Marguerite de Hainaut

Politique

Valenciennes ( ?) circa 1202, 10/02/1279 ou 1280

Mort à la croisade alors qu’il était empereur de Constantinople, Baudouin VI, par ailleurs comte de Hainaut et de Flandre, laisse deux filles, Jeanne et Marguerite : la première n’a pas dix ans et la seconde vient à peine d’en avoir trois. Leur tuteur, Philippe de Namur, par ailleurs évêque de Liège, les confie au roi de France ; à partir de 1211, Marguerite reviendra à Mons où elle sera élevée par Bouchard d’Avesnes, bailli du Hainaut, qui la prend en mariage et se place ainsi en ordre de succession…

Après la bataille de Bouvines (1214), Philippe-Auguste semble avoir convaincu Jeanne, comtesse de Flandre, de faire annuler cette union trop profitable aux d’Avesnes. Les tentatives de Jeanne auprès du pape n’aboutissent qu’à moitié, le pape Innocent III reprenant à son compte une accusation de violation du célibat des prêtres contre Bouchard, qui n’en était pourtant pas un. Bouchard et Marguerite se réfugient alors à Houffalize, auprès du duc de Limbourg/Luxembourg qui conteste par ailleurs le comté de Namur à Jeanne. Le différend s’envenime et embrase presque tout le pays wallon.

S’emparant de la personne de Bouchard (1219), Jeanne contraint son prisonnier à renoncer à son mariage et pousse Marguerite dans les bras de Guillaume II de Dampierre, noble campennois. Ce mariage précipité se réalise en dépit d’un lien de parenté entre les conjoints que dénonce l’Église de Rome. Avec deux enfants d’un premier lit et cinq de son second mariage, Marguerite se retrouve au cœur d’une situation scandaleuse, étant accusée de tous les péchés du monde. Plusieurs tentatives de conciliations échouent. L’affaire ne se limite pas au pays wallon ; toutes les cours d’Europe ont les yeux tournés vers Rome, attendant une réaction, quand Jeanne meurt en 1244, mettant davantage encore en évidence la question de la succession. Les deux couronnes – Flandre et Hainaut – doivent en effet revenir à Marguerite. La querelle entre les d’Avesnes et les Dampierre atteint son paroxysme.

Convoitant le Hainaut et la Flandre, les deux familles ne sont finalement d’accord que sur un point : recourir à l’arbitrage du roi de France pour les départager. Trop heureux de se mêler du sort de ces contrées, Louis IX attribue le Hainaut (ainsi que Namur) aux enfants d’Avesnes, et la Flandre (qui à l’époque est toujours sous la suzeraineté de la France) aux enfants Dampierre (juillet 1246), sans se mêler des questions de légitimité.

Comtesse de Flandre et de Hainaut officiellement de 1244 à 1280, Marguerite abdiquera en 1278 et Guy de Dampierre gouvernera seul la Flandre, tandis que Jean II d’Avesnes héritera seul du comté de Hainaut. Jusqu’en 1356, les comtes du Hainaut seront de la famille des Avesnes. Durant le règne plusieurs fois contesté de Marguerite II de Flandre, ou de Hainaut, parfois aussi appelée Marguerite de Constantinople, le Hainaut comme la Flandre serviront de champ de bataille entre les deux familles et seront le théâtre d’une guerre civile à la suite de la mort accidentelle de Guillaume de Dampierre lors d’un tournoi, à Trazegnies (1251). L’intervention, une fois encore, du roi de France, rétablira la paix, à partir de 1256 (édit de Péronne).

 

Sources

Alphonse WAUTERS, dans Biographie nationale, t. XIII, col. 612-629
Maurice-A. ARNOULD, Le Hainaut. Évolution historique d’un concept géographique, dans Recueil d'études d'histoire hainuyère offertes à Maurice A. Arnould, édité par Jean-Marie CAUCHIES et par Jean-Marie DUVOSQUEL, Mons, Analectes d’histoire du Hainaut, Hannonia, 1983, t. I, p. 25-50
Mélanie DE CLERFAYT, Le Château des comtes de Hainaut à Mons (du Xe au XXIe siècle), Charleroi, asbl Hainaut culture et démocratie, 2002
Claire BILLEN, Xavier CANONNE, Jean-Marie DUVOSQUEL, Hainaut. 1000 ans pour l’avenir, Anvers, Fonds Mercator, 1998