Tellier Céline

Politique, Député wallon, Ministre wallon

Nivelles 08/04/1984

Ministre wallonne : 2019-2024
Députée wallonne : 2024-

Depuis la mise en place des toutes premières institutions wallonnes à titre préparatoire, entre 1974 et 1977, les membres des exécutifs wallons successifs sont majoritairement choisis par leur parti respectif parmi leurs affiliés ayant déjà une certaine expérience parlementaire. Depuis Guy Coëme en 1980, ils sont quelques-uns à faire exception. Issue de la société civile, sans expérience politique particulière, Céline Tellier entre dans cette catégorie, en septembre 2019, lorsqu’elle est choisie par écolocomme ministre de l’Environnement, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité et du Bien-être animal dans le gouvernement à majorité PS-MR-écolo présidé par Elio Di Rupo. Elle est aussi et surtout la première à être ainsi désignée par les écologistes, les socialistes ayant eu recours à cette procédure à cinq reprises (Guy Coëme, Marie Arena, Philippe Courard, Jean-Claude Marcourt, Paul Magnette), comme le PSC-cdH (William Ancion, Benoît Lutgen, Marie-Dominique Simonet, René Collin et Alda Greoli), alors que les libéraux y ont recours à deux reprises (Charles Michel et Adrien Dolimont en 2022).

Après avoir passé son enfance à Nivelles, Céline Tellier y entame ses humanités au Collège Sainte-Gertrude et les achève à l’Institut des Dames de Marie à Woluwé-saint-Lambert. Inscrite à l’ULB en 2002, elle opte pour les Sciences sociales et politiques. Après son brillant parcours en licences, elle entreprend un doctorat, sa thèse portant sur le lobbying de l’administration technique en charge de la réalisation du métro bruxellois. Docteure de l’ULB (2012), elle rejoint Inter Environnement Wallonie en tant que chargée de mission « Mobilité », se montrant déjà très critique à l’égard du soutien financier des pouvoirs publics au monde automobile et invitant à réfléchir à de nouvelles façons de se mouvoir, plus intelligentes, plus efficaces, adaptées aux modes de vie du moment, mais aussi aux défis d’avenir. Parallèlement à son activité au sein de l’asbl, elle travaille dans un bureau d’études suisse, lui aussi spécialisé en mobilité. S’inspirant du modèle suisse pour réinventer le rail, elle avance des formules alternatives documentées qu’un nouveau plan de transport de la SNCB devrait intégrer dès 2017, pour donner tous ses effets positifs à l’horizon 2030.

Directrice politique et secrétaire générale adjointe d’IEW, une fédération qui compte alors 135 ONG et associations environnementales (2017), elle interpelle les acteurs politiques sur les enjeux climatiques, les invitant à définir une vision et à adopter une politique ambitieuse, sans oublier les difficultés pratiques que révèle le mouvement des gilets jaunes. Alors qu’elle contribue au lancement de l’importante mobilisation générale Sign for my future (février-mars 2019), elle devient la nouvelle secrétaire générale d’Inter Environnement Wallonie (février 2019), où elle remplace Christophe Schoune. La résidente de Court-Saint-étienne fait alors campagne pour que tous les partis politiques intègrent les enjeux climatiques dans leurs perspectives électorales. Avec une trentaine de personnalités de très nombreux milieux associatifs importants (syndicats, mutuelles, ONG, etc.), elle contribue à la rédaction d’une Déclaration non gouvernementale (DNG), proposant un changement radical vers une société décarbonée, inclusive, ouverte et solidaire ; émanant de la société civile, ce vaste et ambitieux projet de long terme est orienté vers les niveaux de pouvoirs wallon, bruxellois et communautaire francophone, auxquels dix priorités sont présentées (11 juin 2019). Une semaine plus tard, elle débat de la transition écologique, devant plusieurs centaines de personnes, en compagnie de Nicolas Hulot, Jacques Crahay et Pierre Larrouturou. Toute cette mobilisation orchestrée pour attirer l’attention sur les enjeux climatiques n’est pas étrangère à l’initiative PS-écolo de former une coalition wallonne minoritaire – la coalition coquelicot – sur base du programme inspiré par la société civile, que les autres partis pourraient soutenir ponctuellement (début juillet 2009). Finalement, c’est une majorité arc-en-ciel qui émerge en septembre et Céline Tellier accepte d’en faire partie. Elle est remplacée par Sylvie Meekers à la tête de la fédération IEW (janvier 2020), renommée Canopéa en 2022.

D’emblée confrontée à la crise de la peste porcine africaine qui nécessite des mesures fortes et longues en pays gaumais, alors que les scolytes font aussi des ravages dans les forêts wallonnes, la ministre Tellier entend construire une relation différente à l’environnement, à la nature et au vivant, qui soit moins utilitariste et moins prédatrice. Sobriété, respect et responsabilité sont ses mots d’ordre dans l’approche systémique qu’elle veut développer à partir d’un constat inquiétant : l’eau, l’air, la biodiversité nécessitent un changement de cap radical. Respecter davantage la législation environnementale existante, lutter contre tous les polluants et pesticides, protéger la forêt wallonne et restaurer la biodiversité, la ministre Tellier entend mener une politique résolue pour changer la trajectoire existante et installer les balises d’une relation différente des Wallons par rapport à la nature.

L’ambitieuse Déclaration de politique régionale reflète l’insistance des Verts à mettre l’accent sur une nécessaire triple transition : écologique, économique et solidaire, et leur volonté de mener des actions transversales plutôt que des projets cloisonnés. D’emblée, la ministre Tellier fixe d’ailleurs un projet très concret à réaliser : 4.000 km de haies et un million d’arbres à planter avant la fin de la législature, ainsi que 1.000 hectares de nouvelles réserves annuelles chaque année (Yes We Plant, lancé en 2020). Accueilli par quelques sourires entendus, les objectifs sont largement dépassés en fin de législature et le sens de la démarche intégré : avec 4,2 km de haies et près de 1,5 millions d’arbres plantés, la Wallonie s’inscrit ainsi dans la stratégie européenne en faveur de la biodiversité (planter 3 milliards d’arbres à l’horizon 2030). Inscrivant dans la stratégie européenne du Green Deal sa note d’orientation pour une stratégie Biodiversité 360° à l’horizon 2050 pour la préservation des espaces naturels et semi-naturels de grand intérêt biologique, Céline Tellier retient aussi, après appel à projets, deux « parcs nationaux » : la Semois et l’Entre-Sambre-et-Meuse (décembre 2022) et elle accroît la superficie d’espaces naturels protégés (près de 19.000 hectares, soit une augmentation de 5.000 ha durant la législature) en Wallonie (décembre 2023), l’objectif étant d’atteindre 5 % du territoire sous statut de protection forte à l’horizon 2030. Initiatrice d’un « Plan Loup » conciliant la cohabitation entre les hommes et l’animal (juin 2020), impliquée dans la fixation d’un cadre juridique pour l’éolien (février 2021), la ministre introduit une politique environnementale plus répressive, afin de lutter contre tous les délits contre la nature, y compris en matière de bien-être animal et de biodiversité (décembre 2021) ; un nouveau cadre légal est imposé aux refuges et élevages (février 2023).

Dès 2020, la question complexe des pollutions toxiques (PCB) autour d’usines de recyclage (broyeurs de métaux, etc.) mobilise la ministre écolo interpellée par plusieurs bourgmestres et riverains des nombreux sites concernés. Mais ce sont les mesures à prendre face à la crise sanitaire de la Covid-19 qui occupe pendant plusieurs mois un gouvernement wallon disposant des pouvoirs spéciaux. Effets indirects de la pandémie : comment gérer les déchets, en particulier ceux des hôpitaux ? Faut-il autoriser l’achat d’animaux de compagnie durant le confinement ? Etc. Ce sont aussi les mesures à prendre face aux conséquences des terribles inondations de juillet 2021 qui vont occuper pendant plusieurs mois les ministres du gouvernement wallon. En particulier Céline Tellier dont le Cabinet venait d’annoncer, quelques jours plus tôt, des initiatives pour la « reméandrisation » des cours d’eau et d’évitement des crues (enveloppe de 20 millions d’€). L’heure est cependant à trouver des solutions (et des moyens financiers) pour nettoyer et restaurer les cours d’eau, pour remettre en route des stations d’épuration (une quinzaine particulièrement touchées), pour recycler les terres polluées d’une part, les dizaines de milliers de tonnes de déchets mélangés qui s’amassent sur une portion d’autoroute désaffectée du côté de Herstal, d’autre part, et surtout envisager une reconstruction assurant une sécurité environnementale et un respect de la nature.

Initiatrice de nombreux appels à projet (« Réutilisation 2021 », 2021 ; « Forêt résiliente », 2021 et 2022 ; « Déchets-ressources », 2022 ; « BiodiverCité », 2022 ; « Vis mon village », 2023), elle apporte sa contribution à la rédaction du Plan agricole stratégique wallon s’inscrivant dans le cadre de la Politique agricole commune pour la période 2023-2027 (janvier 2022). La ministre établit aussi de nouvelles règles pour acquérir un animal de compagnie (obligation d’un permis de détention), règlemente drastiquement l’utilisation des plastiques dans la vie quotidienne, impose le tri des biodéchets ménagers. La ministre fait aussi valoir ses principes dans les dossiers du renouvellement du permis de Liège Airport, dans celui de la Boucle du Hainaut, du développement de la 5G, ainsi et surtout dans l’ambitieux Plan Air-Climat-énergie (printemps 2023). Elle apporte un fort soutien à une soixantaine de projets visant à recentrer la production alimentaire en Wallonie (avril 2023) et encourage également le citoyen wallon à se tourner vers les filières bio. Favorable à la formule de la consigne classique, la ministre wallonne tente d’apporter une solution définitive à la déjà très ancienne problématique des consignes des canettes et bouteilles en plastique, le système privilégié devant convenir aussi à la région flamande et à la région bruxelloise. Jusqu’à la toute fin de la législature, mandatée expressément par le gouvernement wallon, elle est sur la brèche pour engranger un accord interrégional, en vain. Les différences de sensibilité entre les trois régions se manifestent aussi quand la Belgique doit donner une réponse commune sur la législation européenne en matière de restauration de la nature ou prépare sa participation aux Conférences internationales sur les changements climatiques. Initiatrice des Assises de la Forêt (2022-2023), la ministre présente avant la fin de la législature une nouvelle « Stratégie forestière wallonne » (mai 2024), synthèse réalisée par le SPW qui articule 53 actions concrètes autour de cinq axes, et qui concerne tous les « utilisateurs » de la forêt.

Ayant demandé, dès l’été 2021, un rapport complet à son administration sur les situations potentielles de pollution, en Wallonie, dues aux Pfas et autres perturbateurs endocriniens (avec réalisation d’un cadastre des sites contaminés), la ministre prend ainsi en compte les alertes répétées que lancent les scientifiques depuis le début du XXIe siècle sur l’enjeu des perturbateurs endocriniens. En conséquence, elle fait mettre en place un biomonitoring permettant de mesurer l’exposition de la population wallonne à un certain nombre de polluants ; dans la foulée de sa décision, la ministre est informée d’un soupçon de pollution à Chièvres, selon un rapport américain (juillet 2021) ; la SPAQUE est alors chargée de réaliser des contrôles relatifs à des pollutions au sein des masses d’eau souterraine ; la SWDE est aussi chargée de coordonner un projet de monitoring des Pfas dans l’eau destinée à la consommation humaine. En octobre 2022, avec les trois autres ministres fédérale et régionaux de l’Environnement, elle lance un appel à l’Europe pour que soit revue, dans le cadre du Green Deal, la règlementation REACH (enRegistrement, évaluation et Autorisation des substances CHimiques) qui établit les normes en matière de produits chimiques. En novembre 2023, Céline Tellier se retrouve néanmoins au cœur d’une polémique politico-médiatique, se voyant reprocher un manque de transparence dans le dossier de l’eau potable contaminée aux Pfas, distribuée aux habitants de Chièvres, et dans de nombreuses autres communes wallonnes ensuite. à la mi-novembre 2023, son audition à la Commission de l’Environnement fait l’objet d’un important battage médiatique. Jusqu’à la fin de la législature, la ministre qui a annoncé sa candidature au scrutin wallon du 9 juin 2024 dans le Brabant wallon reste constamment sous la pression de questions sur sa gestion de la pollution des Pfas, puis sur les broyeurs à métaux, avant d’affronter les agriculteurs en colère (janvier-février 2024). Tout en résistant au flot de critiques qui s’abattent sur elle, la ministre wallonne achève la législature en faisant adopter un nouveau Code de la gestion des ressources du sous-sol, remplaçant ainsi des dispositions de l’ancien code minier datant de 1919, voire même de la période napoléonienne. Souhaitant établir une distinction entre zones urbaines et zones rurales, elle fait abroger, en fin de législature, le décret de 2019 sur la Zone de basse émission généralisée et reporte ainsi l’interdiction généralisée de circuler, en Wallonie, pour les véhicules les plus polluants.

Le 9 juin 2024, sollicitant des électeurs un premier mandat de députée wallonne, celle qui réside à Ottignies est choisie pour emmener la liste écolo dans la circonscription électorale du Brabant wallon. Avec 6.372 vp, elle réalise le 8e résultat tous partis confondus. Si elle décroche le droit de siéger au Parlement de Wallonie, écolo (9,5%), en recul de plus de 10% en BW, réalise son moins bon résultat depuis la première élection directe des députés wallons, le 21 mai 1995.

 

Mandats politiques

Ministre wallonne (2019-2024)

 

Sources

Centre de Recherche & Archives de Wallonie, Institut Destrée, Revue de presse (-06/2024), dont Le Soir, 14 janvier 2011, 18 janvier 2012, 4 mars 2015, 11 et 18 décembre 2018, 25 février 2019, 21 novembre 2019, 10-21 février 2020, 22 juin 2021, 15 juillet 2021, 5 octobre 2022, 7 septembre 2023, 16 et 17 novembre 2023, 14 décembre 2023, 24 et 25 avril 2024 ; La Libre, 30 mai 2024
Cumuleo (-2023)
https://www.facebook.com/Ministre.Tellier

 

 

Parlementaires et ministres de Wallonie (+ 2024)