Delaite Julien
Officier (Historique)
LIÈGE 30.01.1868 – LIÈGE 01.09.1928
Dès ses études en pharmacie à l’Université de Liège, Julien Delaite témoigne de sa volonté de s’engager pour la réalisation de ses idéaux. C’est ainsi qu’il fonde et préside l’Association des Etudiants wallons, en marge d’un cursus qu’il achève, en 1894, comme docteur en sciences naturelles, avec la plus grande distinction. Cette formation scientifique l’amène d’ailleurs à publier plusieurs études et à devenir directeur d’un laboratoire d’analyses chimiques agréé par l’Etat qu’il gère à côté de plusieurs pharmacies.
Ses préoccupations sont cependant loin de se limiter à la chimie. Très tôt, il étudie également le dialecte wallon, auquel il consacre plusieurs publications. Il s’investit également dans l’action politique locale. Fort de ces engagements et intérêts, il assiste aux premiers congrès wallons de 1891 et 1893, typiques des débuts d’un Mouvement toujours confidentiel, principalement centré sur Bruxelles et les intérêts des francophones de Flandre. Dans ce cadre, peu orienté sur la Wallonie, Delaite se manifeste en mettant en cause la mainmise exercée de facto par Bruxelles sur cette première époque, exclusivement antiflamingante.
Julien Delaite jouera ensuite un rôle déterminant dans la (re)lance d’un Mouvement plus authentiquement wallon, par la fondation, en 1897, de la Ligue wallonne de Liège. Il devient alors rapidement l’animateur du Mouvement wallon qui se consacre désormais à l’élaboration d’un projet positif pour la Wallonie. Défendant la poursuite du pèlerinage de Sainte Walburge, il contribue à l’émergence d’une fête wallonne. De même, c’est lui qui, à la tête de la Ligue wallonne, lance le concours qui donnera naissance au Chant des Wallons, futur hymne officiel de la Wallonie. Il organise et préside également le grand Congrès wallon de 1905, tenu à Liège dans le cadre de l’exposition universelle et qui restera comme un jalon de la prise de conscience identitaire wallonne. S’il défend encore la thèse du maintien du français – vecteur des Lumières comme langue officielle unique de la Belgique, ce congrès est aussi le point de départ d’une réflexion sur l’identité wallonne et la défense des intérêts de la Wallonie.
Membre du parti libéral, conseiller communal et provincial, Julien Delaite est également un des précurseurs de la solution fédérale, sujet auquel il consacre une étude dès 1898. Il y plaide pour la création de conseils régionaux en Flandre et en Wallonie, avec un Parlement fédéral paritaire. Bien que partisan de l’unité de la Belgique, le système fédéral lui apparaît comme le meilleur moyen de garantir les droits des Wallons. Les années qui suivent lui permettent de préciser sa pensée. Lors du Congrès wallon du 7 juillet 1912, il présente une Etude d’un régime séparatiste en Belgique et un projet de révision de la Constitution reconnaissant trois Régions. C’est en revenant de ce Congrès, qui s’est prononcé en faveur de la séparation administrative, que Jules Destrée a l’idée de sa Lettre au roi, qui sera publiée le 15 août suivant.
Membre de l’Assemblée wallonne, premier parlement – officieux de Wallonie, Julien Delaite partage désormais le leadership du Mouvement wallon avec le tribun socialiste de Charleroi. Après la Première Guerre mondiale, resté fidèle à sa position fédéraliste, il est choisi comme Président d’honneur par la Ligue d’Action wallonne qui milite pour l’autonomie de la Wallonie, faisant déjà figure de pionnier pour un Mouvement dont l’histoire commence pourtant à peine.
Julien Delaite fut fait officier du Mérite wallon, à titre posthume, en 2012.
Philippe CARLIER, DELAITE Julien, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, notice 1629.