Yann Kersalé, Courant d'âges. 1998

Namur (Beez), rue du Moulin de Meuse n°4. Œuvre exérieure en accès libre

Pour la mise en lumière des Moulins de Meuse, Yann Kersalé a proposé un aménagement lumineux en différents plateaux. Le niveau le plus bas, celui du fleuve, la Meuse, ne jouit pas d'un éclairage direct, mais est perpétuellement animé par le miroitement des lumières du site sur les flots. La plus haute, la zone de circulation recouverte de pavés, est parsemée de bornes basses qui diffusent une lumière blanche et rasante. Entre la voie de chemin de fer et le parking, s'élèvent trente-sept bornes hautes en forme de cône à base octogonale, qui dispersent une lumière blanche éclatante autour d'elles. L'artiste avait imaginé qu'elles encadrent, comme une escorte lumineuse, la voie de chemin de fer. À mesure que l'on s'éloignait des bâtiments, les travées s'agrandissaient, suggérant ainsi une progression dans la découverte.

L'essentiel de la mise en lumière réside toutefois en l'éclairage, par huit cents mètres de tubes fluorescents, des principaux bâtis. Placés au pied, ces tubes répandent un halo de lumière violine qui semble caresser les façades, d'une manière presque sensuelle. La structure massive des moulins paraît allégée, des pans lumineux sont privilégiés, des détails architecturaux, mis en évidence, au détriment de la volumétrie de l'ensemble. Elle est loin l'époque où l'éclairage nocturne voulait rivaliser d'éclat avec la lumière du jour et étouffait l'ensemble architectural sous une lumière englobante. Kersalé fait dans la nuance, l'épure, la légèreté. La lumière, jadis manière à focaliser l'attention sur le volume, est devenue une parure impalpable, qui habille l'édifice sans le travestir et qui magnifie l'harmonie.

Focus sur les Moulins de Meuse à Beez

Erigés en 1900, les Moulins de Meuse, à Beez, près de Namur, constituent l'un des joyaux du patrimoine industriel de la Wallonie. Dès lors, leur réhabilitation, décidée en 1994, devait marier harmonieusement leur nouvelle affectation (le dépôt des archives administratives wallonnes, le Musée de Wallonie, et le Musée de la Meuse) et le respect de cette architecture néomédiévale, caractéristique de la fin du 19e siècle. Après études approfondies, menées de concert avec la direction générale de l'Aménagement du territoire, du Logement et du Patrimoine de la Région wallonne, le cabinet namurois d'architecture L'Arbre d'Or, conseillé par l'architecte Maurice Culot, a opté pour la restauration de la façade extérieure et l'aménagement de la structure interne, afin de la rendre capable de recevoir les tonnes d'archives de la Région, tant d'origine privée que publique.

Les façades de briques rouges ont été nettoyées et traitées par hydrogommage afin de respecter l'apparence originelle de l'édifice. En outre, ce traitement met en exergue l'excellent travail des maçons de l'époque et souligne les motifs décoratifs dessinés par l'orientation des appareils. L'austérité monumentale de l'édifice est, en effet, ponctuellement compensée par des subtilités dans l'agencement des briques. Les ajouts ultérieurs qui défiguraient l'édifice ont été supprimés. Les anciens châssis de fenêtres ont été restaurés et ceux qui étaient détruits ou trop abîmés, refaits à l'identique. Leur conception participe en effet de l'esthétique néomédiévale qui prédomine dans cet ensemble architectural.

L'aménagement intérieur a été confié à la designer française, Andrée Putman. Celle-ci a choisi le thème de la farine comme fil conducteur de sa restauration. Des teintes d'une blancheur laiteuse évoquent l'ancienne activité industrielle que rappellent également les vitrines du musée de Wallonie et du musée de la Meuse, désormais installés dans les moulins.