Gendebien Alexandre

Politique

Mons 04/05/1789, Bruxelles 06/12/1869

Le nom d’Alexandre Gendebien est étroitement lié aux Journées de Septembre 1830. Avocat inscrit au barreau de Bruxelles (1811), jurisconsulte, opposant de Guillaume d’Orange et partisan d’une union des catholiques et des libéraux, ce Montois prend d’ailleurs une part active dans les événements qui donnent naissance à la Belgique, d’août 1830 à juillet 1831. Rêvant d’une réunion à la France depuis la Révolution de Juillet, partisan d’une formule de séparation administrative lorsqu’il rencontre Guillaume d’Orange en tant que représentant des provinces du sud (fin août), il se rallie à la formule de l’indépendance à partir du 26 septembre, au moment où il devient l’un des ministres du gouvernement belge provisoire, avec Charles Rogier, Sylvain Van de Weyer et Emmanuel d’Hooghvorst. À plusieurs reprises, il est envoyé en mission à Paris pour négocier le nouveau statut de la Belgique, sans obtenir le résultat qu’il espérait.

Président du Comité Justice, Alexandre Gendebien est élu pour le Congrès tant par les électeurs de Bruxelles que par ceux de Mons (3 novembre). Celui qui a étudié à Tournai et à Bruxelles choisit les suffrages de Mons, sa ville natale, et retrouve au Parlement tant son père Jean-François, élu de Soignies, que son frère Jean-Baptiste, élu de Charleroi, et son beau-père, le Tournaisien Antoine Barthélemy, élu de Bruxelles.

Ralliant des formules dites réalistes en dépit de certains de ses principes, Alexandre Gendebien vote tour à tour pour l’indépendance de la Belgique, pour la monarchie, pour l’exclusion perpétuelle des Orange-Nassau du pouvoir en Belgique, contre la création d’un Sénat, contre l’élection à vie des parlementaires, en faveur du duc de Nemours comme roi des Belges, ainsi que pour tous les articles de la nouvelle Constitution, à la rédaction de laquelle il prit une part minime en raison de ses missions diplomatiques.

Éphémère ministre de la Justice sous la Régence de Surlet de Chockier, et premier président de la Cour supérieure de Bruxelles (1831), il fonde, anime et préside l’Association nationale belge, groupement destiné à faire pression sur les négociations internationales (conférence de Londres) : Gendebien est un farouche opposant à la formule de rétrocession des territoires du Limbourg et du Luxembourg. Dans un discours célèbre (juillet 1831), il s’oppose fermement au Traité des XVIII articles et il prend une part active comme volontaire présent sur le terrain durant la brève campagne militaire d’août 1831.

Député de Mons (1831-1839), chef d’un courant qualifié de gauche à la Chambre, il refuse obstinément que le Limbourg et le Luxembourg soient sacrifiés sur l’autel des négociations internationales ; il entre aussi en conflit, parfois violent, avec ses anciens amis des Journées de Septembre 1830 et finit par se brouiller avec Devaux (après un duel), Lebeau (après le dépôt d’un acte d’accusation), mais aussi avec de Brouckère, de Gerlache, Nothomb et Rogier. Lors de la discussion de la loi communale (juillet 1834-mai 1835), Gendebien se montre favorable à accorder la plus large liberté municipale possible, plaide pour la publicité obligatoire des séances, pour la suppression de tout cens d’éligibilité, et pour l’élection directe du bourgmestre et des échevins. Rarement, faut-il le dire, il est suivi dans ses choix les plus radicaux.

Refusant les nominations dans la magistrature qui lui sont proposées, Alexandre Gendebien finit par se lasser des débats parlementaires et, surtout, il ne peut supporter l’imposition du Traité des XXIV Articles contre lequel il n’a cessé de combattre : « il est déplorable qu’au moment d’abandonner 400.000 Belges on ne veuille pas nous donner le moyen de justifier cet abandon qu’on a appelé à juste titre un fratricide (…) ». À l’heure du vote (19 mars 1839), faisant allusion au nombre d’habitants « sacrifiés » du Limbourg et du Luxembourg, Gendebien s’écrie : « Non, trois cent quatre-vingt mille fois non, pour trois cent quatre-vingt mille Belges que vous sacrifiez à la peur ». Avec fracas, il donne sa démission de député et quitte définitivement l’assemblée ; il renoncera aussi à son mandat de conseiller communal de Bruxelles (1830-1848) et de bâtonnier de l’ordre des avocats.

Succédant à Antoine Barthélémy comme receveur général, il se consacre alors à l’administration des hospices et à quelques exercices d’écriture afin de laisser une trace de ses mémoires. Sa fortune était en partie assurée par les participations que sa famille possède dans une série de charbonnages à la suite des acquisitions de Jean François Gendebien (1753-1838), le père d’Alexandre et de Jean-Baptiste, et fondateur de la dynastie des Gendebien.

Sources

Théodore JUSTE, dans Biographie nationale, t. 7, col. 577-586
Jules GARSOU, Alexandre Gendebien. Sa vie. Ses mémoires, Bruxelles, René Van Sulper, 1930
Jean-Louis DELAET, dans Ginette KURGAN, Serge JAUMAIN, Valérie MONTENS, Dictionnaire des patrons en Belgique, Bruxelles, 1996, p. 304-306