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Del Cour Jean

Culture, Sculpture

Hamoir 1627, Liège 04/04/1707


Sculpteur admiré de son temps, Jean Del Cour n’a pas perdu de sa notoriété avec le temps. Ses œuvres multiples de style baroque contribuent à l’éclat de Liège, de l’église Saint-Jacques (où un triomphal ensemble présente deux de ses chefs-d’œuvre, le Saint Jacques le Mineur et l’Immaculée Conception) au pont des Arches (il y avait érigé un christ en bronze grandeur nature) en passant par certaines chambres du palais des princes-évêques, par les bas-reliefs de l’église Saint-Martin, voire par la fontaine de Vinâve-d’Île surmontée d’une Vierge à l’Enfant. Il choie aussi la cathédrale Saint-Bavon à Gand, et d’autres églises à Spa, Herkenrode, Huy, etc.


Aîné de cinq enfants, dont le peintre Jean-Gilles, Jean Del Cour a appris le travail du bois auprès de son père menuisier et abandonné ses études au profit du dessin et de la sculpture ; il a fréquenté l’atelier de Robert Henrard, lui-même disciple de François du Quesnoy. Très tôt remarqué, il fait le voyage à Rome (1648-1657) avant de contribuer, dans la principauté de Liège, à l’épanouissement du style baroque fortement tempéré de classicisme. Ses sujets sont principalement destinés aux édifices religieux, mais pas seulement ; il manie avec dextérité toutes les matières (bois, marbre, terre, etc.). Les œuvres de Jean Del Cour s’imposent à celles de ses prédécesseurs et le maître devient le fondateur de l’école liégeoise de sculpture des XVIIe et XVIIIe siècles. Sculpteur, architecte, maçon, entrepreneur, on lui doit encore un Christ au tombeau en marbre blanc (destiné aux Sépulchrines et conservé à la cathédrale Saint-Paul), mais surtout la « réparation » de la grande fontaine du Marché de Liège : en fait, il va l’embellir par la présence de « Trois Grâces » et la mise en valeur du fameux perron liégeois ; le souvenir du sculpteur reste associé à cet édifice, même si ce que l’on voit aujourd’hui diffère beaucoup avec les intentions de l’artiste.

 

Sources

Michel LEFFTZ, Jean Del Cour 1631-1707. Un émule du Bernin à Liège, asbl Les Musées de Liège et Éditions Racine, Bruxelles, 2007
Jacques STIENNON, dans Freddy JORIS, Natalie ARCHAMBEAU (dir.), Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 2005
Albert LEMEUNIER (dir.), Jean Del Cour et la sculpture baroque à Liège. Chefs-d’œuvre du Musée d’Art religieux et d’Art mosan, catalogue d’exposition, Liège, 1994
Pascale BONTEMPS-WERY, Jean Del Cour et la sculpture baroque à Liège : Chefs-d’œuvre du Musée d’Art religieux et d’Art mosan, catalogue, exposition, Liège du 30 avril au 28 mai 1994
Pierre COLMAN, dans Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts – culture, Bruxelles, 1980, t. II, p. 223-230 
Marie-Madeleine ROBEYNS, Jean Delcour, Collection Wallonie, art et histoire, Gembloux, Duculot, 1977
Histoire de la Wallonie (L. GENICOT dir.), Toulouse, 1973, p. 259, 301
Jean Del Cour, 1631-1707 : catalogue de l’exposition organisée à l’occasion du 250e anniversaire de sa mort, Salle des Pas perdus de l’Hôtel de ville du 29 septembre au 20 octobre 1957, Liège, 1957
G. DEWALQUE, dans Biographie nationale, t. V, col. 343-346

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Delaunois Philippe

Socio-économique, Entreprise

Erquelinnes 12/11/1941

Ingénieur civil diplômé des Facultés polytechniques de Mons, ingénieur commercial de l’Université de Mons, Philippe Delaunois complète sa formation par un programme intensif à la Harvard Business School. Depuis son adolescence, il aspire à une carrière dans le secteur de la métallurgie. C’est à Hainaut Sambre qu’il fait son apprentissage : il y entre en 1965 comme ingénieur des laminoirs, avant d’être engagé aux Forges de Clabecq. En 1974, il revient dans le groupe Hainaut Sambre, mais pour prendre en charge le secteur commercial, en tant qu’attaché à la direction ; c’est de ce moment que remontent ses relations privilégiées avec Albert Frère. C’est aussi le moment où la sidérurgie wallonne connaît sa crise la plus grave et se retrouve au bord d’une disparition totale après avoir fait la prospérité de la Région.

Sous l’impulsion d’Albert Frère, s’opère la fusion des bassins liégeois et carolorégiens sous la forme de Cockerill-Sambre. Directeur adjoint de l’exploitation lors de cette fusion, en 1981, Philippe Delaunois devient l’un des proches collaborateurs de Jean Gandois quand le Français est appelé au chevet de la sidérurgie wallonne (1982) et impose le plan qui porte son nom. Directeur général, Delaunois est nommé administrateur-délégué de Cockerill-Sambre sous l’ère Gandois, fonctions qu’il exerce de 1987 à avril 1999, de l’époque où la sidérurgie wallonne reconditionnée selon les principes du « plan Gandois » entreprend de sortir de ses déficits chroniques jusqu’au moment où la Région wallonne, actionnaire majoritaire, revend une partie importante de ses participations au groupe français Usinor. Élu « Manager de l’année 1988 » par ses pairs de Wallonie et de Bruxelles, il prend la présidence de l’Union wallonne des Entreprises de 1990 à 1993 (il succède à Michel Coenraets) et plaide notamment en faveur d’un système d’enseignement (éducation et formation) plus efficace.

Prix 1998 des Amis du Hainaut, président de la Maison de la Métallurgie et de l’Industrie à Liège, Philippe Delaunois quitte l’acier wallon en 1999 pour d’autres responsabilités. Président de la Mosane (holding financier wallon, filiale de la Cobepa), président de la nouvelle Société belge d’édition dont il est un important actionnaire et qui procède au rachat des parts de l’archevêché de Namur dans la presse (1999), il devient d’emblée le patron de Médi@bel et contrôle une série de titres francophones comme Vers l’Avenir, La Libre et La Dernière Heure. Membre de la Task force formée pour piloter le Phasing Out de l’Objectif I Hainaut (2000), il préside l’asbl Pôle Transport & Logistique du Hainaut (2007), au moment de la mise en place des Pôles d’excellence, notamment en logistique, du Plan Marshall. Patron de presse, consul honoraire d’Autriche, il est administrateur-délégué de Carmeuse (2003) et administrateur d’autres sociétés spécialisées dans la communication, les assurances, l’énergie, etc. (CFE, GDF Suez, Mobistar, etc.).

 

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse

de Lassus Roland

Culture, Musique

Mons 1532, Munich 14/06/1594

Nul ne conteste que la plus grande figure de la musique de la deuxième moitié du XVIe siècle est le compositeur Roland de Lassus. Prolifique, son œuvre a enchanté son époque et a résisté au temps. Enfant de chœur à l’église Saint-Nicolas de Mons, sa voix a enchanté et séduit Ferdinand Gonzague, vice-roi de Sicile, qui commande, vers 1544/1546, une armée de Charles-Quint faisant campagne en France. Comme d’autres chantres wallons avant lui, Roland est enlevé à sa famille et reçoit l’essentiel de sa formation en Italie : à Palerme, à Milan, à Naples, puis à Rome où il devient maître de chapelle à Saint-Jean de Latran (1553). C’est là peut-être que s’est forgé son nom, de Lassus signifiant, pour les Italiens, que l’artiste venait de là au-dessus, d’Europe du nord.

Rentré au pays à la mort de ses parents, il se rend en Angleterre et se fixe un moment à Anvers (1554-1555), avant d’être engagé comme ténor par le duc de Bavière (1556) et d’être nommé maître de chapelle à Munich (1563-1594). Cette fonction ne l’empêche nullement de voyager et de faire partager son talent à toute l’Europe, aussi bien aux gens de cour qu’auprès d’un public élargi aux riches bourgeois et aux intellectuels de son temps, humanistes comme poètes (à l’instar de Ronsard ou du Bellay). Chaque année, en effet, à partir de 1555, il dépose de nouvelles compositions chez les plus importants éditeurs d’Europe, à l’heure où l’imprimerie en est à ses débuts ; en étant le premier à « commercialiser » ses « chansons » et sa musique religieuse, de Lassus sort des sentiers battus et, partout, il est accueilli comme « le prince des musiciens ».

Alternant production profane et musique sacrée, maniant l’humour, l’imagination et les références classiques avec élégance, voire parfois à la manière de Rabelais, Roland de Lassus parvient à conserver un très haut niveau de qualité au style qu’il s’est forgé, tant dans la cinquantaine de messes, la centaine de magnificats, et le demi-millier de motets qu’on lui attribue. Très tôt, il a compris que le texte pouvait guider la forme musicale. Ayant séduit par le style italien de ses compositions, il assoit sa renommée en publiant, en 1556, un recueil de motets latins. La perfection est atteinte dans ses cycles des Psaumes de la Pénitence, dans les Leçons de Job et dans les Prophéties des Sibylles.

Héritier des Ciconia, Dufay et autres Josquin des Prés, il perpétue à l’extrême l’art du contrepoint caractéristique du pays wallon qui, pendant deux siècles, donna à l’Europe ses modèles d’écriture. En portant cet art à son apogée, Roland de Lassus marque aussi, au moment de sa disparition, la fin d’une époque. Critiqué, le contrepoint sera progressivement abandonné et remplacé, sans rien enlever aux qualités attribuées à de Lassus du fait de « la variété de sa technique et [de] la richesse de son invention ».

Sources

Robert WANGERMÉE, dans Freddy JORIS, Natalie ARCHAMBEAU (dir.), Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 2005
Histoire de la Wallonie (L. GENICOT dir.), Toulouse, 1973, p. 263
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. II, p. 314-319

Delahaye Gilbert

Culture, Bande dessinée

Franqueville-Saint-Pierre 19/03/1923, Tournai 06/12/1997

Né en Haute-Normandie, la région de sa famille maternelle, Gilbert Delahaye se rapproche du Hainaut de son père, lorsque le couple s’installe à Dunkerque en 1926, avant de s’établir à Tournai en 1937. C’est là qu’il accomplit ses études et subit l’occupation allemande. À la Libération, Gilbert Delahaye entre comme ouvrier-typographe chez Casterman. Touche-à-tout imaginatif, il est associé à Marcel Marlier pour un duo improbable à l’entame des années 1950. Auteur d’un scénario où une gamine découvre la vie à la ferme, Delahaye trouve dans les illustrations de Marlier un comparse parfaitement complémentaire. À côté de la ligne claire incarnée par Tintin, les aventures de Martine vont se tailler une part appréciable du lectorat auprès des jeunes filles charmées par cette Martine aux yeux bleus, de bonne éducation, qui exprime des émotions simples et saines. Jusqu’en 1997, Delahaye va écrire les scénarios des 47 aventures que dessine Marlier. C’est Jean-Louis, le fils de Marlier, qui reprendra la plume pour les derniers albums.

Comme Marlier qui était un dessinateur méticuleux et existait en dehors des péripéties martinesques, Gilbert Delahaye avait un don pour l’écriture qu’il exprimait sous d’autres formes. On le connaît comme poète, reconnu en 1985 par le prix Prévert.
 

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse

Dejardin Lucie

Politique, Résistance

Grivegnée 31/07/1875, Liège 28/10/1945

La première femme à avoir été élue au suffrage universel (masculin) au Parlement belge a été choisie dans un arrondissement wallon, en 1929. Candidate du POB, Lucie Dejardin a fait son entrée à la Chambre des représentants le 26 mai 1929. Avant elle, la Bruxelloise Marie Janson avait siégé au Sénat, mais elle avait accédé à la Haute Assemblée par cooptation (en 1921) ; sinon, aucune autre femme n’avait jamais été élue au suffrage universel. Élue sans bénéficier des voix des autres femmes, le droit de vote étant limité aux hommes jusqu’en 1948, elle peut quant à elle exprimer un vote en raison de son statut particulier d’ancienne prisonnière politique.

Née dans une famille nombreuse ouvrière de Beyne-Heusay, elle ne connaît pas l’obligation scolaire et travaille dès lors très tôt en occupant divers petits boulots ne nécessitant pas de qualification. L’exploitation dont elle fait l’objet la conduit à militer dans les rangs des mouvements socialistes et coopératifs naissants. Affiliée au syndicat des mineurs, co-fondatrice de la première ligue des femmes socialistes de Liège, elle s’engage sur les traces de l’un de ses frères (Joseph) qui deviendra lui aussi parlementaire, en plus d’être le bourgmestre de Beyne-Heusay.

Dès le début de la Grande Guerre, Lucie Dejardin entre au service de La Dame blanche, où elle travaille comme agent de renseignements. En juillet 1915, elle est arrêtée, jugée et condamnée à perpétuité. Fin 1917, en raison de son état de santé, elle bénéficie d’un échange de prisonniers et passe la fin de la guerre en France où elle s’occupe d’enfants belges en exil.

Nommée inspectrice du travail, à son retour à Liège, en 1919, elle s’engage surtout dans l’action militante : la paix, la liberté, l’égalité de droits entre les sexes, l’action sociale. Elle participe à plusieurs congrès internationaux et fait entendre la voix des femmes comme représentante de plusieurs ligues et comités. En 1926, elle entre au Conseil communal de Liège et, trois ans plus tard, fait son entrée au Parlement. Réélue en 1932, elle perd son siège en 1936 et devient secrétaire-propagandiste de la fédération liégeoise du POB ; c’est pour remplacer Georges Truffaut décédé en Angleterre en 1942, qu’elle retrouve la Chambre en septembre 1944, jusqu’à son décès en octobre 1945.

Quand éclate la Seconde Guerre mondiale, des mesures de précaution sont prises à l’égard de celle qui fut condamnée par les Allemands vingt ans plus tôt. Assimilée au personnel anglais, Lucie Dejardin peut fuir en Angleterre dès mai 1940. À Londres, elle aide des réfugiés, avant d’être affectée au ministère belge du Travail en exil.

Son action au Parlement au tournant des années 1930 s’est portée vers les questions de lutte contre la pauvreté, contre l’alcoolisme, et en faveur du statut des enfants et des femmes.

Conseillère communale de Liège (1926-1945)
Députée de Liège (1929-1936, 1944-1945)
 

 

Sources


Éliane GUBIN, Lucie Dejardin, dans Dictionnaire des femmes belges, Bruxelles, Racine, 2006, p. 159-160
Robert ABS, dans Biographie nationale, t. XXXVIII, col. 145-150
Des femmes dans l’histoire en Belgique depuis 1830, Bruxelles, Luc Pire, 2006, p. 125-127
Pol DEFOSSE, Jean-Michel DUFAYS, Martine GOLDBERG (dir.), Dictionnaire historique de la laïcité, Bruxelles, Luc Pire, 2005, p. 88

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de Hodémont Léonard

Culture, Musique

Hodimont c. 1575, Liège 08/1639

Connu dans le monde de la musique par le nom déformé de la commune dont il serait originaire, à savoir Hodimont près de Verviers, Léonard (Collet) de Hodémont s’est fait un nom au tournant des XVIe et XVIIe siècles en s’inscrivant dans la jeune tradition de la musique polyphonique tout en la modernisant. Ainsi introduit-il des violons au jubé, et dans ses motets. 

Nommé Maître de chapelle à la cathédrale Saint-Lambert de Liège (1616-1633), il avait fait ses études musicales en bord de Meuse, avant de se rendre à l’Université de Louvain.

Tout en étant l’héritier des Ciconia, Dufay, Ockeghem et Tinctoris, Léonard de Hodémont diffuse en pays wallon les dernières innovations de la musique italienne. Sans rompre avec la polyphonie à laquelle ses devanciers avaient donné ses lettres de noblesse, il introduit une nouvelle esthétique et influence notamment son disciple, Henri Dumont de Thier, qui deviendra maître de chapelle de Louis XIV. Les œuvres de Léonard de Hodémont sont révélatrices de l’italianisation progressive de la musique religieuse liégeoise. Forte personnalité, quelque peu impulsif et peut-être trop novateur, de Hodémont n’achèvera pas sa carrière à la cathédrale de Liège. Il aura cependant la satisfaction d’assister à l’éclosion de jeunes disciples.
 

Sources

La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. II, p. 323-324
Dictionnaire des compositeurs de Belgique du Moyen Âge à nos jours, Bruxelles, 2006, p. 521

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de Harlez Simon

Culture, Mécénat

Liège c. 1700, Château de Deulin 1778, 1781 ou 1782

Au milieu du XVIIIe siècle, le petit monde artistique et intellectuel wallon est séduit par un quadruple événement qui parvient aussi à ravir les milieux bourgeois voire populaires. Sur une musique du génial Jean-Noël Hamal, quatre opéras-bouffes écrits en wallon constituent les piliers fondateurs du théâtre liégeois (1757-1758). À l’écriture des textes de ces pièces burlesques on trouve associés Jacques-Joseph Fabry, Pierre-Robert Cartier de Marcienne, le baron Pierre-Grégroire de Vivario et les frères de Harlez. S’il est malaisé de fixer clairement la paternité de la versification et du récit, il ne fait aucun doute que le salon feutré qu’entretient Simon de Harlez est le lieu qui permet la naissance des opéras Li voyèdje di Chaufontainne (3 actes), Li lidjwè ègagï (2 actes, dus à Fabry), Li Fièsse di Hoûte-si-ploût (3 actes de Vivario), et Les Hypocontes (3 actes, de Simon de Harlez, février 1758). Joué dans les salons de l'Hôtel de Ville, son opéra consacré aux Hypocondriaques a révélé toutes ses facettes grâce à une étude méticuleuse de Marcel Florkin qui attribue à Simon de Harlez le titre de « Molière des Eaux de Spa » (Épisodes de la Médecine liégeoise, Liège, 1963). Car au-delà de l’opéra burlesque, il s’agit d’une satire où Simon de Harlez se moque en permanence des théories médicales du mouvement, nées de la philosophie de Leibnitz, et en particulier de la mode qui pousse le monde entier à fréquenter les eaux de Spa pour ses qualités supposées.

Né dans une grande famille liégeoise, Simon de Harlez a fait des études à Louvain et à l’Université de Pont-à-Mousson. Licencié en Droit, il est prévôt de Saint-Denis, chanoine tréfoncier de la Cathédrale et conseiller à la Cour allodiale lorsqu’il commet les Ypoconte. Son hôtel est un salon littéraire et musical apprécié d’où, après le théâtre liégeois, sortira le projet de la Société libre d'Émulation, créée par Velbruck en 1779. Cet aristocrate à la curiosité aiguisée saura aussi repérer le talent d’un André-Modeste Grétry qu’il soutiendra au début de sa carrière. On garde comme une hypothèse le fait que ce chanoine, élevé chevalier, ait pu aussi accueillir avec bienveillance le journaliste Pierre Rousseau, propagandiste des idées des Lumières. Conseiller du prince-évêque Charles-Nicolas d'Oultremont, Simon de Harlez avait aussi entrepris la reconstruction de l'abbaye du Val-Saint-Lambert.
 

Sources

Alphonse LE ROY, dans Biographie nationale, t. VIII, col. 731-734
Marcel FLORKIN, Simon de Harlez, the Moliere of the mineral springs of Spa, dans Revue de Médecine, Liège, février 1953
P. GILSON, Un musicien liégeois du XVIIIe siècle : Jean-Noël Hamal (1709-1778), Namur, Les Musicales, 2006

de Geer Louis

Socio-économique, Entreprise

Chênée (Liège) 17/11/1587, Amsterdam 19/06/1652

Comme son père dont il hérite aussi du prénom, Louis de Geer est marchand, banquier et calviniste à l’entame du XVIIe siècle, issu d’une famille liégeoise implantée dans les Provinces-Unies, à Dordrecht puis à Amsterdam. 

Formé en France, il s’intéresse, dès 1616, au marché suédois et aux besoins financiers du puissant roi Gustave-Adolphe. 

En relation avec d’autres Wallons établis en Suède depuis le début du XVIIe siècle, les frères de Besche, il saisit les opportunités que peut offrir la Suède pour ses affaires : achetant des concessions minières, vendant armes et munitions, se lançant dans le commerce du cuivre, obtenant le droit de fournir la marine et l’armée, il facilite les transactions commerciales par les services financiers qu’il peut offrir depuis Amsterdam.

Exportant main d’œuvre, machines et méthodes wallonnes, plus particulièrement liégeoises, pour exploiter les ressources du sol suédois, Louis de Geer finit par s’installer lui-même dans la région de Norköping (1627), où il perçoit d’emblée de nouvelles perspectives de développement. « (…) il réussit, écrit Robert Halleux, une audacieuse entreprise de délocalisation, en rapprochant les usines métallurgiques des gîtes métallifères, des forêts charbonnières et du prodigieux marché que constitue une armée en train de s’équiper pour l’avant-première guerre mondiale. S’il trace un plan industriel pour la Suède, il laisse à ses « facteurs » l’organisation des usines et la conduite des hauts-fourneaux ».

En quelques années, à la fois commerçant, banquier, munitionnaire, industriel et seigneur de Finspong, Louis de Geer contribue aussi à intégrer dans la société suédoise une importante colonie de plusieurs milliers de Wallons qui inspirent durablement le respect. Bien entré en Cour, fait sénateur de la Couronne suédoise, anobli en 1641, propriétaire foncier opulent, Louis de Geer peut être considéré, ainsi que l’écrit Paul Servais, « comme responsable d’une triple paternité : d’abord celle de l’industrie métallurgique suédoise, ensuite celle d’une nouvelle dynastie aristocratique suédoise, enfin celle d’une image wallonne » nourrie de multiples qualités. Le décollage économique de la Suède et son émergence comme puissance métallurgique du XVIIIe siècle sont grandement redevables à Louis de Geer et au savoir-faire des techniciens immigrés wallons. Les historiens scandinaves lui attribuent d’ailleurs le titre de « père de l’industrie suédoise ». 

Jouissant d’une fortune exceptionnelle, de Geer faisait commerce avec la marine anglaise de Cromwell quand il rendit l’âme à Amsterdam, à mi-chemin entre sa terre natale et sa terre d’accueil.

Sources

Robert HALLEUX et Paul SERVAIS, dans POTELLE Jean-François (dir.), Les Wallons à l’étranger, hier et aujourd’hui, Charleroi, Institut Destrée, 2000
Wallonie. Atouts et références d’une Région, 1995
Jean YERNAUX, La métallurgie liégeoise et son expansion au XVIIe siècle, Liège, 1939
Maurice FANON, Les Wallons de Suède… en Terre de Durbuy, dans Terre de Durbuy, n° 20, 1986 et n°39, 1991
Geneviève XHAYET, La famille de Geer et l’émigration wallonne en Suède, dans La Wallonie de Louis de Geer et la Wallonie d’aujourd’hui, catalogue d’exposition, Stockholm, 1999-2000
Luc COURTOIS et Jean PIROTTE (dir.), De fer et de feu, l’émigration wallonne vers la Suède, Fondation wallonne, Louvain, 2003
De fer et de feu. L’émigration wallonne vers la Suède. Histoire et mémoire (XVIIe-XXIe siècles), exposition au Parlement Wallon, Namur, 19-29 février 2008 (Publications de la Fondation Wallonne P.-M. et J.-F. Humblet. Série Études et documents, t. V), édité par L. Courtois et C. Sappia, Louvain-la-Neuve, 2008
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Histoire. Économies. Sociétés, t. I, p. 277

Defrance Léonard

Culture, Peinture

Liège 05/11/1735, Liège 1805

Parmi les artistes de Wallonie, il en est un qui se distingue à la fois par ses dons de peintre et par son rôle politique dans les événements révolutionnaires qui marquent la principauté de Liège à partir de 1789. Peintre reconnu dès la deuxième moitié du XVIIIe siècle, professeur à l’Académie des Beaux-Arts, Léonard Defrance devient le directeur de cette institution créée par le prince-évêque Velbruck. Animateur de la Société d’Émulation, Léonard Defrance s’intéresse particulièrement à l’évolution des techniques. En 1789, il remporte d’ailleurs le prix de l’Académie des Sciences de Paris en réponse à la question « La recherche des moyens par lesquels on pourrait garantir les broyeurs de couleurs des maladies qui les attaquent fréquemment et qui sont la suite de leur travail ».

Après une adolescence chahutée, L. Defrance est formé à Liège par Jean-Baptiste Coclers. Devenu peintre, il s’est d’abord conformé à la tradition et a respecté les règles, réalisant comme beaucoup d’autres avant lui et après lui le voyage en Italie. Sur le chemin du retour, il s’arrête à Montpellier, à Toulouse et à Paris. De retour à Liège (1764), il se dégage de l’école classique pour emprunter des chemins plus modernes inspirés tantôt par Joseph Vernet, par Teniers voire par Watteau. Dès les années 1760, il a l’habitude de se rendre régulièrement à Paris, où il parcourt les Salons de peinture. Il se lie à Fragonard. À la fin du siècle, ses œuvres trouveront dans la capitale française de nombreux acheteurs. À Liège, il expose de façon régulière et ses œuvres sont accueillies avec beaucoup de ferveur.

S’adonnant à la peinture de genre, Defrance développe d’abord des sujets d’histoire puisés chez les Grecs et les Romains, avant de se plonger dans son temps : certes, il actualise les scènes de cabarets, mais il représente surtout des situations liées à l’actualité politique de son temps. Ainsi retrouve-t-on à plusieurs reprises une évocation explicite à l’acte de suppression des couvents décrété par Joseph II ; il évoque aussi l’abolition des privilèges ; il s’intéresse aussi au ciel et aux comètes. Il aime aussi représenter des scènes de la vie quotidienne, joueurs de cartes, clients de cabarets, etc. Ce sont cependant ses « visites » qui caractérisent le plus son œuvre, car elles offrent l’occasion unique de se rendre compte du travail et du contexte de vie des artisans de son temps, et d’une révolution en cours qui mène au machinisme : clouterie, fabrique d’armes, fonderie, forge, fenderie, manufacture de tabac, imprimerie, carrières, rien n’échappe à l’œil de l’artiste qui se fait le photographe original de son temps. En introduisant plusieurs catégories sociales dans le même espace, l’artiste est aussi engagé dans les luttes de son époque. Ses pamphlets anticléricaux témoignent du tempérament de l’artiste engagé.

Généralement, le nom de Léonard Defrance est associé à la démolition de la cathédrale Saint-Lambert. Voulant manifester leur ferme intention de rompre avec l’Ancien Régime, les Liégeois réservèrent en effet un sort funeste au symbole du pouvoir religieux au sein de leur principauté. Defrance fut un activiste de la démolition de la cathédrale. Dès 1789, il avait participé à la première révolution liégeoise et avait accueilli avec faveur la première annexion française. Lors de la seconde restauration autrichienne (mars 1793-juillet 1794), il avait fui à Paris où il ne manquait pas de contacts et où il contribua à la formation d’une Assemblée générale des Liégeois à Paris. Ce patriote s’installa un moment à Charleville où il entreprit, avec Fassin et Henkart, de constituer un musée privé, en rachetant à bas prix les œuvres d’art confisquées par la République. De nombreuses œuvres significatives de Léonard Defrance étaient visibles au Musée de la Vie wallonne avant sa disparition.

Sources

Jules HELBIG, La peinture au pays de Liège et sur les bords de la Meuse, Liège, 1903, p. 460-465
Jacques STIENNON, dans Freddy JORIS, Natalie ARCHAMBEAU (dir.), Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 2005
Jacques STIENNON, dans La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. II, p. 90-91, 248-252, 294
Adolphe SIRET, dans Biographie nationale, t. VII, Bruxelles, 1897, col. 227-230
Françoise DEHOUSSE, Maurice PAUCHEN, Léonard Defrance : Mémoires, Liège, Wahle, 1980

de Coster-Bauchau Sybille

Politique, Député wallon

Élisabethville 23/02/1953

Députée wallonne : 2009-2014 et 2019-

Née au Congo où elle passe sa jeunesse, Sybille Bauchau arrive en Belgique après l’indépendance. Infirmière, la fille aînée du châtelain d’Archennes Pierre Bauchau décide de faire sa vie au Canada où elle séjourne de 1975 à 1979, puis en Afrique de 1979 à 1984, avant de revenir s’établir définitivement en Brabant wallon. Licenciée en Gestion hospitalière, administratrice de PME industrielles et de services, Sybille de Coster-Bauchau est élue en octobre 1988 conseillère communale de Grez-Doiceau, sans afficher d’étiquette politique. Membre active de l’opération Villages roumains, elle accède, six ans plus tard,  à un échevinat, en charge des Finances (1995-2000), de l’Aménagement du Territoire, de l’Environnement et des Affaires sociales (1995-2003). 

Administratrice de l’Intercommunale du Brabant wallon (IBW) et de l’Intercommunale sociale du Brabant wallon (ISBW), vice-Présidente de TVCom, elle conforte son mandat en octobre 2000 (461 vp) dans une équipe qui se veut pluraliste. En cours de législature (février 2003), elle remplace Fernand Vanbéver, le bourgmestre socialiste subitement décédé. Elle accède ainsi à la même fonction que son grand-père maternel qui fut bourgmestre de Marche-en-Famenne, quelques années plus tôt...

Quand elle est élue conseillère provinciale du Brabant wallon en 2000, Sybille de Coster-Bauchau a choisi d’être candidate sur une liste libérale. Candidate MR aux élections fédérales de 2003 (4.878 vp.) et régionales de 2004 (3.629 vp), elle présente une liste d’ouverture où se retrouve l’ensemble du MR local au scrutin d’octobre 2006 : le jeu des nouvelles alliances la pousse dans l’opposition à l’hôtel de ville de Grez, malgré 9 sièges pour la « Liste de la Bourgmestre » et 1.525 vp. Chef du groupe MR au Conseil provincial du Brabant wallon (2006-2009), candidate aux fédérales de 2007 (8.386 vp) et de 2010 (5.474 vp), elle contribue aux importants succès électoraux du MR en Brabant wallon, surtout au scrutin régional de juin 2009.

Deuxième candidate derrière Serge Kubla, elle décroche son premier mandat parlementaire, à Namur (7.909 vp). Remplacée à Wavre par Marie-Claire Tonnon-Noël, elle siège aussi au Parlement de la Communauté française. À Namur, les questions orales de la députée portent notamment sur l’implantation des éoliennes et les nuisances sonores, et à Bruxelles sur les dossiers d’enseignement. En octobre 2012, sa liste Alliance communale remporte 9 sièges ; elle retrouve la fonction de bourgmestre de Grez (avec 1.455 vp.), en s’alliant avec « L’Équipe », contre Alain Clabots, bourgmestre sortant.

Quittant le Parlement wallon pour briguer un mandat à la Chambre fédérale, elle y est entraînée dans le sillage de Charles Michel le 25 mai 2014. Deuxième candidate réalisant 12.002 vp, elle contribue avec la tête de liste et ses 34.000 vp à décrocher un 3e siège pour le MR dans le Brabant wallon. À la Chambre, elle est membre de trois Commissions Affaires sociales, Naturalisations et la commission spéciale Abus sexuels.

En 2019, elle est élue députée aux Parlements de Wallonie et de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

 

Sources

Hervé DOUXCHAMPS, « La famille Bauchau », Recueil de l'Office généalogique et héraldique de Belgique, t. LII et LIII, 2004
Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de presse (-2014)

 

Mandats politiques

Conseillère communale de Grez-Doiceau (1989-1995)
Echevine (1995-2003)
Bourgmestre de Grez-Doiceau (2003-2006)
Conseillère provinciale du Brabant wallon (2000-2009)
Députée wallonne (2009-2014)
Bourgmestre de Grez-Doiceau (2012-2018)
Députée fédérale (2014-2019)
Députée wallonne (2019-   )