Photo

Dussart Auguste

Sport, Boxe

Liège 11/04/1921, Herstal 25/11/2002

C’est en 1938 qu’Auguste Dussart livre son premier combat de boxe dans la catégorie des coqs. En 1943, il devient champion de Belgique dans la catégorie des poids plumes et, en 1947, il remporte son premier titre de champion d’Europe des poids moyens. Très bon technicien, spécialiste de l’esquive, le Kid se fait un nom tant dans le milieu de la boxe qu’en dehors. Son charisme et sa classe naturelle séduisent et il jouit d’une popularité telle que son nom entre dans la mémoire collective comme celle d’un grand boxeur. Certes son palmarès compte 170 combats en 22 années de carrière et s’enrichit d’un second titre de champion d’Europe en 1949. Quand il achève sa carrière à 36 ans sur un dernier succès au championnat de Belgique, ce sont surtout les anecdotes qui entourent le boxeur qui en font une légende : bon vivant, montant dans les catégories en raison d’un régime alimentaire qui laissait à désirer, il avait l’habitude d’entamer ses combats en usant d’une frappe très dure qui déstabilisait ses adversaires.
 

Sources

Freddy JORIS, Natalie ARCHAMBEAU (dir.), Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 2005
Centre d’Archives privées, Revue de presse, novembre 2002
Robert YANNE, Kid Dussart, le « Valeureux Liégeois », Herstal, 1997

Dupriez Patrick

Politique, Député wallon

Yaoundé 17/02/1968

Député wallon : 2009-2014
15e président du Parlement wallon : *2012-2014

Né au Cameroun, où son père est coopérant, Patrick Dupriez passe les six premières années de son enfance en Côte d’Ivoire, avant d’achever sa scolarité dans le Brabant wallon, et d’accomplir des études d’Ingénieur agronome des eaux et forêts, complétées par une candidature en Géographie et une formation en Philosophie. Quant à son TFE, il le conduit au Chili. Sensibilisé aux problématiques de l’environnement, du développement durable et de l’interculturalité, il est très tôt attiré par la démarche de René Dumont, premier candidat écologiste à une présidentielle française. Membre d’Écolo dès la fin des années 1980, responsable actif dans les milieux étudiants à l’Université catholique de Louvain, il y croise notamment la route (en 1988) de Rafael Correa qui, en 2006, deviendra le président de l’Équateur. En 1992, Dupriez représente les Verts au « Sommet de la Terre », à Rio.

Actif au sein d’Écolo, il crée en 1994, avec Christophe Derenne, Jean-Luc Rolland et Christos Doulkeridis notamment, les Cafés politiques. Dans le même esprit, il est parmi les jeunes militants Verts qui lancent, dès l’été 1995, l’ambitieux projet des États Généraux de l’écologie politique. Lui-même candidat Écolo aux toutes premières élections provinciales du Brabant wallon (à la 23e place), dans le district de Nivelles, il ne brigue pas de mandat, mais apporte son soutien à son mouvement, comme d’ailleurs aux élections communales à Genappes, où il figure en 17e position sur la liste des Verts.

Ayant commencé sa carrière professionnelle au sein de l’ONG Diobass (valorisation du savoir-faire des organisations paysannes africaines ; 1995), il est chargé ensuite de la direction du Service Éducation à l’Environnement de la province de Namur, en particulier les Classes de Forêt de Chevetogne et les Classes de Patrimoine de Namur (1996-2002). C’est dans ce cadre qu’il organise le premier marché public en matière d’alimentation durable en Wallonie. S’étant établi à Ciney, il contribue à la réorganisation de la section locale Écolo et est candidat au scrutin d’octobre 2000. Suppléant, il accède au mandat de conseiller communal en 2002.

Responsable de la formation au centre Étopia à partir de 2002, il est notamment chargé de l’organisation des Rencontres écologiques d’Été et de la création de l’Académie verte. Candidat suppléant lors du scrutin fédéral de 2003 en province de Namur, lors du scrutin régional de 2004 dans l’arrondissement de Dinant-Philippeville (765 vp), il se distingue par des interventions fort argumentées au Conseil communal de Ciney où il se heurte régulièrement au bourgmestre MR Jean-Marie Cheffert. Au scrutin communal d’octobre 2006, le PS de Guy Milcamps et le cdH de Michel Barbeaux s’allient pour repousser le MR dans l’opposition, et invitent Écolo à les rejoindre. Réélu conseiller communal avec 359 vp, Patrick Dupriez devient échevin en charge de l’Aménagement du Territoire, de l’Urbanisme, du Logement, de l’Énergie, de la Mobilité, du Plan de cohésion sociale et de la Jeunesse.

Cinquième candidat aux fédérales de 2007 (3.934 vp), tête de liste aux régionales de juin 2009, il renonce à son mandat scabinal quand il est élu au Parlement wallon, en tant que représentant de l’arrondissement de Dinant-Philippeville (3.982 vp) : c’est la première fois qu’un Écolo est choisi dans cette circonscription. À Namur, auteur de nombreuses questions, il s’intéresse particulièrement aux dossiers liés à l’Agriculture, à la Biodiversité, aux Travaux publics et à l’Environnement ; le contournement de Couvin, le stockage d’explosifs sur la base Otan de Sugny, les problèmes des agriculteurs (lait, sapins, épidémie, etc.) et la situation dans les campings wallons retiennent toute son attention. Avec son groupe politique, il contribue à l’adoption par l’assemblée wallonne du décret décumul wallon. Le décret spécial de la Région wallonne, adopté le 9 décembre 2010, impose un décumul partiel des mandats de député wallon d’une part et de bourgmestre ou d’échevin d’autre part.
Au Parlement de la Communauté française, il s’occupe des dossiers liés à la petite enfance, à la promotion de la santé et aux relations internationales.

Quand Émily Hoyos est choisie pour succéder à Jean-Michel Javaux à la coprésidence d’Écolo, sa fonction à la présidence du Parlement wallon revient à Patrick Dupriez, unanimement choisi par les membres d’Écolo (4 mars 2012) et nommé par ses pairs lors de la séance plénière du 14 mars. Il devient ainsi le 15e président du Parlement wallon depuis Franz Janssens en 1974. Il manifeste son intention de renforcer le rôle de Namur capitale et d’améliorer la participation des citoyens dans la construction de leur région. Lors des Fêtes de Wallonie 2012, il relance l’idée de créer une circonscription électorale wallonne unique.

Renonçant à emmener la liste Écolo aux communales d’octobre 2012, il se contente de figurer en dernière place, mais obtient néanmoins 316 vp et le droit de siéger au Conseil communal. Respectant le principe du décumul, il ne prête pas serment ; disposant de deux élus et en progression, Écolo est renvoyé dans l’opposition, la liste Union de J-M. Cheffert ayant enlevé 13 des 25 mandats communaux. 

Président du Parlement wallon dont il organise les travaux et les Commissions, Patrick Dupriez nourrit une réflexion sur l’importance que revêt l’assemblée qu’il dirige dans la démocratie moderne. Soulignant qu’en « cinq ans, le greffe du Parlement wallon a rattrapé près de 20 années de retard en matière de gouvernance, d’archivage, d’automatisation, d’efficience et d’efficacité » (Le Soir, 17/04/2014), il réclame un rôle plus important pour les parlementaires : leurs propositions de décret ne représentent que 4% de la masse des projets de décret déposés par le gouvernement ; l’heure des panels citoyen est venue pour soutenir le travail législatif, estime celui qui est également membre d’assemblées parlementaires internationales : le Conseil parlementaire interrégional (CPI), la Conférence des Assemblées législatives régionales d’Europe (CALRE) et le Comité mixte Assemblée nationale du Québec-Parlement wallon (2012-2014). 

Son statut de président du Parlement wallon ne lui évite pas de connaître le même sort que les députés Écolo de Wallonie : le 25 mai 2014 est une journée noire de l’histoire d’Écolo. Un tsunami emporte 10 des 14 sièges qu’Écolo détenait à Namur. Patrick Dupriez (2.573 vp) est parmi eux et se retrouve sans aucun mandat, le 26 mai.

En mars 2015, il est élu co-président du parti avec Zakia Khattabi1. Il met un terme à son mandat le 19 octobre 2018 pour raisons personnelles. 

 
Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse (-01/2015)

 

Mandats politiques

Conseiller communal de Ciney (2002-2009)
Échevin (2006-2009)
Député wallon (2009-2014)
Président du Parlement wallon (2012-2014)

Dupierreux Richard

Culture, Journalisme, Militantisme wallon

Couillet 06/03/1891, Ixelles 06/06/1957

Fils d’un inspecteur des finances de Marcinelle, Richard Dupierreux étudie le Droit à l’Université libre de Bruxelles lorsqu’il rencontre Jules Destrée. Avec lui, il prépare l’Exposition de Charleroi de 1911, en particulier les salons de peintures anciennes et modernes qui doivent être la démonstration de l’existence d’un art wallon. Sur ce sujet, le jeune Dupierreux donne d’ailleurs des conférences. Pendant plusieurs années, Dupierreux va assister Jules Destrée, étant son secrétaire tant au sein de la société Les Amis de l’Art wallon qu’à l’Assemblée wallonne. Malgré l’éclatement des hostilités en 1914, Dupierreux a eu le temps d’achever ses études de Droit à l’Université libre de Bruxelles et de prêter serment, afin de devenir stagiaire auprès Émile Brunet. Il ne s’attardera pas au pays, et trouvera refuge en Angleterre avant de gagner Paris, puis de suivre Destrée, lorsque celui-ci est envoyé en mission pendant la Grande Guerre et quand il devient ministre entre 1919 et 1921 ; il est alors son chef de Cabinet. Il suit encore son mentor à la Commission internationale de Coopération culturelle de la Société des Nations à Paris. En poste à Paris de 1926 à 1929, Dupierreux est chef de la section des Relations artistiques de l’Institut international de coopération intellectuelle de la SDN.

Correspondant du journal Le Petit Parisien (1919-1939), il devient le nouveau chef des services artistiques et théâtraux du journal Le Soir en 1929. Il quitte Paris et assume cette tâche en même temps que celle de chroniqueur artistique et littéraire. Professeur d’histoire des littératures à l’Institut supérieur d’Architecture et des Arts décoratifs de Bruxelles (1932-1956), président-fondateur de l’Union de la Presse étrangère, président de l’Union de la Presse théâtrale et musicale belge, il a été le secrétaire de la Ligue des Intellectuels wallons et le président des Amis de l’Art wallon (1938). Élu correspondant de l’Académie de Belgique le 5 juillet 1951, Richard Dupierreux devient membre de la classe des Beaux-Arts le 5 janvier 1956.

L’activité de Dupierreux est multiple. On ne compte pas le nombre de sociétés, cercles et revues qu’il a contribué à créer. Outre ses nombreuses publications, monographies, romans ou critiques, consacrés aux artistes ou à des aspects de l’art wallon, Richard Dupierreux est l’auteur du rapport qui détermine l’Assemblée wallonne à choisir, en 1913, le coq rouge sur fond jaune comme drapeau de la Wallonie et le dernier dimanche de septembre comme fête « nationale ». Membre-fondateur de l’Assemblée wallonne (1912-1923), Richard Dupierreux avait accompagné J. Destrée dans le défi de créer un premier Parlement de la Wallonie. Porté à défendre l’option fédéraliste, Dupierreux démissionne de l’Assemblée wallonne en juillet 1923 et abandonne les fonctions qu’il occupait à son bureau.

Sources

Philippe DESTATTE, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2000, t. I, p. 529-530

Dufay Guillaume

Culture, Musique

Cambrai ou Chimay 1400, Cambrai 27/11/1474

Durant le premier tiers du XVe siècle, se forme autour de Cambrai « un premier grand centre de rayonnement international de la polyphonie ». Son principal protagoniste se nomme Guillaume Dufay, dont on n’est pas certain qu’il soit né à Cambrai ; une hypothèse le fait naître à Chimay. Quoi qu’il en soit, le wallon du Hainaut Guillaume Dufay devient l’un des musiciens les plus célèbres du XVe siècle, apprécié par les têtes couronnées les plus illustres du temps, mais pas seulement. À côté de musiques destinées à la liturgie (messes, motets, hymnes, antiennes, magnificat), Dufay a composé beaucoup de musique profane (des ballades, rondeaux et virelais). Pour la période entre 1430 et 1460, Dufay est considéré comme le représentant idéal de la perfection.

Au-delà de la qualité de ses compositions, Guillaume Dufay est l’initiateur d'un style nouveau. Peut-être a-t-il pris exemple sur des musiciens anglais, mais il emprunte aussi aux Italiens et aux Français pour réaliser une synthèse qui donne à la musique une technique nouvelle et une esthétique qui s'oppose aux usages du XIVe siècle. Au regard des ballades ou rondeaux traditionnels, très contrastés, saccadés, aigus voire maniérés, la musique de Dufay paraît empreinte d'une grande souplesse et d'une grande douceur. En orientant la musique dans des voies vraiment nouvelles, en assurant ainsi sa rénovation, G. Dufay apparaît comme le premier artiste à avoir tiré la musique de ses erreurs, comme le premier maître de sa renaissance. Renouvelant la mélodie, le rythme, le contrepoint et le sens de la tonalité, il introduit une « autre esthétique ».

Ainsi, dans le contrepoint, invite-t-il à renoncer à certaines duretés de l'époque antérieure en n'utilisant la dissonance qu'avec discrétion et circonspection. Désormais la dissonance n'est plus guère mise en évidence sur les points d'appui rythmique ; elle n'apparaît le plus souvent que comme le prolongement d'une consonance, comme la suspension provisoire d'une voix sur une autre en mouvement et elle se résout rapidement dans une nouvelle consonance. Aux environs de 1430, la musique de Dufay est considérée comme une véritable ars nova. Il se situe ainsi à l'aube du contrepoint classique, qui sera normalisé plus tard par Josquin Desprez.

Choral à la cathédrale de Cambrai, le jeune Dufay suit l’évêque de Cambrai au concile de Constance (1417) et vit à la cour des Malatesta, à Rimini et Pesaro (1420-1426), avant de se rendre à Bologne, dans l’entourage du cardinal Louis Aleman, légat du pape : il rejoint ensuite la chapelle pontificale où il retrouve quelques Liégeois (1428-1433). Après le Liégeois Ciconia, Guillaume Dufay est l’un des premiers musiciens « du Nord » à faire carrière en Italie. À partir de février 1434, il fait partie de la cour d’Amédée VIII de Savoie comme chapelain d’abord, comme magister capellae ensuite (1433-1435, 1437-1445). En juin 1435, il réintègre la chapelle du pape Eugène IV qu’il suit à Florence (où il compose un motet pour l’inauguration du dôme de Brunelleschi), à Bologne et à Ferrare. Quand il revient à Cambrai, en 1437 ou 1439, Guillaume Dufay bénéficie de la part du pape d’un canonicat à la cathédrale de la ville : il dirige la maîtrise de garçons et le chœur de la cathédrale ; resté en contact avec l’Italie, notamment avec les Médicis de Florence, il retourne quelques fois en Italie, est nommé de manière honorifique chapelain et chantre du duc de Bourgogne, Philippe le Bon, mais c’est en Savoie qu’il séjourne de 1450 à 1458, à la cour du duché, avant d’achever sa carrière musicale au service de la cathédrale de Cambrai ; il a aussi servi la collégiale Sainte-Waudru à Mons.

Sources

Robert WANGERMÉE, dans Freddy JORIS, Natalie ARCHAMBEAU (dir.), Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 2005
Robert WANGERMÉE, Guillaume Dufay et la renaissance en musique, dans Robert WANGERMÉE et Philippe MERCIER (dir.), La musique en Wallonie et à Bruxelles, t. I : Des origines au XVIIIe siècle, Bruxelles, La Renaissance du Livre, 1980, p. 130-133
Histoire de la Wallonie (L. GENICOT dir.), Toulouse, 1973, p. 183, 261-263
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. I, p. 479-486 ; t. II, p. 303-310
Albert LOVEGNÉE, Le wallon Guillaume Dufay : 1398-1474, Charleroi, Institut Destrée, 1980

Duchâteau Netta

Culture, Cinéma

Namur 1915

Dès la fin du XIXe siècle, des concours de « reines de beauté » sont organisés à travers l’Europe. Il s’agit d’initiatives privées et souvent ponctuelles. L’organisation d’un concours de Miss Europe se systématise à partir de la fin des années 1920, engendrant des compétitions de miss au niveau de chaque pays, ce qui donne droit à participer aussi à un concours de Miss Univers. C’est ainsi que le premier concours de miss Belgique se tient en 1928 et qu’en 1930 c’est une Namuroise qui est distinguée. Non contente d’être la première Wallonne à obtenir ce titre, Netta Duchâteau se distingue en devenant Miss Univers 1931, à Galverton, aux États-Unis : son mètre septante, ses 58 kg, ses yeux verts et ses cheveux brun foncé séduisent le jury qui lui décerne le titre de plus belle femme du monde. Elle reste à ce jour la première miss Belgique à avoir atteint cette consécration internationale et la seule Wallonne.

Suite au succès de la jeune fille, le concours de Miss Univers 1932 est organisé à Spa. Jusqu’à la fin des années ’30, elle associe son image à divers produits, dont des automobiles, du chocolat, mais surtout les cigarettes Belga : l’année du centenaire de l’indépendance de la Belgique, la jeune fille inspire Sterne Stevens et devient l’emblème du cigarettier. Elle apparaît aussi au cinéma (Grains de beauté, 1932). Après la Seconde Guerre mondiale, devenue comédienne, Netta Duchâteau va jouer sur la scène de théâtres bruxellois, dans Psyché (1947), ou incarnant notamment Roxane dans Cyrano de Bergerac. À la fin de sa carrière artistique, elle s'installe à Monaco.

Elle n’a pas été oubliée lorsque la ville de Namur a fait réaliser la fameuse Fresque des Wallons, en 2004, mais paradoxalement et… malheureusement seul le nom de la miss univers apparaît sur cette fresque murale.

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Jacques MERCIER, Karl SCHEERLINCK, Made in Belgium : un siècle d’affiches belges, p. 1930

du Broeucq Jacques

Culture, Sculpture

Mons c. 1505, Mons 30/09/1584

Contemporain de Lambert Lombard, Jacques du Broeucq se rend lui aussi très tôt en Italie. Comme le Liégeois, le Montois y affine ses talents de sculpteur. La comparaison s’arrêtera là, même si les deux artistes wallons marquent également leur époque, à l’est et à l’ouest du pays wallon. Sollicité par les chanoinesses du chapitre de Sainte-Waudru, du Broeucq exécute un jubé monumental d’où émergent encore les statues de la Charité, de la Justice, de la Force et de la Tempérance (1535-1540), témoignage magnifique de la synthèse que réussit du Broeucq entre le génie de Florence et la tradition rigoureuse des provinces d’au-delà des Alpes. Son talent s’observe encore dans le bas-relief de Sainte Waudru faisant bâtir une église (c. 1549) ou dans le mausolée d’Eustache de Croÿ de la cathédrale de Saint-Omer. À son talent de sculpteur, Du Broeucq joint celui de l’architecte.

Au milieu du XVIe siècle, Boussu peut s’enorgueillir de disposer d’un somptueux palais de style Renaissance, l’une des plus belles demeures de tous les Pays-Bas, assurément digne d’un roi. Son propriétaire est Jean de Hennin-Liétard, grand écuyer de Charles-Quint, qui a confié, en 1539, la réalisation de son rêve à Jacques Du Broeucq. Incendié en 1554, le château connut des transformations au XVIIIe siècle avant d’être à nouveau détruit partiellement en 1944. Pourtant, le souvenir de l’œuvre réalisée par Du Broeucq a traversé les siècles.

Le château de Hennin n’est qu’une des réalisations de ce personnage sollicité aussi par Marie de Hongrie. La régente des Pays-Bas détient depuis 1545 la ville et la seigneurie de Binche, et le privilège d’y tenir cour royale. C’est Du Broeucq qui est chargé de tous les travaux : aménagements, transformations, mais aussi construction. Le château de Binche est rapidement achevé, mais, pour ses grandes chasses, la régente veut pouvoir disposer aussi d’un château dans les bois ; le lieu a été choisi : Mariemont. En 1549, des fêtes dignes des réalisations saluèrent la fin des travaux. Mais ici encore, les armées du roi de France, Henri II, mirent en poussières des milliers d’heures de travail (1554). Néanmoins, du Broeucq est récompensé pour ses services ; il reçoit le titre, assorti d’une pension, de maître-artiste de l’empereur.

Consulté à diverses reprises pour la construction de nouveaux hôtels de ville et de fortifications (Anvers, Bavai, Beaumont, Ath, Braine-le-Comte) ou l’aménagement de places-fortes (Mariembourg, Charlemont, Philippeville, Luxembourg et Thionville), Jacques du Broeucq dresse des plans mais se voit préférer d’autres architectes. En 1572, il offre sa collaboration à la ville de Mons prise par les protestants. Mais l’instabilité politique est grande et l’architecte doit faire amende honorable quand la ville est reprise par le duc d’Albe. En témoignage de « sa bonne foi », il sculpte la statue de saint Barthélemy (collégiale Sainte-Waudru, 1574).
 

Sources

Jacques STIENNON, dans Freddy JORIS, Natalie ARCHAMBEAU (dir.), Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 2005
Histoire de la Wallonie (L. GENICOT dir.), Toulouse, 1973, p. 250, 258
Jean-François POTELLE (dir.), Les Wallons à l’étranger, hier et aujourd’hui, Charleroi, Institut Destrée, 2000
Pierre COLMAN, dans La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. II, p. 153-157, 215

Dubois Jacques

Académique, Culture, Littérature, Militantisme wallon

Liège 20/03/1933

Docteur en Philologie romane de l’Université de Liège (1961), professeur à l’Université de Liège de 1978 à 1998, Jacques Dubois y enseigne la littérature française des XIXe et XXe siècles, ainsi que la sociologie des institutions culturelles. Au sein de son institution, celui qui accepte de relever le défi de diriger le quotidien de gauche, La Wallonie, de 1990 à 1993, a été l’un des fondateurs du département des Arts et Sciences de la Communication en 1990, qu’il a présidé jusqu’en 1998. Professeur invité dans différentes universités aux États-Unis, en France et au Québec, il a contribué à y former quantité de chercheurs.

Avec ses amis du Groupe µ, groupe interdisciplinaire liégeois, il a suivi la vague structuraliste et publié une Rhétorique générale, internationalement reconnue. Il reprend ensuite son autonomie pour en revenir à la seule littérature et l'aborder sous un angle sociologique correspondant plus à ses convictions. Il se reconnaît dans les travaux de Pierre Bourdieu. Ses études sur les « romanciers français du réel » font autorité. Il y a rangé le romancier liégeois Georges Simenon dont il est devenu l’un des meilleures spécialistes au monde. Avec Benoît Denis il a édité trois volumes de romans dans la bibliothèque de la Pléiade, après avoir fondé et animé un Centre d'études Simenon à l'Université de Liège. Proust figure aussi parmi les auteurs qu’il a étudiés. Pratiquant lui-même une forme de critique-fiction, il se fait auteur à succès avec Pour Albertine et Figures du désir. Pour une critique amoureuse.

Intellectuel éclectique, Jacques Dubois a présidé pendant plusieurs années la Commission de Sélection de films, puis la Commission des Lettres de la Communauté française ; au sein des éditions Labor, il a également contribué au lancement et au succès de la collection Espace Nord, qui reprend les œuvres classiques, soit plus de 300 titres du « patrimoine littéraire francophone belge ». Avec son collègue Jean-Marie Klinkenberg, il a animé le Centre d'Études québécoises fondé par Maurice Piron à l’Université de Liège. Intellectuel engagé, attentif à l’aspiration du Québec vers plus d’autonomie, il ne néglige nullement la situation qui l’entoure. En 1983, il figure parmi les principaux rédacteurs et signataires du Manifeste pour la culture wallonne, qui revendique une autonomie de nature culturelle pour la Wallonie ; contributeur dans l’encyclopédie La Wallonie. Le Pays et les Hommes (1979), ainsi que dans Oser être Wallon (1998), il n’a pas renouvelé sa signature au bas de l’édition du Manifeste 20 ans après, en 2003.

Œuvres principales

La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts – culture, t. III, p. 167
Avec le Groupe μ 
Rhétorique générale (Paris, Larousse, “Langue et Langage”, 1970 ; Paris, Seuil, “Points”, 1982).<Rhétorique de la poésie(Bruxelles, Complexe, 1977; Paris, Seuil, “Points”, 1990).
Romanciers français de l'instantané au XIXe siècle, Bruxelles, 1963
L'Institution de la littérature, Bruxelles, 1978
Le Roman policier ou la modernité, Paris, 1991
Le Roman célibataire, Paris, 1996 (en collab. avec J.-P. Bertrand, M. Biron et J. Paque).
Les Romanciers du réel, Paris, 2000
Stendhal. Une sociologie romanesque, Paris, 2007
Édition de Simenon, Romans, Paris, Gallimard, “Bibliothèque de la Pléiade“, 2003 (en coll. avec Benoît Denis).
Édition de Simenon, Pedigree et autres romans, Paris, Gallimard, “Bibliothèque de la Pléiade“, 2009 (en coll. avec Benoît Denis).
Le Tournant des années 1970. Liège en effervescence, Bruxelles, Les Impressions Nouvelles, 2010 (en codirection avec Nancy Delhalle et Jean-Marie Klinkenberg).
Pour Albertine. Proust et le sens du social, Paris, 1997
Figures du désir. Pour une critique amoureuse, Bruxelles, 2011

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Dreppe Joseph

Culture, Peinture

Liège 30/09/1737, Liège 28/03/1810

Peintre et graveur, Joseph Dreppe est appelé à son service par le prince-évêque Velbrück : professeur de l'Académie de peinture, de sculpture et de gravure nouvellement créée (1775), il deviendra l’un des directeurs sous le règne de Hoensbroeck (1784) ; il est aussi membre de la Société libre l'Émulation qui contribue à faire connaître ses œuvres (1780). En dépit du changement de régime et d’un exil de plusieurs mois à Paris, il conserve des responsabilités au lendemain de la période révolutionnaire liégeoise, devient inspecteur des travaux publics (1795) et reste un artiste apprécié notamment en raison de ses sujets historiques. Son œuvre majeure est sans doute Le meurtre de saint Lambert (1775), qui reste l’une des rares réalisations liégeoises de qualité relatant un événement historique régional.
 

Élève de Jean Latour durant sa jeunesse à Liège (1852-1858), il part à Rome grâce à une bourse Darchis et y fréquente Placide Constanzi, puis Laurent Pècheux (1758-1761). Au-delà des sujets classiques, il découvre en Italie la couleur et la sérénité des paysages de la campagne romaine, et est impressionné par les éléments architecturaux, mais surtout par les ruines antiques. Héritier des grands baroques, précurseur du néo-classicisme et du romantisme, Joseph Dreppe est surtout connu pour ses admirables dessins rehaussés. Rentré à Liège (1762), il succède à Léonard Defrance comme professeur de dessin à l’Académie (1784) et surtout contribue au maintien du travail de la gravure où des Liégeois se distinguent depuis le XVIe siècle. 
 

Ayant dû réaliser des œuvres de circonstance relatant des faits politiques ou culturels liés à Liège sous l'Ancien Régime et après 1795, il se montre parfois grandiloquent et sa production est de qualité inégale. Ainsi, les dessins réalisés par Joseph Dreppe en 1798 nous donnent une singulière photographie des ruines de la cathédrale Saint-Lambert à Liège. En 2010, le Cabinet des Estampes de la ville de Liège lui a consacré une exposition.
 

Sources

Freddy JORIS, Natalie ARCHAMBEAU (dir.), Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 2005
Jean-Luc GRAULICH, dans Le Dictionnaire des Peintres belges du XIVe siècle à nos jours…, Bruxelles, Renaissance du Livre, 1995, p. 393-394
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. II, p. 499-500
Musée des Beaux-Arts, Exposition Le romantisme au pays de Liège, Liège, 10 septembre-31 octobre 1955, Liège (G. Thone), s.d., p. 153-154
Jules HELBIG, La peinture au pays de Liège et sur les bords de la Meuse, Liège, 1903, p. 455 et ssv.

Dragone Franco

Culture, Théâtre

Cairano 12/12/1952, Caire 30/09/2022

C’est en décembre 1958 que Franco Dragone quitte le sud de l’Italie et arrive à La Hestre ; il y rejoint son père qui, comme de nombreux Italiens de sa génération, a pris le chemin de la Belgique pour y trouver du travail (1956). Ouvrier aux aciéries Lesquin, à Haine-Saint-Pierre, le père Dragone envisage une formation professionnelle dans l’enseignement technique pour son fils qui, lui, est plutôt séduit par le théâtre ; il est vrai que ses professeurs à l'Athénée de Morlanwelz se nomment Jean Louvet, Jean-Pierre Soumois et André Balthazar. Passionné par la littérature et la comédie, séduit par le théâtre prolétarien, Franco Dragone rêve d’autant plus des étoiles qu’il a trouvé un boulot, après ses humanités, qui ne le passionne guère : pendant deux ans, il travaille dans l'industrie chimique, à la Gulf Oil Belgium. Soutenu par son épouse, il suit des cours de Sciences politiques à la Fopes et, surtout, s'inscrit au Conservatoire de Mons. Formé à l’école du théâtre populaire, puis à celle du Théâtre Prolétarien de Jean Louvet et de la Commedia dell’Arte, attiré par le théâtre-action, il est déçu par son premier engagement, dans une pièce « classique » à Bruxelles. Inscrit au cours Gaulier à Paris, il multiplie les stages dans toute l’Europe.
 

En 1979, il croise la route de la Compagnie du Campus, y travaille comme animateur, avant d’y être responsable de l’atelier théâtre jusqu’en 1989. C’est durant cette période qu’il entre en contacts avec le Québec où il donne des cours et des conférences, notamment sur le processus d'écriture et la production de spectacles de théâtre-action. Séduit par sa mise en scène de la remise des diplômes de l'École nationale de Cirque du Canada, Guy Laliberté qui est en train de fonder le Cirque du Soleil lui confie un spectacle (1984). C’est le début d’une vraie aventure qui prend la forme, en 1987, d’une tournée qui impressionne toutes les villes des États-Unis. Spectacle inédit mariant les arts du cirque, les arts de la piste et de la rue, de la danse et du théâtre, le Cirque réinventé crée une magie saluée par le public et par de nombreux prix, magie qui fleurte avec le gigantisme.
 

Présentées sous des chapiteaux capables d’accueillir 2 à 3.000 personnes, d’autres tournées débordent les États-Unis, pour l’Asie et l’Europe. Des théâtres permanents sont installés à Las Vegas, dans le Mississipi, ou sur le site de Disney World. Ayant réussi pleinement son entrée dans la troupe des saltimbanques du Québec, Dragone est, pendant quinze ans, le metteur en scène vedette de cet « atelier artisanal » qui gère plus de 2.000 personnes, et où il signe une dizaine de spectacles (dont le célèbre Saltimbanco) qui continuent à tourner à travers le monde.
 

Impliqué dans sa nouvelle vie en Amérique du Nord, Dragone n’en oublie pas son port d’attache, la région de La Louvière. Depuis 2000, avec « Décrocher la Lune », il offre régulièrement un spectacle lumineux à la ville où il a grandi. À la tête de Franco Dragone Entertainment Group, il souhaite surtout participer au développement économique et culturel de sa région d’adoption ; il y installe Créations du Dragon qui, parmi ses activités, s’occupe de la fabrication de costumes et d'accessoires pour les productions des spectacles. Sa collaboration avec Céline Dion et ses spectacles à Las Vegas retiennent particulièrement l’attention, mais, organisateur d’événements, il est mêlé aux cérémonies d’ouverture des Jeux Olympiques, publicitaire, il a sa propre société et homme de spectacle, il ne néglige pas le cinéma. En 2002, il accompagne l’inauguration de l’ascenseur de Strépy-Thieu (Au fil de l’homme). En 2008, il conçoit et met en scène Le Potager des visionnaires, à l’occasion du 400e anniversaire de la ville de Québec, tandis que l’année suivante, pour l’inauguration de la nouvelle gare Calatrava, à Liège, il présente le spectacle Gare à vous. Il investit aussi de manière spectaculaire à Macao dans la City of Dreams où The House of dancing water est à l’affiche depuis 2010, avant de se lancer dans d’ambitieux projets en Chine. Depuis La Louvière, Dragone multiplie les projets, recrutant des créatifs qu’ils soient experts en sport, en informatique, en couture ou en graphisme dans le seul but de proposer les shows les plus originaux et les plus innovants du monde. Parallèlement, il soutient aussi des projets à caractère social.
 

Parmi les nombreuses distinctions remises à Franco Dragone, on retiendra le Prix de la province du Hainaut 1999, le titre de docteur honoris causa de l’Université d’Anvers (2011), le titre de commandeur du Mérite wallon (2012), l'Independence Order of First Grade à Abu Dhabi (2013), le Premio Civitas à Naples (2015) et le TEA Awars pour Décrocher la lune (2017).

 

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Yves VASSEUR, Franco Dragone, une improbable odyssée, Bruxelles, Labor, 2002

https://dragone.com/

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Donckier de Donceel Arnold-Ferdinand

Conception-Invention, Militaires

Liège 20/04/1761, Saint-Josse-ten-Noode 02/04/1840

Bien avant les anticipations du Nautilus, un projet de sous-marin, ayant la forme d’un « bateau-poisson », est soumis à l’attention du roi Guillaume Ier des Pays-Bas, en 1816. Il est l’œuvre d’un officier liégeois, Arnold-Ferdinand Donckier de Donceel. Descendant d’une ancienne famille de la noblesse du pays de Liège, Ar-F. Donckier était entré au service des Provinces-Unies en 1784, avant de passer à celui du prince-évêque de Liège puis de s’engager dans l’armée française, au lendemain de la Révolution liégeoise de 1789 et des tentatives ratées de restauration autrichiennes. Il participe aux campagnes de la République et de l'Empire : il est colonel dans l’armée française sous le premier empire. Fin 1814, il participe à la formation d’une armée nationale dans les Pays-Bas. Après Waterloo, Ar-F. Donckier intègre l’armée du Royaume-Uni des Pays-Bas : nommé colonel en 1816, il est mis en « non-activité » en 1818. Prenant fait et cause pour la Belgique, il accepte, le 20 septembre 1830, le commandement de la place de Liège. Nommé général de brigade (novembre 1831), il entre comme conseiller auprès de la Haute-Cour militaire (1831-1840).
 

En raison du grand intérêt qu’il présentait pour la Défense nationale, son projet de sous-marin avait été classé top-secret. Il n’est rendu public qu’en 1835 par son auteur qui s’est toujours révélé un inventeur ingénieux, spécialisé dans le sauvetage des naufragés en mer : en 1817, il avait mis au point un système de cloche à plongeur. En 1836, il devient président d’honneur de la Société générale des Naufrages et de l’Union des Nations, fondée à Paris l’année précédente : cette société publia notamment la description des inventions de Donckier.
 

Sources

Eric BASTIN, La Justice militaire en Belgique de 1830 à 1850, Louvain-la-Neuve, PUL, 2012, p. 251
Musée des Beaux-Arts, Exposition Le romantisme au pays de Liège, Liège, 10 septembre-31 octobre 1955, Liège (G. Thone), s.d., p. 223
Général Baron GUILLAUME, dans Biographie nationale, t. VI, p. 121.