Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Buste de René Lyr

Buste à la mémoire de René Lyr, réalisé dans un premier temps par Auguste Puttemans ; dans un second temps, par Léandre Grandmoulin, 19 juin 1960 et 18 juin 1967.

C’est dans la botte de Chimay que se forge la personnalité du jeune René Vanderhaegen, à cheval sur les XIXe et XXe siècles. Attiré vers la littérature et la musique ainsi que par les idées socialistes, voire anarchistes, en dépit des espérances familiales, l’adolescent s’émancipe dès 1905, au moment où il s’établit à Bruxelles. Si les idéaux politiques s’effritent avec le temps, il se consacre résolument à l’écriture au détriment de ses études ; il préfère donner des cours de français aux étudiants étrangers qui fréquentent l’Université libre de Bruxelles et taquiner la muse. Au contact des écrivains de son temps, il s’adonne à la poésie, se passionne pour la musique et se forge un nom sous le pseudonyme de René Lyr. Intéressé par l’activité des artistes wallons, en particulier des musiciens, il se penche sur leur histoire et contribue à leur promotion, écrivant des articles et des livres, tout en étant notamment actif au sein de la Société des Amis de l’Art wallon, et à la Fédération des Artistes wallons. Enseignant avant-guerre et pendant celle-ci (il enseigne en Gironde de 1914 à 1918), il devient après l’Armistice à la fois musicologue, critique d’art, journaliste, puis directeur des services d'information et de propagande des Expositions universelles de Bruxelles (1935), Paris (1937), Liège (1939) et New York (1939, pavillon belge). Après la Libération, il est nommé conservateur du Musée instrumental de Bruxelles (1946-1957). 


Représentant de l’arrondissement de Bruxelles à l’Assemblée wallonne de 1919 à 1940, il contribue à l’organisation de secours durant la Grande Guerre et est résistant par la plume durant la Seconde. Secrétaire national du Front de l’Indépendance pendant quatre années, président de Wallonie indépendante en 1944, défenseur de la thèse fédéraliste au Congrès national wallon de Liège, en octobre 1945, membre du Comité permanent du Congrès national wallon (1947-1957), René Lyr était aussi parmi les fondateurs de L’Alliance française en Belgique, dont il est élu président fondateur en 1945 et un des membres du conseil général à Paris. À travers ses très nombreux écrits, il laisse régulièrement filtrer des informations sur sa propre existence, tout en consacrant de nombreuses biographies à ses amis artistes. Le Prix Verlaine de l’Académie lui fut décerné en 1957, quelque temps avant son dernier voyage.


Rapidement, après son décès, la décision est prise d’élever un monument dans sa ville natale. Pour le buste de René Lyr, l’œuvre d’Auguste Puttemans (1866-1922) s’impose d’elle-même. Une réelle amitié avait uni les deux hommes avant la Grande Guerre et le sculpteur bruxellois avait signé un buste en bronze qui fait l’unanimité. Placé au sommet d’un socle en moellons, il est inauguré le 19 juin 1960. Élève de Charles Van der Stappen à l’Académie de Bruxelles, condisciple de Victor Rousseau, Auguste Puttemans est surtout célèbre pour sa statue d’Isis, offerte après la Grande Guerre, par un comité belge, au président Herbert Hoover, ainsi que pour une statue à Francisco Ferrer. À Nismes-lez-Couvin, Puttemans est aussi l’auteur d’une victoire ailée.


Le bronze de Puttemans ne résiste cependant pas à la convoitise de vandales qui s’en emparent définitivement en 1964. Pour remplacer ce buste, les autorités locales se tournent vers une œuvre réalisée en son temps par Léandre Grandmoulin (1873-1957), autre ami de René Lyr qui, comme lui, résidait à Uccle. Comme Puttemans, Léandre Grandmoulin avait été formé à l’Académie de Bruxelles, avait été l’élève de Van der Stappen et connaissait Victor Rousseau : Grandmoulin exécute en effet plusieurs préparations pour ce dernier, comme d’ailleurs pour Meunier et Rombaux. Deuxième du Prix de Rome 1900, ce portraitiste réaliste avait enseigné à l’Académie Saint-Gilles de 1922 à 1933. Ce « nouveau » monument est inauguré le 18 juin 1967.
 

Buste René Lyr (Couvin)

Sources


Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Paul DELFORGE, Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. II, p. 1051-1052
André LÉPINE, 80 monuments insolites d'Entre-Sambre-et-Meuse, Cerfontaine, 1989, p. 77
Paul DELFORGE, Essai d’inventaire des lieux de mémoire liés au Mouvement wallon (1940-1997), dans Entre toponymie et utopie. Les lieux de la mémoire wallonne, (actes du colloque), sous la direction de Luc COURTOIS et Jean PIROTTE, Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 1999, p. 285-300
Robert FRICKS et Raymond TROUSSON, Lettres françaises de Belgique. Dictionnaire des œuvres, 2, La Poésie, Gembloux, 1988, p. 71-72, 111, 143, 484-485 
Robert O.J. VAN NUFFEL, dans Nouvelle Biographie nationale, t. IV, p. 263-267
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 655 et t. II, p. 324

Les Allées
5660 Couvin

carte

Paul Delforge

Photo Jongen 

Statue Louis XIV

Bénéficiant d’un financement inscrit dans le cadre du Phasing out de l'Objectif 1, la ville de Tournai entreprend de valoriser davantage son patrimoine historique, au-delà du beffroi, de la cathédrale et du Pont des Trous. 

Via l’Intercommunale Ideta qui est le maître d’œuvre, un plan stratégique privilégie en effet depuis 1995 le développement touristique du Hainaut. Se concentrant sur le cœur historique de Tournai, les autorités locales confient à l’artiste plasticienne Christine Jongen (1949-) le soin de mettre en place une quinzaine de statues dans un parcours d’interprétation à travers la « Cité des cinq Clochers ». Une quinzaine de statues en bronze sont les étapes marquantes d’un circuit fortement balisé par une signalétique particulière. Touristes comme habitants de la cité sont ainsi invités à une promenade de deux heures, jalonnées de 43 étapes.

Afin de garantir la qualité de l’initiative communale, le bourgmestre, Roger Delcroix, a confié à un comité scientifique composé d’historiens, d’archéologues et de spécialistes des traditions locales la mission d’encadrer le projet. Répondant aux critères souhaités, Christine Jongen implante quinze statues sur les trottoirs de Tournai, entre la Grand-Place, l’Escaut, la Tour Saint-Georges et le Fort Rouge. Née à Bruxelles, formée en psychologie à l’Université libre de Bruxelles, Christine Jongen travaille comme journaliste à l'hebdomadaire Notre Temps (1975-1976), avant de se consacrer entièrement à la sculpture. Laissant son inspiration se nourrir aux sources les plus variées, de la Renaissance européenne aux grandes traditions asiatiques ou d’Amérique, elle s’oriente vers la peinture abstraite quand elle s’installe en France au début des années 1980. Menant aussi une réflexion continue sur l’art dans son essai À la recherche de formes, paru pour la première fois à la fin les années 1980, elle présente ses œuvres à plusieurs reprises (Paris, Bruxelles, Genève, Bordeaux, Bézier, Montréal, Rome, Barcelone, Avignon, Padoue, etc.) et dans divers salons d'art français (2000-2003).

Pour Tournai, Christine Jongen crée quinze statues, en bronze, de 70 à 75 centimètres de haut, qui toutes sont déposées sur des piliers de 2,8 m de haut. Coulées dans les ateliers de la fonderie Francart, à Crisnée, les statues sont autant de références au passé de Tournai, évoquant des fonctions (chanoine, évêque) ou des « activités » (tailleurs de pierre, portier, arbalétrier), comme des personnages historiques. Parmi ces derniers, Louis XIV symbolise une période particulière de l’histoire de Tournai. Investie en 1667, lors de la Guerre de Dévolution, Tournai redevient française jusqu’en 1713 et la signature du Traité d’Utrecht. Sous Louis XIV, la cité scaldienne connaît à la fois une longue période de prospérité et de profondes transformations (les berges du fleuve sont rectifiées et une nouvelle citadelle est édifiée sur les plans de Vauban dans le nord). Considérée par Louis XIV comme une place forte imprenable, Tournai devient un enjeu dans la Guerre de Succession d’Espagne. Sa capitulation devant les troupes du duc de Marlborough (1709) est un moment important, symbolisant la fragilité de la France de Louis XIV. D’une taille de 70 centimètres environ, la statue de Christine Jongen représente un roi de France debout, davantage en habits de cour qu’en guerrier.

 Sources 

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
http://www.badeaux.be/Balisages/Bal5/Site15/Site15.html
http://christine.jongen.pagesperso-orange.fr/GrilleJongen.htm (sv. juillet 2015)

 

Statue Louis XIV (Tournai)


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

place de Nédonchel
7500 Tournai

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Statue Lambert LOMBARD

Statue à la mémoire de Lambert Lombard, réalisée par Alphonse de Tombay, c. 15 octobre 1880.




Au milieu du XIXe siècle, afin de doter l’institution provinciale de Liège de bâtiments dignes de ce niveau de pouvoir, d’importants travaux sont entrepris autour de l’ancien palais des princes-évêques. Propriétaire des lieux (1844), l’État belge retient le projet du jeune architecte Jean-Charles Delsaux (1850) et lui confie la mission de réaliser la toute nouvelle aile, en style néo-gothique, sur le côté occidental du Palais. Face à la place Notger, Delsaux (1821-1893) achève l’essentiel du chantier en 1853, mais des raisons financières l’empêchent de réaliser la décoration historiée qu’il a prévue pour la façade du nouveau palais provincial. Vingt-cinq ans plus tard, le gouverneur Jean-Charles de Luesemans prend l’avis d’une commission pour déterminer les sujets et les personnes les plus dignes d’illustrer le passé de « la Nation liégeoise ». Placés sous la responsabilité de l’architecte Lambert Noppius (1827-1889), une douzaine de sculpteurs vont travailler d’arrache-pied, de 1877 à 1884, pour réaliser 42 statues et 79 bas-reliefs. Dès la mi-octobre 1880, 27 des 42 statues sont achevées, validées par la Commission et mises à leur emplacement respectif. Celle de Lambert Lombart figure parmi les premières.
Artiste majeur, Lambert Lombard (1505 ou 1506-1566) se devait de trouver place parmi les personnalités illustres. En pleine Renaissance italienne, cet artiste de la principauté de Liège fait le voyage en Italie, avec mission de son prince-évêque de ramener dans le nord un maximum des joyaux du sud (1537). Peintre et architecte lui-même, Lambert Lombard découvre ainsi les grands maîtres et acquiert à la fois des objets et des connaissances. À son retour à Liège, il fonde l’une des toutes premières académies d’art de l’Europe du Nord et participe aux ambitieux chantiers de reconstruction de la ville de Liège en introduisant des éléments de style Renaissance. 
La statue de Lombard se trouve sur la façade du marteau de droite du Palais provincial, sur la partie supérieure de la colonne la plus à droite ; Chapeaville et Borset sont ses voisins immédiats. Avec sa palette de couleurs posée sur le bras gauche, Lombard est aisément reconnaissable ; sa longue cape est par contre peu visible. Même si la statue pourrait être l’œuvre d’Alexandre de Tombay (1815-1881) comme l’indiquent certaines sources, il est plus vraisemblable de suivre celles qui l’attribuent à son fils, Alphonse de Tombay (1843-1918). En plus de son apprentissage dans l’atelier paternel, de Tombay fréquente l’Académie de Liège où il bénéficie notamment des conseils de Prosper Drion. Ami de Léon Mignon, il bénéficie comme lui d’une bourse de la Fondation Darchis et séjourne plusieurs mois à Rome (1874-1878). De retour à Liège, il répond à plusieurs commandes officielles dont un buste de Charles Rogier (1880) à Bruxelles qui aura beaucoup de succès. C’est aussi à ce moment qu’il participe au chantier de décoration du palais provincial de Liège auquel il livre six statues et trois bas-reliefs évoquant des scènes historiques (L'exécution de Guillaume de la Marck, La mort de Louis de Bourbon, L'octroi de la Paix de Fexhe). Exposant ses propres œuvres tout en répondant à de nombreuses commandes officielles à Bruxelles, il devient professeur à l’Académie de Saint-Gilles, avant d’en assurer la direction (1902).



Julie GODINAS, Le palais de Liège, Namur, Institut du Patrimoine wallon, 2008, p. 100
http://www.chokier.com/FILES/PALAIS/PalaisDeLiege-Masy.html
Jacques VAN LENNEP, La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 350-351
Lambert Lombard et son temps, catalogue d’exposition, Liège, Musée de l’Art wallon, 30 septembre - 31 octobre 1966
Godelieve DENHAENE, Lambert Lombard, Renaissance et humanisme à Liège, Fonds Mercator, Anvers, 1991
Godelieve DENHAENE (dir.), Lambert Lombard. Peintre de la Renaissance. Liège 1505/06-1566. Essais interdisciplinaires et catalogue de l’exposition, Bruxelles, IRPA, collection Scientia Artis, 2006
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 457-458
Serge ALEXANDRE, Musée en plein air du Sart Tilman, Art&Fact asbl, Parcours d’art public. Ville de Liège, Liège, échevinat de l’Environnement et Musée en plein air du Sart Tilman, 1996
La Meuse, 2 octobre 1880



 

Statue Lambert Lombard


 

© Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Statue Lambert Lombard

façade du Palais provincial, face à la place Notger – 4000 Liège

carte

Paul Delforge

 Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Monument à la mémoire de Félix LIEDEL (et aux aviateurs luxembourgeois)

À l’intersection de la rue Godefroid Kurth et de l’avenue de Longwy, un monument rappelle le souvenir de Félix-Louis Liedel (1888-1914) tout en élargissant l’hommage à l’ensemble des aviateurs du Luxembourg tombés en service. 

En plus d’une couronne stylisée, mentionnant en son centre « A F.L. Liedel », deux inscriptions figurent sur deux des côtés du socle du monument indiquant :

« A Félix-Louis Liedel
Lieutenant au 10e de Ligne
détaché à l'aviation
tombé à Martelange
décédé à Arlon le 26 juin 1914 »
 

Monument Félix Liedel

« Aux aviateurs militaires
originaires du Luxembourg
tombés en service commandé ».

Réalisé en pierre de France, le monument s’étend vers le ciel en forme de parallélépipède rectangle allongé se terminant, au sommet, par deux ailes d’avion déployées, séparées, au milieu, par une roue. L’ensemble a été réalisé par l’architecte arlonais Léon Lamy (1879-1970). Né dans le Hainaut et très tôt installé dans la région d’Arlon il accomplit toute sa longue carrière, Léon Lamy est l’auteur des plans de plusieurs bâtiments religieux (églises, chapelles, etc.), de nombreuses maisons arlonaises et a dû, par la force des choses, contribuer grandement à la reconstruction ou à la rénovation des bâtiments rendues nécessaires à cause de la Grande Guerre et de la Seconde Guerre mondiale. Attaché au patrimoine du sud de la Wallonie, il figure parmi les fondateurs de l’asbl Institut archéologique luxembourgeois en 1928, qui donnera naissance au Musée d’Arlon. C’est à la même époque qu’il se voit confier la réalisation du monument Liedel.


Né à Anderlecht en 1888, Félix-Louis Liedel a 20 ans quand il est admis à l’Académie militaire. Sous-lieutenant d’infanterie (1911), il se tourne vers l’aviation militaire et décroche sa licence de pilote civil en 1913 et de pilote militaire l’année suivante. C’est au cours d’un vol d’entraînement qu’il s’écrase au sol avec un Farman HF-20 Jéro à hauteur de Martelange. Transporté à l’hôpital d’Arlon, il décède de ses blessures quelques heures plus tard (28 juin 1914). En hommage à ce jeune aviateur caserné à Arlon, une souscription est lancée par son régiment, le 10e de Ligne et la ville accepte que soit érigé le monument qui est inauguré en mai 1931. Il est l’occasion d’honorer également les autres aviateurs, originaires du Luxembourg, morts au combat. À l’époque, le monument trouve place au carrefour de la rue Godefroid Kurth et de la rue de Mersch. En 1956, il est démonté et reste quelques années dans la cour du service communal, derrière l’hôtel de ville. Il est transféré ensuite du côté du cimetière communal avant de retrouver sa place en 1985. Rénové et remonté, il est en effet inauguré une seconde fois en septembre 1985, au carrefour qui porte désormais son nom, soit à l'intersection de la rue Godefroid Kurth et de l'avenue de Longwy.
 

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
http://www.aviationheritage.eu/nl/content/monument-ltn-liedel
http://www.bel-memorial.org/cities/luxembourg/arlon/arlon_mon_felix_liedel.htm (sv. février 2014)

Au croisement de la rue Godefroid Kurth et de l’avenue de Longwy
6700 Arlon

carte

Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Monument Marie-Anne LIBERT

Afin de marquer le centième anniversaire de la disparition de la botaniste Marie-Anne Libert (1782-1865), le Cercle naturaliste de Malmedy organise toute une série d’activités entre janvier et juin 1965. Après une messe de Requiem et la pose d’une plaque commémorative sur sa maison natale (17 janvier), une exposition (5-19 avril), une soirée littéraire (26 mai) et une nouvelle exposition (5 juin), le Cercle naturaliste Marie-Anne Libert de la Région de Malmedy inaugure, le 6 juin, un monument en présence des édiles locaux et d’autorités académiques comme le professeur Marcel Florkin. Le lieu choisi est le parc des Tanneries récemment aménagé par les autorités communales. Le mémorial est dans un cadre arboré, avec un important parterre de fleurs sur l’avant. Après cette manifestation, le Cercle éditera encore un livre collectif retraçant le parcours de la botaniste.

Monument Marie-Anne-Libert

Née en 1782 dans un village faisant encore partie de la principauté abbatiale de Stavelot-Malmedy, Marie-Anne Libert ne prend pas aucune part active dans les révolutions politiques qui marquent les premières années de son existence. Dans les années qui précèdent son décès – le 13 janvier 1865, Malmedy était une localité prussienne – elle s’intéressera au passé de la principauté et écrira quelques articles d’histoire et d’archéologie ; mais là n’est pas l’essentiel des activités de celle qui s’exprime en français et étudie aussi les langues anciennes. Passionnée de botanique comme son mari, le médecin verviétois Simon Lejeune (1777-1838), elle le seconde dans une mission que le préfet du département de l’Ourthe lui a confiée : dresser le tableau méthodique du règne végétal de la circonscription. On retrouve ainsi la contribution de la jeune femme dans les différents ouvrages que publie Simon Lejeune. 

Auteur de la collection de Plantae Cryptogamicae quas in Arduenna collegit MA Libert, quatre fascicules parus dans les années 1830, elle donne ensuite une description détaillée du champignon responsable de la maladie de la pomme de terre. Elle est en effet l’une des premières à identifier la responsabilité du mildiou, dans un mémoire publié en 1845 ; en 1876, le mycologue allemand Anton de Bary en fera la démonstration. D’autres avancées sont encore à mettre à l’actif de la botaniste qui inspire le nom du Cercle naturaliste de la région de Malmedy créé en 1951.

Ce cercle confie à Jacques de Biolley (Bruxelles 1911 – Uccle 1990) le soin de réaliser le monument. Créateur de monnaies, dessinateur, le sculpteur est un autodidacte qui signe ses principaux bas-reliefs dans la région de Stavelot et Malmedy. Lointain descendant des industriels verviétois faisant commerce de la laine depuis le début du XVIIIe siècle, arrière-petit-fils du vicomte Raymond de Biolley (1789-1846), le sculpteur Jacques de Biolley est surtout connu pour son buste du violoniste Henri Koch (Liège, 1972). À Malmedy, il réalise surtout le médaillon carré, en bronze, où il représente le profil gauche de la botaniste. Daté de 1964, il est incrusté sur une imposante pierre sur laquelle trouve aussi place la dédicace :

MARIE-ANNE LIBERT
BOTANISTE
1782-1865

L’idée d’élever un monument à Marie-Anne Libert avait déjà été émise en 1913. Conseillers communaux, Alfred Brindels et Henri Bragard soutiennent en effet le projet d’élever un monument à Saint-Remacle auquel seraient associées des personnalités wallonnes marquantes : l’industriel papetier Jules Steinbach, l’historien Augustin-François Villers, le philanthrope Jean-Hubert Cavens et la botaniste Marie-Anne Libert sont explicitement cités. L’arrière-pensée politique d’un tel projet défendu notamment par Henri Bragard (du Cercle wallon de Malmedy) n’échappe pas au pouvoir de tutelle allemand : le landrat von Korff confisque l’idée du monument et le détourne en décidant de le dédier au prince François d’Arenberg (député de Malmedy au parlement prussien puis au Reichstag, entre 1882 et 1907), récemment décédé. Henri Bragard mène alors bataille – avec succès – pour faire échouer ce projet prussien que les années suivantes feront tomber dans l’oubli. 
 

 

La Vie wallonne, IV, 1964, n°308, p. 263-264
La Vie wallonne, III, 1965, n°311, p. 203-206
André LAWALRÉE, J. LAMBINON, F. DEMARET, Marie-Anne Libert (1782-1865). Biographie, généalogie, bibliographie, (préface de R. BOUILLENNE), Liège, 1965
Catherine JACQUES, dans Dictionnaire des femmes belges, Bruxelles, Racine, 2006, p. 375-376
François CRÉPIN, dans Biographie nationale, t. 11, col. 724-727
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 302
http://gw.geneanet.org/bengos?lang=fr;pz=benoit+philippe+paul+marie+ghislain;nz=gosuin;ocz=0;p=jacques+antoine+francois;n=de+biolley (s.v. mai 2014

parc des Tanneries
4960 Malmedy

carte

Paul Delforge

 Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Monument Paul M-G LEVY

Monument Paul M-G. Lévy, réalisé à l’initiative des autorités de Gembloux et de Wallonie, avec le sculpteur Jean-Marie Mathot, 25 novembre 2005.

Situé à hauteur d’un rond-point au nord-ouest de Gembloux, à l’intersection entre le début de la chaussée de Namur et celle de Charleroi, un mémorial rend hommage à Paul M-G. Lévy (Ixelles 1910 – Sainte-Ode 2002), résistant, reporter de guerre et militant européen. Déjà nommé citoyen d’honneur de la ville de Gembloux où il s’était établi au début des années 1970, Paul M-G. Lévy inscrit désormais son nom dans l’espace public de Wallonie tant par le rond-point d’entrée de Gembloux que par le mémorial qui lui est consacré.

Reporter radio, pionnier de l’INR, Paul M-G. Lévy s’était imposé comme une des voix les plus populaires des auditeurs francophones belges dans les années 1930. Son refus de devenir la voix des Allemands, au moment de l’invasion de mai 1940, lui valut une incarcération à Saint-Gilles, puis à Breendonk : annoncé pour mort par la radio de Londres qui connaît les tortures qu’il subit, Lévy bénéficie d’un important mouvement de l’opinion publique qui contraint la Gestapo à le libérer. Après avoir jeté les bases du réseau Samoyède, il parvient à gagner l’Angleterre (printemps 1942). Là, aux côtés du ministre Antoine Delfosse, en charge de l’Information, il prépare l’après-guerre, avant de participer à la Libération de la Belgique : il parvient à rétablir les ondes de l’INR dès les premiers jours de septembre 1944. Grand reporter et correspondant de guerre, Paul Lévy est présent lors de la libération du camp de Dachau et est le premier journaliste occidental à entrer dans Berlin libérée. Élu député dans l’arrondissement de Nivelles, il est le seul représentant de l’Union démocratique belge (1946-1947), cette expérience travailliste qui resta sans lendemain. Déçu par l’immobilisme qui règne en Belgique, il s’éloigne de la politique et est engagé par le Conseil de l’Europe (fin des années 1940). Directeur de l’Information, il contribue à l’évolution de l’idée et du projet européens. Professeur associé de l’Université de Strasbourg, il deviendra également professeur à l’Université catholique de Louvain ; après le Walen Buiten, il s’installe à Gembloux : la maison où il va vivre trente ans est à quelques mètres du rond-point aménagé. Président du Mémorial national du Fort de Breendonk, il entretiendra la mémoire de la tragique période de guerre et sera un actif porteur du message de paix.
 

Monument Paul M-G. Lévy à hauteur du rond-point avec monument du sculpteur Jean-Marie Mathot (montage)

Un tel parcours de vie nécessitait un hommage durable de la part des autorités publiques. En inaugurant une stèle au croisement d’un important axe routier, celui qui relie les trois capitales européennes (Bruxelles, Luxembourg, Strasbourg), les autorités locales de Gembloux se sont associées aux autorités régionales wallonnes pour poser un geste symbolique de forte portée, renforcé par le choix d’installer au centre du rond-point une œuvre monumentale de Jean-Marie Mathot. L’occasion était fournie par la transformation de l’ancien carrefour de la Croisée. En place depuis 2004 déjà, l’œuvre en acier Corten de Mathot est une clé stylisée qui souligne l’importance du lieu comme porte d’entrée de la ville et qui renvoie aux armoiries de Gembloux. En présence du ministre wallon des Transports (André Antoine) et du bourgmestre de Gembloux (Gérard Bouffioux), le rond-point Lévy est inauguré le 25 novembre 2005 en présence de la famille de Paul M-G. Lévy.

Le choix de Jean-Marie Mathot, namurois de naissance (1948) et habitant de Gembloux s’est imposé de lui-même. Après sa formation à l’Académie de Bruxelles à la fin des années 1960, il y enseigne la sculpture et le modelage (1978) et est aussi professeur à l’École des Arts de Braine-l’Alleud. Issu d’une famille de marbriers, il opte d’abord pour la peinture et le dessin avant de se tourner résolument vers la sculpture. Il a commencé par la création de figures en taille directe, avant de mener diverses expériences qui rompent ponctuellement avec sa production habituelle. Délaissant les représentations figuratives, il s’oriente vers « l’exploration des potentialités expressives de la matière ». Tour à tour, il intègre des pierres peintes dans ses compositions, il s’attaque à des « déchets » de carrière, s’essaye au travail du béton et de l’acier. Deux de ses œuvres ornent un rond-point à La Louvière et à Gembloux. Artiste expérimental, il a reçu plusieurs récompenses (le Prix Donnay, le Prix Georges Van Zevenbergen, le Prix de la Gravure au Festival de la Jeunesse à Auderghem, le Premier Prix de la présélection au Concours International Musée 2000 à Luxembourg, le Prix Eugène Delattre de sculpture et le Prix Constant Montald de l'Académie Royale de Belgique, il est aussi  lauréat de la Fondation belge de la Vocation et de la Bourse triennale Maurice et Henri Evenepoel).

À côté de l’imposante sculpture en acier de J-M. Mathot (8,8 m de dimensions extérieures, 5,5 de dimensions intérieures, sur 1 mètre de profondeur), la stèle portant la plaque commémorative se fait humble et discrète, à l’image de Paul Lévy. Faite en briques et en pierre, percée comme une sorte de fenêtre, la stèle est surmontée d’une pierre bleue identifiant le lieu tout en rendant hommage au citoyen d’honneur de Gembloux :

ROND-POINT
BARON
PAUL M.G. LEVY
 

 

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de presse (La Libre, Vers l’Avenir, fin novembre 2005)
Discours de Gérard Bouffioulx, http://www.rond-point-paul-levy.blogspot.be/2005/11/1-7-discours-grard-bouffioux.html 
http://www.rond-point-paul-levy.blogspot.be/ 
http://www.rond-point-paul-levy.blogspot.be/2005/11/1-7-discours-grard-bouffioux.html (s.v. juin 2014)
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 147
http://mathot-sculpture.be/ 
http://acabat.blogspot.be/2010/03/vitaminesarts-20-0309.html 
http://commission-des-arts.wallonie.be/opencms/opencms/fr/integrations/createurs/mathot.html (s.v. mai 2014)

Rond-point Paul M-G. Lévy, entre la chaussée de Namur et la chaussée de Charleroi
5030 Gembloux

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Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Plaque Étienne LENOIR

Plaque sur la maison natale d’Étienne Lenoir, réalisée par Ernest Bernardy, 1989.

Le premier hommage rendu à Étienne Lenoir, le père du moteur à explosion, s’est déroulé conjointement à Paris et dans son village natal de Mussy-la-Ville. En 1912, une plaque commémorative avec un médaillon de bronze était inaugurée au Conservatoire de Paris, tandis qu’une plaque était apposée sur sa maison natale. Lors de l’attaque allemande d’août 1914, la région des frontières luxembourgeoises n’est guère épargnée et, parmi les nombreuses destructions qui sont alors enregistrées, figure la maison natale de Lenoir. Une fois la paix revenue et la période de reconstruction quasiment achevée, les autorités locales décident, conjointement avec celles d’Arlon, de rendre un nouvel hommage à l’enfant du pays. 

En même temps que le monument réalisé par Paul Dubois est officiellement inauguré à Arlon, une autre cérémonie est l’occasion d’apposer un nouveau mémorial sur la façade du n°27 de la rue de Late (août 1929). Peut-être le temps a-t-il fait son œuvre et fait disparaître ledit mémorial car, en 1961, Wallonie libre déplore qu’aucune initiative d’envergure n’ait été prise pour honorer Lenoir dans son village natal. En 1985, les autorités mussipolitaines confie à Fernand Tomasi le soin de réaliser l’imposant monument installé près de l’église. Quatre ans plus tard, le céramiste Ernest Bernardy rend, à son tour, hommage à Lenoir en réalisant l’œuvre placée au-dessus de la porte d’entrée du n°27 de la rue de Late : une mosaïque composée de 48 carrés (8 x 6), ornée de feuilles de chêne et, au centre, comprenant une automobile ancienne, ainsi que la mention :
ici
    naquit
        Étienne LENOIR

Génial inventeur (notamment de la bougie d’allumage), Étienne Lenoir bénéficie d’une place de choix dans l’histoire des sciences et des techniques. En 1860, il déposait un brevet révolutionnaire pour « un moteur à air dilaté par la combustion des gaz ». Il ne s’agissait là que l’un des nombreux brevets de ce fils de maraîcher parti à Paris pour gagner sa vie et réaliser ses rêves. Être le premier à rouler en voiture dans Paris (en 1863) était certainement l’un d’eux.

Comme de nombreux jeunes Wallons de sa génération, Ernest Bernardy (Athus 1923 – Virton 2000)  voit ses études bouleversées par l’éclatement de la Seconde Guerre mondiale. Entré à l’École normale de Virton (1937), il obtient le diplôme d’instituteur en 1943, mais il est attiré par la peinture depuis son plus jeune âge. Encouragé par Jules Vinet et Jean Lejour, c’est devant le Jury central qu’il décroche un diplôme lui permettant d’être désigné comme professeur de dessin, tant dans le secondaire qu’à l’École normale. À l’Athénée de Virton, il accomplira toute sa carrière (1947-1986). Avant cela, forcé au travail obligatoire (1943-1944), il passe de longues journées en usine, puis devient surveillant d’internat, ensuite inspecteur adjoint au ravitaillement pendant les premiers mois de la Libération et, durant son service militaire, surveillant des prisonniers de guerre allemands. Parallèlement, cet autodidacte installé à Saint-Mard se fait peintre d’abord, avant de se tourner résolument vers la poterie et la céramique, ainsi que les mosaïques, sans jamais abandonner le pinceau. 

Attiré par les impressionnistes puis par l’œuvre de Van Gogh, Ernest Bernardy représente de nombreux paysages sidérurgiques inspirés par sa ville natale ; il se laisse aussi attirer par d’autres lumières du sud, de la France comme de la Wallonie. S’il possède un chalet en Provence (Puyméras), il vit régulièrement en Gaume (Saint-Mard), où il est le fondateur d’un club de tennis qu’il préside pendant un quart de siècle. Auteur d’illustrations pour quelques livres, Bernardy discipline son art ; son univers se fait plus rigoureux, raisonné et construit. 

Créateur de dizaines de mosaïques murales, il façonne inconsciemment une sorte de musée à ciel ouvert (à Virton, deux athlètes sur une maison privée, pignon de l’ancienne Auberge de Jeunesse, carte historiée de la Gaume, figures du folklore local  et les vieux métiers face au kiosque ; à Saint-Mard, une œuvre de 60 m² sur la façade du complexe sportif, une fresque sur une boulangerie ; à Arlon, une fresque censurée à la FGBT, etc.). L’artiste ne pouvait manquer de raviver, à Mussy, le souvenir d’Étienne Lenoir, comme il l’avait fait, en 1966 déjà, dans un autre style, pour rendre à Virton ses géants Djean et Djeanne d’Mâdy. En 1999, il avait été fait membre de l’Académie luxembourgeoise. 

Sources 

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Mémoires de Wallonie, Les rues de Louvain-la-Neuve racontent…, Luc COURTOIS (dir.), Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 2011, p. 261-262
Jean-Pierre MONHONVAL, Étienne Lenoir. Un moteur en héritage, Virton, Michel frères, 1985
Jean PELSENEER, dans Biographie nationale, t. XXXIII, col. 355-364
Jean CULOT, Les îles où je demeure. Essai sur le peintre et céramiste Ernest Bernardy, Virton, 2000
Virton – Saint-M’Art, Virton, MTG, 2004
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 87

Plaque Étienne Lenoir (Mussy-la-Ville, Musson)

Rue de Late 27
6750 Mussy-la-Ville (Musson)

carte

Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Monument Étienne LENOIR

Monument Étienne Lenoir,  réalisé par Paul Du Bois, 18 août 1929 puis 1961

Bien avant la commune de Mussy (1985), la ville d’Arlon a honoré un illustre inventeur originaire de la région par un monument d’envergure. C’est en effet en 1929 que les autorités locales inaugurent le mémorial Étienne Lenoir dont la réalisation a été assurée par le sculpteur Paul Dubois.
Né à Mussy-la-Ville en 1822, Lenoir est un inventeur « multirécidiviste ». Plus de cent brevets sont enregistrés à son nom. Mais c’est son brevet déposé en 1860 « Pour un moteur à air dilaté par la combustion du gaz de l’éclairage enflammé par l’électricité » qui constitue sa contribution majeure à l’évolution des sciences et des techniques. Au sein de la Société des Moteurs Lenoir-Gautier et Cie qu’il a créée à Paris, où il réside depuis 1838, il parvient à mettre au point le premier moteur à combustion interne. « Il ne manquait que la compression à ce premier moteur à gaz industriel pour réaliser le cycle universellement adopté par la suite ». 

En septembre 1863, la première automobile Lenoir équipée d’un moteur à gaz de 1,5 CV effectue 18 kilomètres en 3 heures. Les moteurs Lenoir ne cesseront d’être construits et améliorés jusqu’à la fin du siècle, sans assurer la prospérité de son inventeur qui continue à déposer des brevets dans des domaines très divers. Néanmoins, plusieurs Prix importants couronnent ses découvertes dont l’importance ne fut réellement appréciée qu’après son décès, en 1900, à Paris. La ville lumière est d’ailleurs la première à immortaliser Étienne Lenoir en lui dédiant une plaque commémorative et un médaillon de bronze au Conservatoire de Paris, en même temps qu’une plaque est apposée sur sa maison natale, à Mussy (1912). Suite à sa destruction par les Allemands en août 1914, il fut décidé d’y ériger un nouveau mémorial. Dans le même temps, Arlon inaugure, le 18 août 1929, un monument plus ambitieux, dans le parc Léopold Ier.

Créé vers 1845 sur l’emplacement de l’ancienne muraille de la ville, ce parc communal accueillait aussi un kiosque à musique et la statue du roi Albert Ier en tenue de militaire lorsqu’en 1961, il est l’objet d’une profonde transformation. Outre la destruction du kiosque et le déplacement du roi Albert devant l’Église St-Martin, il perd le monument dédié à Étienne Lenoir ; au lieu de bénéficier d’un espace fortement dégagé tout autour de lui, celui-ci est relégué hors du Parc, sur l’esplanade située en face de l’Institut Notre Dame d’Arlon (INDA), en contre-bas de la rue Lenoir, entre la rue Joseph Netzer et la rue de l’Esplanade. 

Placé néanmoins dans un cadre arboré et bien entretenu, le mémorial Lenoir est nettement moins visible, notamment parce qu’il est privé de la totalité de son socle. À l’origine, en effet, Paul Dubois avait conçu un ensemble sculptural relativement complexe : devant une haute et large colonne en forme d’obélisque à trois niveaux, dont le plus haut comporte un écusson où se trouve représenté le profil gauche du célèbre inventeur, le sculpteur a ajouté une femme qui se tient debout, et qui donne l’impression d’enlever le voile en tissu qui cachait jusqu’alors le portrait de Lenoir. La position de la dame est telle que le portrait apparaît entre ses bras tendus. 

Tout cet ensemble est encore visible à Arlon ; il manque le socle rectangulaire initial dont la hauteur représentait le quart de la taille totale du monument. De plus, comme cet ensemble était placé sur une sorte de butte entourée d’une grille en fer forgé, le mémorial Lenoir tel qu’il était présenté en 1929 surmontait nettement la taille des « spectateurs ». Cet effet de « domination » n’existe plus aujourd’hui et le panneau original qui reprenait la dédicace a disparu et laissé la place à une plaque (don du syndicat d’initiative d’Arlon) posée au pied du monument actuel. Le contenu est similaire et sans surprise :
A ÉTIENNE LENOIR
1822 – 1900
INVENTEUR DU MOTEUR A GAZ.

Concernant le sculpteur qui signe le monument Lenoir, tous les textes évoquent systématiquement « le sculpteur français Paul Dubois ». On ne peut que s’étonner de cet unanimisme à l’égard d’un artiste, certes célèbre, mais décédé depuis 1905… Ne s’agirait-il pas plutôt que sculpteur wallon Paul Du Bois, né Dubois et qui avait très tôt changé la graphie son nom (Paul Du Bois) afin d’éviter d’être confondu avec… son célèbre homonyme français ? Si l’on observe le style du monument, on est tenté de reconnaître la griffe de l’artiste wallon qui recourt volontiers à une allégorie féminine pour mettre davantage en évidence son sujet. C’est particulièrement évident dans le cas arlonais. 

Sous réserve d’éléments contraires, il semble par conséquent que, dans une production déjà abondante, il faille ajouter le monument Lenoir d’Arlon à l’œuvre de celui qui fut formé à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles (1877-1884), qui fut l’élève de Louis François Lefèbvre, de Jean-Joseph Jaquet et d’Eugène Simonis, avant de profiter des conseils de Charles Van der Stappen. 

Ouvert à l’avant-garde sans renier son attachement à la Renaissance, membre-fondateur du groupe bruxellois d’avant-garde le Cercle des XX, puis de la Libre Esthétique, il excelle dans les portraits quand lui parviennent les premières commandes officielles de la ville de Bruxelles. Sans abandonner des œuvres de son inspiration qui sont remarquées et primées lors de Salons et d’Expositions à l’étranger, il réalise le monument Félix de Mérode (Bruxelles, 1898) qui symbolise le début de son succès. En 1900, il est nommé professeur à l’Académie de Mons (1900-1929) et, deux plus tard, il est chargé du cours de sculpture ornementale (1902-1905), puis de sculpture d’après l’antique (1905-1910) à l’Académie de Bruxelles où il reste en fonction jusqu’en 1929. En 1910, il succède à Charles Van der Stappen à l’École des Arts décoratifs. Vice-président du jury d’admission des œuvres pour le Salon des œuvres modernes de l’Exposition internationale de Charleroi (1911), Du Bois avait signé d’autres monuments commémoratifs avant celui d’Arlon : ainsi Alfred Defuisseaux (Frameries, 1905), Antoine Clesse (Mons, 1908). En 1931, il signe tour à tour le monument Frère-Orban (Liège) et Viehard (Tournai). On lui doit aussi des bijoux, des médailles (dont celle de l’Exposition universelle de Liège en 1905). 

Sources 

Jean-Pierre MONHONVAL, Étienne Lenoir. Un moteur en héritage, Virton, Michel frères, 1985
Jean PELSENEER, dans Biographie nationale, t. XXXIII, col. 355-364
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 517
Jean-François POTELLE (dir.), Les Wallons à l’étranger, hier et aujourd’hui, Charleroi, Institut Destrée, 2000, p. 191
Paul Du Bois 1859-1938, édition du Musée Horta, Bruxelles, 1996
Anne MASSAUX, Entre tradition et modernité, l’exemple d’un sculpteur belge : Paul Du Bois (1859-1938), dans Revue des archéologues et historiens d’art de Louvain, Louvain-la-Neuve, 1992, t. XXV, p. 107-116
Anne MASSAUX, dans Nouvelle Biographie nationale, t. 4, p. 142-145

Monument Étienne Lenoir

Place Léopold Ier puis esplanade de la rue Étienne Lenoir
6700 Arlon

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Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Mémorial Étienne LENOIR

Mémorial Étienne Lenoir, réalisé par Fernand Tomasi, septembre 1985.

À l’arrière de l’église de Mussy, un solide bloc pesant 10 tonnes en grès d’Esch-sur-Alzette symbolise l’évolution et les progrès de l’automobile, de l’aviation et de la navigation. Inauguré en 1985, il prend place dans le village natal d’Étienne Lenoir (1822-1900), le célèbre inventeur du moteur à explosion. Réalisé par le sculpteur Fernand Tomasi qui a choisi lui-même la pierre dans une carrière de Tétange, au grand-duché de Luxembourg, le mémorial comporte sur son flanc droit, gravées dans la pierre, une dizaine de silhouettes d’automobiles qui reflètent l’évolution de ce moyen de locomotion. Sur la partie centrale, apparaît un moteur stylisé, avec ses bielles et ses pistons ; en bas à droite, un cercle symbolisant sans doute une roue laisse apparaître en son milieu une série de mots gravés et inscrits de manière artistique : « Étienne Lenoir / Inventeur/ 1860 / Mussy »
Le portrait de l’inventeur est, quant à lui, sculpté sur la partie supérieure.

Depuis le début du XXe siècle, diverses initiatives avaient été prises, à Paris comme à Arlon, pour commémorer l’invention d’Étienne Lenoir ; mais à Mussy-la-Ville, aucune initiative ne semblait vouloir naître, ainsi que le déplorait le mouvement Wallonie libre en 1961. Finalement, les autorités locales décidèrent d’un mémorial qui fut érigé à l’arrière de l’église. Les Mussipolitains rendaient ainsi officiellement hommage au plus célèbre des enfants du pays. 

Depuis lors, à diverses reprises, des « concentrations » se déroulent au pied du mémorial, comme celle organisée par la province de Luxembourg, en mai 2010, à l’occasion des 150 ans du dépôt du brevet n°43624 pour « un moteur à air dilaté par la combustion des gaz ». Il ne s’agissait là que l’un des nombreux brevets de ce fils de maraîcher parti à Paris pour gagner sa vie et réaliser ses rêves. Génial inventeur (notamment de la bougie d’allumage), Lenoir entre progressivement dans l’histoire des sciences et des techniques et l’on accorde de plus en plus d’attention à l’importante invention qui fut la sienne. Un musée rappelle l’activité qui fut celle de celui qui fut le premier à rouler en voiture dans Paris. C’était en 1863. 

Sources 

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Mémoires de Wallonie, Les rues de Louvain-la-Neuve racontent…, Luc COURTOIS (dir.), Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 2011, p. 261-262
Jean-Pierre MONHONVAL, Étienne Lenoir. Un moteur en héritage, Virton, Michel frères, 1985
Jean PELSENEER, dans Biographie nationale, t. XXXIII, col. 355-364
 

Mémorial Étienne Lenoir

Rue de Late
6750 Mussy-la-Ville (Musson)

carte

Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Mémorial Guillaume LEKEU

Mémorial Guillaume Lekeu, réalisé par Adolphe Wansart, 27 septembre 1936.


À l’initiative d’un comité local, un mémorial Guillaume Lekeu est inauguré à Verviers, le 27 septembre 1936. Aucune date anniversaire liée à Lekeu ne motive cet événement qui s’inscrit résolument dans le cadre des Fêtes de Wallonie. 

Depuis la décision prise par l’Assemblée wallonne en 1913, celles-ci s’organisent grâce au dévouement de cercles privés dans les derniers jours de septembre ; la présence à Verviers du ministre François Bovesse – dont chacun sait qu’il a relancé la dynamique des fêtes de Wallonie à Namur, au début des années 1920 – rehausse l’événement. Au nom du comité verviétois, son vice-président, M. Herla, remet le mémorial entre les mains des autorités verviétoises qui s’engagent à en assurer la préservation. Au nom des Artistes wallons de Bruxelles, René Lyr vante les qualités du jubilaire : « Sans Lekeu, il manquerait quelque chose à la musique (…). Il a apporté dans l’art musical une note originale et nouvelle, un sentiment, une couleur d’âme unique, que l’on retrouve à chaque page, à tel point que l’on reconnaît immédiatement sa phrase musicale (…) » qu’il tenait de son sol natal, de son pays wallon.


Intégrant sa culture wallonne à la formation « franckiste » qu’il reçoit à Paris et aux encouragements d’Ysaye qui l’a repéré, Guillaume Lekeu s’est très vite révélé un musicien, mais surtout un compositeur d’exception. Alors qu’il s’apprêtait à inscrire son nom dans l’histoire de la musique en Wallonie au XIXe siècle, son talent a été prématurément écrasé par le typhus. À 24 ans, le Verviétois (1870-1894) mourait en effet à Angers, où les affaires retenaient constamment sa famille, laissant de trop rares compositions. « Le monument s’élève, l’œuvre demeure, l’art est vivant », conclut François Bovesse lors de son discours qui salue également la réalisation d’Adolphe Wansart (1873-1854).

Mémorial Guillaume Lekeu

Portraitiste de talent, ce Verviétois est un artiste qui s’est adonné dans sa carrière autant à la sculpture qu’à la peinture. Formé au dessin aux Académies de Verviers et de Liège, avant de prendre des cours de peinture à l’Académie de Bruxelles, marié à la peintre Lucie De Smet, il s’est installé dans la capitale belge (Uccle), où il se signale d’abord par ses tableaux aux lignes simples et aux couleurs vives. 

Arrivé à la sculpture vers 1900, celui qui avait été l’un des élèves de Van der Stappen travaille autant le bois que la pierre ou le bronze. On le retrouve aussi médailleur. Laissant volontiers son imagination l’inspirer, l’artiste fréquente les Salons et s’y impose comme un « important représentant de l’école moderniste ». 

Sollicité sur des chantiers d’envergure internationale (expositions de Paris en 1925, de Bruxelles en 1935, de Paris en 1937 et de Liège en 1939), il répond aussi à des commandes privées ou officielles, réalisant aussi bien des bustes (Jean Tousseul, Pierre Paulus) que des œuvres plus monumentales, comme l’ensemble dédié à Jean Del Cour à Hamoir. Cet exemple montre que Wansart exécute volontiers des bas-reliefs. 

On retrouve sa signature sur l’un d’eux, à savoir sur le Pont des Arches de Liège (où il illustre, en 1948, la période bourguignonne/Moyen Âge) ou sur sa fresque du Grand Palais des Sports de Coronmeuse (lors de l’Exposition de l’Eau de 1939). C’est précédé de sa réputation acquise sur le monument Del Cour que Wansart est appelé à réaliser le mémorial Guillaume Lekeu dans sa ville natale. Ici, il ne représente pas le musicien lui-même, mais sa muse, debout, la tête inclinée sur sa lyre. Il sculpte l’ensemble dans la pierre blanche et la pose sur un premier socle, lui-même accueilli sur un piédestal presque cubique (en ciment ?) où est gravée la dédicace sur la face avant :
A GUILLAUME


LEKEU
1870-1894
 




 

La Vie wallonne, novembre 1927, LXXXVII, p. 70-75
La Vie wallonne, octobre 1936, CXCIV, p. 66-68
Le Thyrse, 1er novembre 1936, n°11, p. 348
Luc VERDEBOUT, Correspondance, Guillaume Lekeu, introduction, chronologie et catalogue des œuvres, Liège, Mardaga, 1993
J. ROBIJNS, dans Biographie nationale, t. 37, col. 522-526
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 775
http://balat.kikirpa.be/photo.php?path=M150784&objnr=10105107 (s.v. mai 2014)
Isabelle VERHOEVEN, dans Musée en plein air du Sart Tilman, Art&Fact asbl, Parcours d’art public. Ville de Liège, Liège, échevinat de l’Environnement et Musée en plein air du Sart Tilman, 1996

Square reine Astrid (près du Grand Théâtre) 

4800 Verviers

carte

Paul Delforge