de Geer Louis

Socio-économique, Entreprise

Chênée (Liège) 17/11/1587, Amsterdam 19/06/1652

Comme son père dont il hérite aussi du prénom, Louis de Geer est marchand, banquier et calviniste à l’entame du XVIIe siècle, issu d’une famille liégeoise implantée dans les Provinces-Unies, à Dordrecht puis à Amsterdam. 

Formé en France, il s’intéresse, dès 1616, au marché suédois et aux besoins financiers du puissant roi Gustave-Adolphe. 

En relation avec d’autres Wallons établis en Suède depuis le début du XVIIe siècle, les frères de Besche, il saisit les opportunités que peut offrir la Suède pour ses affaires : achetant des concessions minières, vendant armes et munitions, se lançant dans le commerce du cuivre, obtenant le droit de fournir la marine et l’armée, il facilite les transactions commerciales par les services financiers qu’il peut offrir depuis Amsterdam.

Exportant main d’œuvre, machines et méthodes wallonnes, plus particulièrement liégeoises, pour exploiter les ressources du sol suédois, Louis de Geer finit par s’installer lui-même dans la région de Norköping (1627), où il perçoit d’emblée de nouvelles perspectives de développement. « (…) il réussit, écrit Robert Halleux, une audacieuse entreprise de délocalisation, en rapprochant les usines métallurgiques des gîtes métallifères, des forêts charbonnières et du prodigieux marché que constitue une armée en train de s’équiper pour l’avant-première guerre mondiale. S’il trace un plan industriel pour la Suède, il laisse à ses « facteurs » l’organisation des usines et la conduite des hauts-fourneaux ».

En quelques années, à la fois commerçant, banquier, munitionnaire, industriel et seigneur de Finspong, Louis de Geer contribue aussi à intégrer dans la société suédoise une importante colonie de plusieurs milliers de Wallons qui inspirent durablement le respect. Bien entré en Cour, fait sénateur de la Couronne suédoise, anobli en 1641, propriétaire foncier opulent, Louis de Geer peut être considéré, ainsi que l’écrit Paul Servais, « comme responsable d’une triple paternité : d’abord celle de l’industrie métallurgique suédoise, ensuite celle d’une nouvelle dynastie aristocratique suédoise, enfin celle d’une image wallonne » nourrie de multiples qualités. Le décollage économique de la Suède et son émergence comme puissance métallurgique du XVIIIe siècle sont grandement redevables à Louis de Geer et au savoir-faire des techniciens immigrés wallons. Les historiens scandinaves lui attribuent d’ailleurs le titre de « père de l’industrie suédoise ». 

Jouissant d’une fortune exceptionnelle, de Geer faisait commerce avec la marine anglaise de Cromwell quand il rendit l’âme à Amsterdam, à mi-chemin entre sa terre natale et sa terre d’accueil.

Sources

Robert HALLEUX et Paul SERVAIS, dans POTELLE Jean-François (dir.), Les Wallons à l’étranger, hier et aujourd’hui, Charleroi, Institut Destrée, 2000
Wallonie. Atouts et références d’une Région, 1995
Jean YERNAUX, La métallurgie liégeoise et son expansion au XVIIe siècle, Liège, 1939
Maurice FANON, Les Wallons de Suède… en Terre de Durbuy, dans Terre de Durbuy, n° 20, 1986 et n°39, 1991
Geneviève XHAYET, La famille de Geer et l’émigration wallonne en Suède, dans La Wallonie de Louis de Geer et la Wallonie d’aujourd’hui, catalogue d’exposition, Stockholm, 1999-2000
Luc COURTOIS et Jean PIROTTE (dir.), De fer et de feu, l’émigration wallonne vers la Suède, Fondation wallonne, Louvain, 2003
De fer et de feu. L’émigration wallonne vers la Suède. Histoire et mémoire (XVIIe-XXIe siècles), exposition au Parlement Wallon, Namur, 19-29 février 2008 (Publications de la Fondation Wallonne P.-M. et J.-F. Humblet. Série Études et documents, t. V), édité par L. Courtois et C. Sappia, Louvain-la-Neuve, 2008
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Histoire. Économies. Sociétés, t. I, p. 277