De Waha Léonie

Humanisme-Egalité, Militantisme wallon

Liège 31/03/1836, Liège 08/07/1926

Philanthrope, libérale, pionnière de l’enseignement des jeunes filles préparatoire à l’université, Léonie de Chestret a laissé son nom de mariée à un grand Lycée liégeois (devenu Athénée communal) qu’elle a contribué à créer, tout en s’engageant en faveur de la petite propriété ouvrière, de la laïcité, de l’émancipation de la femme et de l’autonomie de la Wallonie.

Orpheline à deux ans, éduquée par son père et formée par une série de gouvernantes qui lui donnent le goût de l’histoire et la connaissance de six langues, Léonie de Chestret évolue dans un monde d’opinion libérale, démocrate, tolérant et croyant qui fonde sa personnalité. Elle épouse le baron Victor de Waha de Baillonville, qui décède quatre ans plus tard, à l’âge de 31 ans. 

Veuve jeune, elle décide de se rendre utile à ses semblables : poursuivant l’œuvre de son mari, elle développe des bibliothèques à Chênée et à Esneux. Par ailleurs, soutenue par Julien d’Andrimont (parlementaire libéral), elle contribue à la création d’une Société liégeoise dont le but est de construire des maisons ouvrières suivant le système de Mulhouse (six groupes de quatre maisons adossées avec jardinet en façade) ; ces maisons sont louées avec faculté d’en devenir propriétaire en seize ans et facilitent ainsi l’accès à la petite propriété. Dès le milieu des années 1860, L. de Waha contribue aussi au développement, dans le quartier de Saint-Gilles, à Liège, de plusieurs écoles et jardins d’enfants.

Jusqu’au deuxième tiers du XIXe siècle, il n’existait, à Liège, aucun établissement scolaire formant les jeunes filles à l’Université, hormis les couvents ou les écoles catholiques. À la demande du bourgmestre Julien d’Andrimont encore, et sous la forme d’une société anonyme, Léonie de Waha achète un immeuble rue Hazinelle et y crée l’Institut supérieur de demoiselles (1868), subventionné par la province (1879) puis repris ensuite par la Ville de Liège (1887), et qui deviendra le Lycée de Waha. Placé sous la direction de Pauline Braquaval-l’Olivier, ancienne inspectrice des écoles primaires du Hainaut, « l’Institut supérieur de demoiselles » est donc destiné à favoriser l’accès des filles aux études supérieures ; de surcroît, il se caractérise par son pluralisme philosophique : l’enseignement de chaque culte est donné par un représentant de cette religion, avec faculté d’en être dispensé à la demande des parents. L’Institut est contesté par l’évêque de Liège qui refuse d’admettre la présence d’un prêtre catholique, d’un pasteur et peut-être d’un rabbin dans un même établissement. Lorsque l’Institut est inauguré, l’évêque de Liège, Théodore de Montpellier, excommunie tous ceux qui le fréquentent (direction, personnel enseignant, élèves et parents). Le successeur de l’évêque lèvera la sentence.

Pionnière de l’enseignement féminin, Léonie De Waha encourage aussi les "Djônes Auteûrs Walons", puis fonde et préside l’Union des Femmes de Wallonie dont le programme vise l’autonomie de la Wallonie et l’émancipation de la femme. Par le biais de diverses activités et de la publication de son bulletin, l’UFW se veut le stimulant d’une conscience politique chez les femmes de Wallonie. Féminine et féministe sans excès, sans outrance, en dehors de toute politique partisane et donc ouverte à toutes les femmes qui pensent, à toutes celles que préoccupent le souci de l’équité, de la solidarité, l’amour du sol natal, l’orgueil du peuple wallon énergique et vaillant : telle est, pour ses initiatrices liégeoises, la charte du mouvement.

Sources

DELFORGE Paul, Encyclopédie du Mouvement wallon, t. I, Charleroi, 2000 
LIBON Micheline, L’Union des Femmes de Wallonie (1912-1936). Première approche dans Femmes des années 80 sous la dir. de L. COURTOIS, F. ROSART et J. PIROTTE, Louvain-la-Neuve, 1989, p. 185-191
LOTHE Janine, Les débuts du Mouvement wallon, dans Wallonie, Le Pays et les Hommes, op. cit., p. 202 
LAMBOTTE Emma, Une grande wallonne, Léonie de Waha de Chestret, 1836-1926, Imprimerie la Meuse, 1927
VAN SANTBERGEN René, Léonie de Waha dans Biographie nationale, t. 39, fasc. 2, col. 825-836 
DE WaHA Léonie    D77    Léonie De Waha (s.d.) – Photo extraite de Lambotte E Une grande wallonne, Léonie de Waha de Chestret, 1836-1926, 1927, p. 46.