Dejardin Joseph

Politique

Grivegnée 21/03/1873, Beyne-Heusay 28/10/1932


Député, président de la Centrale nationale des Mineurs et président de la Fédération internationale des Mineurs, Joseph Dejardin est une figure marquante du mouvement ouvrier au tournant des XIXe et XXe siècle.
Septième d’une famille ouvrière de onze enfants, Joseph Dejardin a sa destinée toute tracée ; son père et sa mère travaillent à la mine ; comme ses frères et ses sœurs (dont Lucie, futur députée), il sera aussi mineur. À peine scolarisé, il veut cependant les conditions de vie qui leur sont imposées et s’engage résolument dans l’action syndicale et politique en train de se structurer avec difficultés ; les réticences à vaincre sont autant chez les ouvriers que du côté du pouvoir en place. En 1889, alors qu’il distribue le journal Le Populaire, Joseph Dejardin est arrêté et accusé de fomenter des troubles. Avec détermination, il œuvre à la structuration du mouvement ouvrier socialiste, tant par la création et l’animation de structures syndicales, politiques, coopératives que mutuellistes. 

S’appuyant sur la Charte de Quaregnon, il fait du suffrage universel l’objectif prioritaire, tout en menant des luttes pour l’amélioration des conditions de travail (salaire, temps de travail, sécurité). En 1904, il se présente au suffrage universel tempéré par le vote plural des hommes de l’arrondissement de Liège et est élu au conseil provincial de Liège. Il quitte cette assemblée en décembre 1909, pour remplacer à la Chambre le député P. Smeets décédé. Il sera par la suite régulièrement élu à la Chambre jusqu’en 1932. En octobre 1912, Joseph Dejardin figure parmi les membres-fondateurs de l’Assemblée wallonne créée à l’initiative de Jules Destrée quelques semaines après sa Lettre au roi sur la séparation de la Wallonie et de la Flandre. Il y représente l’arrondissement de Liège, mais ne développe pas d’action particulière au sein de ce Parlement wallon informel.

Conseiller communal élu à Beyne-Heusay en 1903, échevin à partir de janvier 1908, Dejardin fait fonction de bourgmestre au lendemain du scrutin d’octobre 1911. Comme de nombreux autres « candidats » bourgmestres socialistes en Wallonie, il se heurte au refus du ministre de l’Intérieur de nommer des mandataires qui professent des opinions républicaines. Il reste par conséquent échevin, faisant fonction de bourgmestre. Mais son comportement déterminé lors de l’invasion allemande d’août 1914 élimine les querelles « politiciennes » et le gouvernement belge s’empresse de le nommer officiellement le 20 septembre 1914. Il exercera ses fonctions maïorales jusqu’en 1921. Durant les années allemandes de 14-18, il veilla au ravitaillement et à la sécurité des habitants de sa commune et de Liège. Sa résistance larvée lui est reprochée par les autorités d’occupation : appelé à comparaître devant le Tribunal militaire de Liège, il lui est reproché un mot injurieux en allemand sur une affiche publique. Plaidant ne pas connaître la langue de Goethe, Dejardin est condamné à deux ans de travaux forcés par le président Rauh, et il est déporté en Allemagne entre décembre 1916 et mars 1917 (Mallieux).

Ces succès électoraux, Joseph Dejardin les doit en grande partie à son intense activité syndicale. Multipliant les initiatives (réunions, meetings, publications, etc.) pour rassembler les travailleurs au sein de structures défendant leurs intérêts, il met en place un syndicat des mineurs dont la puissance dépasse le bassin houiller liégeois. De responsable liégeois (président du syndicat des Mineurs avant 14), il devient, en 1919, le leader national de la Centrale des Mineurs qu’il avait contribué à faire naître. Internationaliste – il exerça la présidence de l’Internationale des Mineurs –, il plaide très tôt (un congrès syndical en 1901) en faveur d’une action syndicale concertée au plan international : l’objectif est alors la conquête de la journée de huit heures. Son expertise est appréciée et reconnue. Elle est notamment saluée lors des Conférences internationales du Travail de 1930 et 1931 où ses interventions contribuent à l’élaboration des textes définitifs (durée du travail dans les mines). Vice-président de la Fédération internationale des Mineurs, il venait d’être désigné à la présidence lors du congrès de Londres, en septembre 1932, quand la maladie a raison de lui. Ses funérailles furent quasiment nationales.
 

 

Sources

Paul DELFORGE, L’Assemblée wallonne 1912-1923. Premier Parlement de la Wallonie ?, Namur, Institut Destrée, janvier 2013, coll. Notre Histoire, p. 234
Paul VAN MOLLE, Le Parlement belge 1894-1972, Ledeberg-Gand, Erasme, 1972, p. 80
Le mouvement syndical belge, 20 novembre 1932, p. 259
À la mémoire de Joseph Dejardin, Député…, Cuesmes, imp. fédérale, s.d.
Moniteur belge, 20-21-22 septembre 1914, p. 5297
Archives Fernand Mallieux, récit, p. 14

 

Mandats politiques

Conseiller communal de Beyne-Heusay (1903-1932)
Conseil provincial de Liège (1904-1909)
Echevin (1908-1912)
Député (1909-1932)
Bourgmestre faisant fonction (1912-1914)
Délégué de Liège à l’Assemblée wallonne (1912-1921)
Bourgmestre (1914-1921)