Collection privée

Colonne de Sainte-Walburge

Dès les premières années de son existence, le jeune état belge tient, tout naturellement, à rendre hommage aux révolutionnaires de 1830 qui lui ont permis de se libérer du joug hollandais. Au fil du temps, et malgré l’instauration du 21 juillet comme fête officielle, les journées de septembre continuent d’être célébrées avec faste par la population. A Liège, leur point d’orgue en est le « pèlerinage » au monument aux morts de 1830 de Sainte-Walburge, situé à l’endroit où les volontaires liégeois ont arrêté les Hollandais, le 30 septembre 1830.
 

La Colonne de Sainte-Walburge © Collection privée

Dès la fin du XIXe siècle, les volontaires survivants et les militaires y côtoient les premiers militants wallons. Pour le jeune Mouvement wallon, les événements révolutionnaires symbolisent également la lutte pour la liberté et contre l’imposition du néerlandais en Wallonie, autant de thèmes se trouvant au centre de leurs revendications. En mai 1900, le décès de Walthère Ista, le dernier combattant liégeois de 1830, fait planer une menace sur l’avenir de l’événement. Commence alors le combat de la Ligue wallonne de Liège pour la pérennisation de cette organisation à haute valeur symbolique.

 

 

Affiche de la première Fête de Wallonie à Liège © Province de Liège – Musée de la Vie wallonne - FHMW

En 1905, l’important Congrès wallon de Liège, évoque l’idée d’organiser  des fêtes purement wallonnes, sans pour autant se prononcer formellement à ce sujet. A leur sorite, les participants se rendent néanmoins à Sainte-Walburge, sous une pluie diluvienne. C’est en 1913, dans la foulée de l’adoption d’autres symboles identitaires comme le drapeau et l’hymne, que la Fête de Wallonie sera instaurée par l’Assemblée wallonne, premier parlement – officieux – du peuple wallon. Après une première organisation à Verviers, de nombreuses autres villes wallonnes tiennent leur première édition, la quatrième dimanche de septembre.

 

Après la Première Guerre mondiale, en 1923, le mouvement sera relancé depuis Namur, par François Bovesse, pour devenir la manifestation populaire que nous connaissons aujourd'hui.

A Liège, la colonne de Sainte-Walburge demeurera longtemps un haut-lieu de ces fêtes, comme en témoignent des dépôts de fleurs organisés le dernier dimanche de septembre pendant les deux conflits mondiaux, alors que les festivités avaient, bien évidemment, été suspendues.

 

Rue Sergent Merx 99

4000 Liège

carte

Bovesse François

Militantisme wallon, Politique, Résistance

Namur 10/06/1890, Namur 1/02/1944

Défenseur opiniâtre de Namur – de sa ville puis de sa province –, militant wallon de la première heure, député et ministre, François Bovesse est une des figures de proue du libéralisme wallon de l’Entre-deux-Guerres, payant de sa vie les valeurs démocratiques et françaises qu’il n’a cessé de privilégier.

Poète au moment où il achève ses humanités à l’Athénée de Namur (1907), il démarre sa carrière comme employé à l’administration fiscale tout en entamant des études à l’Université de Liège. Docteur en Droit au moment même où est déclenchée la Première Guerre mondiale,  membre et fondateur de nombreux cercles étudiants et d’associations artistiques, il contribue au renouveau culturel namurois et prend conscience d’une identité wallonne. La triple identité culturelle de François Bovesse est d’ores et déjà définie : Namur, Wallonie, France. 

Dès les premiers jours de la guerre, il participe au combat du fort d’Évegnée où il est blessé. Considéré comme inapte au combat, il est réformé (novembre 1914). Il rejoint Paris avant d’être affecté à Calais à l’auditorat militaire. Nommé substitut de l’auditeur militaire provincial à Namur (janvier 1919), il doit traiter toute une série de dossiers liés à la collaboration en temps de guerre. Inscrit comme avocat au barreau de Namur en 1919, il s’impose comme une figure marquante du Parti libéral. Élu conseiller communal de Namur (1921-1937), il va surtout représenter l’arrondissement de Namur à la Chambre de 1921 à 1925. En 1925, le parti libéral ne parvient pas à imposer l’un de ses représentants à Namur. Échevin de l’État civil et des Beaux-Arts suite au décès d’Alphonse Delonnay (1927-1929), il revient au Parlement lors des élections de 1929 pour y siéger jusqu’en 1937. Durant toutes ces années, il est particulièrement actif dans les débats relatifs à l’emploi des langues dans l’Enseignement (y compris l’Université de Gand), l’Administration, l’Armée et la Justice, ainsi que pour la défense de la frontière de l’Est. Défenseur des positions wallonnes tant au sein de son parti qu’en dehors, François Bovesse réclame l’unilinguisme régional avec des dispositions intermédiaires ponctuelles, ce que définiront les lois linguistiques votées dans les années ’30.

Ministre des PTT (1931-1932), ministre de la Justice (1934-1935 et 1936-1937) et de l’Instruction publique, des Lettres et des Arts (1935-1936), il est le premier ministre en fonction à participer à un congrès wallon et est considéré comme l’homme de la Wallonie dans les gouvernements auxquels il participe. Ses passages ministériels sont marqués par des réformes importantes et durables.

Animateur de la Ligue wallonne de Namur, membre de l’Assemblée wallonne (1919-1927), Fr. Bovesse est à l’origine de l’organisation de la Fête de Wallonie, à Namur, via le Comité de Wallonie (1923). Cette fête qui connaîtra un succès progressif incontestable est l’occasion pour lui de réclamer l’égalité de droit entre Wallons et Flamands et de dénoncer les appétits flamingants. Resté ministre auprès de Paul Van Zeeland jusqu’à l’élection partielle du 11 avril 1937 qui voit le Premier ministre affronter Léon Degrelle, il marque ainsi sa volonté d’en finir avec le rexisme. Le 16 avril, Bovesse démissionne de ses mandats et est nommé gouverneur de la province de Namur.

Lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate, il tente d’organiser le ravitaillement et l’approvisionnement des premiers réfugiés, à Namur d’abord, en France ensuite, où il est nommé Haut-commissaire du gouvernement belge en France (dans l’Hérault). Rentré à Namur avec le dernier train des rapatriés (septembre 1940), il est démis de ses fonctions par l’occupant qui le considère comme un chef wallon en contact avec le 2e bureau français. Ayant repris ses activités d’avocat, il est dans la ligne de mire des rexistes qui ne lui pardonnent pas son action contre eux lorsqu’il était ministre de la Justice. Arrêté et condamné par le Conseil de Guerre à six mois de forteresse en Allemagne pour outrage à l’armée allemande, il est ensuite pris à plusieurs reprises comme otage sur le train Namur-Maubeuge. 

Le 1er février 1944, François Bovesse est assassiné par des collaborateurs qu’il n’a jamais cessé de dénoncer. Malgré les interdictions, son enterrement donnera lieu à un impressionnant rassemblement de citoyens qui manifestent ainsi leur opposition à l’Ordre nouveau et surtout leur admiration à un homme qui a défendu son pays et ses libertés.

Sources

DELFORGE Paul, Encyclopédie du Mouvement wallon, t. I, Charleroi, 2000 
François Bovesse, Namur et les années sombres, 1936-1945, CCB, 1990
GAVROY Arnaud, François Bovesse, 1890-1944, Itinéraire et pensées politiques, Namur, 1990
Grands avocats de Belgique, 1984, p. 36-42
HICGUET Robert, François Bovesse 1890-1944, Paris-Bruxelles, Labor, (mars 1944)
KESTELOOT Chantal et GAVROY Arnaud, François Bovesse. Pour la défense intégrale de la Wallonie, Institut Jules Destrée Charleroi, 1988
Wallonie, le Pays et les Hommes, t. 3, p. 31-34

Mandats politiques

Conseiller communal de Namur (1921-1937)
Échevin (1927-1929)
Député (1921-1925, 1929-937)
Ministre (1931-1932, 1934-1937)
Gouverneur de Namur (1937-1944)
 

Forgé au cours du XIXe siècle, le mot « Wallonie » fut rapidement popularisé tant au sein de la région qu’il désigne que chez ses voisins. Point de départ de l’affirmation de l’unité wallonne, cette dynamique a conduit, voici un siècle, à l’adoption d’un drapeau et d’une fête que le Parlement wallon a consacrés officiellement en 1998. De la revue littéraire d'Albert Mockel jusqu'à la régionalisation, cette leçon met en lumière les grands repères symboliques de l'identité wallonne au travers d'une synthèse et de documents.

Bovesse François

Commandeur (Historique)

NAMUR 10.06.1890 – NAMUR 01.02.1944

Se destinant à la poésie après ses humanités, François Bovesse est sensibilisé à la cause wallonne lors de la fondation, par Jules Destrée, de la section namuroise des Amis de l’Art wallon, en 1911. Il crée alors, en 1912, en parallèle à ses études de droit à l’Université de Liège, l’hebdomadaire culturel et littéraire Sambre et Meuse, consacré à la région namuroise. Membre du parti libéral depuis ses dix-huit ans, actif au sein de la Ligue wallonne de l’arrondissement de Namur, il fait rapidement évoluer sa revue en organe du Mouvement wallon.

Ayant tout juste décroché son doctorat en juillet 1914, il combat les Allemands à Liège, Anvers et sur l’Yser. Ses blessures lui valent de multiples décorations. Le conflit terminé, il s’inscrit comme avocat au barreau de Namur, ville au sein de laquelle il s’implique comme conseiller communal et comme échevin, contribuant de façon déterminante à la création des fêtes de Wallonie en 1923. Député à de multiples reprises, il milite en faveur de l’unilinguisme régional, s’opposant à toute tentative de flamandisation de la Wallonie.

L’ancien combattant francophile de 1914 sensibilise également la population à la défense de la frontière de l’Est, qu’il pressent menacée. Le Gouvernement lui refusant  le portefeuille de la défense, il ira jusqu’à démissionner de son poste de ministre pour protester contre un amendement flamand visant à réduire les budgets de fortifications à l’Est. Considéré comme l’homme de la Wallonie au sein des gouvernements auxquels il participe entre 1931 et 1937, il y porte les thèses du Mouvement wallon comme le maintien de l’accord militaire franco-belge, le refus de l’amnistie des collaborateurs de 14-18 et le combat contre le mouvement fasciste Rex qui n’hésite pas à l’attaquer de manière calomnieuse.

En avril 1937, il devient Gouverneur de la Province de Namur et prend, à ce titre, des mesures de protection dans la perspective d’une attaque allemande. Lorsque la guerre éclate, il tente de ravitailler les nombreux réfugiés à Namur, tâche qu’il perpétue en France. Revenu à Namur fin 1940, l’occupant lui interdit de recouvrer sa fonction, en raison de son aura wallonne et de sa francophilie.

Redevenu avocat, il se montre sans concession pour l’occupant et les collaborateurs, ce qui ne fait que renforcer la haine que lui vouent les rexistes depuis son passage au Ministère de la Justice. Dénoncé par des membres de la Légion Wallonie et arrêté en décembre 1941, il est emprisonné six mois à Saint-Gilles, dont il sort très affaibli.

Le 1er février 1944, il est assassiné par des collaborateurs qu’il n’aura jamais cessé de combattre. Malgré l’interdiction de l’ennemi, de nombreux citoyens assisteront à son enterrement, manifestant ainsi leur opposition à l’Ordre nouveau et, surtout, leur admiration à l’homme et ses valeurs.

François Bovesse fut fait Commandeur du Mérite wallon, à titre posthume, en 2012.

Orientation bibliographique :

Paul DELFORGE, BOVESSE François, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, notice 628.
Arnaud GAVROY, François Bovesse, 1890-1944, Itinéraire et pensées politiques, Namur, 1990.
Chantal KESTELOOT & Arnaud GAVROY, François Bovesse. Pour la défense intégrale de la Wallonie, Charleroi, Institut Jules Destrée, 1988.