De Forest Jessé
Eglises
Avesnes (Hainaut) 1576, Oyapok (Amérique) 22/10/1624
Au cours des XVIe et XVIIe siècles, nombreux sont ceux qui fuient les persécutions perpétrées notamment par les Espagnols dans leurs pays d’en bas. Les raisons sont politiques, économiques et le plus souvent religieuses.
Parmi les Wallons exilés, on rencontre Jean de Forest. Originaire de Mons, ce teinturier s’est établi à Avesnes et a été séduit par le protestantisme professé dans nos contrées. Partisan des réformateurs, il est conscient des dangers qu’il encourt et s’en va trouver refuge à Leyde dans les Provinces-Unies. Il prend part à la vie de la jeune Église wallonne de Leyde. C’est dans cette cité que Jessé, son fils, ouvre un atelier dans la même branche d’activités que son paternel. La concurrence et les techniques nouvelles utilisées par les « Hollandais » ne laissent guère de chance de prospérité aux exilés wallons, qui multiplient alors les démarches pour décrocher le droit de migrer vers le Nouveau Monde.
Depuis septembre 1609, la Compagnie hollandaise des Indes orientales bénéficie des découvertes faites en son nom par l’Anglais Hudson. Remontant un fleuve auquel il donnera son nom, le navigateur a pris possession d’une région baptisée Nieuw Nederland, en néerlandais, et Novum Belgium en latin. L’odyssée du Mayflower en 1620 va inspirer de nombreux candidats au voyage. Ainsi a-t-on retrouvé une pétition (Round Robin) datée du 5 février 1621 où, au nom de plusieurs dizaines de familles wallonnes du grand Hainaut, Jessé de Forest sollicite de l’ambassadeur d’Angleterre l’autorisation de s’établir en Virginie et d’y former une colonie autonome respectueuse de la langue et de la religion que ces familles pratiquent, ce qui leur est refusé. Par contre, avec une dizaine de compagnons, de Forest parvient à convaincre une nouvelle Compagnie « hollandaise » (août 1622) de les laisser embarquer pour l’Amérique du Nord ; ils ont l’intention de préparer l’arrivée de leur famille.
Embarqués sur le Pigeon, les nouveaux colons subissent les caprices de l’océan et arrivent là où se développera la Guyane néerlandaise (futur Surinam). Jessé de Forest y mourra le 22 octobre 1624 sans connaître la réussite de ses familiers de l’Église wallonne de Leyde. Mais il leur avait ouvert la voie et les avait inspirés. C’est à ce titre que son nom est explicitement honoré sur un bloc de pierre de Soignies inauguré, le 20 mai 1924, dans un parc situé à la pointe sud de l'île de Manhattan (Battery Park). Il s’agit d’une initiative du Conseil provincial du Hainaut (en particulier de François André) qui rend ainsi hommage aux premiers « colons wallons », fondateurs de la Big Appel. D’autres Wallons contribuèrent aussi à la fondation d'Albany et de Philadelphie.
Sources
Michel ORIS, dans Freddy JORIS, Natalie ARCHAMBEAU (dir.), Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 2005
Robert GOFFIN, Les Wallons Fondateurs de New York, Institut Jules Destrée, 1970
A. DE SMET, Les Belges ont-ils pris part à la fondation de New York ?, dans Album Antoine De Smet, Bruxelles, 1974, p.413-441.
A. DE SMET, La Communauté belge du Nord-Est du Wisconsin. Ses origines. Son évolution jusque vers 1900. Wavre, Cercle Historique et Archéologique, 1957
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. I, p. 70
Charles W. BAIRD, History of the Huguenot Emigration to America, 2 vol., 1885
Pierre-Jean SCHAEFFER, En 1624, des pionniers du Hainaut fondaient… New York, Charleroi, Université du Travail et Imprimerie provinciale du Hainaut, 1999
Minuit Pierre
Wesel 1580, île Saint-Christophe 05/08/1638
Au cours des XVIe et XVIIe siècles, nombreux sont ceux qui fuient les persécutions perpétrées notamment par les Espagnols dans leurs « pays d’en bas ». Les raisons sont politiques, économiques et le plus souvent religieuses. Partisan des réformateurs, la famille Minuit quitte son roman païs où elle travaille la terre pour s’établir à Wesel, dans le duché de Clèves, où s’était constituée une communauté protestante wallonne.
C’est là que naît Pierre Minuit en 1580. Stimulé par l’expédition du Mayflower (1620) et par les démarches d’autres Wallons, dont Jessé de Forest (1622), il est séduit par les échos favorables qui lui reviennent de tous ces Wallons partis, en 1624, à bord du Nieuw Nederland, au service d’une nouvelle Compagnie des Indes occidentales : plus de deux cents colons exclusivement wallons se sont installés entre la Virginie et la Nouvelle-Angleterre, dans une région dénommée Nieuw Nederland, en néerlandais, et Novum Belgium en latin, bordée par le fleuve Hudson. Pierre Minuit est de l’équipée qui quitte Amsterdam et arrive à… New-Amsterdam le 4 mai 1626.
À peine débarqué, Pierre Minuit est nommé gouverneur de la Nouvelle-Belgique, et remplace Willem Verhulst éphémère successeur de Cornelis May, le capitaine du bateau arrivé en 1624. La même année, 1626, Pierre Minuit achète la pointe sud de l'île aux Indiens Manhattes, en échange de verroterie et autres colifichets, pour l'équivalent d’une poignée de dollars. Le nom de cette tribu désignera le quartier de Manhattan, partie de la ville de New York (nom donné par les Anglais en 1664), dont la date officielle de création, le 20 mai 1624, est celle de l’arrivée des premiers Wallons. Ayant fait connaître tous les avantages de leur nouvelle terre d’élection, les premiers arrivés suscitèrent l’arrivée rapide de nouveaux migrants wallons. Bien organisés, ces Wallons contribuèrent aussi à la fondation d'Albany et au développement du Connecticut. En 1628, Pierre Minuit qui était le représentant officiel de la Compagnie est élu par tous les membres de la communauté protestante installés sur place comme l’un de ses deux administrateurs.
Faisant preuve de bienveillance à l’égard des Indiens algonquins et évitant de privilégier les colons au détriment des autochtones, Pierre Minuit est remplacé en 1632 par un neveu d’un directeur de la Compagnie hollandaise et rappelé en Europe. Qualifiée de New Amsterdam par la Compagnie des Indes occidentales, la grande cité doit sans conteste sa naissance aux Wallons arrivés sur le Nieu Nederland. Si la Compagnie des Provinces-Unis a eu l’habitude de « néerlandiser » tous les patronymes et de faire référence aux toponymes des provinces bataves, les Wallons exilés ont laissé des traces de leur œuvre fondatrice, même si l’on retrouve souvent Pierre Minuit affublé du nom de Pieter Minnewit. Ainsi, identifie-t-on encore aujourd’hui à New York, la baie de Gowanus, à l'ouest de Brooklyn : ce lieu tire son nom d'Owanus, traduction latine du village d’origine de la famille de Pierre Minuit, la commune d’Ohain. Quant à la baie de Wallabout, au nord de Brooklyn, il s’agit d’une déformation du néerlandais Waal bocht qui signifie la baie wallonne. Quant à Peter Stuyvesant, malgré de nombreuses tentatives visant à lui attribuer la paternité de New York, il reste malaisé d’expliquer comment il aurait pu concilier la date de naissance de New York (1624), avec son arrivée sur place en…1647.
Licencié par les « Hollandais », Pierre Minuit se met alors au service de Suédois qui cherchent eux aussi à s’établir en Amérique du Nord. Connaissant bien le terrain, Minuit les incite à coloniser le Delaware, le Maryland et la Pennsylvanie, soit les terres à l’ouest du Delaware, et à y fonder une Nouvelle-Suède dont il serait le gouverneur. Ayant négocié avec les tribus locales et construit Fort Christina, Pierre Minuit devait repartir pour la Suède pour y embarquer un nouveau groupe de colons. Un détour par les Caraïbes pour y charger du tabac à revendre en Europe lui est cependant fatal : son navire est emporté dans un ouragan.
Le 20 mai 1924, un bloc de pierre de Soignies rendant hommage aux premiers « colons wallons », et à l’œuvre inspiratrice de Jessé de Forest, est inauguré dans un parc situé à la pointe sud de l'île de Manhattan (photo). Cette initiative revient au Conseil provincial du Hainaut, en particulier à François André. Trois timbres seront émis à cette occasion par le service de la poste américaine et une pièce d’un demi-dollar sera frappée pour commémorer les Wallons à Manhattan.
Sources
Michel ORIS, dans JORIS Freddy, ARCHAMBEAU Natalie (dir.), Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 2005
Robert GOFFIN, Les Wallons Fondateurs de New York, Institut Jules Destrée, 1970
A. DE SMET, Les Belges ont-ils pris part à la fondation de New York ?, dans Album Antoine De Smet, Bruxelles, 1974, p.413-441.
A. DE SMET, La Communauté belge du Nord-Est du Wisconsin. Ses origines. Son évolution jusque vers 1900. Wavre, Cercle Historique et Archéologique, 1957
cfr Forces wallonnes, n°28, 29 juillet 1975, p. 3
Charles W. BAIRD, History of the Huguenot Emigration to America,
Pierre-Jean SCHAEFFER, En 1624, des pionniers du Hainaut fondaient… New York, Charleroi, Université du Travail et Imprimerie provinciale du Hainaut, 1999