Le comté de Namur au XIe siècle (1093)

Les convoitises de l’évêque de Liège sont telles que le comte de Namur perd progressivement des abbayes et les terres qui les accompagnent. De surcroît, les comtes du Hainaut et ceux de Louvain grignotent à leur tour les possessions des comtes de Namur qui étendent cependant leurs liens familiaux vers l’Ardenne : un mariage les unit au comté de Laroche (1065).

Références
Er-Cover ; HHWH24 ; MoDic2a ; MoDic2z


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La maison de « Luxembourg » au XIe siècle

En se disputant avec l’empereur Henri II qui avait épousé une des filles de Sigefroid, la nombreuse descendance directe de ce dernier se montre trop gourmande ; la maison de Luxembourg hypothèque d’autant plus ses espoirs de grandeur que Henri II meurt sans héritier. Après quelques temps plus difficiles, Frédéric – petit-fils de Sigefroid – devient duc de Basse-Lotharingie, mais surtout avoué de l’abbaye de Stavelot. Avec ses frères, il s’emploie à enraciner les « Luxembourg » et à créer un comté portant ce nom (XIe siècle).
Initiative de Conrad qui est le premier à porter le titre de comte de Luxembourg (1083), l’établissement d’un monastère à Luxembourg (abbaye Notre-Dame, devenue Munster) lie définitivement les héritiers de Sigefroid à cet endroit ; ils éprouvent néanmoins de réelles difficultés à constituer un ensemble territorial étendu, durable et indépendant. Les mariages et les alliances les attirent tant vers la Saxe et la Franconie que vers l’Aquitaine, la Flandre et le long de la Meuse. En 1136, Conrad reste sans héritier.

Références
AzKG-94 ; DHGe14 ; ErCover ; TrauLxb119


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Le Hainaut, fief de l’Église de Liège (fin du XIe siècle)

À la mort de Baudouin (1070), Robert le Frison, son frère, s’empare de la Flandre, en écarte tous les prétendants, et laisse le Hainaut à Richilde et à son fils Baudouin. L’union est rompue. Cherchant une aide extérieure (1071-1076), le comté de Hainaut devient un fief de l’Église de Liège, tout en conservant son autonomie politique. Jusque-là il était essentiellement compris dans le diocèse de Cambrai qui partageait le même statut qu’Arras, Boulogne, Thérouanne et Tournai au sein de l’archevêché de Reims. Le diocèse de Tournai ne redevient distinct de ses voisins immédiats qu’en 1146.
Vers 1245, il semble que l’incorporation « temporelle » ne se réalise pas et le comté de Hainaut n’intègre pas la principauté de Liège. En 1408, après la bataille d’Othée, le comte de Hainaut brise le lien féodal avec le diocèse de Liège ; prince-évêque issu de la même famille (Wittelsbach) que le comte du Hainaut, Jean de Bavière ne s’oppose pas à cette mesure.

Références
ANA ; AzKG-94 ; Bo ; DCM17, 20 ; Er35c ; WPH01-219


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Réunion des comtés de Flandre et de Hainaut sous la couronne de Baudouin VI et de Richilde (1067-1070)

Par son mariage avec Richilde, Baudouin – dont le père est comte de Flandre – devient comte de Hainaut sous le nom de Baudouin Ier (1051-1070). À la mort de son père, il hérite du comté de Flandre et, pendant trois années, Hainaut et Flandre sont réunis sous une même couronne (1067-1070). Baudouin VI ne survit que trois années à la mort de son père. Les deux comtés reviennent alors à des souverains différents.

Références
ANA ; Bo ; DCM17; DCM20; Er35c; WPH01-219


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Chartes et franchises (XIe – XIVe siècles)

À partir des Xe-XIe siècles, la prospérité des bourgeois des villes devient telle qu’ils revendiquent la reconnaissance de leur spécificité et le droit d’intervenir dans la vie de la cité. Au terme de vives négociations et rapports de force, des privilèges et « libertés » sont concédés par le seigneur. Pour éviter l’oubli… et dans la mesure où la versatilité des familles princières est assez grande, ces franchises vont être progressivement consignées par écrit. Quand la grande bourgeoise prend les commandes sur le plan communal, les petits réclament à leur tour, souvent par la force, une place dans la gestion des affaires de la cité. Unis en « conjuration » ou en « communes », les bourgeois prêtent serment et s’efforcent ainsi d’obtenir des garanties. Ces mouvements dits « communaux » se déroulent d’abord en Italie puis en Espagne où plusieurs villes obtiennent une charte de libertés : Gênes (959), Crémone (996) et Savone (1014), ainsi que Léon (1020). Dans la partie septentrionale de l’Europe, c’est Huy (24 août 1066) qui obtient la première charte de franchises connue à ce jour.
Huy ne devient pas totalement libre du jour au lendemain mais ses bourgeois sont reconnus comme « communauté », obtiennent des privilèges et le processus d’émancipation urbaine est entamé. Il devait exister d’autres contrats négociés entre le prince et ses gens sur des aspects plus restreints (liés à un métier ou au domaine économique, politique ou militaire), mais l’attribution de chartes plus générales caractérise nos régions dès le XIe siècle. Quand, vers 1196-1200, le prince-évêque Albert de Cuyck accorde une charte contenant 23 articles, pour s’attacher davantage les bourgeois de la cité de Liège, il est précisé que ceux-ci disposaient déjà de privilèges plus anciens. À Tournai, dont le statut reste longtemps particulier, une charte semble avoir été promulguée vers 1187. À Namur, la charte qui inspirera tout le comté remonte à la fin du XIe siècle et la charte de Valenciennes (1114) sert de modèle pour le comté de Hainaut. En 1212, Fontaine-l’Évêque dispose de son propre texte. En effet, l’octroi de chartes importantes conduit à la création de véritables familles de droits urbains, l’exemple d’une grande ville étant imité par une série de localités plus petites.
Au XIVe siècle, bourgeois des villes, clergé et noblesse constituent ensemble les trois états ; très régulièrement sollicités financièrement par leur seigneur, ils finissent par exiger des garanties pour le respect des lois et franchises d’une part, contre ses abus financiers d’autre part. De nouvelles chartes sont rédigées ; leurs dispositions s’appliquent à l’ensemble d’un territoire plus vaste (Paix de Fexhe, 1316, Joyeuse Entrée 1356). En 1332, Jean l’Aveugle, comte de Luxembourg et roi de Bohême, accorde à Bastogne le statut de ville libre par une charte de franchise.


Référence
JoAn-103


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La fin des Régnier (998-1051)

Dans le dernier quart du Xe siècle, le roi de France aide les Régnier à récupérer la plupart de « leurs » biens et l’on retrouve des enfants Régnier à la tête des comtés de Louvain et de Hainaut. Par les jeux d’alliance et les guerres, les Régnier IV et V, ainsi que Herman s’empressent d’ailleurs d’agrandir leurs territoires notamment au détriment des marches de Valenciennes et d’Éname. Chièvres et Alost appartiennent alors à la maison de Verdun, mais, au fil des conflits, le comte de Flandre qui est aussi ambitieux que les Régnier, se retrouve maître du comté de Chièvres dans l’ancienne marche d’Ename, alors que le Hainaut possède le reste de cette marche, c’est-à-dire les terres situées au nord, sans lien direct avec le Hainaut. En 1047, les deux familles décident d’un échange, et c’est ainsi que l’ancien comté de Chièvres intègre celui de Hainaut et que l’Escaut est atteint et même débordé en 1047, avec la cession de Valenciennes et ses environs, vers l’Ostrevant.
D’abord terre d’empire, circonscription administrative ensuite, le Hainaut s’est détaché progressivement de toute autorité souveraine pour devenir une principauté quasi autonome, mais dépendante de la lignée seigneuriale (XIe siècle).
À la mort de Herman en 1051, sa veuve, Richilde, déjà fort active dans les affaires du comté, déjoue les difficiles relations entre Germanie et Francie, mais ne peut éviter un mariage avec le fils du comte de Flandre, le futur Baudouin VI qui règnera sur la Flandre de 1067 à 1070. Depuis le IXe siècle, les comtés de Hainaut et de Flandre se sont en effet développés parallèlement et la limite « naturelle » que constitue l’Escaut a déjà été contestée à diverses reprises, les dynastes cherchant à s’étendre par-delà le fleuve.

Références
ANA ; Bo ; DCM17; DCM20; Er35c; WPH01-219


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Liège sous Notger, évêque et prince (972-1008)

Empereur d’Occident, se proclamant héritier des Romains et de Charlemagne, Otton Ier utilise son droit de nommer les évêques à des fins politiques. En attribuant aux évêques des charges comtales, l’empereur évite la dispersion de son patrimoine. Bien que Saxon et non carolingien, Otton accorde de l’importance à ses terres les plus occidentales. Comme les « (…) principautés territoriales du Hainaut, de Louvain-Brabant, du Limbourg, du Luxembourg et de Namur se sont édifiées au préjudice de l’autorité royale », la principauté liégeoise sera construite « par la volonté des rois – particulièrement ceux de la dynastie des Otton – désireux d’enrayer le processus d’hérédité ou, ce qui revient au même, de confiscation, par les princes territoriaux laïcs, des hautes charges publiques » (Histoire de la Wallonie, p. 113).
Véritable incarnation du système ottonien, Notger, par ailleurs formidable personnalité politique de son époque, peut être considéré comme le fondateur de la principauté de Liège. Désigné évêque de Liège par Otton Ier en 972, il obtient d’Otton II la confirmation de l’immunité des possessions de l’Église de Liège (980) ; en d’autres termes, soustraites à une charge comtale, plusieurs possessions (à Huy, Maastricht, Namur, Dinant, Tongres, Marchienne-au-Pont, Theux, etc.) dépendent de la seule autorité de l’empereur. En déléguant son pouvoir à la cathédrale saint-Lambert et à son titulaire, l’empereur transforme de facto l’évêque, en l’occurrence Notger, en un comte ayant droit de haute justice, de lever le tonlieu, de battre monnaie, d’établir des marchés et de dresser des fortifications. En 985, Notger reçoit en donation le comté de Huy, d’autres suivront. Les pouvoirs de l’évêque et du prince se rejoignent pour régler le spirituel et le temporel sur un territoire. La principauté de Liège devient le modèle de ce que l’on appellera l’« Église impériale ottonienne » (Reichskirche).


Références
AzKG-94 ; DHGe14 ; HW04-113-114 ; LJGdLg48 ; Meuse-Rhin10


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L’Europe à la fin du Xe siècle

À la veille d’un nouveau millénaire, la frontière occidentale du royaume de Germanie contourne et englobe le territoire qui deviendra plus tard la Wallonie. Sous l’apparence de grands ensembles se cachent en fait une multitude de petits découpages territoriaux, caractéristique de l’époque féodale.

Référence
Duby46


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Les ponts sur la Meuse jusqu’en 980

À l’heure des routes, autoroutes et voies ferroviaires ultrarapides, l’importance du passage d’un fleuve ou d’une rivière paraît plus que secondaire. Pourtant, la possibilité de traverser un cours d’eau a conditionné pendant des siècles la circulation des gens et des marchandises et influencé durablement l’aménagement du territoire. Dès l’époque romaine, les routes qui sont construites suivent le cours des rivières et des fleuves. Les points de traversée ne sont pas fréquents. Outre certains « passages d’eau » généralement en barque, il n’existe que quatre ponts sur la Meuse (peut-être y avait-il encore un cinquième à hauteur d’Andenne). L’importance de cet enjeu se lit par exemple dans le nom de lieu : ainsi Maastricht doit-elle son nom à trajectum ad Mosam (mosa trajectum) « traversée de la Meuse », seul pont construit sur la route Tongres-Cologne. Un autre pont traverse la Meuse à hauteur d’Ombret, sur la liaison routière Tongres-Arlon. Un troisième pont est attesté à hauteur de Dinant, sur la route Bavay-Trèves. Quant au pont que l’on situe à hauteur de l’actuelle Charleville-Mézières, cités fusionnées situées de part et d’autre du fleuve, il a défini la première dénomination du lieu, à savoir Arcae Remorum, Arches (sur la Meuse). Il était situé sur la route reliant Reims à Cologne. Ces constructions paraissent avoir subsisté à ces différents endroits jusqu’au Xe siècle, complétés par d’autres passages d’eau moins élaborés.

Références
Fan01 cartes I, III, IV et VIII


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Les biens de l’Église de Liège au Xe siècle

Faisant partie du diocèse primitif de Tongres, la petite cité de Liège acquiert un statut tout neuf quand l’évêque Lambert y est assassiné en l’an 700. Successeur de Lambert, Hubert y fait édifier une basilique et, en 800, sous Charlemagne, Liège devient siège épiscopal, celui-ci ayant déjà migré précédemment de Tongres à Maastricht. C’est désormais depuis Liège que l’évêque, représentant local du pape, exerce un pouvoir spirituel et moral sur l’ensemble d’un diocèse qui a conservé les mêmes dimensions que l’ancienne civitas tungrorum. Progressivement, il va aussi exercer un pouvoir temporel sur les terres que lui offrent princes et seigneurs. Au Xe siècle, les donations sont nombreuses et les possessions de l’Église de Liège – sous forme de biens ou de droits – sont situées le long de l’axe Sambre-et-Meuse ; elles confèrent à l’évêque une position prestigieuse.

Références
AzKG-94 ; HPLg-16-31 ; LJGdLg48 ; Meuse-Rhin10


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