Daoust Alex
Culture, Gravure, Sculpture
Bioul 5/06/1886, Champion 7/01/1947
Sculpteur et dessinateur au talent aussi grand que sa modestie, Alex Daoust a marqué une génération de jeunes Dinantais durant l’Entre-deux-Guerres par son enseignement, et l’histoire de la sculpture de Wallonie par plusieurs réalisations remarquables.
Dès ses humanités au collège de Belle-Vue à Dinant, Alex Daoust se révèle un dessinateur doué, mais la carrière artistique ne semble pas tenter l’adolescent qui devient professeur de mathématiques à l’Abbaye de Maredsous. Cependant, la rencontre avec l’abbé Dom Pascal qui enseigne le modelage à l’École d’arts décoratifs de l’Abbaye conduit Daoust vers la sculpture. Ses sujets sont d’abord religieux et correspondent à des commandes quand éclate la Grande Guerre. Après l’Armistice, il décroche un diplôme qui lui permet d’enseigner le dessin dans les Écoles moyennes de l’État et, en 1920, il devient professeur de dessin à l’Athénée de Dinant, établissement où il accomplit toute sa carrière (1920-1946). Proche d’Eugène Gillain pour lequel il contribue à l’illustration d’ouvrages (années 1920) et de la revue des Cahiers wallons (1937), il avait notamment été le premier professeur de dessin du jeune Joseph Gillain (en 1924), qui se fera un nom dans la bande dessinée sous le pseudonyme de Jijé. En parallèle, le co-fondateur de l’Université populaire de Dinant enseigne aussi à l’École industrielle de Dinant. Durant toute la période de l’Entre-deux-Guerres, il s’attèle à ressusciter et à rénover l’art de la dinanderie.
Se dégageant du côté « académique » de ses débuts, sa sculpture développe un style plus personnel ; elle est guidée par son amour de la Wallonie, de ses habitants, de ses traditions. Ainsi illustre-t-il plusieurs ouvrages de littérature wallonne. Continuant à sculpter des œuvres d’inspiration personnelle, Daoust répond aussi à des demandes de particuliers ou à des commandes officielles ; destiné à immortaliser l’assaut aussi héroïque que vain de quelques « pantalons rouges » lancés à l’attaque de la Citadelle, son remarquable et imposant (3 mètres) monument L’Assaut, au cimetière français de Dinant, lui ouvre de nouvelles portes (1927). Combinant avec bonheur son esprit mathématique avec son élan artistique, influencé par le cubisme, il se fait un nom avec modestie. Le bas-relief réalisé pour le monument Sebald, à Houffalize, synthétise à la fois ses convictions (chrétiennes, françaises et wallonnes) et son savoir-faire.
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, outre un bas-relief glorifiant les martyrs des camps d’extermination, il se lance dans un projet qu’il mûrit depuis longtemps : « réaliser un ensemble d’œuvres sculpturales (reliefs, statues) et fusains dont le thème serait d’essence tout à fait wallonne », qu’il intitulerait L’Âme wallonne et qui serait installée à Liège. De ce projet ambitieux, il n’aura l’occasion de réaliser que la partie centrale, « Noël de Wallonie », bas-relief où l’on reconnaît pêle-mêle César Franck, Ysaÿe, Grétry, un prince-évêque, Charlier Jambe de Bois, Henri Simon, Varin, Auguste Donnay, Zénobe Gramme, Nicolas Defrecheux… et bien d’autres comme les marionnettes de Charlemagne, Roland, Tchantchès et Nanèsse, voire encore le cerf miraculeux de saint Hubert, un houilleur, un armurier, une botteresse… sur fond de bâtiments caractéristiques. Un accident mortel prive l’artiste des années de retraite qu’il avait préparées pour mener son projet à bien.
Sources
Jean SERVAIS, Le sculpteur Alex Daoust, dans La Vie wallonne, 1947, n°238, p. 81-104
TOUSSAINT J., dans Biographie nationale, t. 44, col. 365-368
Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 2005
La Wallonie. Le Pays et les hommes (Arts, Lettres, Cultures), Bruxelles, t. III, p. 358-359
Jacques TOUSSAINT et Joseph DEWEZ (dir.), Les Cahiers wallons ont 75 ans. Les relis Namurwès au service de l’identité wallonne, Namur, 2012, p. 82-85
Paul Delforge