Dejardin Lucie

Politique, Résistance

Grivegnée 31/07/1875, Liège 28/10/1945

La première femme à avoir été élue au suffrage universel (masculin) au Parlement belge a été choisie dans un arrondissement wallon, en 1929. Candidate du POB, Lucie Dejardin a fait son entrée à la Chambre des représentants le 26 mai 1929. Avant elle, la Bruxelloise Marie Janson avait siégé au Sénat, mais elle avait accédé à la Haute Assemblée par cooptation (en 1921) ; sinon, aucune autre femme n’avait jamais été élue au suffrage universel. Élue sans bénéficier des voix des autres femmes, le droit de vote étant limité aux hommes jusqu’en 1948, elle peut quant à elle exprimer un vote en raison de son statut particulier d’ancienne prisonnière politique.

Née dans une famille nombreuse ouvrière de Beyne-Heusay, elle ne connaît pas l’obligation scolaire et travaille dès lors très tôt en occupant divers petits boulots ne nécessitant pas de qualification. L’exploitation dont elle fait l’objet la conduit à militer dans les rangs des mouvements socialistes et coopératifs naissants. Affiliée au syndicat des mineurs, co-fondatrice de la première ligue des femmes socialistes de Liège, elle s’engage sur les traces de l’un de ses frères (Joseph) qui deviendra lui aussi parlementaire, en plus d’être le bourgmestre de Beyne-Heusay.

Dès le début de la Grande Guerre, Lucie Dejardin entre au service de La Dame blanche, où elle travaille comme agent de renseignements. En juillet 1915, elle est arrêtée, jugée et condamnée à perpétuité. Fin 1917, en raison de son état de santé, elle bénéficie d’un échange de prisonniers et passe la fin de la guerre en France où elle s’occupe d’enfants belges en exil.

Nommée inspectrice du travail, à son retour à Liège, en 1919, elle s’engage surtout dans l’action militante : la paix, la liberté, l’égalité de droits entre les sexes, l’action sociale. Elle participe à plusieurs congrès internationaux et fait entendre la voix des femmes comme représentante de plusieurs ligues et comités. En 1926, elle entre au Conseil communal de Liège et, trois ans plus tard, fait son entrée au Parlement. Réélue en 1932, elle perd son siège en 1936 et devient secrétaire-propagandiste de la fédération liégeoise du POB ; c’est pour remplacer Georges Truffaut décédé en Angleterre en 1942, qu’elle retrouve la Chambre en septembre 1944, jusqu’à son décès en octobre 1945.

Quand éclate la Seconde Guerre mondiale, des mesures de précaution sont prises à l’égard de celle qui fut condamnée par les Allemands vingt ans plus tôt. Assimilée au personnel anglais, Lucie Dejardin peut fuir en Angleterre dès mai 1940. À Londres, elle aide des réfugiés, avant d’être affectée au ministère belge du Travail en exil.

Son action au Parlement au tournant des années 1930 s’est portée vers les questions de lutte contre la pauvreté, contre l’alcoolisme, et en faveur du statut des enfants et des femmes.

Conseillère communale de Liège (1926-1945)
Députée de Liège (1929-1936, 1944-1945)
 

 

Sources


Éliane GUBIN, Lucie Dejardin, dans Dictionnaire des femmes belges, Bruxelles, Racine, 2006, p. 159-160
Robert ABS, dans Biographie nationale, t. XXXVIII, col. 145-150
Des femmes dans l’histoire en Belgique depuis 1830, Bruxelles, Luc Pire, 2006, p. 125-127
Pol DEFOSSE, Jean-Michel DUFAYS, Martine GOLDBERG (dir.), Dictionnaire historique de la laïcité, Bruxelles, Luc Pire, 2005, p. 88