Rousseau Victor

Culture, Sculpture

Feluy 15/12/1865, Forest 17/03/1954


Quand les œuvres de Victor Rousseau commencent à être connues, le débat sur l’existence et les caractéristiques d’un art wallon bat son plein. Très vite, ceux qui théorisent l’art wallon voient en Rousseau le représentant par excellence de leur définition. Révélatrices du tempérament wallon, les œuvres de Rousseau s’imposent à la fois par leur beauté formelle, par leur sentimentalité et par la suggestion cérébrale qu’elles induisent, par cette intellectualité dans la simplicité qui serait l’une des caractéristiques de l’art wallon. Dans sa Lettre au roi, l’esthète Jules Destrée observe une filiation « saisissante » entre Jacques Du Broeucq et Victor Rousseau. Assumant tous les éloges, Victor Rousseau acceptera volontiers d’être célébré comme « sculpteur wallon ». Tous les honneurs dont il fut couvert ne lui faisaient pas oublier ses tout débuts.

Séduit par la musique, celle de Wagner puis de Beethoven, Victor Rousseau faillit s’y consacrer entièrement ; touchant à la poésie, ce fils de carriers apprend pourtant ce métier difficile dès son plus jeune âge. À une époque où l’école obligatoire et gratuite n’est encore qu’une revendication, il est apprenti (1875), avant d’être plongé sur le chantier pharaonique du Palais de Justice de Bruxelles ; sous les ordres du sculpteur français Georges Houstont, l’ouvrier qu’il est alors taille les corniches du nouveau bâtiment conçu par Joseph Poelaert. La précision du métier lui plaît et il décide de suivre les cours de l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles. En 1890, le prix Godecharle distingue un artiste promis à un bel avenir. Il lui permet surtout de supporter financièrement un séjour de deux ans à Paris (où il est frappé par les œuvres de Rodin, mais surtout par l’art nouveau) et un voyage à Londres où il retient, au British Museum, la perfection des formes classiques de l’art grec, avant de découvrir, en Italie, les chefs-d’œuvre de la Renaissance. Se forgeant sa propre esthétique, Victor Rousseau va construire une œuvre originale et totalement en marge de l’esprit de son temps. À côté de Constantin Meunier et de Léon Mignon, représentants du réel, Victor Rousseau se fait « sculpteur d’âmes ».

Professeur de sculpture à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles (1901-1919), directeur de la dite Académie (1919-1922, 1931-1935), il expose ses œuvres à l’Exposition de Charleroi en 1911. Grand Prix de Rome 1911, Grand Prix des arts plastiques (1931) et Prix des amis du Hainaut 1935, il se laisse voir dans les naïades et tritons qui ornent, depuis 1905, le Pont de Fragnée à Liège, dans les anges du monument destiné à César Franck (exposition de Bruxelles, 1925), dans la cour d’honneur de l’ancien château de Mariemont (Vers la Vie). Réfugié en Angleterre entre 1914 et 1919, il y réalise le Memorial in Gratitude à Londres. Si on voyage plus loin, le christ en croix de la cathédrale d’Oviedo retient le regard ; on trouve aussi de nombreux « Victor Rousseau » de formats beaucoup plus petits, en bronze, en plâtre, en terre cuite, ou sur des dessins au fusain et en aquarelles. Eugène Ysaye et Fernand Severin ont eu droit à leur buste.
 

Sources

Freddy JORIS, Natalie ARCHAMBEAU (dir.), Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 2005
Histoire de la Wallonie (L. GENICOT dir.), Toulouse, 1973, p. 568
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. II, p. 570-572 ; t. III, p. 357 ; t. IV, p. 232
Richard DUPIERREUX, Victor Rousseau, Anvers, 1944, coll. Monographie de l’art belge
Marcel BOUGARD, Victor Rousseau. Sculpteur wallon, Charleroi, Institut Destrée, 1968, coll. Figures de Wallonie
Denise VANDEN EECKHOUDT, Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 539