Le comté de Louvain en 1013

En réunissant le comté de Bruxelles (entre la Dyle et la Senne) à ses propriétés hesbignonnes de Louvain et à quelques biens épars, le comte Lambert Ier devient une personnalité importante. Tout en poursuivant une politique d’expansion dans ce qui deviendra la partie romane du Brabant, le digne successeur des Régnier au Long col et Régnier III n’hésite pas à s’opposer à l’empereur, à l’Église et encore moins aux voisins envahissants ou gênants. Avoué des (riches) abbayes de Nivelles (1003) et de Gembloux (1013) et des domaines qui en dépendent, il s’empare aussi de l’énigmatique pays de Brugeron au détriment de l’évêque de Liège, après la bataille de Hoegaarden (1013) ; ce territoire restera fort disputé tout au long des XIe et XIIe siècles et ne sera définitivement acquis au Brabant qu’en 1106, hormis quelques enclaves. En 1015, Lambert trouve la mort lors de la bataille de Florennes.

Références
Col ; ErCoverBbt ; VuBrbt69


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Le comté de Brabant en 1106

À partir de 1040, Lambert II Baldéric transfère le centre du comté de Louvain vers l'ouest et choisit Bruxelles où il fait construire de nouvelles fortifications et l’église saint Michel et où il transfère les reliques de sainte Gudule (1047). En 1085, lorsqu’il reçoit le comté de Brabant directement de l’empereur germanique, le comte de Louvain devient son landgrave. C’est à partir de ce moment que l’identification au Brabant se substitue progressivement à celle de Louvain. Ambitieux, comme son homologue de Limbourg, Godefroid Ier, comte de Louvain/Brabant, convoite le titre honorifique de duc de Basse-Lotharingie. En 1106, l’empereur retire ce titre au duc de Limbourg et l’accorde à Godefroid, montrant ainsi l’importance qu’il accorde à la maison de Louvain. Godefroid Ier obtient en même temps le marquisat d’Anvers et quelques autres terres : le Brabant s’étend désormais vers le nord, nord-est. En 1146, toutes les terres d’Église seront désormais soumises aux comtes. Ce n’est qu’en 1190 que Henri Ier s’attribuera le titre de duc de Brabant que conserveront ses successeurs.

Références
Col ; ErCoverBbt ; VuBrbt69


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Bouillon en croisade (1095-1100)

Répondant à l’appel du pape Urbain II (1095), Godefroid de Bouillon abandonne tous ses biens pour partir à la croisade. Il participe à la prise de Jérusalem (1099), refuse la couronne du royaume nouvellement formé, préférant le titre de Gardien de la Saint-Sépulcre, et meurt en 1100, sans héritiers directs.
L’impact provoqué par les faits d’armes de Godefroid en Terre Sainte a certainement conduit à créer un titre de duc de Bouillon dont s’honorèrent les princes-évêques (peut-être dès le XIIIe siècle) jusqu’en 1794 (les armes de Bouillon apparaissent toujours dans le drapeau de la province de Liège comme elles l’étaient dans celui de la principauté).

Références
Duby46 ; www_cm1099


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Les biens vendus de Godefroy de Bouillon (1095)

Comme beaucoup d’autres comtés carolingiens, le comté d’Ardenne a été progressivement démembré au profit de grandes familles aristocratiques locales, souvent turbulentes et régulièrement en conflit tant avec l’empereur qu’avec leurs voisins immédiats. La limite méridionale du comté avait été fixée sur la Semois, rivière qui est aussi utilisée comme critère de séparation entre la Basse et la Haute-Lotharingie. Alleu héréditaire de la maison d’Ardenne, le château (re)construit sur le contrefort de Bouillon au XIe siècle contrôle les passages.
Ses propriétaires sont des princes importants des familles d’Ardenne-Verdun : Godefroid Ier a été choisi comme duc de Basse-Lotharingie (1013-1023) et son frère Gothelon qui lui succède (1023-1044), dispose aussi du titre sur la Haute-Lotharingie (1033-1044). Le château revient ensuite à un autre Godefroy dont le nom va davantage passer à la postérité en raison de sa participation à la première croisade.
Rangé aux côtés de l’empereur dans la querelle des Investitures, Godefroy de Bouillon (1058 ?-1100) est récompensé par le titre de duc de Basse-Lotharingie (1087). Quand il vend son château au prince-évêque de Liège pour partir à la croisade, il a prévu que trois de ses descendants auraient le droit de racheter le duché au même prix, à défaut le duché resterait en possession perpétuelle de l’Église de Liège. Malgré des contestations, cette dernière option scelle le sort du comté de Bouillon. Liège doit employer la force pour conserver son acquisition (1141), avec l’aval de l’empereur (1155). À quelques distances du comté d’Ardenne-Bouillon, Liège exerce aussi son influence sur le domaine de l’abbaye de Saint-Hubert.

Références
ErCover ; HHWH59 ; WPH01-236


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Le comté de Namur au XIe siècle (1093)

Les convoitises de l’évêque de Liège sont telles que le comte de Namur perd progressivement des abbayes et les terres qui les accompagnent. De surcroît, les comtes du Hainaut et ceux de Louvain grignotent à leur tour les possessions des comtes de Namur qui étendent cependant leurs liens familiaux vers l’Ardenne : un mariage les unit au comté de Laroche (1065).

Références
Er-Cover ; HHWH24 ; MoDic2a ; MoDic2z


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La maison de « Luxembourg » au XIe siècle

En se disputant avec l’empereur Henri II qui avait épousé une des filles de Sigefroid, la nombreuse descendance directe de ce dernier se montre trop gourmande ; la maison de Luxembourg hypothèque d’autant plus ses espoirs de grandeur que Henri II meurt sans héritier. Après quelques temps plus difficiles, Frédéric – petit-fils de Sigefroid – devient duc de Basse-Lotharingie, mais surtout avoué de l’abbaye de Stavelot. Avec ses frères, il s’emploie à enraciner les « Luxembourg » et à créer un comté portant ce nom (XIe siècle).
Initiative de Conrad qui est le premier à porter le titre de comte de Luxembourg (1083), l’établissement d’un monastère à Luxembourg (abbaye Notre-Dame, devenue Munster) lie définitivement les héritiers de Sigefroid à cet endroit ; ils éprouvent néanmoins de réelles difficultés à constituer un ensemble territorial étendu, durable et indépendant. Les mariages et les alliances les attirent tant vers la Saxe et la Franconie que vers l’Aquitaine, la Flandre et le long de la Meuse. En 1136, Conrad reste sans héritier.

Références
AzKG-94 ; DHGe14 ; ErCover ; TrauLxb119


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Le Hainaut, fief de l’Église de Liège (fin du XIe siècle)

À la mort de Baudouin (1070), Robert le Frison, son frère, s’empare de la Flandre, en écarte tous les prétendants, et laisse le Hainaut à Richilde et à son fils Baudouin. L’union est rompue. Cherchant une aide extérieure (1071-1076), le comté de Hainaut devient un fief de l’Église de Liège, tout en conservant son autonomie politique. Jusque-là il était essentiellement compris dans le diocèse de Cambrai qui partageait le même statut qu’Arras, Boulogne, Thérouanne et Tournai au sein de l’archevêché de Reims. Le diocèse de Tournai ne redevient distinct de ses voisins immédiats qu’en 1146.
Vers 1245, il semble que l’incorporation « temporelle » ne se réalise pas et le comté de Hainaut n’intègre pas la principauté de Liège. En 1408, après la bataille d’Othée, le comte de Hainaut brise le lien féodal avec le diocèse de Liège ; prince-évêque issu de la même famille (Wittelsbach) que le comte du Hainaut, Jean de Bavière ne s’oppose pas à cette mesure.

Références
ANA ; AzKG-94 ; Bo ; DCM17, 20 ; Er35c ; WPH01-219


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Réunion des comtés de Flandre et de Hainaut sous la couronne de Baudouin VI et de Richilde (1067-1070)

Par son mariage avec Richilde, Baudouin – dont le père est comte de Flandre – devient comte de Hainaut sous le nom de Baudouin Ier (1051-1070). À la mort de son père, il hérite du comté de Flandre et, pendant trois années, Hainaut et Flandre sont réunis sous une même couronne (1067-1070). Baudouin VI ne survit que trois années à la mort de son père. Les deux comtés reviennent alors à des souverains différents.

Références
ANA ; Bo ; DCM17; DCM20; Er35c; WPH01-219


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Chartes et franchises (XIe – XIVe siècles)

À partir des Xe-XIe siècles, la prospérité des bourgeois des villes devient telle qu’ils revendiquent la reconnaissance de leur spécificité et le droit d’intervenir dans la vie de la cité. Au terme de vives négociations et rapports de force, des privilèges et « libertés » sont concédés par le seigneur. Pour éviter l’oubli… et dans la mesure où la versatilité des familles princières est assez grande, ces franchises vont être progressivement consignées par écrit. Quand la grande bourgeoise prend les commandes sur le plan communal, les petits réclament à leur tour, souvent par la force, une place dans la gestion des affaires de la cité. Unis en « conjuration » ou en « communes », les bourgeois prêtent serment et s’efforcent ainsi d’obtenir des garanties. Ces mouvements dits « communaux » se déroulent d’abord en Italie puis en Espagne où plusieurs villes obtiennent une charte de libertés : Gênes (959), Crémone (996) et Savone (1014), ainsi que Léon (1020). Dans la partie septentrionale de l’Europe, c’est Huy (24 août 1066) qui obtient la première charte de franchises connue à ce jour.
Huy ne devient pas totalement libre du jour au lendemain mais ses bourgeois sont reconnus comme « communauté », obtiennent des privilèges et le processus d’émancipation urbaine est entamé. Il devait exister d’autres contrats négociés entre le prince et ses gens sur des aspects plus restreints (liés à un métier ou au domaine économique, politique ou militaire), mais l’attribution de chartes plus générales caractérise nos régions dès le XIe siècle. Quand, vers 1196-1200, le prince-évêque Albert de Cuyck accorde une charte contenant 23 articles, pour s’attacher davantage les bourgeois de la cité de Liège, il est précisé que ceux-ci disposaient déjà de privilèges plus anciens. À Tournai, dont le statut reste longtemps particulier, une charte semble avoir été promulguée vers 1187. À Namur, la charte qui inspirera tout le comté remonte à la fin du XIe siècle et la charte de Valenciennes (1114) sert de modèle pour le comté de Hainaut. En 1212, Fontaine-l’Évêque dispose de son propre texte. En effet, l’octroi de chartes importantes conduit à la création de véritables familles de droits urbains, l’exemple d’une grande ville étant imité par une série de localités plus petites.
Au XIVe siècle, bourgeois des villes, clergé et noblesse constituent ensemble les trois états ; très régulièrement sollicités financièrement par leur seigneur, ils finissent par exiger des garanties pour le respect des lois et franchises d’une part, contre ses abus financiers d’autre part. De nouvelles chartes sont rédigées ; leurs dispositions s’appliquent à l’ensemble d’un territoire plus vaste (Paix de Fexhe, 1316, Joyeuse Entrée 1356). En 1332, Jean l’Aveugle, comte de Luxembourg et roi de Bohême, accorde à Bastogne le statut de ville libre par une charte de franchise.


Référence
JoAn-103


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La fin des Régnier (998-1051)

Dans le dernier quart du Xe siècle, le roi de France aide les Régnier à récupérer la plupart de « leurs » biens et l’on retrouve des enfants Régnier à la tête des comtés de Louvain et de Hainaut. Par les jeux d’alliance et les guerres, les Régnier IV et V, ainsi que Herman s’empressent d’ailleurs d’agrandir leurs territoires notamment au détriment des marches de Valenciennes et d’Éname. Chièvres et Alost appartiennent alors à la maison de Verdun, mais, au fil des conflits, le comte de Flandre qui est aussi ambitieux que les Régnier, se retrouve maître du comté de Chièvres dans l’ancienne marche d’Ename, alors que le Hainaut possède le reste de cette marche, c’est-à-dire les terres situées au nord, sans lien direct avec le Hainaut. En 1047, les deux familles décident d’un échange, et c’est ainsi que l’ancien comté de Chièvres intègre celui de Hainaut et que l’Escaut est atteint et même débordé en 1047, avec la cession de Valenciennes et ses environs, vers l’Ostrevant.
D’abord terre d’empire, circonscription administrative ensuite, le Hainaut s’est détaché progressivement de toute autorité souveraine pour devenir une principauté quasi autonome, mais dépendante de la lignée seigneuriale (XIe siècle).
À la mort de Herman en 1051, sa veuve, Richilde, déjà fort active dans les affaires du comté, déjoue les difficiles relations entre Germanie et Francie, mais ne peut éviter un mariage avec le fils du comte de Flandre, le futur Baudouin VI qui règnera sur la Flandre de 1067 à 1070. Depuis le IXe siècle, les comtés de Hainaut et de Flandre se sont en effet développés parallèlement et la limite « naturelle » que constitue l’Escaut a déjà été contestée à diverses reprises, les dynastes cherchant à s’étendre par-delà le fleuve.

Références
ANA ; Bo ; DCM17; DCM20; Er35c; WPH01-219


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