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Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Statue Joseph LEBEAU

Statue Joseph Lebeau, réalisée par Guillaume Geefs, 16 août 1869.


Située au cœur d’une place transformée en rond-point, à l’intersection des avenues Godin-Parnajon, Ch et L. Godin, Delchambre et Joseph Lebeau, à Huy, une imposante statue émerge dans le paysage urbain, rendant hommage à « l’un des pères de la Belgique de 1830 », le hutois Joseph Lebeau (1794-1865). Très vite après son décès, les autorités communales ont pris l’initiative d’ériger un monument à la mesure de leur concitoyen disparu. 

Le sculpteur Guillaume Geefs fut chargé du bronze, tandis que le piédestal était dessiné par Vierset-Godin. L’inscription est minimaliste : « A Joseph Lebeau ».


L’inauguration ne tarde guère : le 16 août 1869, à une date qui ne correspond à aucun élément biographique de Lebeau, c’est en grandes pompes que les autorités locales célèbrent l’achèvement du monument. Vêtu d’une longue veste où sont représentées ses principales décorations, Joseph Lebeau se tient debout, la main droite légèrement tendue vers l’avant, tandis que la gauche tient un document qui évoque le texte de la Constitution belge. À l’arrière de sa jambe gauche, un bloc rectangulaire présente les armoiries belges sur ses côtés ; il est recouvert d’un drap. Quant au visage de Lebeau, il présente des traits fermes et décidés.


L’œuvre est due au sculpteur anversois Guillaume Geefs (1805-1883), qui signe sa réalisation par la mention « Gme Geefs/statuaire du roi/Bruxelles » gravée dans le bronze. Formé à l’Académie d’Anvers, le jeune Geefs avait été très rapidement repéré par ses professeurs. Une bourse lui a permis de parfaire sa formation à Paris et, à son retour, il était nommé professeur de sculpture à l’Académie d’Anvers (1833-1840). Membre de la classe des Lettres de l’Académie dès 1845, il la préside de 1858 à 1883. Il était membre de l’Institut de France. Présent dans différents salons, il s’impose avec le modèle de la statue du Général Belliard et le monument funéraire du comte Frédéric de Mérode. 

Le jeune royaume de Belgique venait de trouver l’un de ses sculpteurs capables de figer dans la pierre (ou le bronze) les personnes et les événements les plus illustres du pays. Répondant aux multiples commandes destinées à orner les églises, les places, les édifices, les cimetières ou les salons de toute la Belgique, il livre à Anvers une statue de Rubens (1840) et à Liège, celle de Grétry (1842), avant de réaliser de nombreuses statues de Léopold Ier. C’est donc un artiste renommé qui réalise, pour Huy, la statue en l’honneur de celui qui contribua à la naissance de la Belgique et qui, lui aussi, fut un proche du premier roi des Belges.


Joseph Lebeau avait vingt ans quand fut constitué le Royaume-Uni des Pays-Bas. Jeune universitaire, diplômé en Droit de l’Université de Liège en 1819, il se passionne pour la politique et va être un acteur décisif dans les événements de 1830 et 1831. Député du Congrès national, il est membre de la Commission chargée de rédiger le projet de Constitution pour le nouvel État, étape décisive de la vie de Lebeau que G. Geefs a illustrée. Partisan d’un statut de monarchie constitutionnelle, il est ministre des Affaires étrangères durant la Régence et, tacitement, occupe le poste de chef du gouvernement jusqu’à la prestation de serment du roi Léopold. Ministre à plusieurs reprises, premier gouverneur de la province de Namur (1834-1840), il dirige le tout premier et éphémère gouvernement libéral homogène (1840-1841). Député jusqu’en 1863, il représente tour à tour Huy (1831-1833), Bruxelles (1833-1848) et Huy (1848-1864). En 1857, il est nommé Ministre d’État.


À de multiples reprises, le monument Lebeau a été l’objet de commémorations. Ainsi, par exemple, dans les années soixante, à la fin septembre, les militants wallons de Huy, qu’ils soient de Wallonie libre ou du Rassemblement wallon, s’y donnaient rendez-vous. Autre exemple, en septembre 1994, ce sont les autorités locales qui organisent une manifestation à l’occasion du bicentenaire de la naissance de Joseph Lebeau. Une plaque est alors apposée sur le piédestal, mentionnant une citation datant de 1819 :

 « Tous les hommes ont la même origine, la même patrie, les mêmes droits.
L’humanité est aussi outragée sur les rives du Tage, du Bosphore, de la Plata, du Sénégal, qu’elle le serait sur les bords de la Meuse et de la Seine, et pour nous, le jour de la victoire doit être celui où le sang des hommes sera partout respecté et leurs droits reconnus et sanctionnés sur les deux hémisphères.
Joseph Lebeau, 1879.

Bicentenaire de la naissance de Joseph Lebeau, inauguré le 27-9-1994 par Madame Anne-Marie Lizin-Vanderspeeten députée-bourgmestre de Huy 


Sybille VALCKE, dans Jacques VAN LENNEP, La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 415-417
A. FRESON, dans Biographie nationale, t. XI, 1890-1891, col. 503-517
Joseph Lebeau Recueil d’articles sur Joseph Lebeau 1794-1865, Huy, 1980
Joseph Lebeau. Commémoration du centième anniversaire de sa mort en 1865. Expositions de documents. Catalogue par R. Thielemans, Conservateur aux Archives générale du royaume, Bruxelles, 1965

Monument Joseph Lebeau

 

Avenue Godin-Parnajon 

4500 Huy

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Monument Désiré MERCIER

Légèrement en retrait de la chaussée de Mont Saint-Jean, devant le collège cardinal Mercier, se dresse l’imposant monument dédié au prêtre mais aussi et surtout à l’enseignant. La sculpture représente en effet le professeur-cardinal en dialogue avec un jeune étudiant en culotte courte, portant sa mallette sous son bras gauche et son calot dans la main droite. 

Réalisée en 1931, la sculpture ne sera hissée sur son socle et inaugurée que le 30 juin 1935, en présence du roi Léopold III et de la reine Astrid, comme le montre notamment une série de chromos imprimés par les chocolats « Côte d’Or », démarche qui symbolise à elle seule l’importance de l’événement auquel prirent part également le Cardinal Van Roey, le nonce apostolique Micara, plusieurs évêques, ministres et ambassadeurs. 

D’ailleurs, événement rare pour l’érection d’un monument, une cérémonie officielle a eu lieu le 17 juillet 1933 pour la bénédiction et la pose de la première pierre dudit monument ! Des discours y furent déjà prononcés, notamment par le cardinal Van Roey, le ministre de la Prévoyance sociale, Henri Carton de Wiart, et par Charles de Preter, président du comité exécutif responsable du projet. 

Le Collège Cardinal Mercier est alors en pleine phase de construction ; il a été souhaité par le cardinal qui a béni la première pierre en juin 1924 ; quelques mois avant sa disparition, il a fait une visite surprise sur le chantier, témoignant ainsi de son intérêt tout particulier pour le projet. Il ne verra cependant pas l’inauguration de cet important établissement d’enseignement primaire et secondaire dont il avait ardemment défendu la création dans sa ville natale. 
 

Statue Cardinal Mercier (Braine l’Alleud)

Les plans initiaux du Collège sont l’œuvre de l’architecte Henri Vaes qui s’occupe également de définir l’implantation du monument en l’honneur du 

Cardinal Mercier. Érigé en 1935 par l’entreprise Legrève frères, il est quelque peu décentré par rapport à la façade principale. Situé sur le côté gauche lorsqu’on fait face à l’entrée du Collège, il apparaît d’autant plus imposant que l’ensemble est surélevé par rapport à la chaussée et que la sculpture en bronze est elle-même posée sur un socle composé de 9 rangées de hauts blocs de pierre rouge.  

Au pied du socle, dans un angle créé pour faire apparaître une longue croix dans le relief de la pierre, apparaît la simple mention, aujourd’hui en lettres blanches sur fond noir : 1851 -  CARDINAL MERCIER - 1926.

À l’origine, on trouvait le même texte, mais en lettres noires sur la pierre rouge polie. 

Confié au R.P. Ephrem-Marie de Kcynia (ou Ephram-Maria de Czynia ou de Kzynia), le groupe monumental était déjà achevé en 1931. Un jeune étudiant avait posé pendant une quinzaine de jours pour ce statuaire polonais qui réalisait alors aussi la statue en bronze du Cardinal destinée aux jardins de l’Institut supérieur de Philosophie de Louvain. Pour Leuven, il représente le cardinal absorbé dans son travail d’écrivain ; pour Braine-L’Alleud, dans un style identique, il lui donne une autre stature. Familier du cardinal Mercier, Ephram-Marie de Kcynia est le dernier prêtre consacré par celui-ci. Ensemble, Mercier et de Kcynia avaient édité un ouvrage, Fioretti, les petites fleurs de S. François d’Assises où le cardinal signa la préface et l’artiste polonais une série d’aquarelles. En 1923, celui-ci signe encore une série de huit aquarelles pour illustrer l’ouvrage d’Arnold Goffin, Le Cantique des créatures de Saint-François d’Assise. Il réalisera d’autres aquarelles religieuses.  

 

- Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse 
- Xavier CAMBRON, Si le Collège m’était conté…, Braine-l’Alleud, éd. IdéeLumineuse, s.d. 
- Chronique de l’Institut supérieur de Philosophie, dans Revue néo-scolastique de philosophie, 33e année, n°30, 1931, p. 241-244 
- http://www.wiki-braine-lalleud.be/index.php5?title=Coll%C3%A8ge_Cardinal_Mercier_-_Ann%C3%A9es_1930  

Chaussée de Mont Saint-Jean 83
1420 Braine l’Alleud

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Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Monument Louis PIERARD

Dans la cité Louis Piérard, à Frameries, à un endroit de la partie extérieure de la rue des Templiers, surgit un espace arboré qui accueille, depuis 1959, un monument consacré à un écrivain et à un homme politique très attaché à son Borinage natal, qui fut aussi un très grand amateur d’art et l’ami de nombreux artistes. Huit années après sa disparition, les autorités de Frameries ont décidé de lui dédier un monument et ont confié sa réalisation au sculpteur André Hupet (Grand-Reng 1922 – Ciply 1993).

Monument Piérard

Le sculpteur André Hupet

Formé à l’Académie de Mons auprès de Louis Buisseret (1937-1947), Prix Godecharle 1947 (pour La Dense, Mons, théâtre communal), André Hupet est un sculpteur qui a rapidement été sollicité dans la région de Charleroi, après la Seconde Guerre mondiale, pour assurer la décoration du Palais des Expositions (1953), du Palais des Beaux-Arts (1957) et du Palais de Justice (1964). On le retrouve ensuite à Gembloux (Institut agronomique), puis à Mons (Faculté polytechnique en 1962, Lycée Bervoets en 1965), etc. 

Ses œuvres monumentales (principalement des allégories) ne passent pas inaperçues, mais ce ne sont pas ses seules réalisations. Céramiste, il a été membre de la « Maîtrise de Nimy » dès 1943, et a participé à l’expérience communautaire de Raoul Godfroid dans le cadre de la Manufacture impériale et royale de faïenceries. Il expose énormément dans les années 1940 et 1950, tant à l’étranger que sur ses terres. 

Dessinateur, créateur de tapisseries, il est également peintre ; figuratif, il se range dans le courant expressionniste, sans qu’il s’agisse de sa seule marque stylistique. Professeur à l’Académie de Mons à partir de 1948, André Hupet enseigne aussi à l’École supérieure d’Architecture (1948) et à l’École normale secondaire de Mons (1954). 

Au tournant des années 50 et 60, il est sollicité pour figer définitivement les traits de personnalités de l’ouest wallon comme Alex de Taeye (1957), Louis Piérard (1958), Achille Delattre (1959), Achille Liénard (1965), René Thône (1970) et Edmond Yernaux (1970). C’est après avoir contribué à la décoration des Écoles de la cité Louis Piérard à Frameries, en 1956, qu’André Hupet est sollicité pour ciseler un portrait de Louis Piérard à placer dans l’espace public. Il réalise un bronze qui colle au plus près au profil gauche de l’écrivain et l’incruste sur une sobre colonne en pierre bleue. Sur la face avant, la dédicace est elle aussi minimaliste :


LOUIS
PIERARD

1886 – 1951

L’ensemble est placé sur une esplanade arborée, où deux saules pleureurs créent une atmosphère quiète et sauvage. Peut-être faut-il voir là une allusion à l’action que mena Louis Piérard pour sauver le bois de Colfontaine, mais ce ne serait là qu’un aspect anecdotique, tant les activités de Louis Piérard furent denses et variées. 

Louis Piérard

Descendant d’une lignée de porions, Louis Piérard était né à Frameries à la veille de l’émeute ouvrière qui frappe le pays wallon durant le printemps 1886. En a-t-il été influencé ? Toujours est-il que ce fils de commerçants mènera une carrière politique en tant que représentant du POB. Conseiller communal (1932), puis bourgmestre de Bougnies (1933-1948), il représente l’arrondissement de Mons à la Chambre pendant de nombreuses années (1919-1951). Tribun polémiste, il dépose notamment une loi instituant l’Œuvre nationale des Loisirs du Travailleur (1922) ; aussi devient-il en 1929 président du Conseil supérieur de l’Éducation populaire. Se définissant volontiers comme un Wallon ardemment francophile, grand voyageur, polyglotte, Louis Piérard taquine la plume avec passion. Écrivain, critique d’art, reporter, journaliste, essayiste (Visages de la Wallonie, 1934), ce boulimique est encore l’organisateur d’expositions de peintures et de spectacles théâtraux. Grand amateur d’art, il fait renaître la section d’art du Parti ouvrier belge (1924). Militant wallon, il soutient la Lettre au roi de Jules Destrée, tout en naviguant dans les milieux belges, entre le modèle d’une Belgique française et celui d’une Wallonie plus autonome.



Marinette BRUWIER, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, 2001, t. III, p. 1268-1269.
Alain JOURET, dans Nouvelle Biographie nationale, 2001, t. VI, p. 311-317.
La Vie wallonne, IV, 1951, n°256, p. 295-296.
http://www.andrehupet-artiste.be/biographie.htm (s.v. juin 2014)
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 734.

cité Piérard, rue des Templiers – 7080 Frameries

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Paul Delforge

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Buste Félicien ROPS

Buste en hommage à Félicien Rops, réalisé par Charles Delporte, 12 mai 1988.

Si la ville de Namur a fini par accorder beaucoup d’attention à la mémoire de Félicien Rops, né dans la cité mosane en 1833, une autre localité a aussi compté dans la vie de l’artiste : par son mariage avec Charlotte Polet de Faveaux (1857), le peintre va habiter régulièrement dans le château familial des Polet, à Thozée. C’est là, à partir de 1869, qu’il donnera des leçons de gravure. Classé par la Région wallonne en 1996, le château de Thozée accueille l’asbl Fonds Félicien Rops qui perpétue la mémoire de son ancien propriétaire. À moins de trois kilomètres du château, un buste commémore la présence de Rops dans l’entité de Mettet. Il est situé devant la maison communale, place Joseph Meunier, et est l’œuvre de Charles Delporte.

Frère du poète Jacques Viesvil et du chanteur Paul Louka, Charles Delporte (1928-2012) avait entamé une carrière d’instituteur dans le pays de Charleroi qui l’a vu naître, avant de se consacrer entièrement à l’art : s’il commence à sculpter en 1947, sa première exposition remonte à l’année 1952 (Charleroi), mais la peinture le passionne également. Créatif à l’originalité débordante, artiste contemporain, il découpe lui-même son parcours artistique en trois périodes : génétique (il privilégie alors les formes ovoïdes et embryologiques) ; géophysique (son graphisme s’inspire alors de la science et des mathématiques) ; nucléaire enfin (ses formes évoquent des mouvements d’électrons). Si ses réalisations provoquent souvent la perplexité du spectateur, voire des critiques, Charles Delporte n’a de cesse de les promouvoir, exposant aux quatre coins de la planète, n’hésitant pas à offrir certaines d’entre elles à des musées prestigieux ; il parvient à obtenir un espace d’exposition permanent à Mont-sur-Marchienne, tandis qu’un musée lui est consacré dans l’ancienne école communale de Damme. Catholique fervent, royaliste revendiqué et Wallon passionné, Charles Delporte jouit d’une notoriété toute particulière dans le pays de Charleroi en raison de ses trois coqs situés au milieu du rond-point du boulevard Tirou. Sculpture acquise par la ville dans les années 1990, cette œuvre s’intitule en réalité Chantre de la liberté. Ce n’est d’ailleurs pas le seul rond-point occupé par des œuvres monumentales de Charles Delporte en Wallonie, comme à Bruxelles et en Flandre.

Également poète et musicien, il signe plusieurs bustes de Félicien Rops, dont une très originale version à Mettet.
Sur une dalle dressée, en marbre Sainte-Anne, un moulage bronzé figure la tête barbue de Félicien Rops dans un cadre particulier puisqu’elle apparaît entre des ramures de cerf. Sur le socle, une petite plaque en bronze indique :


HOMMAGE A ROPS
DELPORTE
1988


Inauguré en mai 1988 en présence du gouverneur de la province de Namur, d’une petite-fille de Félicien Rops et de Charles Delporte, le buste rend hommage à un artiste wallon des plus exceptionnels. Peintre, aquafortiste, dessinateur, illustrateur et graveur, Félicien Rops (Namur 1833 – Essonnes 1898, et enterré à Mettet), fut sa vie durant un provocateur qui n’avait consenti à aucun sacrifice pour éviter de tomber dans un purgatoire justifié seulement par la pudibonderie de son temps. Dans les milieux artistiques que fréquente le jeune Rops alors qu’il est inscrit aux cours de Droit de l’Université libre de Bruxelles au milieu du XIXe siècle, on a très vite reconnu le talent du caricaturiste et du lithographe. Illustrateur des Légendes flamandes (1858) de Charles de Coster, il est poussé par Charles de Groux et Constantin Meunier. Maîtrisant toutes les techniques (vernis mou, pointe sèche, aquatinte), il excelle dans la gravure à l’eau-forte qu’il a étudiée à Paris. Illustrateur de Baudelaire (Épaves en 1866, et les poèmes condamnés des Fleurs du mal), Rops devient l’un des illustrateurs les plus recherchés de la capitale française où il s’installe définitivement en 1874, sans renoncer à voyager à travers l’Europe et l’Amérique du Nord, ni à revenir régulièrement en bord de Meuse. Il en ramène d’éblouissants paysages ; mais à côté de cette peinture à l’huile, le dessinateur continue d’affoler les bourgeois bien-pensants par ses thématiques provocatrices. Membre du Groupe des XX, Félicien Rops a encore croisé la route d’Armand Rassenfosse (1886). De leur profonde amitié naissent une technique particulière de gravure et un vernis mou transparent, au nom évocateur, le « Ropsenfosse ».

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
André LÉPINE, 80 monuments insolites d'Entre-Sambre-et-Meuse, Cerfontaine, 1989, p. 28
Wallonia 1912, p. 561
La Vie wallonne, 15 août 1921, n°12, p. 573 ; 15 octobre 1925, LXII, p. 81 ; 15 décembre 1925, LXIV, p. 133-146 ; octobre 1933, CXLVIII, p. 66-68
Maurice KUNEL, dans Biographie nationale, t. 33, col. 627-63

 

Buste Félicien Rops (Mettet)

Place Joseph Meunier
5640 Mettet

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Plaque Paul VERLAINE

Plaque commémorative Paul Verlaine, dessinée par l’architecte Jules Ghobert, 26 juin 1932.


« Paliseul ou Jéhonville », Belgique, par Sedan et Bouillon (Verlaine).
Entre Paliseul, Bertrix, Bouillon, Corbion, Sedan et Jéhonville, les références à Paul Verlaine sont nombreuses dans l’espace public, presque autant que les allusions à cette région dans l’œuvre de l’écrivain. « Car (…) Verlaine restait foncièrement attaché au pays de ses aïeux, et l’atmosphère ardennaise est constamment présente au fil de ses écrits, en un jeu continu de miroirs » (CHANTEUX-VAN GOTTOM, p. 10). Les relations entre Paul Verlaine et l’Ardenne wallonne sont intimes. En 1924, Paul Dresse avait été l’un des premiers à établir dans le détail « l’ascendance paternelle ardennaise » de l’écrivain et à mettre en évidence les affinités ardennaises du poète dans son œuvre. Le père Verlaine, Nicolas, est originaire de Bertrix (1798-1865) ; d’autres membres de sa famille résidaient dans la région, dont une de ses tantes (Henriette, épouse Grandjean, 1796-1869) qui avait offert son château de Carlsbourg aux frères des Écoles chrétiennes. Pendant plusieurs étés, entre 1849 et 1873, Paul Verlaine séjourne régulièrement entre la Lesse et la Semois, dans un pays et auprès de gens qui marqueront durablement son imaginaire :

« L’endroit où demeurait ma tante est, à trois lieues de Bouillon, un tout petit chef-lieu de canton, Paliseul […] Un joli site perché, qui corrige l’âpreté un peu des toits trop uniformément en ardoises… » (Croquis de Belgique, 1895).
Né à Metz au hasard des affectations professionnelles de son père, c’est à Paris que Paul Verlaine (1844-1896) grandit ; sa famille s’est installée dans la capitale française après la démission du père Verlaine de la carrière militaire (1851). Mis en pension durant sa scolarité, l’adolescent exprime déjà son mal-être et ne s’attardera pas dans les études. Employé municipal, le jeune Verlaine est surtout attiré par l’écriture : son premier recueil de poésies paraît en 1866, mais un premier amour impossible le tourmente ; alcool et violence altèrent définitivement le comportement de celui qui, coup sur coup, voit son mariage éclater et sa situation professionnelle perdue : il est renvoyé de la mairie parisienne pour avoir soutenu les Communards (1871). Sa relation tumultueuse avec Arthur Rimbaud s’achève à Bruxelles : pour avoir blessé son ami au poignet au cours d’une bagarre violente, il est condamné et privé de liberté dans la prison de Bruxelles puis à celle de Mons jusqu’en 1875. Au terme de sa peine réduite, il a retrouvé la foi catholique et il devient professeur. Après avoir donné des cours en Grande-Bretagne, il atterrit à Rethel où il entretient une relation singulière avec l’un de ses élèves (1877-1883) qui se termine à nouveau tragiquement. Bien que reconnu comme un maître, voire comme un précurseur par les défenseurs du symbolisme, Verlaine ne s’en remettra jamais, décédant à Paris d’une congestion pulmonaire à l’âge de 51 ans. Désigné « Prince des Poètes » en 1894, le poète maudit, auteur en 1895 de Croquis de Belgique, laisse une œuvre majeure et son souvenir fait l’objet d’une attention toute particulière dans le pays où il vécut une partie de sa jeunesse.
Sur un côté de la future « Maison Paul Verlaine », qui appartenait alors à Paul Poncelet, notaire et bourgmestre de Saint-Hubert, à l’angle de la rue Paul Verlaine et de la petite ruelle qui revient vers la Grand Place de Paliseul, une plaque rappelle une période importante de la vie de l’entité :


ICI
JOUA
PAUL
VERLAINE


PLACÉ PAR LES ÉCRIVAINS ARDENNAIS
LE 26 JUIN 1932


L’initiative de cette plaque sobrement décorée en revient aux Écrivains ardennais, coutumiers de ce genre de démarches. Lors de l’inauguration, de nombreuses personnalités officielles avaient fait le déplacement, dont Jules Poncelet, député du Luxembourg et président de la Chambre en exercice, Jules Destrée en tant que représentant officiel de l’Académie de Langue et de Littérature françaises de Belgique, et le Consul de France Fernand Sarrien. Autour de Thomas Braun et de très nombreux écrivains ardennais et d’ailleurs (comme Marcel Thiry ou Olympe Gilbart), les autorités locales représentées par le bourgmestre Poncelet avaient également réussi à faire venir différentes personnalités françaises (dont l’éditeur des œuvres de Verlaine). Outre la lecture de poèmes, Thomas Braun, J-P. Vaillant et Henri d’Acremont avaient préparé chacun un discours, tandis que Jules Destrée s’adressa au nombreux public en une brève improvisation.

Dessinée par l’architecte Jules Ghobert, la plaque fournie par les Ardoisières de Martelange est une allusion à la proximité de l’endroit où le jeune Paul Verlaine venait jouer avec Hector Perot (de 12 ans son aîné), dont le père Joseph, percepteur des postes, fut bourgmestre de Paliseul : les Perot habitaient la maison aujourd’hui appelée Paul Verlaine. Elle évoque aussi l’amitié de Verlaine avec le jeune Jean-Baptiste Dewez (1841-1899) qui deviendra le directeur du collège Juste Lipse à Louvain (1871). Quant à la matière de la plaque commémorative, il s’agit de schiste d’Ardenne, évocation à la fois des ardoises d’écriture des écoliers de cette époque et des ardoises de couverture des toits typiques de la région. Au milieu des années 1970, quand est inauguré un complexe culturel avec salles polyvalentes, une inscription est placée au-dessus de la porte d’entrée principale. Il s’agit de cette phrase de Verlaine :


au pays de mon père
on voit
des bois sans nombre…


Si Paul Verlaine est définitivement attaché à la littérature de la France et si l’Ardenne occupe une place indéniable dans son œuvre, il est une hypothèse formulée par Guy Gilquin sur l’influence qu’a pu avoir Verlaine sur l’émergence d’un milieu artistique dans cette partie de la Wallonie, et pas seulement sur Albert Raty : « Avec ses vers fameux, Paul Verlaine n’a-t-il pas été l’élément qui fit prendre conscience aux artistes et poètes wallons de leur existence et du potentiel inspirateur que constituait cette région éloignée des centres urbains ? » (GILQUIN, cité par CHANTEUX-VAN GOTTOM, p. 13).
Quant à Jules Ghobert (Wéris 1881-Bruxelles 1971), après sa formation en architecture à Saint-Luc Liège, il s’adonne tant à la peinture, à la lithographie qu’à l’architecture, cette dernière étant son activité professionnelle principale. Auteur d’un inventaire des constructions rurales et traditionnelles (1914), il signe les plans de nombreuses habitations privées, tant à Bruxelles qu’à Louvain pour l’essentiel, au lendemain de la Grande Guerre. Cet ami de Charles Counhaye partage avec le Verviétois le goût du monumental et du luminisme et, comme lui, est rattaché à l’école du fauvisme brabançon. Ensemble, il contribue à l’aménagement intérieur de l’abbaye de Tongerlo (1920-1935), tandis que Ghobert réalise aussi des commandes de monuments commémoratifs, comme à Paliseul, ou funéraires. Ayant participé sans succès à plusieurs concours internationaux d’architecture, il remporte, en 1937, celui de l’aménagement du complexe du Mont-des-Arts, à Bruxelles. Après moults péripéties dues à l’indécision des autorités, il collabore avec Maurice Houyoux pour établir les plans définitifs d’un projet qui évolue sans cesse et qui occupera trente années de sa carrière : les travaux sont exécutés entre 1954 et 1969. L’ensemble comprendra finalement bibliothèque, palais des congrès, cabinet des Estampes et archives et marquera durablement le cœur de Bruxelles.

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse 
La Vie wallonne, décembre 1922, n°28
Paul DRESSE, dans Les Cahiers mosains, 15 février 1924, n°1, p. 9-11
Danielle CHANTEUX, Paul Verlaine et l’Ardenne : regard singulier d’enfance, Neufchâteau, Weyrich, 2011
Jean ISTACE, Les séjours de Paul Verlaine à Paliseul, dans Terres d’Herbeumont à Orchimont, bulletin n°39, 2013, p. 16-28
La Grive, octobre 1932, cité par Jean ISTACE
Exposition « Verlaine, Ardennais de souche et de cœur », et vidéo du Gsara, cfr http://gsara.tv/outils/verlaine-adrennais-de-souche-et-de-coeur/ 
http://www.tvlux.be/video/paliseul-paul-verlaine-et-l-ardenne_10040.html
http://balat.kikirpa.be/peintres/Detail_notice.php?id=2526 (s.v. juillet 2015)
Exposition Verlaine, cellule n° 252. Turbulences poétiques, Mons, capitale culturelle 2015, musée des beaux-arts 2015-2016
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 622

 

Plaque Paul Verlaine (Paliseul)

Rue Paul Verlaine
6850 Paliseul

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Paul Delforge

Statue Charles-Joseph de LIGNE

Statue à la mémoire du prince Charles-Joseph de Ligne, réalisée par Charles Brunin, 1882-1883. 



Située sur la place principale de Beloeil, une imposante statue rend hommage au prince Charles-Joseph de Ligne (1735-1814). Militaire, diplomate, écrivain, Charles-Joseph Lamoral, prince de Ligne, a servi plusieurs cours impériales et princières ; il a brillé dans les salons parisiens et, l’écrivain a publié une trentaine d’ouvrages, les uns consacrés à l’art de la guerre, les autres au théâtre ; romancier, autobiographe et mémorialiste, « ce prince cosmopolite » tenait ses quartiers dans la prestigieuse résidence royale qu’il possédait à Beloeil. Il paraissait dès lors naturel que cette localité accueille à un endroit central un monument rendant hommage à ce personnage illustre du XVIIIe siècle. À l’initiative de l’État, une statue est commandée à Charles Brunin (1841-1887).
Formé à l’Académie de sa ville natale auprès d’Étienne Wauquière, le montois Charles Brunin a suivi les cours de sculpture de Joseph Geefs à Anvers (1865-1868), avant de rejoindre à Bruxelles les cours d’Eugène Simonis. S’il ne remporte pas le Prix de Rome, il est aidé par la ville de Mons et fait de courts séjours en Italie (1871, 1873). Remarqué aux différents salons où il expose des œuvres de son inspiration, souvent des bustes « de type populaire italien » qui ont beaucoup de succès, il est nommé professeur de sculpture à l’Académie de Mons en 1875. C’est vers 1877-1878 que lui est commandée la statue du prince de Ligne. Il s’agit de la première d’une série d’autres commandes publiques ; ce seront cependant davantage des allégories qui lui seront demandées par la suite. Renonçant à son emploi à Mons (1882), pour s’installer à Bruxelles plus près des commanditaires publics, Brunin devait décéder subitement en 1887 alors qu’il réalisait la maquette du monument Dolez pour la ville de Mons.
La réalisation de la statue du prince de Ligne ne s’est pas déroulée dans les meilleures conditions. Dès 1878, l’artiste avait présenté une maquette de son sujet lors d’un Salon à Bruxelles. Chargée de valider le projet de Brunin, la Commission des Monuments exigea un certain nombre de modifications que l’artiste n’accepta pas ; selon un expert, l’élégance du prince était exagérée et l’allure générale donnait l’impression que le prince allait se mettre à danser ; un procès s’en suivit, semble-t-il, avant que, finalement, la Compagnie des Bronzes de Bruxelles ne procède à la fonte, en 1882. Le monument Charles de Ligne pouvait être inauguré. La statue représente le spirituel écrivain debout, habillé en costume de cour, donnant l’impression de tenir une conversation plaisante. Sur un socle carré, la statue trône au centre de la place principale du village de Beloeil. Le piédestal porte l’inscription :


LA COMMUNE DE BELOEIL
Au FELD-MARÉCHAL
CHARLES-EUGÈNE-LAMORAL,
PRINCE DE LIGNE.
3 MAI 1735—13 DÉCEMBRE 1814


Plusieurs hommages seront rendus à cet endroit, notamment à l’occasion du centenaire du décès du prince : à l’initiative du Cercle archéologique d’Ath et de la région, les 25, 26 et 27 juillet 1914…, Ath et Beloeil accueillent une prestigieuse manifestation (Congrès-exposition, concerts, défilé devant la statue, fête nautique, lecture d’œuvres, etc.) à laquelle s’associe notamment la Société des Amis de l’Art wallon. Il s’agit de la dernière grande manifestation culturelle en Wallonie avant la Grande Guerre.



Hugo LETTENS, La sculpture de 1865 à 1895, dans Jacques VAN LENNEP, La sculpture belge au 19e siècle, Bruxelles, CGER, 1990, t. 1, p. 103
Hugo LETTENS, dans Jacques VAN LENNEP, La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 311-313
Biographie nationale, t. 12, col. 185
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 160
Paul DELFORGE, Société des Amis de l’Art wallon, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. III, p. 1484-1486
L’Art moderne, 25 janvier 1914, n°4, p. 31
L’Art moderne, 14 juin 1914, n°24, p. 191
L’Art moderne, 2 août 1914, n°31, p. 241-243
Wallonia, 1913, p. 626-627

 

place communale – 7970 Beloeil

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Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Plaque Orsini DEWERPE

Plaque commémorative Orsini Dewerpe, réalisée par F-G. Schmidt, 26 septembre 1954. 

Sur la façade de la maison où il vécut, une plaque commémorative a été apposée en septembre 1954 en l’honneur d’Orsini Dewerpe qui, dans le même temps, donne son nom à la rue. Les Dewerpe sont connus depuis plusieurs générations à Jumet pour leurs activités de souffleurs de verre. Pourtant, c’est la musique qui désormais fait leur notoriété. Le père d’Orsini Dewerpe, Pierre-Joseph, a déjà rompu avec la tradition familiale en vivant de la musique, comme violoniste et professeur de musique à l’École moyenne de Jumet. La mère est aussi chanteuse et pianiste. Trempé dans la musique dès son plus jeune âge, Orsini Dewerpe (1887-1943) se révèlera un excellent pianiste, mais c’est une chanson composée en l’honneur de Paul Pastur qui lui survivra : En Wallonie ! reste en effet, dans le pays de Charleroi, un air connu, du moins déjà entendu. Avec la chanson Amis Chantons la Wallonie, voire avec Femmes wallonnes, la chanson En Wallonie ! est l’œuvre la plus remarquable de celui qui a été le directeur de l’École moyenne de Jumet (aujourd’hui Athénée qui porte le nom de Dewerpe depuis 2002).

Né au lendemain des grèves qui mobilisent violemment le bassin industriel wallon, le jeune Dewerpe reçoit le prénom peu usité d’Orsini, en référence explicite au révolutionnaire et patriote italien Felice Orsini (1819-1858) : membre de Jeune Italie, adepte de Mazzini, ce républicain italien contribue à l’éphémère expérience de la « république romaine » de 1848-1849 et est l’un des auteurs de l’attentat perpétré en janvier 1858 contre l’empereur Napoléon III ; condamné à mort, Orsini est guillotiné en mars 1858.

En plus des conseils familiaux en matière musicale, le jeune Dewerpe suit les cours d’harmonie de Paulin Marchand à l’Académie de Charleroi. Pianiste virtuose sur des airs de Liszt et de Chopin, il ne fait cependant pas de la musique sa carrière. Diplômé de l’École normale de Nivelles (1906), où il a marqué une prédilection pour la littérature, il entame une carrière d’instituteur à Ransart, avant d’enseigner le français à Jumet, sa commune natale, et l’hygiène à l’École moyenne. Engagé à temps partiel à l’Université du Travail, il est nommé en 1925 à la direction de l’École industrielle de Jumet, puis de l’École moyenne (1933). Il n’a pas renoncé pour autant à la musique. Mariant écriture et interprétation, Orsini Dewerpe forme un duo apprécié avec l’industriel Jules Cognioul, de la commune voisine de Marcinelle. Ce dernier va chanter une série de textes écrits par Dewerpe qui l’accompagne aussi au piano. Leur association commence en 1916 ; Dewerpe n’hésite pas à dénoncer les atrocités de la guerre, les profiteurs et les occupants ; après l’Armistice, la thématique rencontre un succès certain. Par la suite, son amour pour la Wallonie et pour la France occupe une place importante dans son répertoire d’Entre-deux-Guerres, ce qui incite Dewerpe à ne pas s’attarder au pays de Charleroi en mai 1940. De retour au pays, il est en contact étroit avec le docteur Marcel Thiry (de Charleroi) et s’informe régulièrement de l’activité de la Wallonie libre clandestine, sans pouvoir s’y impliquer personnellement. Son exil a affecté sa santé et il décède en août 1943. 

Au moment où un hommage appuyé est rendu pour le 10e anniversaire de sa disparition, l’administration communale de Jumet annonce son intention d’apposer une plaque commémorative. Elle reçoit le soutien actif de la section de Jumet de Wallonie libre – avec Marcel Thiry, Marcel Gilson et Jean Deterville notamment – qui lance la souscription et choisit un artiste local, F-G. Schmidt, pour réaliser une plaque en bronze originale puisqu’elle inscrit le profil gauche d’Orsini Dewerpe entre l’emblème de Jumet et celui de la Wallonie, en mentionnant les dates 1887-1943 et l’inscription :

ICI A VECU ORSINI DEWERPE
CHANTRE DU PAYS WALLON
HOMMAGE DE WALLONIE LIBRE

L’inauguration a lieu le 26 septembre 1954 et s’est inscrite dans le cadre des Fêtes de Wallonie

Sources 

Paul DELFORGE, Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2000, t. I, p. 500
Wallonie libre, décembre 1953, p. 3
Achille GOETHALS, Orsini Dewerpe, Jumet, éd. El Bourdon d'El Mojo des Wallons, 2002 - Chiroux
René DEMEURE, Jules Cognioul, chantre de Wallonie 1872-1952, Une vie en chansons, Charleroi, 1963 -IJD
Émile LEMPEREUR, dans Robert WANGERMÉE (dir.), Dictionnaire de la chanson en Wallonie et à Bruxelles, Liège, Mardaga, 1995, p. 136-137
Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse 
Wallonie libre, n° de 1954, dont celui d’octobre, p. 3

 

Plaque Orsini Dewerpe (Jumet)

Rue Orsini Dewerpe 12
6040 Jumet

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Banc George Garnir

Dans le village d’Ocquier, se trouve en banc inauguré au lendemain de la Seconde Guerre mondiale en l’honneur de Georges Garnir. Il se trouve au début de la rue Enroua, du moins à quelques dizaines de mètres du carrefour entre la rue En Visoul et la Grand Rue (la N641 en direction de Clavier), à gauche lorsqu’une fois dans la rue Enroua on se dirige vers les rues Wez et du Vieux Moulin. Il s’agit d’un vrai banc rustique en moellons, placé dans un endroit paisible entouré de maisons et de fermes en pierres du pays, et d’un petit cours d’eau de la vallée du Néblon. Au centre du dossier de ce banc, une pierre bleue a été gravée, indiquant :

GEORGE GARNIR

POETE DU CONDROZ
LES CHARNEUX
LES DIX JAVELLES
1868 – 1939
LA FERME AUX GRIVES
LES CONTES À MARJOLAINE

Délibérément, les initiateurs de ce monument n’ont retenu qu’une facette de George Garnir, à savoir l’écrivain et, singulièrement, dans son œuvre, ses écrits condruziens les plus significatifs. Considéré comme « un conteur wallon authentique », l’écrivain – reconnu pour une certaine drôlerie et la bonne humeur de ses ouvrages – sera durablement inspiré par son Condroz d’origine, tout en s’intéressant « aux mœurs bruxelloises ». Jeune, il passait ses vacances dans la maison paternelle située à côté de « la ferme aux grives » (proche du banc inauguré en 1947, la ferme est classée par la Région wallonne en juin 1993) et qui est le titre d’un de ses romans parus en 1901. En 1910, Garnir publie Les Dix Javelles qui, comme les Contes à Marjolaine datant de 1893, recèle des traces explicites de la vie condruzienne ; quant aux Charneux, avec le sous-titre Mœurs wallonnes, ce premier roman qu’il inscrit résolument et explicitement en Wallonie remonte à 1891, à l’époque où, docteur en Droit et en Sciences politiques de l’Université libre de Bruxelles, il côtoie les Fernand Severin et autre Albert Mockel qui mettent le jeune homme sur les rails de la littérature et de la poésie. Les écrits de Garnir paraissent alors dans les premiers numéros de La Wallonie. Abandonnant dès 1888 le pseudonyme initial de George Girran, il supprimera le S final de son prénom et gardera son patronyme de naissance lorsqu’il se fera un nom dans la littérature et le journalisme. Né à Mons où son père travaillait alors en tant du fonctionnaire des Chemins de Fer, Garnir passera l’essentiel de son existence à Bruxelles, mais cultivera toujours le souvenir des racines condruziennes de sa famille qui est originaire du village d’Ocquier.

Pourtant George Garnir est le plus souvent identifié comme l’un des trois fondateurs de l’hebdomadaire Pourquoi Pas ? C’est en effet en 1910, avec Léon Souguenet et Louis Dumont-Wilden, que Garnir lance ce magazine politique et de société qui va traverser quasiment tout le XXe siècle, s’éteignant en 1989 avec quelques soubresauts. Organisateur d’un « référendum » en 1912, dans les colonnes du Pourquoi Pas ?, sur le choix d’un jour de fête pour la Wallonie, membre de l’Académie royale de langue et de littérature françaises (mars 1926), Garnir a donné son nom à un prix qui est décerné à un écrivain belge de langue française, auteur d’un roman ou d’un recueil de contes évoquant les aspects et les mœurs des provinces wallonnes.

Comme Schaerbeek qui a donné le nom de Garnir à l’une de ses rues, et la ville de Mons qui honore « son » écrivain par une stèle dans le parc du Waux-Hall, le village d’Ocquier dispose d’un monument qui fait référence aux racines familiales de l’écrivain. 
« Oh ! Ce n’est pas un monument prétentieux et arrogant, loin de là ! Non, ce sont de vieilles pierres de chez nous, patinées et moussues, adossées simplement au vieux mur où [Garnir] s’est assis souvent » (discours de Gérard). L’initiative en revient à la famille Garnir et en particulier aux frères Abel et Jean Lurkin qui sont des cousins de l’écrivain. Ils ont fait appel à la fois à l’Association pour la Défense de l’Ourthe pour l’organisation et à l’architecte François Malfait pour la conception du banc : architecte en chef de la ville de Bruxelles pendant de nombreuses années, Malfait était un grand ami de George Garnir. Le dimanche de l’inauguration, plusieurs personnalités avaient tenu à honorer l’écrivain de leur présence : outre les précités, on retrouvait le dernier mousquetaire du Pourquoi Pas ?, Louis Dumont-Wilden, la veuve de Léon Souguenet, Auguste Buisseret, Olympe Gilbart, Jacques Ochs, Arsène Soreil, Elise Champagne, René Pouret, ainsi qu’Adolphe Gérard le bourgmestre de la localité et cousin lui aussi de l’écrivain, et Louis Gavage, le président de l’Association pour la Défense de l’Ourthe et ses affluents. L’écrivain, le journaliste, mais aussi le Wallon et l’ami de la nature furent tour à tour célébrés.

 

Sources

Paul DELFORGE, Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. II, p. 700
La Vie wallonne, 1947, n°238, p. 146
http://www.cicc-clavier.be/Pdf/Georges_Garnir.pdf. (s.v. avril 2015)
Bulletin de l’Association pour la Défense de l’Ourthe et de ses affluents, janvier-mars 1947, n°130, p. 10-11 ; avril 1947, n°131, p. 51-

Banc George Garnir (Ocquier)

Enroua
4560 Ocquier

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Paul Delforge

Paul Delforge

Plaque Léon HOUA

Plaque commémorative Léon Houa, réalisée à l’initiative de la province de Liège, du club cycliste Le Pesant et de la société organisatrice du Tour de France, 26 avril 2014.

À l’occasion de la centième édition de la course cycliste Liège-Bastogne-Liège, un hommage particulier a été rendu à celui qui avait remporté la toute première épreuve, en 1892. La maison natale de Léon Houa ayant été retrouvée, au 34 rue du Pont, une plaque commémorative est inaugurée le 26 avril 2014, à la veille de la 100e édition de la « Doyenne des Classiques ». L’initiative en revient à trois partenaires engagés dans l’organisation de l’épreuve cycliste : le Pesant club Liégeois, la province de Liège et ASO – Cyclisme.
Le 29 mai 1892, lors de la toute première course cycliste au départ de Liège, qui rallie Bastogne avant de rentrer à Liège, 17 cyclistes seulement rallieront l’arrivée, le dernier concédant plus de 5 heures de retard au premier, en l’occurrence Léon Houa (Liège 1867 – Bressoux 1918). Celui-ci est un des pionniers de la petite reine dans nos contrées. À 25 ans, Léon Houa compte déjà quelques années sportives derrière lui. Après son succès en 1892, il réédite son exploit en 1893 et en 1894. Par la suite, l’épreuve n’est plus organisée pendant une quinzaine d’années et Houa reste par conséquent l’unique vainqueur de la course au XIXe siècle. Champion de Belgique (amateur) en 1893 et (professionnel) en 1894, le cyclisme perd la trace de Houa après 1896, la concurrence lui étant fatale. Amateur de sensations fortes, Houa devient alors pilote automobile. Il est essayeur chez Renault et c’est à l’occasion d’une compétition qu’il perd le contrôle de son véhicule, accident qui lui est fatal.
Sous la représentation d’un vélo, la plaque commémorative en marbre apposée rue du Pont, indique sobrement que

ICI EST NÉ
LEON HOUA
VAINQUEUR DES TROIS PREMIERS
LIEGE – BASTOGNE – LIEGE
1892 – 1893 – 1894
LE ROYAL PESANT CLUB LIÉGEOIS
LA PROVINCE DE LIÈGE
ASO-CYCLISME

 


Sources



Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse (dont La Libre, 19 avril 2014)
Théo MATHY, dans Freddy JORIS, Natalie ARCHAMBEAU (dir.), Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 1995
http://www.siteducyclisme.net/coureurfiche.php?coureurid=9236 (s.v. 31 juillet 2013)
http://www.dhnet.be/dernieres-depeches/belga/liege-bastogne-liege-une-plaque-commemorative-sur-la-maison-natale-de-son-premier-vainqueur-leon-houa-samedi-535287153570aae038bb781e (s.v. juin 2014)

Plaque commémorative Léon Houa

Rue du Pont 34
4000 Liège

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 Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Monument à la mémoire de Félix LIEDEL (et aux aviateurs luxembourgeois)

À l’intersection de la rue Godefroid Kurth et de l’avenue de Longwy, un monument rappelle le souvenir de Félix-Louis Liedel (1888-1914) tout en élargissant l’hommage à l’ensemble des aviateurs du Luxembourg tombés en service. 

En plus d’une couronne stylisée, mentionnant en son centre « A F.L. Liedel », deux inscriptions figurent sur deux des côtés du socle du monument indiquant :

« A Félix-Louis Liedel
Lieutenant au 10e de Ligne
détaché à l'aviation
tombé à Martelange
décédé à Arlon le 26 juin 1914 »
 

Monument Félix Liedel

« Aux aviateurs militaires
originaires du Luxembourg
tombés en service commandé ».

Réalisé en pierre de France, le monument s’étend vers le ciel en forme de parallélépipède rectangle allongé se terminant, au sommet, par deux ailes d’avion déployées, séparées, au milieu, par une roue. L’ensemble a été réalisé par l’architecte arlonais Léon Lamy (1879-1970). Né dans le Hainaut et très tôt installé dans la région d’Arlon il accomplit toute sa longue carrière, Léon Lamy est l’auteur des plans de plusieurs bâtiments religieux (églises, chapelles, etc.), de nombreuses maisons arlonaises et a dû, par la force des choses, contribuer grandement à la reconstruction ou à la rénovation des bâtiments rendues nécessaires à cause de la Grande Guerre et de la Seconde Guerre mondiale. Attaché au patrimoine du sud de la Wallonie, il figure parmi les fondateurs de l’asbl Institut archéologique luxembourgeois en 1928, qui donnera naissance au Musée d’Arlon. C’est à la même époque qu’il se voit confier la réalisation du monument Liedel.


Né à Anderlecht en 1888, Félix-Louis Liedel a 20 ans quand il est admis à l’Académie militaire. Sous-lieutenant d’infanterie (1911), il se tourne vers l’aviation militaire et décroche sa licence de pilote civil en 1913 et de pilote militaire l’année suivante. C’est au cours d’un vol d’entraînement qu’il s’écrase au sol avec un Farman HF-20 Jéro à hauteur de Martelange. Transporté à l’hôpital d’Arlon, il décède de ses blessures quelques heures plus tard (28 juin 1914). En hommage à ce jeune aviateur caserné à Arlon, une souscription est lancée par son régiment, le 10e de Ligne et la ville accepte que soit érigé le monument qui est inauguré en mai 1931. Il est l’occasion d’honorer également les autres aviateurs, originaires du Luxembourg, morts au combat. À l’époque, le monument trouve place au carrefour de la rue Godefroid Kurth et de la rue de Mersch. En 1956, il est démonté et reste quelques années dans la cour du service communal, derrière l’hôtel de ville. Il est transféré ensuite du côté du cimetière communal avant de retrouver sa place en 1985. Rénové et remonté, il est en effet inauguré une seconde fois en septembre 1985, au carrefour qui porte désormais son nom, soit à l'intersection de la rue Godefroid Kurth et de l'avenue de Longwy.
 

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
http://www.aviationheritage.eu/nl/content/monument-ltn-liedel
http://www.bel-memorial.org/cities/luxembourg/arlon/arlon_mon_felix_liedel.htm (sv. février 2014)

Au croisement de la rue Godefroid Kurth et de l’avenue de Longwy
6700 Arlon

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Paul Delforge