Photo

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Monument Nicolas COMPERE

Stèle à la mémoire de Nicolas Compère, réalisée à l’initiative des autorités locales, circa 1947. 


Située dans les bois des Stepennes, sur la commune d’Anthisnes, un monument rappelle que le 13 mai 1940 a été fusillé, à cet endroit, le premier « résistant » du pays. Sur un gros bloc de pierre, est attachée une plaque en marbre noire dans lequel ont été gravés les circonstances de la guerre 40-45, le nom de Nicolas Compère, tandis que son portrait apparaît sous la forme d’un médaillon photographique.


Né à Rotheux-Rimière en 1871, il avait accompli toute sa carrière dans la police de Seraing : entré en 1900 comme simple agent, il était devenu inspecteur en 1910, commissaire-adjoint en 1920 et avait été admis à la pension en 1936. Lors de leur offensive en mai 1940, les armées allemandes subissent des pertes importantes en raison de la résistance du fort de Boncelles, à laquelle s’ajoutent les actions décidées de francs-tireurs. Des civils sont pris en otage par l’envahisseur du côté de Seraing : ils sont menacés d’être exécutés si la résistance ne cesse pas.


Alors qu’il vient de faire face au décès très récent de son épouse (3 mai 1940), Nicolas Compère se propose comme otage volontaire à la condition que les autres personnes arrêtées soient libérées. Le soir même, Nicolas Compère est fusillé par les Allemands sur la route d’Anthisnes, au village de Vien. Son corps ne sera découvert que le 18 mai, dissimulé dans la végétation, à l’entrée du Bois des Stepennes. Il est enterré au cimetière de Seraing (1941) et transféré dans un caveau d’honneur en 1963.


Chaque année, les autorités d’Anthisnes accompagnées des associations patriotiques fleurissent ce monument, ainsi que celui, proche, dédié « Aux Résistants Belges, Soldats Américains et Partisans Russes ayant combattu à Anthisnes qui se souvient ».
 


Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
http://www.bel-memorial.org/cities/liege/anthisnes/anthisnes_stele_nicolas_compere.htm (sv. août 2013)
Informations communiquées par M. Armand Collin (février 2014)

Bois des Stepennes
4160 Anthisnes

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Paul Delforge

Paul Delforge-Diffusion Institut Destrée-Sofam

Statue Arlette de Huy

Statue Arlette de Huy, réalisée par André (Fanneau) de la Horie, 1986.

À deux pas de la Grand Place de Huy, une place ouverte vers l’avenue des Ardennes accueille, dans un décor de bandes dessinées, un groupe monumental composé d’un ancien bassin-abreuvoir, d’un bloc de pierre en forme de stèle évoquant une sortie de fontaine, lui-même surmonté d’une statuette. Sur le bloc, une plaque en cuivre contient l’inscription suivante en lettres d’or :

ARLETTE de HUY
MERE DE GUILLAUME
LE CONQUERANT
DON DU ROTARY CLUB
DE HUY

À l’avant du bassin, une autre plaque noire aux lettres blanches identifie tous les éléments de cet ensemble composite :

Arlette de Huy
André de la Horie, 1986. Don du Rotary.
Autrefois fontaine, il n’est reste que la
sculpture évoquant la mère supposée de
Guillaume le Conquérant (1066).


Offerte à la ville de Huy par le Rotary Club local en 1986, la statue est du Hutois André Fanneau de la Horie, qui en tira la forme en travaillant de la terre d’Andenne, avant que la fonderie Peeters n’en fasse un bronze, solidement arrimé dans une pierre de Vinalmont.

Habituellement l’année 1066 fait référence, à Huy, à la charte de franchises accordée, un 27 août, par le prince-évêque de Liège, Théoduin, qui reconnaissait ainsi des libertés aux bourgeois de la cité mosane : il s’agissait là de la première charte d’Europe du Nord. La même année, après la bataille d’Hastings, Guillaume le Conquérant prenait la couronne d’Angleterre et si un lien doit réunir Huy à l’Angleterre, en dehors de la date de 1066, c’est par l’intermédiaire d’Arlette. Ainsi que l’a bien montré Chantal du Ry, la perplexité se mêle à la complexité lorsque l’on essaye d’identifier les ancêtres de Guillaume le Conquérant, en particulier lorsqu’il s’agit de dresser la biographie d’Arlette. 

Personnage historique ou légendaire, Arlette (dite aussi Herlève, Arlot, Arleite, etc.) serait, selon une des traditions qui remonte au XIIIe siècle, la fille de Fulbert (ou Herbert ou Robert) et de Doda (ou Duwa), couple qui se maria à Huy en 1004. Tanneur de son état, Fulbert aurait épousé une princesse d’Écosse qui se serait échappée du couvent sainte Begge d’Andenne. Ayant décidé de quitter Huy pour la France, le couple se serait trouvé en Normandie, à Falaise, un jour de 1027 où le jeune Robert le Libéral (dit aussi Robert le Magnifique), duc de Normandie, croisa la route de la jeune Arlette et en tomba amoureux. 

Statue Arlette de Huy

De leur union illégitime serait né Guillaume II, dit le Bâtard, futur Guillaume le Conquérant et roi d’Angleterre… Si l’histoire est belle, bien fol qui s’y fie, tant les versions varient. En Normandie, Arlette est surnommée Arlette de Falaise, tandis qu’une autre tradition fait partir les parents d’Arlette de Florennes. Néanmoins, les Hutois ont adopté depuis longtemps la version de Maurice de Neufmoustier, « le plus ancien historien de Huy » (du Ry) et le Rotary local n’a fait que s’inscrire dans cette tradition en invitant le sculpteur André de la Horie à en réaliser la statue.

C’est au hasard des activités professionnelles de son père qu’André Fanneau de la Horie naît à Louvain en 1923. Enracinée en Normandie depuis des générations, la famille des Fanneau de la Horie compte quelques ancêtres qui s’illustrèrent dans l’histoire de France, comme le fameux général qui tenta un coup d’état contre Napoléon. Mais, loin de la Normandie, c’est d’abord à Maredsous qu’André suit des humanités artistiques, avant de s’orienter vers des études d’ingénieur à l’Université catholique de Louvain. Ingénieur industriel, il séjourne notamment au Congo (1955-1958) et en Algérie (1975-1981). 

À l’heure de la retraite, André Fanneau de la Horie s’établit à Couthuin-Surlemez, dans une ancienne bâtisse qu’il rénove et où il se consacre désormais à la sculpture : il s’était passionné pour cet art quand il était adolescent, avait fréquenté l’Académie de Louvain et Saint-Luc, mais sans jamais trouver le temps de s’adonner pleinement à sa passion. Le modèle féminin l’inspire constamment, qu’il s’agisse de travailler le bois, la pierre, la terre cuite ou le bronze. Professeur de sculpture aux ateliers du Cercle Li Cwerneu, il y donne pendant plus de dix ans des cours qui influencent durablement le style de ses élèves, de même que celui de ses deux filles, Barbara et Brigitte, toutes deux artistes. En acceptant l’invitation du Rotary de sculpter Arlette de Huy, André de la Horie renoue aussi avec les racines familiales normandes. Il exposera à Huy à deux reprises, avant son décès, en novembre 1998.

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse dont l’article de Jacques Henrard, dans Vers l’Avenir, Huy-Waremme, 13 novembre 1998
Chantal DU RY, Huy : histoire d’une ville à travers ses légendes et des monuments, Liège, Cefal, 2000, p. 63-69
Freddy VAN DAELE, Arlette de Huy, Hosdent, 2007
François BAIX, La légende d’Arlette de Huy, dans Namurcum, bulletin de la Société archéologique de Namur, 1954, t. XXVIII, p. 1-12
http://www.pays-de-huy.be/statues_de_huy.htm 
http://www.standbeelden.be/standbeeld/2045 (s.v. juin 2014)

en Mounie, avenue des Ardennes
4500 Huy

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Paul Delforge

Paul Delforge-Diffusion Institut Destrée-Sofam

Plaque François BOVESSE

À divers endroits et sous diverses formes, le souvenir de François Bovesse est bien présent dans l’espace public de la capitale wallonne : une plaque avec inscription sur sa maison natale (1946), une esplanade devant la Maison de la Culture et une plaque avec un médaillon sur un mur de la Halle al’Chair (1960), une plaque sur la maison de l’avenue Cardinal Mercier à Salzinnes sur le lieu de son assassinat (1962), le mémorial François Bovesse (1964), une présence sur la Fresque des Wallons, une rue et une place dans la périphérie. Depuis peu, l’Athénée a cependant officiellement enlevé son patronyme ; quant au dragueur de mines « M909 Bovesse », il n’est plus actif.

Défenseur de sa ville natale, militant wallon, député, figure de proue du parti libéral dans l’Entre-deux-Guerres, ministre – des PTT (1931-1932), de la Justice (1934-1935 et 1936-1937) et de l’Instruction publique, des Lettres et des Arts (1935-1936) – François Bovesse avait abandonné tous ses mandats électifs lorsqu’il avait été nommé gouverneur de la province de Namur (16 avril 1937). Quelques mois plus tard, il allait être démis de ses fonctions par l’occupant. Celui qui a repris officiellement ses activités d’avocat maintient ses convictions et prend des risques. Le 1er février 1944, il est assassiné par des collaborateurs rexistes qu’il n’a jamais cessé de dénoncer. Malgré les interdictions, son enterrement donne lieu à un impressionnant rassemblement de citoyens qui manifestent ainsi leur opposition à l’Ordre nouveau et surtout leur admiration à un homme qui a défendu son pays et ses libertés.

Après la Libération, le Comité central de Wallonie (que présidait Bovesse jusqu’en 1937 et qui organise les Fêtes annuelles à Namur) se préoccupe d’ériger un monument en l’honneur du disparu. Il faudra attendre 1964, soit vingt années après la disparition de Bovesse pour que soit achevé le monumental mémorial sur le pignon de la Maison de la Culture. Entre-temps, d’autres initiatives ont été prises dont, en septembre 1962, l’apposition d’une plaque commémorative sur la maison qu’occupait François Bovesse, le 1er février 1944, au n°2 de l’avenue cardinal Mercier. En présence de nombreux représentants des associations patriotiques, des mayeurs de la province de Namur, du ministre Héger et du bourgmestre de Liège Auguste Buisseret, la plaque est dévoilée par le gouverneur Gruslin et par Joseph Calozet, président du Comité central de Wallonie :


« ICI FUT LÂCHEMENT ASSASSINÉ
LE 1ER FÉVRIER 1944
LE GRAND PATRIOTE
FRANÇOIS BOVESSE
GOUVERNEUR DE LA PROVINCE »


Chaque année, lors des Wallonies, le parcours des plaques fait une halte à cet endroit pour honorer François Bovesse.



Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Jacques VANDENBROUCKE (texte), Pierre DANDOY (photos) : 40 ans de fêtes de Wallonie à Namur, Bruxelles, Luc Pire, 2000, p. 51
André BROZE, Quelques discours prononcés par Monsieur le Ministre François Bovesse durant l’année 1935, Bruxelles, 1936

avenue cardinal Mercier 2
5000 Namur

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Paul Delforge

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Statue Jean-Baptiste BERGER

Entre la rue Albert Ier et la rue du Temple, à La Louvière, s’étirait au début du XXe siècle une rue des Écoles, en référence à l’école primaire du Centre et à l’école moyenne des garçons qui s’y trouvaient. En 1929, elle est débaptisée tout en continuant pourtant à se référer au monde de l’éducation scolaire puisque c’est le nom de Jean-Baptiste Berger (1882-1927) qui lui est donné, en hommage à l’action menée par le « directeur-fondateur des écoles industrielles moyenne et supérieure, directeur d’école moyenne », ainsi que le précise le bas-relief en bronze fixé sur le mur de l’établissement scolaire qui accueille au début du XXIe siècle un enseignement de promotion sociale (format21).
Confiée à Alfred Courtens, le bas-relief qui est un « hommage de reconnaissance » représente Berger en trois quarts profil dans la partie centrale, énonçant dans la partie supérieure :


EN SOUVENIR DE
Mr J.B. BERGER
1882-1927


Régent de formation, J-B. Berger avait en effet fait partie de l’équipe qui contribua à fonder l’école des garçons en 1882. Structure scolaire embryonnaire à ses débuts, l’établissement voyait progressivement grossir le rang de ses élèves et de ses professeurs au moment où il prenait ses quartiers définitifs rue Malbecq. En 1894, J-B. Berger succédait au premier directeur, Eugène Dufour ; quatre ans plus tard, il créait l’École industrielle moyenne et, en 1907, en raison du succès de l’enseignement prodigué à des élèves toujours plus nombreux, Berger fondait une école industrielle supérieure qui offrait une formation de techniciens qualifiés, destinés à être immédiatement employés par une industrie en plein développement. En raison de son rôle fondateur, J-B. Berger assura la direction des deux écoles, dès 1898 pour l’École industrielle, à partir de 1907 pour l’École industrielle supérieure.
 

Statue Jean-Baptiste Berger (La Louvière)

En choisissant de confier la réalisation du bas-relief au sculpteur bruxellois Alfred Courtens (1889-1967), les autorités locales optaient pour un jeune artiste qui disposait déjà d’un nom dans le métier. Ayant grandi dans une famille de peintres, sculpteurs et architecte, le fils de Franz Courtens avait par ailleurs bénéficié également des conseils de Charles Van der Stappen à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles, avant de suivre les cours de Thomas Vinçotte à l’Institut supérieur national des Beaux-Arts à Anvers. Prix Godecharle 1913 (grâce à un Caprice exceptionnel, Le Caprice est le nom de l’œuvre audacieuse qu’il vient de réaliser), le jeune artiste ne cache pas qu’il cherche à sortir des sentiers battus ; mais, après la Grande Guerre, il répond essentiellement à des commandes officielles, tout en accordant beaucoup d’attention à la famille royale de Belgique (notamment le monument reine Élisabeth à Eisden, Léopold II à Ostende, reine Astrid à Courtrai, Léopold III à Courtrai, etc.).

Après l’Armistice, la production de Courtens va correspondre à la volonté des autorités nationales d’honorer les victimes de la Grande Guerre et de réaffirmer le projet politique de 1830. Ses monuments sont essentiellement implantés en Flandre et à Bruxelles, mais pas seulement : il signe en effet le monument de La Louvière, de Virton et de Sombreffe pour les victimes de 14-18 et, en 1949, il sera le lauréat du concours visant à ériger La borne de la Libération à Hértain, première localité libérée par les troupes britanniques en 1944. Des bustes lui sont aussi commandés par des diplomates, des hommes politiques (Gutt, Pholien, etc.), des industriels ou en leur honneur, comme c’est le cas à Court-Saint-Étienne avec le buste Henricot. De 1927 à 1951, il enseigne aussi le modelage et la sculpture à l’Académie de Dendermonde (la ville dont sa famille est originaire). « Illustrateur du sentiment patriotique belge », médailleur et statuaire de la Cour, Courtens est absorbé par la statuaire publique et le bas-relief qu’il signe à La Louvière en hommage à Berger reste une œuvre soignée et de qualité, tout en étant classique.


Marcel HUWÉ, Fidèle MENGAL, Fernand LIENAUX, Histoire et petite histoire de La Louvière, 1959, p. 573
Axelle DE SCHAETZEN, Alfred Courtens, sculpteur, catalogue de l’exposition du Musée des Beaux-Arts d’Ixelles, juin-septembre 2012, Bruxelles, Racine, 2012
Judith OGONOVSZKY-STEFFENS, Alfred Courtens, dans Nouvelle biographie nationale, vol. 6, p. 87-91
Judith OGONOVSZKY-STEFFENS, Les Courtens. Deux générations d’artistes, Mouscron, 1999
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 262

rue Jean-Baptiste Berger (anciennement rue des Écoles), place Maugrétout
7100 La Louvière

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Paul Delforge

Paul Delforge

Statue Charlemagne

Statue équestre de Charlemagne, réalisée par Louis Jehotte, 26 juillet 1868.

Jeune État né d’une révolution, la Belgique de 1830 n’obtient d’assurances sur sa pérennité qu’à la suite de la signature du Traité des XXIV articles, à Londres, en 1839. Déjà quelques « peintres d’histoire » ont commencé à s’inspirer d’événements du passé « belge » et les parlementaires ont décidé « d’honorer la mémoire des grands hommes belges » en encourageant toute initiative pour que fleurissent des statues dans l’espace public. =

À la suite du ministre de l’Intérieur, Jean-Baptiste Nothomb, des commandes sont passées auprès de sculpteurs pour décorer le péristyle du grand vestibule du Parlement (1845). D’emblée s’imposent comme « héros nationaux » Pépin de Herstal, Thierry d’Alsace, Baudouin de Constantinople, Jean Ier de Brabant, Philippe le Bon et Charles Quint. 

Tandis que l’hôtel de ville de Bruxelles se couvre de près de 300 statues (entre 1844 et 1902), la façade du nouveau Palais provincial de Liège en accueille une quarantaine (entre 1877 et 1884). Une impulsion avait été donnée, le mouvement allait suivre, abandonnant les façades pour occuper les places publiques. 

Chef de Cabinet, en charge de l’Intérieur (1847-1852), Charles Rogier invite chaque province à élever un monument digne des gloires nationales dans son chef-lieu. Soutenu par son successeur, Joseph Piercot, le projet se concrétise lorsque Rogier redevient ministre, entre 1858 et 1868. Aux quatre coins du pays, les édiles municipaux se mobilisent bon gré mal gré (en raison des coûts) dans un projet qui se veut collectif, mais qui révèle à la fois des particularismes locaux et des interrogations sur la définition de « belge ».

À Liège, le sculpteur Louis Jehotte (1804-1884) a offert ses services, dès 1855, pour élever sur la place Saint-Lambert une statue équestre de Charlemagne, en bronze, personnage étonnement absent de la sélection de J-B. Nothomb. Arrière-petit-fils de Pépin de Herstal, petit-fils de Charles Martel et fils de Pépin le Bref, Charles le Grand semble présenter quelques liens avec l’Ardenne et le pays mosan, avant qu’il ne soit couronné empereur, à Rome, le 25 décembre 800, par le pape Léon III. Si Charlemagne (742-814) établit sa capitale à Aix-la-Chapelle, on s’interroge encore au XIXe siècle sur le lieu de sa naissance. L’Académie a mis la question en concours, mais aucune réponse ne lui est parvenue. Herstal paraît cependant un meilleur choix que Liège, car jusqu’en 784, Charlemagne y disposait d’un palais où, disait-on, il aimait résider… De surcroît, dans certains quartiers de la localité son souvenir continue d’être vénéré, tant lors d’une fête annuelle que dans une église. Mais, au milieu du XIXe siècle, la question du lieu de naissance de Charlemagne n’est pas réglée : Belgique, France, Allemagne ? L’initiative de Jehotte relance la polémique et pousse l’Académie royale à mettre la question en concours, sans recevoir de réponse.

Embarrassée par l’offre de Jehotte, la ville de Liège choisit néanmoins, en 1862, d’installer le futur monument à proximité de l’ancien chœur occidental de la cathédrale Saint-Lambert démolie. Personne ne conteste le statut de cette « gloire nationale », mais le Conseil provincial remet en question la pertinence de l’emplacement, si bien qu’en 1863, les autorités locales optent pour le boulevard d’Avroy, dans cette partie de la ville où d’importants travaux ont transformé les anciens bras de la Meuse en avenues. Contestant cette décision en justice, le sculpteur perd son procès, mais obtient satisfaction quand il réclame que l’empereur soit orienté face au sud. Dans la mesure où le gouvernement intervient financièrement, plus rien ne s’oppose à la réalisation de la fameuse statue équestre. C’est finalement le 26 juillet 1868 que l’on procède à son inauguration devant une foule importante, mais en l’absence des hautes autorités, hormis le gouverneur de la province de Liège qui préside.

Formé à l’Académie de Liège, Louis Jehotte a bénéficié d’une bourse de la Fondation Darchis dans sa jeunesse, et a fait le voyage en Italie (Florence et Rome). Ami d’Eugène Simonis, il est comme lui élève de Mathieu Kessels à Rome (en 1823), avant de séjourner à Paris (1830) et à Copenhague où il fréquente l’atelier de Thorwaldsen (1831). Nommé professeur de sculpture à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles en 1835, il y enseigne seul cette matière pendant 27 ans (1835-1863), influençant considérablement plusieurs générations d’artistes (Mélot, Bouré, Fiers, Meunier, Desenfans, etc.). Préférant sculpter des sujets religieux, Jehotte se fait rare en monuments publics. Pourtant, c’est lui-même qui avance, en 1855, l’idée de Charlemagne, personnage auquel il consacre, avec son ami André Van Hasselt, une importante biographie résultant de vingt ans de recherches. Tenant particulièrement à ce monument, Jehotte a acquis un terrain à Bruxelles (rue de Pachéco) et c’est là qu’il exécute lui-même la fonte de cette œuvre colossale, pesant dix tonnes.
Le cheval et son cavalier sont en bronze. Le socle est en pierre. On peut lire l’inscription :

« CAROLUS MAGNUS
MAGNUS BELLO
MAJOR PACE »

De style roman, le piédestal est aussi orné de statues représentant les ancêtres de l’empereur, à savoir (sainte) Begge, Pépin de Herstal, Charles Martel, Bertrade, Pépin de Landen et Pépin le Bref.
En 1888, des vandales abîment trois des statues du piédestal et un nouveau procès oppose la ville et le sculpteur qui meurt sans que l’affaire soit réglée. À la veille de la Grande Guerre, la partie inférieure du socle est remplacée. Au début du XXIe siècle, il a été procédé à une rénovation totale du monument qui a retrouvé des couleurs et un large espace de dégagement.

Sources:

Statue équestre de Charlemagne

Jacques VAN LENNEP, La sculpture belge au 19e siècle, t. 1. La Sculpture belge, Bruxelles, CGER, 1990, p. 71
Jacques VAN LENNEP, La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 460-461
Pier

re COLMAN, Le site de la statue équestre de Charlemagne, dans Chroniques d’archéologie et d’histoire du pays de Liège, Liège, Institut archéologique liégeois, juillet-décembre 2004, n°7-8, tome II, p. 76-77
Alain DIERKENS, La statuaire publique, dans L’architecture, la sculpture et l’art des jardins à Bruxelles et en Wallonie, Bruxelles, La Renaissance du Livre, 1995, p. 246-250
Liège, Patrimoine architectural et territoires de Wallonie, Liège (Mardaga), 2004, p. 154
Charles BURY, Les Statues liégeoises, dans Si Liège m’était conté, n°35, printemps 1970, p. 9-10
Pierre COLMAN, Le sculpteur Louis Jehotte, alias Jehotte (1803-1884) académicien comblé...d’avanies, Liège, 2010
http://www.sculpturepublique.be/4000/Jehotte-Charlemagne.htm 
Jean WUILBAUT, Mons 1853-1868. Controverses autour de la statue de Baudouin de Constantinople, dans Annales du Cercle archéologique de Mons, Mons, 1988, t. 73, p. 1-45
Alain COLIGNON et Baudouin VAN DEN ABEELE, Mémoires de Wallonie, Les rues de Louvain-la-Neuve racontent…, Luc COURTOIS (dir.), Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 2011, p. 105-107
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 764
Alexia CREUSEN, dans Musée en plein air du Sart Tilman, Art&Fact asbl, Parcours d’art public. Ville de Liège, Liège, échevinat de l’Environnement et Musée en plein air du Sart Tilman, 1996

 


 

Boulevard d’Avroy
4000 Liège

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Paul Delforge

Paul Delforge-Diffusion Institut Destrée-Sofam

Monument Mathieu BODSON

Situé à l’intersection de la rue Jean Hermesse, de la rue du Diable et de la place Mathieu Bodson, à Jupille, près de Liège, un monument rappelle qu’un résistant de la Grande Guerre a été fusillé à Bruxelles en 1916 pour espionnage. Ouvrier plombier quand éclate la Grande Guerre, Mathieu Bodson vient tout juste de fêter ses vingt et un ans. Il s’est porté volontaire dès août 1914, mais il a été réformé par l’armée belge. L’armée britannique lui trouve pourtant suffisamment de qualités pour recourir à ses services dans le contre-espionnage. Il est actif pendant plusieurs mois, avant d’être dénoncé. Arrêté et condamné à mort, Mathieu Bodson est exécuté à Bruxelles en septembre 1916 : les chefs d’accusation retenus contre lui portent sur le fait d’avoir favorisé le passage de fugitifs aux Pays-Bas, sur la fabrication de faux-passeports et une aide aux soldats belges.

À l’initiative de l’administration communale de Jupille, la place de Fléron est rebaptisée place Mathieu Bodson dès les années 1920, mais une association souhaite rendre un hommage plus appuyé au « héros local » en érigeant un monument. Se positionnant sans doute comme les descendants lointains de la famille des pépinides, « Lès R’djètons dès Pépins » obtiennent le soutien des autorités communales et des anciens combattants de 14-18 pour élever un monument que la végétation a progressivement encerclé. Précédé d’un bac d’eau alimenté par le réseau, le monument en béton comprend sur sa partie supérieure un portrait de profil du résistant, placé entre deux colonnes et surmonté d’un mince chapiteau. Outre le nom des contributeurs, le monument mentionne :

« Mathieu Bodson
Fusillé à Bruxelles
Pour espionnage
16 septembre 1916 ».

Liège, Patrimoine architectural et territoires de Wallonie, Liège (Mardaga), 2004, p. 72
Lettre du Patrimoine, avril 2013
http://www.bel-memorial.org/cities/liege/jupille-sur-meuse/jupille-sur-meuse_mon_mathieu_bodson.htm (sv 31 janvier 2014)

place Mathieu Bodson
4020 Liège-Jupille

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Paul Delforge

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Mémorial André COOLS

Mémorial André Cools, réalisé par Michel Smolders, 19 septembre 1993.


Assassiné en juillet 1991, André Cools a fait l’objet d’une multitude de marques de sympathie. Une fois l’émotion passée et alors que la Justice menait son enquête, les autorités communales de Flémalle prenait l’initiative, dès juillet 1992, d’apposer une plaque commémorative dans le porche d’entrée de la Maison communale. Il s’agit d’un premier pas car le conseil communal décide de consacrer un mémorial à son ancien membre (il a siégé au Conseil de 1952 à 1991) et surtout bourgmestre.


De 1965 à 1991, en effet, André Cools a été à la tête de l’entité flémalloise. Parallèlement, député élu en 1958 dans l’arrondissement de Liège, il allait accomplir une carrière nationale et régionale. Militant du Mouvement populaire wallon et sympathisant affirmé du programme d’André Renard en faveur du fédéralisme et des réformes de structures, André Cools devient Ministre en 1968 et les circonstances le propulse en tant que vice-premier dans le gouvernement Eyskens qui introduit plusieurs modifications fondamentales dans la Constitution, dont la reconnaissance du principe des Régions et des Communautés. Président du Parti socialiste (1974-1981), André Cools est le leader de la majorité wallonne qui négocie la mise en place de l’article 107 quater et crée les institutions wallonnes en août 1980. Membre (1980-1990) et président du Parlement wallon de 1981 à 1985, il achève sa carrière politique comme ministre wallon (1988-1990), tout en restant actif dans les projets de redynamisation économique du bassin de Liège. C’est l’ensemble de ce parcours que le mémorial va tenter d’illustrer, mais aussi le profond engagement socialiste, wallon, franc-maçon du « maître de Flémalle.


Ne rencontrant pas l’approbation de la famille, un premier projet est abandonné avant que celui de Michel Smolders soit finalement réalisé, non sans soulever diverses réticences. Finalement, en septembre 1993, c’est une pyramide de trois mètres de haut, à trois faces, en pierre bleue du pays, qui est inaugurée dans les jardins, à l’arrière de l’hôtel de ville de Flémalle. L’espace a été réaménagé pour l’occasion. Les trois faces de la pyramide présentent la particularité d’être différentes l’une de l’autre : la face avant est lisse et polie, tandis que les deux autres sont burinées. Écartant l’idée d’un médaillon en bronze, c’est finalement un portrait en bas-relief qui a été retenu, présentant André Cools sur son profil droit : ce bronze est serti sur le pan lisse de la pyramide. Celle-ci s’inscrit au centre d’un large cercle dont le contour est cintré en pierre bleue, avec diverses phrases inscrites. Des petits pavés de rue complètent la surface arrondie.


Face au portrait d’André Cools qui donne l’impression de continuer à veiller sur « son » hôtel de ville, l’inscription principale au sol mentionne

« André Cools
1927-1991.
Bourgmestre de Flémalle
homme d’État
militant socialiste et wallon
assassiné le 18 juillet 1991 ».


De part et d’autre, des formules et saillies dont Cools était coutumier rappellent divers moments de sa carrière. En partant de droite à gauche, à partir de la face principale de la pyramide, on peut lire au sol :

« Un homme de parole. André Cools fait ce qu’il dit ».
« Le parti ne me doit rien. Je lui dois tout ».
« Il ne faut jamais rougir de ses origines. Ce n’est pas la fonction qui fait l’homme, mais la manière dont il la remplit ».
« Être heureux, et surtout veiller à ne pas être seul à être heureux ».
« Guéris-toi des individus ».
« Il est temps que les hommes prennent conscience du passé pour mieux préparer l’avenir ».
« La régionalisation, c’est de la responsabilité, encore de la responsabilité, toujours de la responsabilité ».
« Ci qui abîme si narenne, abîme si visedge ».


L’ensemble a été réalisé par le sculpteur bruxellois Michel Smolders (1929-) qui a travaillé une pierre bleue venant des carrières Jullien. Formé à Saint-Luc puis à La Cambre, M. Smolders a voyagé et travaillé tour à tour au Congo-Kinshasa, en Italie (Carrare) et au Mexique. Sculptant sur pierre comme sur bois, il expose dans peu de galeries, mais ses œuvres sont visibles dans plusieurs églises de Bruxelles, ainsi qu’à Huy et à Boussu. Il est aussi présent au Musée en plein air du Sart Tilman (avec un Grand gisant, 1982), à HEC (Carnaval et Le Chemin, 2013), ainsi qu’à l’Université catholique de Louvain (Le Byzantin). En 1984, il a créé les Symposiums de sculpture à Les Avins-en-Condroz qu’il anime. Il est aussi peintre, dessinateur et graveur.



Sources


Paul DELFORGE, Encyclopédie du Mouvement wallon, Namur, Institut Destrée, 2010, t. IV, p. 119-123
Alain COLIGNON, Nouvelle Biographie nationale, t. IX, p. 86-96
Arnaud COLLETTE et Philippe HALLEUX, André Cools. Rebelle d'État, Ottignies (Quorum), 1996 
De l'Échec du Pacte d'Egmont en 1977 à la Régionalisation en 1980. Le rôle d'André Cools, Colloque du 4 décembre 1993, Institut André Cools, 1994
Christiane LEPÈRE, André Cools, de la contestation à la gestion progressiste, Bruxelles, 1972 
Emmanuel MAURAGE, La longue marche vers la régionalisation. Les carnets politiques d'André Cools (1973-1979), Ottignies (Quorum), 1997
http://www.smolderscarabee.be/mich_bio.php (sv. février 2014)

 

Jardins de la Maison communale

Grand Route 297

4400 Flémalle

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Paul Delforge

Paul Delforge-Diffusion Institut Destrée-Sofam

Statue saint ARNOULD

Statue de saint Arnould, réalisée par Victor Demanet, sur le pont de Liège 25 juin 1939 puis au bout du quai de la Tannerie après la Libération de 1945.

Sculpteur des rois et des reines, des soldats et des résistants, des personnages historiques lointains comme de personnalités contemporaines, Victor Demanet a fait de l’espace public, notamment de Wallonie, sa galerie d’exposition. Remarqué au Salon des Artistes français de Paris, en 1923, pour son buste de Bonaparte à Arcole, Victor Demanet s’est rapidement imposé comme un portraitiste de talent auquel sont confiées de nombreuses commandes publiques. Il a déjà participé à plusieurs expositions internationales et reçu d’importants prix et distinctions lorsque lui est confiée la réalisation de deux statues, l’une de saint Arnould et l’autre de Godefroid de Bouillon, destinées à la ville de Bouillon. 

Dans la deuxième moitié des années 1930, la cité achève en effet d’importants travaux de voirie : dédoublement de la rue de la Maladrerie et création d’un nouveau quai qui dégage de nouvelles perspectives (circa 1937). S’inspirant du Pont Saint-Ange à Rome, les autorités locales ont par conséquent décidé de garnir les deux accès du pont de Liège des statues en question. Chargé de cette importante commande publique, Victor Demanet doit inscrire les deux statues sur un socle imposant (2,5 m de haut, sur 0,9 m de large) où viendront s’inscrire des bas-reliefs en bronze à motifs héraldiques.

Dès 1938, les statues d’Arnould et de Godefroid sont achevées par le sculpteur et peuvent être installées aux accès du Pont de Liège. La cérémonie d’inauguration, le 25 juin 1939, se déroule en grandes pompes. La duchesse de Vendôme (la sœur de feu le roi Albert Ier) a fait le déplacement. Mais quelques mois plus tard, lors de l’invasion allemande de mai 1940, aucune chance n’est laissée au Pont de Liège. Miraculeusement, le bombardement épargne les deux statues. À la Libération, il n’est plus question de les réinstaller sur le pont reconstruit. Elles sont séparées et le Godefroid de Bouillon escalade le contrefort pour trouver place à quelques mètres de l’entrée du château, tandis que le saint Arnould est relégué en bord de Semois, au bout du quai de la Tannerie. On l’aperçoit tant bien que mal depuis l’autre rive, en scrutant bien depuis le boulevard Vauban. Saint Arnould aura moins de visibilité que son homologue Godefroid.

Moins célèbre en dehors de Bouillon que l’homme des croisades, Arnould (ou Arnoul) n’en est pas moins considéré comme le premier dans la généalogie des ducs de Bouillon, descendant des comtes d’Ardenne. Né vers 582 à Lay-Saint-Christophe, près de Nancy, Arnoul serait le fils de Bodogisel et de Chrodoara (celle qui deviendra l’abbesse d’Amay). Ayant grandi au sein d’une noble famille franque, il est considéré comme le fondateur de la dynastie des Arnulfiens, famille alliée aux Pépinides. Aussi appelé Arnoul de Metz, il a gouverné l’Austrasie avec Pépin de Landen à l’époque des Mérovingiens (en l’occurrence Thibert II, la régente Brunehilde, puis Clotaire II). Fils d’Arnoul, Ansegisel épouse d’ailleurs Begge, la fille de Pépin, contribuant ainsi au développement de la dynastie carolingienne. Mais lassé par la vie de cour, Arnoul accepte d’être désigné évêque de Metz, alliant alors fonctions administratives et religieuses (613-628) ; il est à ce moment aussi précepteur du jeune Dagobert Ier. Mais il aspire à consacrer exclusivement sa vie à Dieu ; il renonce définitivement aux affaires de la cité et vit désormais en ermite solitaire jusqu’à son décès en 640. Godefroid en serait un lointain descendant. Décédé un 18 juillet de l’année 640 ou 641, Arnoul est fêté localement à cette date. Patron des brasseurs, il n’est pas le saint patron de Bouillon car c’est saint Eloi qui a ce titre.

 

Statue de saint Arnould (Bouillon)

Ayant grandi au confluent de la Sambre et de la Meuse où ses parents tiennent un commerce d’antiquités au cœur de la ville, Victor Demanet (Givet 1895 – Namur 1964) était appelé à leur succéder si ses études à l’Académie des Beaux-Arts (1916-1919), ne lui avaient pas donné le goût de la pratique de la sculpture. Élève de Désiré Hubin, Demanet eut la révélation en voyant des œuvres de Constantin Meunier et surtout celles traitant de la thématique sociale et ouvrière développée par le peintre/sculpteur bruxellois. Lors d’un séjour à Paris, les œuvres de Rude, Carpeaux et Rodin avaient fini de convaincre Demanet que sa voie était dans la sculpture. Comme d’autres artistes de son temps, il va réaliser plusieurs monuments aux victimes des deux guerres ; auteur de plusieurs dizaines de médailles, il poursuit aussi une œuvre plus personnelle à l’inspiration comparable à celle de Constantin Meunier, avec de nombreux représentants du monde du travail.

 

 


Les sculptures en pierre de Victor Demanet à Bouillon, Les jalons d’une ville n°3, dans http://bouillon.communesplone.be/shared/revue-communale/2008.09.pdf
http://www.sculpturepublique.be/6830/Demanet-GodefroidDeBouillon.htm
http://www.osotatarl.com/monument_chapuis.86.html#Ch%C3%A2teau%20Bouillon%2001 (s.v. novembre 2013)
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 397
Jacques TOUSSAINT, Les médailles du sculpteur-médailleur Victor Demanet (1895-1964), dans Revue belge de numismatique et de sigillographie, Bruxelles, 1984, n°130, p. 141-204 + planches
Jacques TOUSSAINT, Victor Demanet dans Arts plastiques dans la province de Namur 1800-1945, Bruxelles, Crédit communal, 1993, p. 147
M-J-F. OZERAY, Histoire des pays, château et ville de Bouillon, depuis l’origine du Duché jusqu’à la révolution de 1789…, Luxembourg, 1827, p. 313
Le Guetteur wallon, 1961, n°3, p. 65

sur le pont de Liège puis au bout du quai de la Tannerie après la Libération de 1945
6830 Bouillon

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Buste BRANCART Arthur

À Fauquez, un buste rend hommage à l’industriel Arthur Brancart (1870-1934), dont les activités et l’inventivité ont apporté de la prospérité à la région durant plus d’un demi-siècle. Graveur sur verre réputé aux usines de Saint-Ghislain dans les années 1880, Arthur Brancart est envoyé aux Gobeleteries et Cristalleries de l’Escaut à Anvers (1890), société qu’il va diriger, avant de restructurer une verrerie en Pologne pour le compte de la Société Générale de Belgique (1900). En 1902, il reprend la direction d’une toute jeune société installée à Fauquez, avant de créer sa propre société. En 1907, il est à la tête de la Société anonyme des Verreries de Fauquez qui, en plus de la gobeleterie, développe une activité de céramique et de verres spéciaux. Après la Grande Guerre, il invente et exploite la marbrite qui connaît un succès fulgurant, tant ce matériau a la faveur des réalisations Art Déco. Lorsqu’il disparaît en 1934, le « patron » est à la tête d’une société prospère, employant plusieurs centaines d’ouvriers, dont la plupart bénéficie d’un encadrement social (cité ouvrière, caisse de secours, établissement scolaire, etc.).

Industriel-philanthrope, Arthur Brancart est une figure marquante de sa région ; en guise d’hommage, la réalisation d’un buste en pierre noire est confiée au sculpteur Paul Joris (1887-1964) ; et dès 1934, ce buste est érigé sur la place du village de Fauquez. Sur le socle du buste une plaque en marbrite (qui évoque son invention) rend hommage à l’industriel et à son rôle social :

« Fondateur des Usines de Fauquez
Fondateur et Protecteur des Œuvres Sociales de Fauquez ».

À l’origine, le buste semble avoir fait partie d’un ensemble monumental comprenant également une religieuse avec, à ses pieds, un enfant et un ouvrier : ses personnes étaient placées à deux mètres en contre-bas du buste du « patron, dans une évidente posture paternaliste. En face, se trouvait le monument aux verriers morts, combattants ou déportés de la Guerre 14-18. L’ensemble était situé à proximité de la salle des fêtes Bien Travailler - Bien S'Amuser et du dispensaire des ouvriers. Par la suite, le monument a été déplacé ; seul le buste et son socle ont été conservés, sans que l’on sache si Paul Joris, le sculpteur, était l’auteur de l’ensemble de l’œuvre ou seulement du buste de Brancart.

Né à Molenbeek-Saint-Jean en 1887, Paul Joris se fait surtout connaître après la Grande Guerre. Certes, il n’échappe pas aux monuments aux victimes de guerre, mais celui qui s’est installé dans le Hainaut parvient à réaliser des œuvres personnelles particulièrement appréciées dans les années 1920. Travaillant le marbre ou la pierre, il réalise des bustes qui ravissent les particuliers et les décideurs publics. En 1927, il remporte d’ailleurs le Prix de sculpture du Hainaut. Il semble aussi travailler la céramique et la terre cuite. Il est décédé à Mons en 1964.

 

Jean-Jacques HEIRWEGH, Patrons pour l’éternité, dans Serge JAUMAIN et Kenneth BERTRAMS (dir.), Patrons, gens d'affaires et banquiers. Hommages à Ginette Kurgan-van Hentenryk, Bruxelles, Le Livre Timperman, 2004, p. 434 et 441
Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse

rue Arthur Brancart
1460 Fauquez

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Médaillon Jules BERLEUR

Au milieu du parc de l’avenue Delchambre, à Huy, l’imposant banc dédié à Eugène Godin n’échappe pas au regard ; réalisé par Guillaume Geefs et inauguré en 1872 du vivant de l’industriel hutois, ce monument est destiné à accueillir les membres des associations de musique que patronne Eugène Godin. Dans la cité mosane, la vie musicale est fort intense au milieu du XIXe siècle. Le 12 juin 1853 avait été créée la Société d’Amateurs, à l’initiative de Godefroid Camauër, artiste né à Tilburg en 1821, formé à Liège auprès de Daussoigne-Méhul, et installé à Huy à partir de 1840 quand il est nommé maître de chapelle à l’église collégiale de la cité. Avec le soutien d’Eugène Godin, Camauër multiplie les activités musicales, inscrivant Huy au palmarès de plusieurs concours européens de chant puis d’harmonie. À Camauër succédèrent Eugène Hutoy (1876-1880) puis Jules Berleur.

Après des études musicales au Conservatoire de Bruxelles, où il obtient le 1er prix de composition, Jules Berleur (Huy 1838-15/08/1883) s’était révélé un pianiste, un compositeur et un professeur de musique talentueux et apprécié. Auteur d’opérettes, d’odes et de chansons souvent populaires dont la bibliothèque du Conservatoire de Liège conserve moins d’une dizaine de partitions, Jules Berleur avait pris l’habitude de composer la musique et de laisser à d’autres le soin d’écrire les paroles. L’opérette Les enfants du proscrit, et les chants Avant l’assaut et Pensée de nuit semblent les plus connus. Berleur s’intéressait aussi fortement à l’organisation des concours de sociétés chorales dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Plusieurs sociétés ont d’ailleurs fait appel à lui pour les diriger : l’Union chorale de Pâturages, le Cercle Rossini d’Ixelles, la Chorale de Bruxelles, la Lyrique d’Andenne. L’ensemble de ses compositions sont rassemblées dans un ouvrage publié vers 1880 et intitulé Œuvres chorales de Jules Berleur.En 1880, il prend la succession d’Eugène Hutoy à la tête de la Société des Amateurs, mais la maladie a raison de ses initiatives ; en trois ans, il avait redynamisé la société et créé le Cercle choral des Dames. Joseph Duysburgh lui succèdera.

Médaillon Jules Berleur (Huy)

Dès mars 1884 se constitue un comité pour élever un monument à la mémoire de Jules Berleur ; Eugène Godin préside ce groupement qui lance une large souscription. C’est dans le cimetière de Huy-la Buissière que s’élève l’impressionnant monument funéraire, réalisé à la mesure du personnage. Achevé en octobre 1884, il fait l’objet d’un important rassemblement de la famille et de très nombreux amis. En raison du mauvais temps, la cérémonie se déroule au Théâtre, plutôt qu’au cimetière. Plusieurs dizaines de personnes y écoutent les discours et l’interprétation d’œuvres de Berleur, avant qu’Eugène Godin ne les convie à un banquet. Sur la colonne du cimetière figure un médaillon dont la copie conforme est apposée au flanc de la colonne qui soutient le buste de l’industriel Godin, sur la gauche du fameux banc du parc de l’avenue Delchambre. Inauguré en 1872 ce banc était une initiative de l’association musicale « la Société d’Amateurs de Huy ». Il est vraisemblable que le « médaillon Berleur » de la « colonne Godin » devait être inauguré le même jour que le rassemblement au cimetière de la Buissière, en octobre 1884. Sous le médaillon de la « colonne Godin », gravée dans la pierre, la mention rend hommage


A
JULES
BERLEUR
COMPOSITEUR ET


DIRECTEUR
1838-1883


Cependant, aucune signature n’apparaît, ni au cimetière ni au parc de l’avenue Delchambre, ni sur la pierre, ni sur le bronze. Si les archives nous renseignent sur l’architecte (Ferdinand Heine) et sur le tailleur de pierre (Constant Paquot) du monument funéraire, elles restent muettes quant au sculpteur du médaillon.


Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse, dont La Meuse, 6 mars 1884, 28 octobre 1884, 14 et 17 août 1903
Eugène DE SEYN, Dictionnaire biographique des sciences, des lettres et des arts en Belgique, Bruxelles, 1935, t. I, p. 49
http://www.zedfolio.com/pmb2/opac_css/index.php?lvl=author_see&id=7547 (s.v. mars 2015)
Jean Jacques ANDRIES, Précis de l’histoire de la musique, depuis les temps les plus reculés, suivi de notices sur un grand nombre d’écrivains didactiques et théoriciens de l’art musical, …
Souvenir d’un vieux disciple, dans Bulletin de la Société liégeoise de Musicologie, janvier 1993, n°80, p. 26-28
L’art universel, Bruxelles, 15 février 1873, p. 40

parc de l’Avenue Delchambre
4500 Huy

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