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Plaque Nicolas BOSRET

Après la Première Guerre mondiale, François Bovesse a donné ses lettres de noblesse au décret de l’Assemblée wallonne instaurant une fête de la Wallonie. Avec la création en 1923 du Comité de Wallonie, l’organisation des fêtes à Namur est désormais structurée et pérennisée : désormais, des manifestations rendent hommage aux volontaires wallons qui ont contribué aux Journées de Septembre 1830. Mêlant discours politique, folklore wallon et namurois, le rendez-vous annuel de septembre prend plusieurs déclinaisons dont l’inauguration de plaques commémoratives en souvenir de « grands Namurois ». 

Plaque commémorative Nicolas Bosret (Namur)

En 1925, à l’initiative des Amis de l’Art wallon, en particulier de la section namuroise, la plaque apposée sur la « maison natale » de Félicien Rops est la première à s’inscrire sur une liste qui ne va cesser de s’allonger, accueillant notamment par la suite une plaque dédiée à Nicolas Bosret, apposée sur sa maison natale. Le nombre deviendra à ce point conséquent qu’une sélection annuelle est faite pour déterminer le « parcours des plaques » qui s’inscrit dans le programme des fêtes de Wallonie. La plaque de Nicolas Bosret s’impose cependant comme un passage obligé.

« COLAS BOSRET
PRUMI DIRECTEÛR DES 40 MOLONS
A V’NU AU MONDE VAICI
LI 5 DI MAUS 1799 ».


Entre Nicolas Bosret et Namur, il existe une histoire d’amour qui remonte à 1856, lorsque la ville fait du Bia bouquet son hymne propre. On sait que Namur n’était pas la muse du compositeur wallon ; celui-ci évoque dans sa chanson ses états d’âme à la veille de son mariage. Musicien, bon vivant, sociétaire de plusieurs cercles culturels et d’amusement, co-fondateur des Moncrabeau, Nicolas Bosret est un personnage entré de son vivant dans le cœur des Namurois. Pour honorer sa mémoire à d’autres moments qu’à des anniversaires, une rue porte son nom dès 1878, un important buste est inauguré en 1929 et, par la suite, une plaque est apposée sur sa maison natale dans le vieux quartier de la capitale de la Wallonie. Chaque année, durant les fêtes de Wallonie, le parcours des plaques fait inévitablement halte devant cette maison située place Maurice Servais et les 40 Molons rendent un hommage particulier à celui qui a créé leur société, celle de Moncrabeau.


Jacques VANDENBROUCKE (texte), Pierre DANDOY (photos), 40 ans de fêtes de Wallonie à Namur, Bruxelles, Luc Pire, 2000, notamment p. 27
Mémoires de Wallonie, Les rues de Louvain-la-Neuve racontent…, Louvain-la-Neuve, 2011, p. 78
http://namur-cent-detours.skynetblogs.be/archives/category/des-statues/index-1.html 
Ernest MONTELLIER, dans Biographie nationale, t. 30, col. 183-187
Lucien MARÉCHAL, Nicolas Bosret et le « Bia bouquet », dans Le Guetteur wallon, décembre 1926, n°11 p. 232-237
Le Guetteur wallon, novembre 1926, p. 202 ; octobre 1928, n°8-9, p. 18

à l’angle de place Maurice Servais, de la rue des Échasseurs et de la rue de la Halle
5000 Namur

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Buste BOSRET Nicolas

Situé dans le cœur de Namur, entre l’ancienne Bourse de Commerce et le Théâtre auquel il fait face, le buste de Nicolas Bosret (1799-1876) rend hommage au compositeur du Bia bouquet. Entre le compositeur et la cité mosane, il existe une histoire d’amour qui remonte à 1856, lorsque la ville fait du Bia bouquet son hymne propre. On sait que Namur n’était pas la muse du compositeur wallon qui évoque, en fait, ses états d’âme à la veille de son mariage. 

Musicien, bon vivant, sociétaire de plusieurs cercles culturels et d’amusement, co-fondateur des Moncrabeau, Nicolas Bosret est un personnage entré de son vivant dans le cœur des Namurois et dont la mémoire est régulièrement honorée : en 1893, l’occasion en est donnée par le cinquantième anniversaire de la fondation des Moncrabeau ; en 1901, c’est le cinquantième anniversaire du Bia bouquet qui sert de prétexte à évoquer un Nicolas Bosret qui a donné son nom à rue de Namur depuis 1878. La réalisation d’un monument se fait par contre attendre. Il voit le jour au lendemain de la Grande Guerre.

Au début des années 1920, en effet, les groupements wallons de Namur se mobilisent pour élever un monument à Nicolas Bosret et le cinquantième anniversaire de la disparition de Bosret est l’occasion retenue pour concrétiser le projet. La Société des Moncrabeau coordonne l’initiative. Malgré une forte mobilisation et pour de multiples raisons, l’année 1926 s’écoule sans que le monument voie le jour. Sans cesse reporté, il est finalement inauguré : un buste réalisé en septembre 1928 est placé sur un monument original installé rue Jean-Baptiste Brabant. Lorsque les travaux seront entrepris pour réaliser le pont des Ardennes, le monument sera déplacé à proximité du Théâtre.

La réalisation du buste a été confiée au sculpteur et ornemaniste Désiré Hubin (1861-1944). Formé à l’Académie des Beaux-Arts de Namur, où il fut l’élève de Ferdinand Marinus, il reçoit aussi les enseignements de Charles Van der Stappen à Bruxelles. Auteur de sculptures décoratives et d’ornementations, il devient professeur de sculpture à l’Académie de Namur à partir de 1916. Maître de Victor Demanet et de Gustave Fischweiler notamment, Hubin réalisera d’autres bustes (Theo Tonglet, René Barbier, Jules Genisson ou Ernest Montellier) que celui de Bosret.
Le buste du monument Bosret est en bronze ; il est placé au sommet d’un haut piédestal en pierre fort évasé à sa base. Sur la face avant du socle, a été représenté et sculpté dans la pierre le « blanc bouquet » ; il est surmonté par les inscriptions minimalistes suivantes :

« Nicolas
Bosret
1799-1876 ».


En 1960 (ou 1953 ?, Vandenbroucke, p. 35), le Comité central de Wallonie offre la « pierre de vérité » aux 40 Molons dans le cadre de la redynamisation des fêtes de Wallonie à Namur. À partir de 1963, le monument Bosret est réinstallé près du Théâtre où quatre Molons en uniforme montent une garde d’honneur autour de la statue de leur fondateur lors des fêtes de Wallonie, en septembre. Au pied de la colonne, là où les passants peuvent s’asseoir sur une large pierre faisant office de banc entourant et soutenant l’ensemble, apparaît, sur la partie toujours, l’emblème/l’écusson en cuivre gravé de la Société Moncrabeau. 

La « pierre de vérité » est une sorte de siège qui joue un rôle important, chaque année, début septembre, à la veille des Fêtes de Wallonie : c’est là en effet que les candidats au concours de menteries de ladite Société s’asseyent pour raconter leur « minte ». Le lauréat devient Prince-Président de la République libre des Menteurs.


Jacques VANDENBROUCKE (texte), Pierre DANDOY (photos) : 40 ans de fêtes de Wallonie à Namur, Bruxelles, Luc Pire, 2000, p. 35, 54
Mémoires de Wallonie, Les rues de Louvain-la-Neuve racontent…, Louvain-la-Neuve, 2011, p. 78
http://namur-cent-detours.skynetblogs.be/archives/category/des-statues/index-1.html
Ernest MONTELLIER, dans Biographie nationale, t. 30, col. 183-187
Le Guetteur wallon, novembre 1926, p. 202
Lucien MARÉCHAL, Nicolas Bosret et le « Bia bouquet », dans Le Guetteur wallon, décembre 1926, n°11 p. 232-237
Le Guetteur wallon, octobre 1928, n°8-9, p. 18
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, p. 730

rue de Bavière, près du Théâtre
5000 Namur

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Buste BORDET Jules

Très tôt dans le XIXe siècle, la ville de Soignies est dotée d’une gare ferroviaire, ce qui reste relativement rare pour l’époque. Inaugurée en 1841, la gare voit se développer autour d’elle un tout nouveau quartier. L’espace se dessine progressivement ; en 1893, l’ancien kiosque est reconstruit et prend place au milieu d’un square où est érigé, en 1905, un monument dédié au travail « El Cayoteu ». C’est aussi là que les autorités locales vont honorer leur citoyen le plus célèbre. 

En 1919, l’attribution du Prix de médecine et de physiologie à Jules Bordet assied définitivement la notoriété du Sonégien. Professeur à l’Université libre de Bruxelles, chercheur à l’Institut Pasteur, Jules Bordet (1870-1961) s’est spécialisé dans l’étude de la bactériologie, la réalisation de vaccin et a ouvert à la biologie de vastes horizons dans le domaine de l'immunité. Le Prix Nobel consacre ses recherches et met en évidence l’ouvrage qu’il a rédigé durant la Grande Guerre mondiale, à savoir un Traité de l'immunité dans les maladies infectieuses.

La première décision du conseil communal de Soignies consiste à rebaptiser le square de la Station : désormais, il s’appellera le Square Jules Bordet (décision du 4 décembre 1920). Ensuite, en présence de Jules Bordet, une plaque est apposée sur la façade de sa maison natale, rue de Mons. Durant la Seconde Guerre mondiale, cette maison est détruite et la plaque commémorative est sauvegardée dans les locaux de l’Athénée qui va lui aussi porter le nom de l’illustre savant, comme d’ailleurs le Centre culturel. Après son décès, une nouvelle plaque rappelle le souvenir du Prix Nobel, et est apposé au 97 de la rue de la Station.

Quant au buste, installé sur le square Bordet, face à la gare, plus personne ne semble se souvenir de quand il date, qui l’a réalisé et à l’initiative de qui il a vu le jour. Les recherches effectuées par Jean-Philippe Losfeld l’ont conduit à constater que le buste est totalement identique à celui qui se trouve sur la tombe du savant, au cimetière d’Ixelles. Cette ressemblance ainsi que la mention, sur le monument situé à Soignies, des dates 1870-1961 gravées dans la pierre, donnent à penser que le buste a été placé sur le monument au début des années 1960, peu après le décès de l’éminent Sonagien. Peut-être s’agissait-il d’une initiative des autorités communales.

Avec plusieurs effets d’étages réalisés dans la pierre, un socle longitudinal en granit supporte le buste. En plus de la mention des dates dans la partie inférieure, les mots suivants ont été gravés sur le socle, juste en-dessous du buste :

« A J. Bordet »

Très discrètement décorée, une pierre de forme carrée soutient le socle, à l’arrière, à hauteur du sol.

Bulletin de l’Amicale des Anciens élèves de l’Athénée Jules Bordet de Soignies, 2009, n°59 (http://www.amicaleanciens-ars.be/Bulletin%202009.pdf)
Informations communiquées par Jean-Philippe Losfeld (janvier 2014)

square Jules Bordet
7060 Soignies

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Mémorial Albert BONJEAN

Pendant longtemps, les seuls monuments érigés dans la Fagne ont été des croix d’occis, rappelant des moments tragiques où tel garde forestier, tel promeneur patenté ou tel couple de fiancés trouvèrent la mort dans l’étendue sauvage que constitue le parc naturel des Hautes Fagnes. Une nouvelle tradition s’instaure dans les années 1930 lorsque de grands défenseurs de la Fagne sont honorés par leurs amis : c’est le cas pour Léon Frédéricq, décédé en 1935 ; puis d’Albert Bonjean honoré de son vivant, en 1938.

Docteur en Droit de l’Université de Liège (1880), Albert Bonjean a fait carrière comme avocat dans la cité lainière dont il est originaire et où il a fait ses études. Né en 1858, il est plusieurs fois bâtonnier du barreau de Verviers. S’il aime la prise de parole pour défendre ses clients, il trouve cependant son épanouissement profond en parcourant la Fagne voisine qu’il traverse de part en part, solidement équipé de vêtements et de souliers appropriés, de réserves alimentaires et de puissantes jumelles. Il n’oublie ni ses cartes ni surtout ses carnets de note qui constitueront la substance de nombreux écrits (légendes d’abord, poèmes et romans ensuite) dont la Fagne est l’héroïne principale. Déjà à l’Athénée, son professeur, Till Lorrain, l’encourageait à l’écriture. Si d’autres écrivains ont vanté certains coins de Wallonie, Bonjean est le premier chantre des Hautes Fagnes. 

Auteur d’une dizaine d’ouvrages publiés entre 1878 et 1939, il est le signataire d’une série impressionnante d’articles dans de nombreuses revues dont la ligne éditoriale manifeste notamment des sympathies libérales et de l’intérêt pour la Wallonie. Membre responsable du Touring-Club de Belgique (créé en 1895) auquel il apporte des articles pour son magazine, membre de la Commission des Monuments et des Sites, il se fait également le défenseur du patrimoine naturel et bâti, et surtout des sentiers vicinaux. Co-fondateur du Comité des Défenseurs de la Fagne (26 octobre 1911), puis de la Ligue de la Fleur, des Plantations et des Sites, il sera nommé président d’honneur des Amis de la Fagne lorsque cette asbl est constituée en 1935. Il n’eut de cesse d’obtenir la protection intégrale et officielle de la région des Hautes Fagnes et eut la satisfaction de voir ses efforts couronnés par le projet de reconnaissance de la Fagne en réserve nationale.

Mémorial Albert Bonjean

Ce sont ces différents titres qui lui valent l’honneur d’une haute stèle (3,5 mètres) où un bas-relief de bronze figure sa silhouette. L’initiative est prise par « ses amis », comme en témoigne la signature sur la face avant du monument. Le sculpteur ne pouvait omettre d’attirer l’attention sur les jumelles du jubilaire. Le lieu et le jour de l’inauguration du mémorial ont aussi valeur de symboles. Depuis plusieurs années, Bonjean s’était battu pour préserver la Fagne et, en 1931, il avait réussi à faire renaître la Baraque Michel. Cent ans après l’édification de la chapelle Fischbach, le lieu reprenait vie et redevenait un point de rendez-vous pour les amis de la Fagne. Alors que les Hautes Fagnes obtenaient le statut de Parc national, la société des Amis de la Fagne décidait d’une journée annuelle de la Fagne : le 10 juin 1936, lors de cette première, Bonjean fut au centre de tous les discours et des réjouissances. L’année suivante, c’est au tour du professeur Frédéric d’être honoré. Quant à la troisième édition de la Journée de la Fagne, elle est l’occasion d’inaugurer le monument Albert Bonjean, tandis que Jules Feller lui consacre un poème. L’œuvre est installée à la Baraque Michel, à quelques pas des tourbières, du Boultay et de la chapelle Fischbach. En 1975, il sera déplacé en bordure nord du parking de la Baraque Michel.

Les Amis de la Fagne en ont confié la réalisation à un sculpteur liégeois. Né à Grivegnée en 1883, Van Neste est à la fois peintre et sculpteur. Autodidacte pour le premier genre, il a reçu une formation à l’Académie de Liège pour le second. Retenu prisonnier dans un camp allemand pendant la Première Guerre mondiale (il séjournait à Munster en mars 1915), Van Neste représentera les conditions de sa captivité, ainsi que des portraits de prisonnier dans quelques tableaux, mais il privilégiera les paysages, les fleurs et les natures mortes dans son œuvre picturale, voire quelques scènes villageoises. Comme d’autres sculpteurs, il eut diverses commandes de monuments aux morts de la Grande Guerre dont principalement celui de Spa. Il signe aussi le buste placé au sommet du monument aux motocyclistes à Aywaille.


La Vie wallonne, août 1938, CCXVI, p. 357-374
André VLECKEN, Albert Bonjean, le Chantre des Hautes Fagnes, sa vie, son œuvre 1858-1939, Verviers, Vinche, c. 1941
http://www.osotatarl.com/monument_chapuis.86.html#Baraque%20Michel 
http://www.mini-ardenne.be/encyclopedie.phpdisplay=theme&commune=JALHAY&localite=HAUTES_FAGNES&P=1 (s.v. mars 2014)
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 672
Benjamin STASSEN, La Fête des Arbres. L’Album du Centenaire. 100 ans de protection des arbres et des paysages à Esneux et en Wallonie (1905-2005), Liège, éd. Antoine Degive, 2005, p. 60
Bulletin de l’Association pour la Défense de l’Ourthe, juillet-septembre 1939, n°114, p. 190
R. COLLARD et V. BRONOWSKI, Guide du plateau des Hautes Fagnes, Verviers, éd. des Amis de la Fagne, 1977, p. 303

Baraque Michel – 4845 Jalhay

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Plaque Pierre BONAPARTE

C’est à l’occasion de l’ouverture d’un Musée Bonaparte aux Épioux qu’une plaque commémorative est inaugurée dans ce château proche de Florenville, le 6 octobre 1950. L’initiative en revient à l’Académie luxembourgeoise présidée par Pierre Nothomb qui, depuis la Libération, parsème la province de Luxembourg de mémoriaux dédiés à des personnalités illustres qui ont vécu, séjourné ou sont passées par la « Belle province ». Après Pétrarque, Châteaubriand, Shakespeare et Perk, c’est au tour de Pierre Bonaparte de retenir l’attention de cette Académie héritière de l’Association des Écrivains ardennais.


ICI VECUT 
DE 1862 À 1871
LE PRINCE 
PIERRE NAPOLÉON
BONAPARTE
QUI Y TROUVA 
DANS LES RUDES PLAISIRS 
DE LA CHASSE
ET L’AMITIÉ DES ARDENNAIS
LES SEULS JOURS DE REPOS
DE SA VIE
AVENTUREUSE


indique la plaque de schiste apposée sur le pignon de façade du vieux manoir ardennais dont Bonaparte fut quelque temps le propriétaire.

Neveu et cousin de deux empereurs des Français, Pierre Bonaparte n’a pas marqué la grande histoire de son empreinte à l’instar de Napoléon Ier ou de Napoléon III. Fils de Lucien Bonaparte, Pierre Bonaparte naît à Rome en 1815 quelques jours avant l’exil à Saint-Hélène de Napoléon Ier, son oncle. Davantage attiré par l’équitation et par le maniement des armes que par l’enseignement des Jésuites d’Urbino, il est mêlé à diverses intrigues et péripéties (dont la Rivoluzione di Romagna de 1831 et des faits d’armes condamnables) qui l’obligent à trouver refuge en différents endroits (États-Unis, Londres, etc.) avant finalement de trouver refuge à Mohimont, dans un Luxembourg dont le sort n’a pas encore été définitivement fixé par les traités (1838). 

Dix ans plus tard, il délaisse sa vie rythmée par la chasse, l’étude et l’écriture pour se joindre, à Paris, à la Révolution. Désigné comme représentant de la Corse à l’Assemblée nationale, le député de l’extrême gauche est nommé chef de bataillon à la Légion étrangère. Ces expériences tournent court ; en 1851, il s’éloigne de son cousin Napoléon III. Après un séjour en Corse (1852-1859), il revient en province de Luxembourg : à Daverdisse d’abord (1859), en louant le château d’Orval ensuite (1860-1862), avant de se porter acquéreur du château des Épioux (1862-1870). Se passionnant pour l’écriture, il fait installer une presse d’imprimerie et, comme l’observe Édouard Hizette, plusieurs de ses ouvrages de l’époque (dont La Bataille de Calenzana) portent l’inscription «Imprimerie des Épioux». 

En 1869, lors d’un séjour à Paris, la plume de Pierre Bonaparte s’éloigne de la poésie pour piquer les adversaires de Napoléon III auquel il accorde à nouveau ses faveurs. La joute scripturale dégénère et Pierre Bonaparte tue un des témoins du journaliste adverse qui le provoquait en duel. L’affaire fait grand bruit et la tombe spectaculaire de Victor Noir – un gisant en bronze – qui, au Père Lachaise, reste un lieu très fréquenté, alimente le mythe de l’un des derniers duels mortels de l’histoire de France qui entoure les protagonistes. Acquitté après un procès particulièrement suivi par l’opinion publique (1870), Pierre Bonaparte repasse la frontière, séjourne à Rochefort (1870-1875), avant de s’installer à Bruxelles (1875-1877), puis à Versailles (1878-1881) où il s’éteint. De ses relations et mariages, Pierre Bonaparte n’eut qu’un fils comme héritier, Roland (1858-1924). Ce dernier est le père de Marie (1882-1962). Celle qui épousa en 1907 le fils du roi de Grèce deviendra, dans l’Entre-deux-Guerres, la propagandiste enthousiaste de l’œuvre de Freud ; considérée ipso facto comme psychanalyste, la princesse de Grèce et du Danemark est aussi reconnue comme écrivaine à partir de 1933 quand elle publie une impressionnante biographie sur Edgar Poe.

C’est elle qui est l’invitée d’honneur de l’Académie luxembourgeoise, en 1950, pour l’inauguration du « Musée Bonaparte » aux Épioux, en même temps qu’est dévoilée la plaque commémorative. Lancé par l’Académie luxembourgeoise, le projet de Musée – dont Arsène Geubel, membre de l’Académie, est le conservateur – ne survivra pas aux années 1960 aux Épioux ; il est transféré au Moulin Maron à Florenville, avant d’être hébergé dans une maison de la rue de la Station (1961-1970), puis de fermer définitivement. Le Musée conservait quelques souvenirs du « baroudeur et chasseur invétéré, rejeton turbulent, exilé pour cause de son sang… », ainsi que le qualifie Jean-Marie Cauchies. Organisée au printemps 2009, une exposition montée par le Cercle archéologique et historique de Florenville témoigne que les objets et livres provenant de l’ancien Musée n’avaient pas disparu. 

Mais c’est surtout Pierre Nothomb qui a contribué à mettre en évidence l’attachement particulier de Pierre Bonaparte pour la province de Luxembourg. Au-delà de ses écrits très fouillés, s’appuyant sur de riches archives familiales, le président de l’Académie luxembourgeoise est en effet le principal initiateur tant du musée que de la plaque apposée sur le mur du « château du Prince Pierre », aux Épioux, faisant de Pierre Napoléon « un homme du pays », « un Ardennais », « un Luxembourgeois » ; « ce n’est qu’à la veille de sa mort que l’ancien châtelain des Épioux s’arrache à ce pays wallon-luxembourgeois qui est vraiment devenu son pays ! », rappelle Pierre Nothomb qui a établi avec méticulosité que le berceau de la famille maternelle de Pierre se situe précisément dans un espace compris entre Mohimont, Carignan, Orval et Florenville (p. 97-116).

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
http://pierrebonaparte.skynetblogs.be/ 
http://www.herodote.net/dossiers/evenement.php?jour=18700112 (s.v. juillet 2015)
La Vie wallonne, IV, n°252, 1950, p. 300
Les Cahiers de l’Académie luxembourgeoise, Chronique 1938-1958, Arlon, Fasbender, 1959, nouvelle série 1, p. 19-20
Édouard HIZETTE, Pierre Napoléon Bonaparte (1815-1881), Prince à Orval et aux Épioux, dans Le Pays gaumais, 2003-2004, Virton, 2010, p. 167-183 (intro. De J-M. Cauchies)
Pierre Napoléon Bonaparte (1815-1881), neveu de l’empereur Napoléon Ier, prince aux châteaux d’Orval et des Épioux, Jamoigne, ancienne grange du Faing, exposition, avril 2009
Lucien PETIT, Revue Ardenne et Meuse n° 5
EUGÉNIE DE GRÈCE, Pierre Napoléon Bonaparte, Paris, Hachette 1963
Pierre NOTHOMB, Curieux personnages, Bruxelles, Brepols, 1942, p. 89-116
Adrien DE PRÉMOREL, L’Avenir, 26 octobre 1950
Témoignage du propriétaire du manoir (août 2015)

Les Épioux
6820 Florenville

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Stèle Pierre BONAPARTE

En octobre 1990, l’Escadron Sacré prend l’initiative d’ériger et d’inaugurer une stèle au sud de Halma, à Neupont, près de la Lesse, non loin de la ferme de Mohimont, en l’honneur de Pierre Bonaparte.

Passant, souviens-toi !
Ici, de 1838 à 1848, PIERRE BONAPARTE,
neveu de l’Empereur, Prince errant
des forêts d’Ardenne, vint calmer son
humeur farouche.

Inspiré par un texte qu’écrivit Adrien de Prémorel sur le long séjour de Pierre Bonaparte en Ardenne, la formule du mémorial fait surtout référence à la période où le jeune Corse fugueur trouva refuge à quelques kilomètres de la France.

Neveu et cousin de deux empereurs des Français, Pierre Bonaparte n’a pas marqué la grande histoire de son empreinte à l’instar de Napoléon Ier ou de Napoléon III. Fils de Lucien Bonaparte, Pierre Bonaparte naît à Rome en 1815 quelques jours avant l’exil à Saint-Hélène de Napoléon Ier, son oncle. Davantage attiré par l’équitation et par le maniement des armes que par l’enseignement des Jésuites d’Urbino, il est mêlé à diverses intrigues et péripéties (dont la Rivoluzione di Romagna de 1831 et des faits d’armes sévèrement condamnés) qui l’obligent à trouver refuge en différents endroits. Après avoir erré aux États-Unis, en Albanie, voire à Londres, il s’arrête à Mohimont, dans un Luxembourg dont le sort n’a pas encore été définitivement fixé par les traités (1838). Pendant dix ans, sa vie est rythmée par la chasse, l’étude et l’écriture. C’est à cette période de l’existence de Pierre Bonaparte que fait référence le mémorial de Daverdisse.
 

Stèle Pierre Bonaparte (Daverdisse)

Par la suite, Pierre Bonaparte quitte son exil doré pour se joindre aux troubles révolutionnaires qui éclatent à Paris en 1848 et qui amènent Napoléon III au pouvoir. Désigné comme représentant de la Corse à l’Assemblée nationale, Pierre est député de l’extrême gauche, en même temps qu’il est nommé chef de bataillon à la Légion étrangère. Ces deux expériences tournent court ; en 1851, il s’éloigne de son cousin Napoléon III. Après un séjour en Corse (1852-1859), il revient en province de Luxembourg : à Daverdisse encore (1859), mais surtout au château d’Orval (1860-1862), avant de se porter acquéreur du château des Épioux (1862-1870). En 1869, lors d’un séjour à Paris, la plume de Pierre Bonaparte s’éloigne de la poésie pour piquer les adversaires de Napoléon III auquel il accorde à nouveau ses faveurs. La joute scripturale dégénère et Pierre Bonaparte tue un des témoins du journaliste adverse qui le provoquait en duel. L’affaire fait grand bruit et la tombe spectaculaire de Victor Noir – un gisant en bronze – qui, au Père Lachaise, reste un lieu très fréquenté, alimente le mythe de l’un des derniers duels mortels de l’histoire de France. Acquitté après un procès particulièrement suivi par l’opinion publique (1870), Pierre Bonaparte repasse la frontière et finit ses jours à Rochefort (1870-1875), avant de s’installer à Bruxelles (1875-1877) puis à Versailles (1878-1881) où il s’éteint. De ses relations et mariages, Pierre Bonaparte n’eut qu’un fils comme héritier, Roland (1858-1924). Ce dernier est le père de Marie (1882-1962). Celle qui épousa en 1907 le fils du roi de Grèce deviendra, dans l’Entre-deux-Guerres, la propagandiste enthousiaste de l’œuvre de Freund ; considérée ipso facto comme psychanalyste, la princesse de Grèce (et du Danemark) est aussi reconnue comme écrivaine à partir de 1933 quand elle publie une impressionnante biographie sur Edgar Poe.

Loin des péripéties du Musée Bonaparte qui occupa l’Académie luxembourgeoise dans les années 1950, d’autres passionnés de Napoléon finissent par convaincre les autorités locales de baptiser la route reliant Wellin à Daverdisse, la N857, « route Pierre Napoléon Bonaparte » : dans les années 1980, quelques panneaux fleurissent au bord d’une chaussée qui fait 6 kilomètres. En octobre 1990, L’Escadron sacré pose un geste supplémentaire en inaugurant une stèle au bord de la route Bonaparte, non loin de la Lesse, à peu de distance de la ferme de Mohimont. Réalisée par les ouvriers communaux de Wellin, composée de pierres provenant d’un cimetière, la stèle actuelle comprend une plaque émaillée avec le texte évoqué ci-dessus et elle était surmontée, à l’origine, d’un "N" impérial, réalisé par Joseph Poelman. En 2015, suite à des actes de vandalisme, il ne reste plus qu’une grande plaque émaillée et la trace de l’emplacement du "N" impérial. Comme le rapporte Lucien Petit, le mémorial constitua jusqu’en 2002 une halte sur le parcours d’une marche « impériale » organisée par les membres de l’association napoléonienne L’Escadron Sacré. Outre l’interprétation d’hymnes nationaux et le dépôt de fleurs, un discours était prononcé par Miguel Moutoy, président du cercle. Créée en juillet 1988, la « Société d’études napoléoniennes et de prestation en uniforme du premier empire » fut dissoute en décembre 2002.

 
Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
http://pierrebonaparte.skynetblogs.be/ 
http://www.herodote.net/dossiers/evenement.php?jour=18700112 (s.v. juillet 2015)
La Vie wallonne, IV, n°252, 1950, p. 300
Édouard HIZETTE, Pierre Napoléon Bonaparte (1815-1881), Prince à Orval et aux Épioux, dans Le Pays gaumais, 2003-2004, Virton, 2010, p. 167-183 (intro. De J-M. Cauchies)
Pierre Napoléon Bonaparte (1815-1881), neveu de l’empereur Napoléon Ier, prince aux châteaux d’Orval et des Épioux, Jamoigne, ancienne grange du Faing, exposition, avril 2009
Lucien PETIT, Revue Ardenne et Meuse n° 5
EUGÉNIE DE GRÈCE, Pierre Napoléon Bonaparte, Paris, Hachette 1963
Pierre NOTHOMB, Un curieux personnage, Bruxelles, Brepols, 1966
Adrien DE PRÉMOREL, L’Avenir, 26 octobre 1950
Lucien PETIT, sur http://pierrebonaparte.skynetblogs.be/+&cd=1&hl=fr&ct=clnk&gl=be

le long de la N857, dite route Pierre Napoléon Bonaparte 
6922 Neupont, hameau faisant partie de Halma, entité de Wellin

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Paul Delforge

Paul Delforge-Diffusion Institut Destrée-Sofam

Monument Mathieu BODSON

Situé à l’intersection de la rue Jean Hermesse, de la rue du Diable et de la place Mathieu Bodson, à Jupille, près de Liège, un monument rappelle qu’un résistant de la Grande Guerre a été fusillé à Bruxelles en 1916 pour espionnage. Ouvrier plombier quand éclate la Grande Guerre, Mathieu Bodson vient tout juste de fêter ses vingt et un ans. Il s’est porté volontaire dès août 1914, mais il a été réformé par l’armée belge. L’armée britannique lui trouve pourtant suffisamment de qualités pour recourir à ses services dans le contre-espionnage. Il est actif pendant plusieurs mois, avant d’être dénoncé. Arrêté et condamné à mort, Mathieu Bodson est exécuté à Bruxelles en septembre 1916 : les chefs d’accusation retenus contre lui portent sur le fait d’avoir favorisé le passage de fugitifs aux Pays-Bas, sur la fabrication de faux-passeports et une aide aux soldats belges.

À l’initiative de l’administration communale de Jupille, la place de Fléron est rebaptisée place Mathieu Bodson dès les années 1920, mais une association souhaite rendre un hommage plus appuyé au « héros local » en érigeant un monument. Se positionnant sans doute comme les descendants lointains de la famille des pépinides, « Lès R’djètons dès Pépins » obtiennent le soutien des autorités communales et des anciens combattants de 14-18 pour élever un monument que la végétation a progressivement encerclé. Précédé d’un bac d’eau alimenté par le réseau, le monument en béton comprend sur sa partie supérieure un portrait de profil du résistant, placé entre deux colonnes et surmonté d’un mince chapiteau. Outre le nom des contributeurs, le monument mentionne :

« Mathieu Bodson
Fusillé à Bruxelles
Pour espionnage
16 septembre 1916 ».

Liège, Patrimoine architectural et territoires de Wallonie, Liège (Mardaga), 2004, p. 72
Lettre du Patrimoine, avril 2013
http://www.bel-memorial.org/cities/liege/jupille-sur-meuse/jupille-sur-meuse_mon_mathieu_bodson.htm (sv 31 janvier 2014)

place Mathieu Bodson
4020 Liège-Jupille

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Paul Delforge

Paul Delforge-Diffusion Institut Destrée-Sofam

Monument Herman BODSON

À côté du célèbre lion réalisé par Félix-A. Bouré et qui culmine au sommet du barrage de La Gileppe, un monument dédié aux constructeurs dudit barrage faisait piètre figure. Situé au pied du mur du premier barrage, il était comme écrasé et paraissait nettement moins spectaculaire que l’immense roi des animaux. Par sa forme – une haute et étroite colonne en pierre posée sur un bloc rectangulaire en moellons, lui-même dressé au-dessus d’une base circulaire de trois marches – il est aussi nettement plus discret : sur les côtés du piédestal principal, sont incrustées quatre plaques commémoratives. Chacune identifie un acteur majeur du prestigieux édifice construit pour retenir l’eau du ruisseau de La Gileppe, fournir ainsi de l’eau de distribution aux industries et aux habitants de Verviers et régulariser aussi le débit – souvent torrentueux – de la Vesdre.

Ce monument pourrait avoir été construit dès 1869 et inauguré le 9 octobre lors de la pose de la toute première pierre du barrage, afin d’honorer Eugène Bidaut, décédé en 1868. Diplômé de l’École des Mines de Liège (à la fin des années 1820), cet ingénieur fera toute sa carrière dans la jeune administration belge. Dès les années 1850, il est chargé des premières études sur les eaux verviétoises. Son rapport final sur La Gileppe lui vaut d’accéder au rang de secrétaire général du Ministère des Travaux publics en 1866, mais sa mort, deux ans plus tard, l’empêche d’accompagner la phase décisive des travaux et d’être pleinement célébré au moment de l’inauguration du barrage.

A EUGÈNE BIDAUT
AUTEUR DU PROJET
DE CE BARRAGE
NÉ À LIÈGE
LE 6 AOÛT 1808
DÉCÉDÉ LE 19 MAI 1868 À BRUXELLES


La deuxième plaque commémorative pourrait avoir été apposée à la même époque puisqu’elle rend hommage :

A AUGUSTE DONCKIER
INGÉNIEUR
COLLABORATEUR AU PROJET DE CE BARRAGE
NÉ À LIÈGE
LE 24 MAI 1831
DÉCÉDÉ À GOÉ-LIMBOURG
LE 9 AOÛT 1866


Géologue et botaniste, ingénieur et docteur en Sciences, Donckier avait été chargé d’étudier sur le terrain les détails du projet de barrage. Sa disparition, à l’âge de 35 ans, fut un handicap dans la poursuite du projet, de la même manière que la mort d’Herman Bodson :

« A
HERMAN BODSON
INGÉNIEUR ET
COLLABORATEUR AU PROJET
ET AUX PREMIERS TRAVAUX
DE CONSTRUCTION
DE CE BARRAGE
NÉ À ODEUR
LE 1ER DÉCEMBRE 1806
DÉCÉDÉ À LIÈGE
LE 28 MAI 1871 »


Ingénieur diplômé de l’École des Mines de Liège (1828), Herman Bodson a fait carrière entre le Corps des Mines où il est nommé géomètre en 1833 et divers chantiers privés en Wallonie où il travaille dans le secteur charbonnier. Détaché par l’administration pour s’occuper spécialement du projet de barrage sur La Gileppe, il défend l’idée d’un seul barrage, dont le mur de retenue voisinerait avec les 45 mètres de haut afin de pouvoir retenir 12 millions de m³ d’eau. Décédé en 1871, Bodson n’assistera pas à l’inauguration du barrage, en 1878.

Si l’on veut considérer que le monument a été dressé en l’honneur de tous les constructeurs du barrage, il n’est par conséquent pas possible de retenir l’année 1869 comme celle de son inauguration, ni d’ailleurs celle du 28 juillet 1878, lors de l’inauguration du barrage. La quatrième plaque du monument aux constructeurs du barrage rend en effet hommage :

AU BARON JAMBLINNE DE MEUX
INGÉNIEUR-COLLABORATEUR
DE L’AUTEUR DE CE BARRAGE
NÉ AU CHÂTEAU D’EMINES
LE 28 DÉCEMBRE 1820
DÉCÉDÉ À BRUXELLES
LE 28 AVRIL 1912

Plaque commémorative rappelant la première construction du barrage de La Gileppe et son inauguration par Léopold II

Le doute est cependant de mise car un monument apparaît sur le premier tableau de La Gileppe, réalisé par le jeune peintre verviétois, Charles Boland dès 1878. Ce dernier avait été impressionné par la construction du barrage et avait voulu être le premier à peindre ce paysage neuf. Il prend l’initiative d’offrir à la ville de Verviers le tableau qu’il achève durant l’été 1878. De manière assez visible mais sans aucune précision, un monument apparaît au pied du mur du barrage, près des bâtiments du personnel. Ce tableau permet par conséquent d’affirmer qu’un monument était déjà construit lors de l’inauguration du barrage, le 28 juillet 1878, mais il est impossible de savoir s’il s’agit du monument aux constructeurs du barrage.

La question est plus délicate qu’il n’y paraît. En effet, une polémique a éclaté en octobre 1869 sur la question de la paternité des plans du barrage de la Gileppe. Les honneurs officiels décernés à Jamblinne de Meux cette année-là ont heurté le fils d’Eugène Bidaut et la veuve d’Auguste Donckier. Si Jamblinne avait signé les plans di barrage, Bidaut et Donckier en étaient les auteurs principaux, voire uniques : leurs mérites ne devaient pas être oubliés. La presse de l’époque a fait ses choux gras des lettres échangées publiquement sur le sujet. Par ailleurs, les articles de presse d’octobre 1869 et de juillet 1878 ne font aucune mention d’un quelconque monument aux constructeurs du barrage. Dresser un monument commun aux différents protagonistes a par conséquent dû être un acte de pacification accompli après la disparition du baron Jamblinne, après 1912.

Dans les années 1960, quand d’importants travaux sont entrepris pour rénover et rehausser le mur du barrage de La Gileppe, le sort du monument aux constructeurs paraît être scellé. Une photo de 1969 montre clairement que son emplacement constitue une gêne évidente sur le chantier d’élargissement de la base du mur-barrage. Alors qu’une nouvelle plaque commémorative est apposée sur le nouveau socle du lion, lors de l’inauguration du surhaussement, le 20 octobre 1971, l’ancien monument a disparu. En fait, il s’est éloigné de la vallée de la Gileppe et a été transféré à Verviers. Il se trouve désormais à l’arrière du bâtiment qui, rue Xhavée, accueille le Centre culturel régional de Verviers (CCRV).



Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse, notamment de juillet 1878
La Meuse, 11 octobre 1869, 17 et 25 novembre 1869 ; L’Écho du Parlement, 14, 20 et 25 novembre 1869
R. CAMPUS dans Biographie nationale, t. XXX, suppl. 2, col. 161-164 
E. GILON, Le barrage de la Gileppe. Guide du touriste. Vues, cartes et plans, Verviers, 1878, p. 134
Bulletin communal de Verviers, 1866, p. 56 
R. DEMOULIN, Contribution à l’histoire de la Révolution de 1830 à Liège, extrait du Bulletin de l’Institut archéologique et historique, Bruxelles, 1936, t. 60, p. 15
Jean DESHOUGNES, La petite histoire de La Gileppe et ses promenades, Verviers, Marabout, 1971, 2e éd., p. 54-55, en particulier la photo de 1969 p. 133
BODSON, DETIENNE, DECLERCQ, Le barrage de la Gileppe, Mémoire rédigé à la demande de la section de Liège de l’Association des ingénieurs sortis de l’École  de Liège, Liège, 1877
Une certaine idée de la Wallonie. 75 ans de Vie wallonne, Liège, 1995, numéro spécial de La Vie wallonne, t. LXIX, p. 260
La Vie wallonne, I, 1962, n°297, p. 5-29

Béthane
4830 Dolhain

carte

Paul Delforge

http://www.sculpturepublique.be/7130/DeValeriola-GillesBinchois-.jpg 

Statue Gilles BINCHOIS

Face à la gare de Binche, de style néo-gothique, construite entre 1905 et 1910, s’étend une imposante esplanade, appelée place Eugène Derbaix, au centre de laquelle a été inaugurée en 1931 une statue de l’Indépendance ; autour de ce monument central s’étendent quatre pelouses séparées par des chemins : la moitié supérieure, côté gare, est ceinturée par une balustrade en pierre bleue, sculptée, de style néo-gothique d’où émergent 8 colonnes de pierre, elles-mêmes surmontées d’une statue en bronze. Destiné à mettre la gare davantage en évidence tout en atténuant harmonieusement le dénivelé du terrain, le square a été aménagé en respectant les indications très précises de la Commission royale des Monuments qui délégua sur place, à plusieurs reprises, ses représentants pour veiller à la bonne exécution des travaux (adjugés à 60.000 francs de l’époque). Soutenu par les autorités locales, et en particulier par le bourgmestre Eugène Derbaix, le projet de square s’inspire de celui du Petit Sablon, à Bruxelles, avec ses colonnettes gothiques et ses statuettes évoquant « l’histoire nationale ». Il est inauguré en septembre 1911.

Statue de Gilles Binchois

Oeuvres des sculpteurs Vermeylen et Valériola, désignés en mai 1911, les 8 statues représentent « des personnages illustres qui ont joué dans l’histoire locale un rôle important et dont le souvenir mérite de vivre dans la mémoire des Binchois » (Derbaix). Quatre sont dues au ciseau de Frantz Vermeylen : Guillaume de Bavière, Marguerite d’York, Arnould de Binche et Charles-Quint (toutes les statues de droite, quand on fait face à la gare). Les quatre autres ont été réalisées par Edmond de Valériola (1877-1956) : Baudouin le Bâtisseur, Gilles Binchois (disparue en 2014), Yolande de Gueldre et Marie de Hongrie dont la statue a été volée en 1993. Dans le projet initial, présenté en octobre 1910, Gilles Binchois, comme d’ailleurs Yolande de Gueldre et Guillaume de Bavière, n’avait pas été retenu. Figuraient alors Albert, Isabelle et Jacques Du Broeucq qui, sur

 décision du conseil communal de Binche et d’Eugène Derbaix en particulier, furent remplacés dans la version définitive du projet, arrêtée au printemps 1911.

Formé à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles (1894-1904), de Valériola est le cadet de 20 ans de Frantz Vermeylen avec lequel il travaille sur le chantier binchois. Plusieurs fois candidat au Prix de Rome, le Bruxellois s’est spécialisé dans les portraits (surtout les jeunes filles et les femmes) et les médailles. La ville d’Ostende lui a confié le monument James Ensor (1930), celle d’Etterbeek celle de Constantin Meunier (1931) et il est aussi l’auteur d’un buste en marbre de Jules Bordet (Académie royale de Médecine, 1950). Comme beaucoup de sculpteurs de son époque, il fut sollicité pour réaliser des monuments commémoratifs des événements de 14-18, puis de la Seconde Guerre. Il semble cependant que les critiques émises lors de la présentation de son lieutenant-général Bernheim (inauguré à Bruxelles, au square Marie-Louise, en 1936) aient quelque peu porté préjudice à sa réputation. Cela ne l’empêche pas de réaliser de nombreuses œuvres personnelles, l’artiste travaillant le marbre autant que le bronze suivant son inspiration qui trouva aussi à s’épanouir comme médailliste. À Binche, en 1910, ce sont cependant quatre statues qu’il réalise dont un Gilles Binchois (1400-1460) aisément reconnaissable : face à la gare, sa statue est située sur la partie latérale gauche de la balustrade ; elle est la première.

Contemporain de l’illustre Guillaume Dufay, Gilles Binchois est reconnu comme un compositeur de chansons profanes dont l’influence sur les générations suivantes semble s’être davantage exercée que celle de Dufay, voire de l’Anglais John Dunstable. Ses œuvres ont en effet été maintes fois empruntées, utilisées voire transformées. Ses musiques sont presque toujours écrites à trois voix, et se fondent généralement sur des poèmes à forme fixe, des ballades et surtout des rondeaux, dont il n'a pas écrit le texte lui-même, sans que l’on connaisse toujours l’auteur. À l’instar de Dufay, Binchois est l’initiateur d'un style nouveau. Aux alentours de 1430, la musique de Binchois à la fois profane et religieuse est considérée comme une véritable ars nova.
Il est intéressant d’observer que sur les 8 statues réalisées devant la gare de Binche, six représentent des « princes ou princesses », contre deux artistes : Arnould de Binche et Gilles Binchois. Toutes les personnalités ont vécu avant le XVIIe siècle.



Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Le Journal de Charleroi, 31 octobre 1910 et 16 mai 1911, Journal de Bruxelles, 3 octobre 1911
Eugène DERBAIX, Monuments de la Ville de Binche, Vromant & Cie, 1920, p. 38-39
Étienne PIRET, Binche, son histoire par les monuments, Binche, Libraire de la Reine, 1999
Robert WANGERMÉE, Guillaume Dufay et la renaissance en musique, dans Robert WANGERMÉE et Philippe MERCIER (dir.), La musique en Wallonie et à Bruxelles, t. I : Des origines au XVIIIe siècle, Bruxelles, La Renaissance du Livre, 1980, p. 130-133
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. I, p. 479-486
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 460

 

place et square Eugène Derbaix
7130 Binche

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Paul Delforge

Paul Delforge (avril 2015)-Diffusion Institut Destrée-Sofam

Plaque Marguerite BERVOETS

Apposée sur la maison familiale des Bervoets à La Louvière, une plaque rend hommage à l’héroïsme d’une jeune résistante promise à une belle carrière littéraire. Professeur à l’École normale de Tournai au moment de l’invasion allemande de mai 1940, Marguerite Bervoets avait suivi une formation de romaniste auprès de Gustave Charlier à l’Université libre de Bruxelles qui lui avait procuré un diplôme universitaire, mais surtout lui avait permis de cultiver son goût et sa curiosité pour l’écriture. Délaissant sa thèse de doctorat et son activité littéraire, elle s’engage dans la Résistance dès 1941.

Membre de la Légion belge, elle fait paraître le clandestin La Délivrance, tout en devenant un agent de liaison. Surprise au moment où elle tentait de prendre des photographies du champ d’aviation de Chièvres, Marguerite Bervoets est arrêtée, jugée et condamnée à mort. Transférée en Allemagne, elle est décapitée à Brunswick, à la prison de Wolfenbüttel le 7 août 1944.
 

Inauguration de la plaque commémorative apposée sur sa maison natale. (La Louvière, 17 novembre 1946)

Le jour même où un monument est inauguré dans la cour de l’École moyenne de La Louvière, une autre inauguration a lieu quelques dizaines de mètres plus loin, la pose officielle d’une plaque sur la façade de la maison natale de Marguerite Bervoets, juste à côté de l’hôtel-restaurant Mille Colonnes exploité par son père. En raison de la ressemblance entre la plaque apposée sur la maison familiale et celles figurant sur le monument de l’École moyenne, on peut être tenté d’attribuer à Hector Brognon (1888-1977) la réalisation de la plaque commémorative évoquée ici.

Professeur à l’École industrielle et commerciale d’Écaussinnes pendant plusieurs années, Brognon a signé de nombreuses réalisations en Hainaut, aussi bien des bustes et des statues, que des monuments aux morts sur les places publiques (comme celui d’Écaussinnes-d’Enghien, sur la Grand-Place) ou dans les cimetières (les « Martyrs de Tamines » en 1926, ou le bas-relief Ernest Martel en 1939). La pierre bleue d’Écaussinnes n’a plus de secret pour celui qui a été surnommé récemment « le Rodin de Bois d’Haine ».

Dans les années 1970, d’importants travaux conduisent à la démolition de l’hôtel et de la maison voisine, dans le haut de la rue Sylvain Guyaux, près de la place Mansart. Dans l’étroite galerie piétonne qui est aménagée, entre la rue Guyaux et la rue Albert Ier, la plaque commémorative a été rétablie. Depuis le début du XXIe siècle, la galerie est cependant fermée et la plaque disparaît de la vue du public, jusqu’à sa restauration et son rétablissement sur la façade du n°32 de la rue Guyaux fin 2014, début 2015.


Lucienne BALASSE-DEGUIDE, dans Biographie nationale, t. 43, col. 82-89
Roger DARQUENNE, Images de Chapelle-lez-Herlaimont, Écomusée régional du Centre, 1994
http://www.lalouviere.be/UploadDirectory/Publication/Documents/PV%20Conseil%2008.03.17.pdf 
http://www.maisondusouvenir.be/marguerite_bervoets.php (s.v. avril 2014)
Émile PEQUET, Marguerite Bervoets, [Mons], Hainaut, Culture et Démocratie, 2014, coll. Les Carnets de la Mémoire.
Guy SYMOENS, Hector Brognon (1888-1977) le Rodin de Bois d'Haine, dans Les Cahiers du Grand Manage, 2009, n°56
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, p. 155
 

rue Sylvain Guyaux 32
7100 La Louvière

carte

Paul Delforge