SPW-Patrimoine-Guy Focant 

Monument Arille CARLIER

Situé sur un square spécialement aménagé dans l’avenue du Centaine, à Dampremy, un monument rend hommage à l’activité wallonne d’Arille Carlier (1887-1963). Avocat, stagiaire chez Jules Destrée, il s’est distingué dans la dialectologie et a été l’un des fers de lance du Mouvement wallon de 1912 à 1962. 

Inscrivant son action dans le sillage de la pensée politique wallonne de Destrée, Carlier est à l’origine de multiples actions et associations wallonnes développées dans le pays de Charleroi et il participe activement, pendant cinquante ans, à la plupart des grandes initiatives wallonnes. 

Favorable à l’autodétermination de la Wallonie, il s’est fait le théoricien du mouvement national et de l’autonomie des États. 
Co-fondateur de la Société historique pour la Défense et l’Illustration de la Wallonie (1938) et de l’Institut Jules Destrée (1961), il avait reçu de Jules Destrée l’autorisation de rééditer la Lettre au roi sur la séparation de la Wallonie et de la Flandre.

Soutenu par la commune de Dampremy et par l’Institut Jules Destrée, le mouvement Wallonie libre ouvre un fonds de souscription en 1968 pour rendre hommage à son activité en faveur de la Wallonie. Le Comité du Monument Arille Carlier qui se met en place (Isabelle Carlier, sa fille, Willy Bal, Maurice Bologne, Jacques Carlier, Jean Coyette, Alphonse Darville, Jacques Hoyaux, Émile Lempereur, l’échevin Maurice Magis et le bourgmestre de Dampremy Willy Seron) s’assure la collaboration amicale du sculpteur Alphonse Darville (1910-1990), qui s’était déjà signalé, notamment, par l’érection de la statue de Jules Destrée au boulevard Audent. 

Natif de Mont-sur-Marchienne, formé à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles, Prix Godecharle 1931 et Premier Grand Prix de Rome 1935, attaché à la promotion de la création artistique en Wallonie, Darville est l’un des fondateurs de l’Académie des Beaux-Arts de Charleroi, qu’il dirige de 1946 à 1972.

Inauguré le 5 octobre 1969, le monument Carlier se présente sous la forme d’une pierre de six tonnes dont la forme évoque un menhir. Il est rehaussé d’un médaillon à l’effigie d’Arille Carlier dû à Alphonse Darville. Il mentionne simplement : « Arille Carlier Militant wallon 1887-1963 ».

Le square a été spécialement aménagé pour offrir un espace de dégagement. C’est là que, chaque année, depuis 1969, à l’occasion des Fêtes de Wallonie, se retrouvent des sympathisants wallons pour un dépôt de fleurs et des discours, généralement à l’initiative de Wallonie libre, de l’Institut Destrée et de l’Association wallonne des anciens Combattants.
 

 

- Paul DELFORGE, Arille Carlier, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2000, t. I, p. 230-232
- Marie-Paule BOUVY, Monument Carlier, Idem, t. II, 2001, p. 1115-1116
- Paul DELFORGE, Essai d’inventaire des lieux de mémoire liés au Mouvement wallon (1940-1997), dans Entre toponymie et utopie. Les lieux de la mémoire wallonne, (actes du colloque), sous la direction de Luc COURTOIS et Jean PIROTTE, Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 1999, p. 285-300

Avenue du Centenaire 
6020 Dampremy (Charleroi)

carte

IPW

Buste Jules DESTREE

Situé sur la Grand-Place de Marcinelle et adossé à un muret derrière l’église romane Saint-Martin, un petit monument à Jules Destrée a été le lieu de commémorations liées au Mouvement wallon, à l’initiative de la commune de Marcinelle, à partir de 1950. Composé d’un élément principal en pierre, le monument comporte une colonne sur laquelle est placé un buste en bronze de Jules Destrée au visage expressif, oeuvre du sculpteur et graveur bruxellois Armand Bonnetain (1883-1973). Un autre exemplaire de ce buste, en pierre, se trouve au palais des Académies à Bruxelles et un troisième, en bronze lui aussi, est installé dans un des halls du palais de Justice de Bruxelles.

Grand-Place de Marcinelle
6001 Charleroi

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Freddy Joris & Frédéric Marchesani, avril 2009

Guy Focant-SPW

Athénée Destenay

Suite à l’installation d’une école moyenne dans les locaux de l’école industrielle, sise jusque-là rue des Croisiers, décision est prise de construire un nouveau bâtiment pour abriter l’institution, sur les plans des architectes Louis Boonen et Joseph Lousberg. Facilement accessible depuis la construction d’une passerelle en 1878, le boulevard Saucy s’impose au choix du collège communal. 

Située sur l’ancien bief de Saucy comblé en 1872, l’école industrielle s’installe donc dans un nouveau quartier sortant de terre à la fin du xixe siècle. L’édifice est terminé en 1881 et inauguré en 1883. Bâtiment imposant de style néoclassique, l’école industrielle présente une riche façade : frise de feuillage en pierre, fronton à colonnes et linteaux de fenêtres en alternance de pierres. Un oeil-de-boeuf, dans lequel l’architecte pensait installer une horloge, anime également cette façade. Le fronton comporte une haute statue en pierre, Le Métallurgiste, réalisée sur concours par le statuaire Guillaume Beaujean. Cette oeuvre, imposante dans ses dimensions, renforce le caractère néoclassique du monument, déjà étayé par le jeu des colonnades. 

Le bâtiment a été surélevé au milieu des années 1950, sur ses deux ailes, par un troisième étage en briques rouges. Dans la cour trône un bronze représentant Zénobe Gramme, ancien élève de l’école (lorsqu’elle était rue des Croisiers), réalisé par le sculpteur liégeois Joseph Sauvage. Un intéressant monument aux morts des deux guerres mondiales se trouve au premier étage depuis 1946. Depuis 1962, le bâtiment abrite les locaux d’une école secondaire, l’athénée communal Maurice Destenay (aussi appelé athénée Saucy).

 

1912 : le septième Congrès wallon

Organisé par la Ligue wallonne de Liège, le Congrès wallon se déroule pour la première fois dans les locaux de l’école industrielle, le 7 juillet 1912, six ans après le dernier Congrès et sous la présidence de Julien Delaite. De nombreux sujets sont à l’ordre du jour : flamandisation de l’Université de Gand, défense de la langue et de la littérature wallonnes, mise en valeur de l’histoire wallonne. Au cours des débats, le projet de Delaite en faveur d’une séparation administrative fait l’objet d’un débat vif et d’un vote favorable. Pour la première fois depuis 1890, un Congrès wallon opte pour le fédéralisme. C’est en rentrant du Congrès que Jules Destrée conçoit sa « Lettre au Roi » sur la séparation de la Wallonie et de la Flandre.

 

1913 : le huitième Congrès wallon

À nouveau organisé par la Ligue wallonne de Liège, le Congrès du 6 juillet 1913 présidé par Delaite est essentiellement culturel: mise en valeur de l’histoire wallonne, littérature et philologie wallonnes en sont les thèmes principaux. Le Congrès est également l’occasion de s’insurger contre la récente loi sur l’emploi du flamand à l’armée. Ce congrès, qui aura bien moins de répercussions que le précédent, clôture une série de Congrès organisés à Liège. Un dernier Congrès wallon sera organisé à Verviers peu avant l’invasion.

Boulevard Saucy 16
4000 Liège

carte

Freddy Joris & Frédéric Marchesani, avril 2009

Dès la fin du XIXe siècle, des militants s’organisent pour défendre les intérêts de la Wallonie. Révélant la réalité wallonne, ils contribuent à créer les symboles identitaires adoptés par tous les Wallons, comme le drapeau, l’hymne ou la fête de la Wallonie. Cette leçon fait le point sur les origines et l’évolution du Mouvement wallon, dont l’action fédéraliste a eu une influence déterminante sur l’organisation actuelle de l’Etat.

Lettre au roi sur la séparation de la Wallonie et de la Flandre

Texte fondateur de la conscience wallonne, la Lettre au Roi sur la séparation de la Wallonie et de la Flandre, publiée en 1912, demeure largement méconnue malgré son large retentissement. Plus d'un siècle plus tard, (re)découvrez le contenu et le contexte (dans la Leçon La lettre au roi de Jules Destrée) d’un document d’époque auquel il est toujours abondamment fait référence aujourd’hui.

Texte fondateur de la conscience wallonne, la Lettre au Roi sur la séparation de la Wallonie et de la Flandre, publiée en 1912, demeure largement méconnue malgré son large retentissement. Plus d'un siècle plus tard, (re)découvrez le contenu et le contexte historique d’un document d’époque auquel il est toujours abondamment fait référence aujourd’hui.

En 1912, Jules Destrée écrit sa célèbre Lettre au Roi sur la séparation de la Wallonie et de la Flandre. Ce texte fondateur de la conscience wallonne, auquel il est toujours fait référence, n'est souvent que partiellement connu. Au travers de séquences vidéo didactiques, redécouvrez l’ampleur, les subtilités et l’impact de ce document, ainsi que les clefs pour l’interpréter.

 

 

 

 

 

Téléchargez ou consultez en ligne le texte intégral de Jules Destrée (boutons en bas de la page)

 

Un peu de critique historique

Quatre capsules vous proposent quelques éléments utiles pour appréhender la Lettre au Roi dans son contexte de 1912

De la lecture d'un texte centenaire
Du patriotisme belge de Destrée
 De l'emploi du mot "métis"
 De la signification du mot "race"

Paul Delforge & Marie Dewez, 2014

Couverture de la Lettre au Roi, de Jules Destrée © Province de Liège – Musée de la Vie wallonne - FHMW

Répartition régionale et politique des députés (1912)

Majoritaire depuis 1884, le Parti catholique est fortement influencé par ses représentants à l’écoute des revendications flamandes. Dès lors, la mino¬risation politique de la Wallonie devient de plus en plus évidente et se manifeste paradoxalement davantage depuis que le système élec¬toral a été modifié. En effet, la revendication du suffrage universel, défen¬due par les socialistes et les libéraux progressistes, et qui s’est concrétisée en partie par l’introduction en 1892 du suffrage universel tempéré par le vote plural, a eu comme conséquence d’augmenter le poids catholique au Parle-ment. Or, comme la Fédération des Cercles catholiques compte ses électeurs surtout au nord du pays, les revendications flamandes trouvent de plus en plus d’échos au Parlement.
Les difficultés internes que connaît le Parti catholique en 1911 font naître de grands espoirs de changements dans les rangs de ses adversaires. Aux élections du 2 juin 1912, sous un régime de suffrage universel plural à la proportionnelle, et où le nombre de sièges de députés a augmenté par rapport à 1910, passant de 166 à 186, le succès catholique et flamand constitue une surprise. Au niveau national, la Fédération des Cercles catholiques progresse de 86 à 101 sièges (dont 28 en Wallonie) ; les libéraux maintiennent le statu quo (45, dont 17 en Wallonie) ; les socialistes passent de 34 à 39 (dont 27 en Wallonie) et le parti de l’abbé alostois Adolphe Daens  compte un élu. Après une campagne électorale très tendue, parfois violente, la défaite des libéraux et des socialistes est d’autant plus cuisante qu’ils ont largement pratiqué la formule des listes de cartel et qu’ils disposent d’une large majorité en Wallonie (44 sièges sur 72).

Références
Moyne


Institut Destrée (Paul Delforge et Marie Dewez) - Segefa (Pierre Christopanos, Gilles Condé et Martin Gilson)

Destree Jules

Commandeur (Historique)

MARCINELLE 21.08.1863 – BRUXELLES 02.01.1936

Né dans un milieu bourgeois, Jules Destrée s’investit dès ses études en droit dans ses deux grandes passions : l’art et la politique. C’est ainsi que, parallèlement à ses contributions dans des revues artistiques, il revendique, dès 1882, avec des étudiants de tendance libérale progressiste, le suffrage universel. Avocat à Charleroi durant les émeutes ouvrières de 1886, il défend régulièrement les grévistes traduits devant la justice. Cet épisode le rapproche des milieux ouvriers, première étape de son adhésion au Parti ouvrier belge, dont il sera l’un des vingt-huit premiers députés élus à la Chambre, en 1894.

Dès le début du Mouvement wallon, à la fin du XIXe siècle, il affirme le principe d’égalité entre Flamands et Wallons. Il vote, à ce titre, avec le gouvernement catholique, la loi de 1898 instaurant l’équivalence juridique des textes  néerlandais et français. Dans les années qui suivent, il développe le thème de la dualité entre Flamands et Wallons. Il estime ainsi que leurs qualités respectives sont diminuées à force d’être confondues dans l’amalgame belge officiel. Transposant cette réflexion dans le domaine de l’art, il organise, en 1911, à Charleroi, une exposition consacrée à l’Art wallon, mettant à l’honneur la contribution de la Wallonie à la culture française.

Il participe ensuite au Congrès wallon de Liège de 1912, qui étudie la question de la séparation administrative. Le 15 août 1912, il publie sa célèbre Lettre au Roi sur la séparation administrative de la Flandre et de la Wallonie. Dans ce texte fondateur, il met l’accent sur la méconnaissance de l’identité et des aspirations wallonnes et prône le fédéralisme. Cet acte au grand retentissement donne une assise importante au Mouvement wallon auquel l’avocat de Marcinelle contribuera de manière intensive jusqu’à sa mort. Toujours en 1912, il est l’initiateur de l’Assemblée wallonne, premier parlement informel de Wallonie dont la première réunion inaugurale a lieu le 20 octobre, à Charleroi.

Pendant la première guerre mondiale, Jules Destrée est investi d’importantes missions internationales, notamment celle d’aller à Rome pour rallier, avec succès, l’Italie à la Triple entente. Il se rend également en mission spéciale en Russie en octobre 1917. Après le conflit, il devient Ministre des Sciences et des Arts entre 1919 et 1921, poste où il déploie une activité intense. Il contribue ainsi à reconstruire un enseignement primaire de qualité, notamment en instaurant l’obligation scolaire et en imposant de nombreuses réformes toujours d’actualité. Dans le domaine des Arts, il fonde l’Académie de Langue et de Littérature françaises qu’il ouvre aux femmes et à des membres étrangers, figurant ainsi parmi les pionniers de la francophonie et de l’égalité des sexes.

Redevenu parlementaire, il continue à s’impliquer dans le Mouvement wallon face à une Assemblée wallonne attiédie. Pragmatique et homme d’action, il signe en 1929, avec Kamiel Huysmans, le Compromis des Belges, prônant un fédéralisme modéré. A la fin de sa vie, en parallèle à ses activités wallonnes et artistiques, il s’élèvera contre les fascismes.

Figure emblématique du Mouvement wallon, tribun hors pair ayant contribué à l’éveil de la conscience wallonne, Jules Destrée demeure une référence incontournable.

Il fut fait Commandeur de Mérite wallon à titre posthume en 2012, année du centenaire de sa célèbre Lettre.

Orientation bibliographique :

Philippe DESTTATE, DESTREE Jules, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, notice 1924.
Georges-Henri DUMONT, DESTREE Jules, dans Nouvelle Biographie nationale, t. 5, Bruxelles, Académie royale, 1999, pp. 117-123.

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