Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Plaque Paul COLLET

Alors qu’il est encore étudiant à l’Université catholique de Louvain, dans les années 1907-1911, Paul Collet est particulièrement attentif à la défense du patrimoine ; en dehors de ses convictions religieuses et de ses études de Droit, Nivelles est au cœur de ses préoccupations, en particulier la préservation de son bâti (restauration de façades, maintien de maisons anciennes, etc.) et la valorisation du parler local et du folklore (initiateur d’un musée du folklore). 

Créateur de revues artistiques avant la Grande Guerre, attiré par la dimension régionale wallonne apportée par Jules Destrée à l’heure des Amis de l’Art wallon et de l’Assemblée wallonne, celui qui fut un membre actif de la Fédération wallonne des Étudiants de l’Université catholique de Louvain reste davantage ancré dans son « Roman pays de Brabant », dont il est un défenseur acharné et apprécié. Membre de la Commission des Monuments et des Sites, il fait de la restauration de la collégiale un engagement permanent. Son talent de dessinateur offre à sa ville natale des témoignages irremplaçables de certains de ses quartiers.


Parmi les hommages qui lui sont rendus à diverses reprises, deux s’inscrivent durablement dans l’espace public de Wallonie. En septembre 1969, Paul Collet figure en effet parmi les Nivellois marquants honorés dans la pelouse d’honneur du parc de la Dodaine et une plaque commémorative est officiellement inaugurée au 51 de la rue de Bruxelles. Elle est encastrée dans la façade de la maison où Paul Collet passa l’essentiel de son existence. A côté du blason de la ville de Nivelles, on peut y lire :


ICI VECUT
PAUL COLLET
AVOCAT. HOMME DE LETTRES.
ILLUSTRATEUR DE TALENT.
DECEDE DANS CETTE MAISON
LE 22-7-1952


Docteur en Droit de l’Université catholique de Louvain, avocat avoué à Nivelles, Paul Collet (1889-1952) a consacré ses plus belles heures à sa ville natale qu’il illustre tant par ses talents littéraires qu’artistiques (croquis, illustrations à l’encre de chine, eaux fortes, aquarelles, pastels, lithographies, clichés photographiques). « Imagier du Roman Pays », comme le surnommaient ses amis, dont Georges Willame, Paul Collet est le fondateur et principal rédacteur de revues nivelloises avant la Grande Guerre, et un actif collaborateur de diverses revues wallonnes dont La Terre wallonne d’Élie Baussart, par la suite.

En 1917 et 1918, il s’occupe activement de l’accueil des réfugiés français du Nord et du Pas de Calais. Il s’agit là de l’une de ses nombreuses manifestations de sa francophilie ; en contact avec plusieurs cercles culturels français, il a été un ardent propagandiste de la culture française, récompensé de la Légion d’honneur en 1939 (chevalier). Professeur d’histoire de l’art en amateur éclairé, mais surtout avocat, juge suppléant en première instance et bâtonnier, Paul Collet est encore le délégué de Nivelles à l’Assemblée wallonne (1921-1940) et membre de son Bureau permanent. Régionaliste unioniste, il est le pionnier des fêtes de Wallonie à Nivelles ; en 1928, il crée en effet le Comité de Wallonie qui institue la Fête de la Wallonie à Nivelles. Séduit par le discours de Degrelle, ce catholique accepte d’être candidat rexiste dans l’arrondissement de Nivelles en 1936. Élu député, il représente le Roman pays de Brabant à la Chambre jusqu’en 1939. En désaccord avec le chef de Rex, il quitte alors ce parti. Après un court exil en France durant les premières semaines de la Seconde Guerre mondiale, il passe la guerre à Nivelles où il vit dans la clandestinité. À la Libération, il est à nouveau désigné par ses pairs comme bâtonnier de l’Ordre (1948).


Le dimanche 21 septembre 1969, un hommage officiel appuyé est rendu à Paul Collet, tant au Nivellois qu’au Wallon. La veille, Nivelles avait inauguré la Bibliothèque nationale de Wallonie. À l’hôtel de ville de Nivelles, une foule nombreuse assiste à une séance académique qui associe dans un même hommage Paul Collet et la Fête de la Wallonie qu’il avait créée dans sa cité dès les années 1920. Sans conteste, l’hommage de Nivelles à Paul Collet doit beaucoup à Émile Delvaille, ancien résistant, président de la section de Nivelles de Wallonie libre et conseiller communal, qui a su convaincre les échevins Vander Heggen et Hemberg. Après la séance académique matinale, la plaque figurant sur la maison Collet est inaugurée par le vice-président de Wallonie libre-Nivelles, Paul Bila. Dans l’après-midi, un mémorial Paul Collet est aussi officiellement inauguré dans le parc de la Dodaine. Au-delà de la personnalité de Paul Collet, la manifestation organisée en 1969 vise à affirmer l’appartenance à la Wallonie de l’arrondissement de Nivelles, en d’autres termes le Roman pays de Brabant, au moment où les parlementaires débattent d’une réforme de l’État et de la révision de la Constitution.
 

Sources


Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Archives Paul Collet, 14-22, Chemise Commémoration 1969, notamment article du Peuple, 24 septembre 1969
Paul DELFORGE, Essai d’inventaire des lieux de mémoire liés au Mouvement wallon (1940-1997), dans Entre toponymie et utopie. Les lieux de la mémoire wallonne, (actes du colloque), sous la direction de Luc COURTOIS et Jean PIROTTE, Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 1999, p. 285-300
Paul DELFORGE, Paul Collet, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2000, t. I, p. 293-294
Georges LECOCQ, Pierre HUART, Dis, dessine-moi un monument… Nivelles. Petite histoire d’une entité au passé bien présent, Nivelles, Rif tout dju, mars 1995, p. 10

 

Plaque commémorative en hommage à Paul Collet

 

51 rue de Bruxelles

1400 Nivelles

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Ensemble monumental Roger de la Pasture

Ensemble monumental à la mémoire de Roger de le Pasture, réalisé par Marcel Wolfers, 20 septembre 1936.

Longtemps considéré comme un peintre flamand, sous le nom de Rogier Van der Weyden, Roger de le Pasture commence à être mieux connu depuis la moitié du XIXe siècle, moment où deux Tournaisiens – Charles-Barthélemy Dumortier et Alexandre Pinchart – établissent que son  lieu de naissance est à Tournai, sous le nom de Roger de le Pasture. Au début du XXe siècle, cependant, ce lieu d’origine n’en fait pas un artiste de Wallonie, ses œuvres continuant d’être présentées comme appartenant à l’école flamande (dans le sens ancien de cet adjectif), mais aussi comme réalisées par un artiste flamand (dans le sens politique acquis par l’adjectif à la fin du XIXe siècle). C’est en s’interrogeant sur l’existence d’un art wallon, exercice pratique tenté en 1911 dans le cadre de l’Exposition internationale de Charleroi, que Jules Destrée va accorder une place toute particulière à Roger de le Pasture.

Ensemble monumental Roger de le Pasture (Tournai)

Étudiant l’œuvre de l’artiste tournaisien du XVe siècle sous toutes ses coutures, l’esthète Jules Destrée y voit un peintre essentiellement wallon, figure de proue d’une « école » dont la création en 1912 et l’activité de la société des « Amis de l’Art wallon » doivent encore démontrer l’existence. Cité dans la Lettre au roi sur la séparation de la Wallonie et de la Flandre (août 1912), Roger de le Pasture se devait d’être honoré dans sa ville natale, et la Cité des Cinq Clochers comme partie prenante de la Wallonie. Avant la Grande Guerre, la revue Wallonia et les Amis de l’Art wallon s’y emploieront en collaboration avec les autorités locales et quelques érudits. Dans l’Entre-deux-Guerres, une initiative plus spectaculaire est prise à l’initiative de Jules Destrée et un imposant monument est inauguré au pied de la cathédrale, sur la place Vieux Marché aux Poteries.

À l’entame des années 1930, Jules Destrée publie une forte synthèse sur Roger de le Pasture – van der Weyden et, dans la perspective de l’Exposition internationale de Bruxelles en 1935, le projet d’ériger un monument est confié à Marcel Wolfers (1886-1976). Son œuvre sera placée devant le Palais de l’Art Ancien lors de l’Exposition de 1935, puis offerte à la ville de Bruxelles ; cachée pendant la Seconde Guerre mondiale, elle restera dans les collections de l’hôtel de ville de Laeken. Parallèlement, Jules Destrée suggère qu’une « réplique » trouve place à Tournai. Dès 1934, il prend contact avec le bourgmestre Henri Carton et, très vite, pour acquérir l’œuvre s’associent « les Amis du Hainaut », la Société de l’Art wallon, la société historique de Tournai, le ministère de l’Instruction publique et les autorités tournaisiennes. Par rapport à l’œuvre présentée à Bruxelles, seule la couleur des émaux diffère sur la statue « tournaisienne » qui est inaugurée le 20 septembre 1936, dans le cadre des Fêtes de Wallonie. La presse locale affirme que les couleurs correspondent à celles du tableau de Pasture.

L’œuvre installée à Tournai en 1936 sera fortement détériorée par les bombardements allemands que subit la cité en mai 1940 ; la polychromie de Wolferts disparaît. Une rénovation récente s’est inspirée des couleurs du tableau peint par de le Pasture en 1435. Pour retrouver les couleurs choisies par Wolfers pour l’expo de 1935, il faut se référer à l’œuvre restaurée en 2012 qui se trouve à la maison communale de Laeken.

Le célèbre orfèvre bruxellois Marcel Wolfers transpose dans un ensemble en bronze émaillé le tableau de Roger de le Pasture présentant Saint Luc en train de peindre le portrait de la Vierge à l’Enfant. L’œuvre est spectaculaire et singulière. Sur un large socle en pierre bleue, quatre volumes rectangulaires se succèdent formant une sorte de long escalier. Sur la marche la plus basse, à gauche, Luc agenouillé est en train de représenter la Vierge allaitant Jésus, assise sur le cube le plus haut. La polychromie étonne, surtout sous les rayons du soleil. Au centre du socle en pierre bleue, a été gravée l’inscription :


ROGER DE LE PASTURE
DIT VAN DER WEYDEN
NE A TOURNAI EN 1399
MORT A BRUXELLES EN 1464


Marcel Wolfers est le fils de Philippe (1858-1929) et le petit-fils de Louis (1820-1892) Wolfers, maîtres-orfèvres établis à Bruxelles depuis la fin du XIXe siècle ; ils y possèdent et gèrent les ateliers « Wolfers frères » qui emploient une centaine de personnes et qui vont se spécialiser aussi dans la joaillerie et les arts décoratifs au début du XXe siècle en s’inscrivant résolument dans le courant de l’Art nouveau. Marcel Wolfers poursuit la tradition familiale en matière d’orfèvrerie et de sculpture, dans l’ombre de l’exceptionnel talent paternel, tout en innovant et en devenant l’un des meilleurs laqueurs du monde. Sans possibilité de vérifier l’information, on affirme qu’il avait retrouvé le secret des laques bleues perdu depuis les Ming.

Sculptant aussi bien la pierre que le bois, Marcel Wolfers a réalisé notamment le Chemin de croix de l’église de Marcinelle, ainsi que les monuments commémoratifs de la guerre à Louvain, Jodoigne et Woluwe-Saint-Pierre, sans oublier l’impressionnante statue du Cheval dit Wolfers, à La Hulpe. En orfèvrerie, le milieu de table Ondine, acquis en 2003 par la Fondation roi Baudouin, est une pièce exceptionnelle réalisée pour impressionner les visiteurs étrangers lors de l’Expo de 1958.

Sources

Marnix BEYEN, Jules Destrée, Roger de le Pasture et « les Maîtres de Flémalle ». Une histoire de science, de beauté et de revendications nationales, dans Philippe DESTATTE, Catherine LANNEAU et Fabrice MEURANT-PAILHE (dir.), Jules Destrée. La Lettre au roi, et au-delà. 1912-2012, Liège-Namur, Musée de la Vie wallonne-Institut Destrée, 2013, p. 202-217
Wallonia, 1913, p. 543-550
Jacky LEGGE, Mémoire en images : Tournai, t. II : Monuments et statues, Gloucestershire, 2005, p. 52-53, 97-98
Marcel Wolfers. Sculpteur-Laquer, Bruxelles, 1970
Marcel Wolfers. Ondine, pour l’Expo 58, Bruxelles, Fondation roi Baudouin, 2006
Anne-Marie WIRTZ-CORDIER, Nouvelle Biographie nationale, t. III, p. 304-312
Suzette HENRION-GIELE et Janine SCHOTSMANS-WOLFERS, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 616-618
La dynastie des Wolfers, maîtres de l’argent, exposition présentée au Design Museum de Gand, janvier-avril 2007
Françoise URBAN, Marianne DECROLY, Redécouverte d’un bronze laqué monumental de Marcel Wolfers, dans Association professionnelle de conservateurs-restaurateurs d’œuvres d’art, asbl, Bulletin, 2013, 4e trimestre, p. 21-28

Place Vieux Marché aux Poteries
7500 Tournai

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Paul Delforge

Guy Focant

Hôtel de Grady

Construit en brique et calcaire, l’hôtel de Grady, également appelé de Sklins ou de Spirlet, est un des nombreux hôtels de maître de la rue Hors-Château. Commandité par Nicolas de Spirlet, il est composé de neuf baies rythmant les deux niveaux qui posent sur un haut soubassement en pierre. Les trois travées centrales sont couronnées d’un fronton triangulaire qui présente une allégorie des fonctions de conseiller. Un porche cintré s’ouvre vers la cour intérieure bordée de bâtiments. La façade porte le millésime de 1765. L’hôtel de Grady illustre la richesse du statut social de cette artère liégeoise au XVIIIe siècle. La beauté de ses décors intérieurs, notamment des peintures de Henri Deprez, stucs, boiseries et cheminées, traduit le raffinement de l’art de vivre à l’époque. Actuellement, l’hôtel de Grady abrite une partie de l’École d’hôtellerie de Liège.

 

1935 : la Maison wallonne de Liège

Fondée en 1930, la Maison wallonne de Liège s’inscrit dans un mouvement né après la Première Guerre mondiale. La première association du genre avait été créée à Bruxelles en 1921, et de grandes villes wallonnes avaient suivi. Les diverses associations wallonnes pouvaient se retrouver dans ces maisons, mettre en commun leurs initiatives et développer ensemble leurs activités. Prenant la forme d’une coopérative, la Maison wallonne de Liège naît donc au moment de l’exposition internationale de 1930, organisée à Liège à l’occasion du centenaire de l’indépendance. Installée en premier lieu sur le boulevard de la Sauvenière, la Maison wallonne déménage en 1935, en Hors-Château, dans l’hôtel de Grady. Une association des Amis de la Maison wallonne prendra alors la suite de la coopérative. Composée de responsables issus des milieux culturels wallons, elle est ouverte à tous. Pourtant, en raison de tensions avec le Front démocratique wallon, elle sera contrainte de fermer peu avant la guerre : les Amis restent ensuite actifs, mais la Maison wallonne n’existe plus. Il faudra attendre le 13 avril 1957 pour que soit inaugurée une Nouvelle Maison wallonne, au boulevard de la Sauvenière, qui restera ouverte jusqu’en 1998.


 

 

1938 : l’assemblée de la Société historique pour la défense et l’illustration de la Wallonie 

Réunis le samedi 11 juin 1938 autour du président de la Concentration wallonne, l’abbé Jules Mahieu, sept militants wallons décident de créer une société savante, la Société historique pour la défense et l’illustration de la Wallonie. Les premiers travaux de la société sont prolifiques : cinq assemblées sont organisées en deux ans, dont la première à l’hôtel Cosmopolite de Namur. La seconde se tient à Liège, dans les locaux de la Maison wallonne, le 29 octobre 1938, toujours sous la présidence de Jules Mahieu. On y signe l’acte constitutif de l’association. Trois personnalités d’envergure se trouveront à la tête de celle-ci : Jules Mahieu (président), Maurice Bologne (secrétaire) et Robert Grafé (administrateur). La société présente son programme et son but principal : par des communications et des publications, faire connaître l’histoire de la Wallonie au peuple wallon. En 1960, la Société deviendra l’Institut Jules Destrée, toujours en activité actuellement.

Rue Hors-Château 5
4000 Liège

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Freddy Joris & Frédéric Marchesani, avril 2009

IPW

Buste Jules DESTREE

Situé sur la Grand-Place de Marcinelle et adossé à un muret derrière l’église romane Saint-Martin, un petit monument à Jules Destrée a été le lieu de commémorations liées au Mouvement wallon, à l’initiative de la commune de Marcinelle, à partir de 1950. Composé d’un élément principal en pierre, le monument comporte une colonne sur laquelle est placé un buste en bronze de Jules Destrée au visage expressif, oeuvre du sculpteur et graveur bruxellois Armand Bonnetain (1883-1973). Un autre exemplaire de ce buste, en pierre, se trouve au palais des Académies à Bruxelles et un troisième, en bronze lui aussi, est installé dans un des halls du palais de Justice de Bruxelles.

Grand-Place de Marcinelle
6001 Charleroi

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Freddy Joris & Frédéric Marchesani, avril 2009

Guy Focant-SPW

Athénée Destenay

Suite à l’installation d’une école moyenne dans les locaux de l’école industrielle, sise jusque-là rue des Croisiers, décision est prise de construire un nouveau bâtiment pour abriter l’institution, sur les plans des architectes Louis Boonen et Joseph Lousberg. Facilement accessible depuis la construction d’une passerelle en 1878, le boulevard Saucy s’impose au choix du collège communal. 

Située sur l’ancien bief de Saucy comblé en 1872, l’école industrielle s’installe donc dans un nouveau quartier sortant de terre à la fin du xixe siècle. L’édifice est terminé en 1881 et inauguré en 1883. Bâtiment imposant de style néoclassique, l’école industrielle présente une riche façade : frise de feuillage en pierre, fronton à colonnes et linteaux de fenêtres en alternance de pierres. Un oeil-de-boeuf, dans lequel l’architecte pensait installer une horloge, anime également cette façade. Le fronton comporte une haute statue en pierre, Le Métallurgiste, réalisée sur concours par le statuaire Guillaume Beaujean. Cette oeuvre, imposante dans ses dimensions, renforce le caractère néoclassique du monument, déjà étayé par le jeu des colonnades. 

Le bâtiment a été surélevé au milieu des années 1950, sur ses deux ailes, par un troisième étage en briques rouges. Dans la cour trône un bronze représentant Zénobe Gramme, ancien élève de l’école (lorsqu’elle était rue des Croisiers), réalisé par le sculpteur liégeois Joseph Sauvage. Un intéressant monument aux morts des deux guerres mondiales se trouve au premier étage depuis 1946. Depuis 1962, le bâtiment abrite les locaux d’une école secondaire, l’athénée communal Maurice Destenay (aussi appelé athénée Saucy).

 

1912 : le septième Congrès wallon

Organisé par la Ligue wallonne de Liège, le Congrès wallon se déroule pour la première fois dans les locaux de l’école industrielle, le 7 juillet 1912, six ans après le dernier Congrès et sous la présidence de Julien Delaite. De nombreux sujets sont à l’ordre du jour : flamandisation de l’Université de Gand, défense de la langue et de la littérature wallonnes, mise en valeur de l’histoire wallonne. Au cours des débats, le projet de Delaite en faveur d’une séparation administrative fait l’objet d’un débat vif et d’un vote favorable. Pour la première fois depuis 1890, un Congrès wallon opte pour le fédéralisme. C’est en rentrant du Congrès que Jules Destrée conçoit sa « Lettre au Roi » sur la séparation de la Wallonie et de la Flandre.

 

1913 : le huitième Congrès wallon

À nouveau organisé par la Ligue wallonne de Liège, le Congrès du 6 juillet 1913 présidé par Delaite est essentiellement culturel: mise en valeur de l’histoire wallonne, littérature et philologie wallonnes en sont les thèmes principaux. Le Congrès est également l’occasion de s’insurger contre la récente loi sur l’emploi du flamand à l’armée. Ce congrès, qui aura bien moins de répercussions que le précédent, clôture une série de Congrès organisés à Liège. Un dernier Congrès wallon sera organisé à Verviers peu avant l’invasion.

Boulevard Saucy 16
4000 Liège

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Freddy Joris & Frédéric Marchesani, avril 2009

IPW

Tombe commune Jules DESTRÉE et Paul PASTUR

Image étonnante, à l’entrée du cimetière de Marcinelle195, que celle de la sépulture commune de Jules Destrée et de son ami et collègue Paul Pastur (1866-1938), autre figure du Mouvement wallon, mais surtout fondateur de l’Université du Travail de Charleroi. Entre deux médaillons présentant les profils des deux illustres occupants du caveau, la phrase « Les familles Pastur et Destrée, unies dans la vie, réunies dans la mort » fut ajoutée à la mort de Pastur, survenue deux ans après celle de Jules Destrée, lorsque son urne funéraire fut placée à côté de celle de son ami d’enfance dans le caveau familial.

La tombe est la première de l’Allée 1, à gauche en entrant.

Cimetière de Marcinelle 
Rue du Repos 12
6001 Charleroi

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Freddy Joris & Frédéric Marchesani, avril 2009

IPW

Statue Jules DESTRÉE

Cette statue monumentale en bronze due au sculpteur Alphonse Darville (1910-1990, originaire de Mont-sur-Marchienne et directeur de l’Académie des Beaux-Arts de Charleroi qu’il fonda en 1946) représente Jules Destrée sous les traits de l’homme de dialogue, simple et en mouvement, une main tendue vers le haut. 

Elle fut commandée par la ville de Charleroi, mais l’initiative avait été lancée par le député permanent René Thône en 1956, puis relayée par les autorités communales. 

Inaugurée le 23 juin 1957 en présence du roi Baudouin, elle deviendra un lieu de rassemblement du Mouvement wallon dès 1959 suite à la décision du Directoire de Wallonie libre d’y organiser un rendez-vous annuel le premier dimanche de septembre.

Boulevard Audent
6000 Charleroi

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Freddy Joris & Frédéric Marchesani, avril 2009

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Plaque Franz DEWANDELAER

Plaque commémorative en hommage à Franz Dewandelaer, réalisée à l’initiative de la section de Nivelles de Wallonie libre, 15 septembre 1968.

Les admirateurs du poète Franz Dewandelaer (1909-1952) affirment que « son œuvre est une des plus fortes et des plus pathétiques de la poésie wallonne ». Nivelles, sa ville natale, est le thème central de nombreux écrits où il utilise souvent des images fortes, parfois violentes. Ayant exercé divers métiers avant de se fixer comme employé à l’administration communale de Nivelles (1934), il s’est lancé très tôt dans l’écriture poétique, en langue française comme en langue wallonne, avant de se lancer dans la composition de pièces de théâtre, au contenu engagé dans le combat politique, dans l’écriture de sketches radiophoniques, de contes, voire de chroniques pour des journaux et revues. 

Après la Libération, il militera très activement dans le Mouvement wallon : mêlant ses convictions politiques à ses talents littéraires, il propose un hymne wallon en composant deux chœurs parlés, Bloc et Il était une fois, d’après la Lettre au roi de Jules Destrée. Puisant son inspiration dans des sources identiques à celles des surréalistes wallons, Dewandelaer compose la plupart de ses poèmes entre 1930 et 1936, mais beaucoup ne seront publiés que bien plus tard.  Mobilisé en 1939, le soldat est arrêté au soir de la Campagne des Dix-Huit Jours, et emprisonné en Bavière. Rapatrié malade en 1941, il conservera toujours des séquelles de sa captivité. Il mourra en clinique des suites lointaines de sa captivité.

En septembre 1968, dans le cadre des fêtes de Wallonie, les autorités locales de Nivelles rendent un hommage appuyé à Franz Dewandelaer, figure marquante du roman païs de Brabant. Sans conteste, cette initiative doit beaucoup à Émile Delvaille, ancien résistant, président de la section de Nivelles de Wallonie libre et conseiller communal, qui a su convaincre les échevins Vander Heggen et Hemberg. Avant qu’un mémorial soit inauguré dans le parc de la Dodaine, un cortège officiel fait halte devant le n°3 de la rue Paradis pour inaugurer une plaque apposée sur la façade de la maison natale du poète :

ICI VECUT
FRANZ DEWANDELAER
CHANTRE DE SA BELLE VILLE DE
NIVELLES. LE PLUS POETE DE
NOS POETES DIALECTAUX.
1909-1952

Au-delà de la personnalité du poète dialectal, la manifestation organisée en 1968 vise à affirmer l’appartenance du Roman pays de Brabant à la Wallonie et la défense des intérêts wallons au moment où est débattue la question de l’implantation d’une activité de pétrochimie à Feluy. En septembre 1967, le bourgmestre Jules Bary avait conféré un caractère davantage officiel à la Fête de Wallonie organisée à Nivelles depuis les années 1930. La collaboration des autorités locales avec le Comité communal des Fêtes, le Syndicat d’initiative et de tourisme et la Fédération nivelloise de Wallonie libre contribue à l’organisation d’un programme structuré et ambitieux, visant à étoffer la commémoration wallonne. Ainsi en 1968, au-delà des discours officiels, du cortège musical et d’un feu d’artifice, le spectacle offert au public le samedi soir a été préparé par Willy Chaufoureau qui met en scène des poèmes, des chansons et des saynètes tirés des œuvres de Dewandelaer. 

Sources 

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Archives Paul Collet, 14-22, Chemise Commémoration 1969, notamment article du Peuple, 24 septembre 1969
Paul DELFORGE, Essai d’inventaire des lieux de mémoire liés au Mouvement wallon (1940-1997), dans Entre toponymie et utopie. Les lieux de la mémoire wallonne, (actes du colloque), sous la direction de Luc COURTOIS et Jean PIROTTE, Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 1999, p. 285-300
Paul DELFORGE, Franz Dewandelaer, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2000, t. I, p. 498
Georges LECOCQ, Pierre HUART, Dis, dessine-moi un monument… Nivelles. Petite histoire d’une entité au passé bien présent, Nivelles, Rif tout dju, mars 1995, p. 17
La Vie wallonne, 1952, p. 220 ; 1953, p. 118-140
Le Gaulois, n° 245, 30 août 1952, p. 6
Wallonie libre,  septembre 1968, p. 15 ; octobre 1968, p. 10.

 

Plaque Franz Dewandelaer (Nivelles)

Rue Paradis 3
1400 Nivelles

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Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Monument Jules DESTRÉE

Statue dédiée à Jules Destrée, réalisée par Alphonse Darville, 23 juin 1957

Située boulevard Audent, au cœur de Charleroi, une imposante statue rend hommage à Jules Destrée (1869-1936). Avocat, juriste, homme politique socialiste, préoccupé par la question sociale, orateur brillant, militant wallon, esthète, écrivain, critique d’art, Jules Destrée a été élu député le 14 octobre 1894 dans l’arrondissement de Charleroi : il figure ainsi parmi les tout premiers parlementaires du jeune Parti ouvrier belge. Rapidement, il s’impose comme l’un des leaders de ce parti, présent sur le plan national, régional et local. En 1910-1911, il prend une part active au succès de l’Exposition internationale organisée à Charleroi. Durant la Grande Guerre, il représente la Belgique en Italie et en Russie. 

Devenu Ministre des Sciences et des Arts en 1919, et l’un des tout premiers ministres socialistes wallons, il crée notamment l’Académie de Langue et de Littérature française et établit la loi sur les Bibliothèques publiques. En 1922, il devient le délégué de la Belgique à la Commission internationale de Coopération intellectuelle de la SDN, mandat qu’il exerce jusqu’au début des années trente... Son engagement wallon se manifeste à de multiples reprises dont les plus marquantes sont la Lettre au roi sur la séparation de la Wallonie et de la Flandre(août 1912), la création de l’Assemblée wallonne dont il reste le secrétaire général d’octobre 1912 à décembre 1919, et sa contribution au Compromis des Socialistes belges en 1929. Ami des arts et des artistes, responsable de la Société des Amis de l’Art wallon, Jules Destrée a été pris comme modèle par plusieurs peintres, médailleurs ou sculpteurs, d’initiative ou sur commande.

Monument Jules Destrée

La monumentale statue du boulevard Audent est l’œuvre d’Alphonse Darville (1910-1990). Né à Mont-sur-Marchienne en 1910, il étudie à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles, reçoit le Prix Godecharle 1931 et le Premier Grand Prix de Rome 1935. Co-fondateur de L’Art vivant au pays de Charleroi (1933), attaché à la promotion de la création artistique en Wallonie, il participe aux travaux clandestins de la section culturelle du Conseil économique wallon de Charleroi et figure parmi les fondateurs de la section de Charleroi de l’Association pour le Progrès intellectuel et artistique de la Wallonie (1945). Co-fondateur de l’Académie des Beaux-Arts de Charleroi, il la dirige de 1946 à 1972. Réali

sant des œuvres d’inspiration, Darville réalise également des commandes comme sa participation à la décoration du Pont des Arches, à Liège, après la guerre, aux bâtiments du gouvernement provincial à Mons, voire à l’hôtel de ville ou au Palais des Expositions à Charleroi. 

Quand René Thône – député provincial du Hainaut – lance l’idée d’élever un monument en l’honneur de Jules Destrée, relayé par les autorités de la ville de Charleroi, tous se tournent naturellement vers Alphonse Darville pour la réalisation. Sur un socle de pierre bleue où est gravé l’hommage « À Jules Destrée », s’élève une haute statue d’un Destrée debout, la main droite en poche, la main gauche ouverte légèrement en avant, tendue dans un dialogue auquel invitent les traits de son visage. Ce sont toutes les facettes de l’activité de Destrée que les autorités carolorégiennes et hennuyères ont souhaité mettre en évidence. Il s’agit du second monument dédié à Destrée inscrit dans l’espace public wallon, après le buste de Bonnetain installé, en 1936, à Marcinelle.

L’inauguration du boulevard Audent qui s’est déroulée le 23 juin 1957 a été solennelle. Les plus hautes autorités du pays ont fait le déplacement à Charleroi. Les plus hautes autorités du pays ont fait le déplacement à Charleroi. Chacun a pu admirer l’œuvre de Darville, même si plus tard, Jean Place – alias Pierre-Jean Schaeffer – se permettra cette critique : 
« Sauf le respect que j'ai pour Alphonse Darville, c'est un Destrée salonnard, qui pérore... Face au Palais du Peuple, il aurait fallu plutôt un tribun haranguant la foule... ».Lieu de rassemblement pour le Mouvement wallon, et étape indispensable lors des Fêtes de Wallonie, la statue de Jules Destrée fait l’objet d’un réaménagement au cours de l’année 2013 ; la végétation d’où le tribun semblait parfois sortir a été éliminée au profit d’une mise en évidence totale, au centre d’un lieu de grand passage urbain. 

 

Geneviève ROUSSEAUX, Alphonse Darville sculpteur, Charleroi, Institut Jules Destrée, 1982, coll. « Figures de Wallonie »
Alphonse Darville : 60 [soixante] années de sculpture, catalogue d’exposition, 20 novembre 1982 - 16 janvier 1983, Jean-Pol DEMACQ [préface],  Charleroi, Musée des Beaux-Arts, 1982
Alphonse Darville 1977, Charleroi, Impaco, 1977
Philippe DESTATTE, Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2000, t. I, p. 483-490
Paul DELFORGE, Essai d’inventaire des lieux de mémoire liés au Mouvement wallon (1940-1997), dans Entre toponymie et utopie. Les lieux de la mémoire wallonne, (actes du colloque), sous la direction de Luc COURTOIS et Jean PIROTTE, Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 1999, p. 285-300
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 290

Boulevard Audent 
6000 Charleroi

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Paul Delforge

Lettre au roi sur la séparation de la Wallonie et de la Flandre

Texte fondateur de la conscience wallonne, la Lettre au Roi sur la séparation de la Wallonie et de la Flandre, publiée en 1912, demeure largement méconnue malgré son large retentissement. Plus d'un siècle plus tard, (re)découvrez le contenu et le contexte (dans la Leçon La lettre au roi de Jules Destrée) d’un document d’époque auquel il est toujours abondamment fait référence aujourd’hui.