no picture

Régnier III

Politique

dit au Long col

Lieu et date de naissance inconnus, lieu de décès inconnus en Bohême à une date imprécise, 958 ou 973, selon les sources

Propriétaires de biens relativement dispersés, à la tête de plusieurs pagi initialement du côté de la Meuse, les Régnier feront souche en Hainaut, se concentrant dans l’Entre-Sambre-et-Meuse. Profitant de la faiblesse de leur suzerain, ils vont imposer non seulement leur nom, mais surtout leur pouvoir personnel dès le début du Xe siècle, à partir de leur résidence fortifiée établie à Mons.

Fils aîné de Régnier II, Régnier III semble hériter, dès 939, de son oncle, Gislebert, du comté de Luighau, territoire compris entre la Meuse, l’Ourthe et la Gueule, soit sur ce qui deviendra les comtés de Dalhem et Limbourg, ainsi que le marquisat de Franchimont, avant de recevoir de son père (s’il est bien mort en 940) le comté de Hainaut. Ses prédécesseurs avaient fortement contribué à placer la Lotharingie sous la suzeraineté du roi de Germanie et bien qu’il souhaite s’émanciper, Régnier III reconnaît, dans un premier temps, l’autorité de l’empereur Otton Ier. Pourtant, comme son grand-père, Régnier n’hésite pas à prendre les armes et à se soulever, même contre l’empereur. 

En ces temps agités, où l’empereur joue la carte de l’Église impériale et place ses pions dans l’évêché de Liège, Régnier III n’a de cesse d’éliminer ceux qui font – ou qui pourraient faire – de l’ombre à sa puissance entre l’Escaut et la Meuse. Ainsi, quand Rathier, jusque-là moine à l’abbaye de Lobbes, est nommé à la tête du diocèse de Liège, Régnier vient aider l’aristocratie liégeoise et le clergé local, en profite pour détruire le château de Thuin, propriété de l’évêque jugée trop avancée dans « ses » terres sambriennes, et place son neveu sur le siège épiscopal. L’empereur n’est pas la seule cible de Régnier III qui lorgne aussi vers le sud et n’hésite pas à s’en prendre à des vassaux du roi de France ; sur les terres d’entre Ourthe-et-Meuse de son frère Rodolphe, Régnier provoque encore l’empereur, tout en ciblant les riches abbayes du pays mosan et mosellan, celle de Lobbes étant tombée dans son escarcelle grâce à son neveu. S’il convoite leur potentiel économique et se montre lui-même peu scrupuleux, Régnier III se montre particulièrement intraitable à l’égard des moines et des prêtres avec la discipline et le respect des principes religieux ; son règne sera marqué par un soutien inconditionnel à de profondes réformes qui, au final, doivent renforcer son pouvoir.

Le premier, le roi de France réagit contre ce voisin envahissant ; des troupes françaises occupent la place de Mons et s’emparent de la famille de Régnier III. Duc de Lotharingie et frère d’Otton Ier, Bruno parvient, quant à lui, à rétablir l’autorité impériale. En 957, il obtient la reddition, puis l’exil en Bohême de Régnier III ; il intervient ensuite dans la succession de Baldéric (mort en 959), en faisant élire Eracle comme prince-évêque ; il reprend enfin le contrôle de l’espace lotharingien, en divisant le territoire en Basse et en Haute Lotharingie. Dans ses sentences, Bruno condamne aussi à l’exil Rodolphe, frère de Régnier III, et confisque tous les biens et propriétés de cette famille ; les enfants trouvent refuge en France, tandis que leurs pères ne reverront jamais leur terre natale. La rébellion des ambitieux Régnier était définitivement mâtée. Des enfants de Régnier III, Lambert deviendra comte de Louvain et Régnier IV conservera le comté de Hainaut.

 

Sources

Léon VANDERKINDERE, dans Biographie nationale, t. XVIII, col. 875-879
Léon VANDERKINDERE, La formation territoriale des principautés belges au Moyen Âge, Bruxelles (Henri Lamertin), 1902, t. II, p. 159-183
Maurice-A. ARNOULD, Le Hainaut. Évolution historique d’un concept géographique, dans Recueil d’études d’histoire hainuyère offertes à Maurice A. Arnould, édité par Jean-Marie CAUCHIES et par Jean-Marie DUVOSQUEL, Mons, Analectes d’histoire du Hainaut, Hannonia, 1983, t. I, p. 25-50
Mélanie DE CLERFAYT, Le Château des comtes de Hainaut à Mons (du Xe au XXIe siècle), Charleroi, asbl Hainaut culture et démocratie, 2002
Claire BILLEN, Xavier CANONNE, Jean-Marie DUVOSQUEL, Hainaut. 1000 ans pour l’avenir, Anvers, Fonds Mercator, 1998
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Histoire. Économies. Sociétés, t. I, p. 219