Destree Jules
Commandeur (Historique)
MARCINELLE 21.08.1863 – BRUXELLES 02.01.1936
Né dans un milieu bourgeois, Jules Destrée s’investit dès ses études en droit dans ses deux grandes passions : l’art et la politique. C’est ainsi que, parallèlement à ses contributions dans des revues artistiques, il revendique, dès 1882, avec des étudiants de tendance libérale progressiste, le suffrage universel. Avocat à Charleroi durant les émeutes ouvrières de 1886, il défend régulièrement les grévistes traduits devant la justice. Cet épisode le rapproche des milieux ouvriers, première étape de son adhésion au Parti ouvrier belge, dont il sera l’un des vingt-huit premiers députés élus à la Chambre, en 1894.
Dès le début du Mouvement wallon, à la fin du XIXe siècle, il affirme le principe d’égalité entre Flamands et Wallons. Il vote, à ce titre, avec le gouvernement catholique, la loi de 1898 instaurant l’équivalence juridique des textes néerlandais et français. Dans les années qui suivent, il développe le thème de la dualité entre Flamands et Wallons. Il estime ainsi que leurs qualités respectives sont diminuées à force d’être confondues dans l’amalgame belge officiel. Transposant cette réflexion dans le domaine de l’art, il organise, en 1911, à Charleroi, une exposition consacrée à l’Art wallon, mettant à l’honneur la contribution de la Wallonie à la culture française.
Il participe ensuite au Congrès wallon de Liège de 1912, qui étudie la question de la séparation administrative. Le 15 août 1912, il publie sa célèbre Lettre au Roi sur la séparation administrative de la Flandre et de la Wallonie. Dans ce texte fondateur, il met l’accent sur la méconnaissance de l’identité et des aspirations wallonnes et prône le fédéralisme. Cet acte au grand retentissement donne une assise importante au Mouvement wallon auquel l’avocat de Marcinelle contribuera de manière intensive jusqu’à sa mort. Toujours en 1912, il est l’initiateur de l’Assemblée wallonne, premier parlement informel de Wallonie dont la première réunion inaugurale a lieu le 20 octobre, à Charleroi.
Pendant la première guerre mondiale, Jules Destrée est investi d’importantes missions internationales, notamment celle d’aller à Rome pour rallier, avec succès, l’Italie à la Triple entente. Il se rend également en mission spéciale en Russie en octobre 1917. Après le conflit, il devient Ministre des Sciences et des Arts entre 1919 et 1921, poste où il déploie une activité intense. Il contribue ainsi à reconstruire un enseignement primaire de qualité, notamment en instaurant l’obligation scolaire et en imposant de nombreuses réformes toujours d’actualité. Dans le domaine des Arts, il fonde l’Académie de Langue et de Littérature françaises qu’il ouvre aux femmes et à des membres étrangers, figurant ainsi parmi les pionniers de la francophonie et de l’égalité des sexes.
Redevenu parlementaire, il continue à s’impliquer dans le Mouvement wallon face à une Assemblée wallonne attiédie. Pragmatique et homme d’action, il signe en 1929, avec Kamiel Huysmans, le Compromis des Belges, prônant un fédéralisme modéré. A la fin de sa vie, en parallèle à ses activités wallonnes et artistiques, il s’élèvera contre les fascismes.
Figure emblématique du Mouvement wallon, tribun hors pair ayant contribué à l’éveil de la conscience wallonne, Jules Destrée demeure une référence incontournable.
Il fut fait Commandeur de Mérite wallon à titre posthume en 2012, année du centenaire de sa célèbre Lettre.
Orientation bibliographique :
Philippe DESTTATE, DESTREE Jules, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, notice 1924.
Georges-Henri DUMONT, DESTREE Jules, dans Nouvelle Biographie nationale, t. 5, Bruxelles, Académie royale, 1999, pp. 117-123.