KIK-IRPA, Bruxelles

Pierre Ferdinand de BAVIERE

Localité forte d’un passé millénaire, Fosses-la-Ville était une des vingt-trois Bonnes Villes de la principauté de Liège. 

Sa prospérité doit beaucoup à Notger, premier prince-évêque. Toutefois, cette appartenance amena la localité à être prise dans les feux des conflits opposant les princes-évêques aux comtes de Namur et aux ducs de Brabant. 

Dès 974, Fosses entrait dans la stratégie de défense du territoire liégeois. Des murailles sont alors érigées et le prince-zvêque lui-même pourrait avoir été le commanditaire de la seconde église de Fosses. 

De nos jours, les environs de la collégiale Saint-Feuillen conservent les traces de deux princes-évêques. 

Place du chapitre, le presbytère, construction sans doute du XVIIe siècle, conserve une trace des plus intéressantes. Encastrée dans un mur de l’édifice se trouve une pierre commémorative de Ferdinand de Bavière (1612-1650). 

Taillé dans la pierre et d’une largeur de 58 cm, le bloc porte l’inscription suivante, partiellement effacée : « a vita fide conservat omnia ferdinando bavar[IAE ] princ[I] pe… bovrghem[AIT ]res » et le millésime de 1612. Sur la place du marché, centre vital de la ville, se trouve un ancien moulin jadis desservi par un bief. Un cartouche portant le millésime de 1551 et le blason de Georges d’Autriche (1544-1557) a été replacé sur la façade du bâtiment.

Place du Chapitre

5070 Fosses-la-Ville

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Frédéric MARCHESANI, 2013

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Pont Saint-Jean

Trace atypique parmi d’autres, le pont Saint-Jean franchissant la Lesse peu avant la confluence avec la Meuse, témoigne d’une autre facette du passé principautaire. Ce pont en calcaire a été reconstruit successivement en 1533-1534, en 1642 puis en 1719-1720, chaque fois aux frais des États de la principauté de Liège, par l’entrepreneur Jacques Wespin pour la dernière campagne. L’ouvrage presque tricentenaire parvenu jusqu’à nous possède deux arches surbaissées, appareillées, reliées par une pile centrale renforcée de part et d’autre par un bec triangulaire.

Trois entités composent les États de la principauté de Liège, ainsi dénommés depuis le XVe siècle. Ainsi, à la fin du Moyen Âge, une partie de la puissance publique est conjointement exercée par le prince et les États, c’est-à-dire les représentants de trois catégories sociales : les chanoines de la cathédrale Saint-Lambert (État primaire), la noblesse (État noble) et la bourgeoisie urbaine (État tiers). 

Tous trois participent à l’exercice des pouvoirs édictal et judiciaire, consentent l’impôt et exercent un droit de regard sur la politique étrangère de la principauté. Le contrôle et la perception des impôts permettent ainsi aux États de financer leurs nombreuses dépenses parmi lesquelles figurent entre autres l’entretien des forteresses et la construction et la réparation des chaussées et ouvrages d’art.

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Frédéric MARCHESANI, 2013

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Pont Marie-Thérèse

Situé au nord du village, à cheval sur les communes de Paliseul et Libin, un pont franchit la Lesse sur l’ancienne route Bouillon-Liège qui, sous l’Ancien Régime, reliait la principauté de Liège et les Pays-Bas autrichiens. Cette remarquable construction en moellons de schiste classée le 12 mai 1989 comporte quatre arches surbaissées et un parapet coiffé de pierres de taille en demi-lunes. 

Il est élargi de chaque côté afin de permettre de canaliser les animaux avant de franchir la rivière. En amont, trois becs sont situés entre les arches afin d’orienter les eaux vers les quatre ouvertures. L’ouvrage doit son nom, selon la tradition, à l’impératrice Marie-Thérèse qui l’aurait fait construire à la suite d’un accident dont elle fut victime en franchissant la Lesse à cheval. Ce pont a longtemps facilité le passage de la route reliant Paris à Liège.

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Frédéric MARCHESANI, 2013

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Pont Joseph II

La terre d’Emptinne est comprise dans la prévôté de Poilvache et constitue la partie la plus importante du ban de Natoye. Jeté en travers du Bocq, un petit pont a été bâti vers 1722-1724 par le Namurois Nicolas Bolvin aux frais des États du comté de Namur. Construit en moellons de calcaire, il est composé de deux arches en arc surbaissé séparées par une large pile. Il est recouvert de grosses dalles de calcaire. Fortement endommagé, il a été restauré en 1986 et rebaptisé « pont Joseph II » en l’honneur d’un des derniers souverains namurois. Aujourd’hui, une plaque a été apposée sur le parapet du pont et précise toute l’importance de l’édifice sous l’Ancien Régime : « Pont Joseph II. Comte de Namur et empereur ».
    
Ce pont ancien témoigne de l’importance et du rôle des États du comté de Namur. Ils apparaissent pour la première fois en 1421, lors de la vente du comté au duc de Bourgogne Philippe le Bon. On parle alors d’ « assemblée du pays », sorte de conseil du comte de Namur composé de seigneurs laïcs et ecclésiastiques et du maïeur ou des échevins de Namur, la seule ville d’importance du comté. Sa compétence s’étend aux questions politiques, administratives, judiciaires et financières. Comme la plupart des assemblées d’États sous l’Ancien Régime, les États du comté de Namur sont composés de trois membres : l’État du clergé, l’État noble et le Tiers-État. 

Mis à part entre 1429 et 1510, sous la domination bourguignonne, les États se réunissent régulièrement, au moins une fois par an. Leurs attributions se résument en trois titres, lourds d’importance : inaugurer le nouveau comte de Namur lors de sa prise de fonctions, défendre les privilèges et gérer le service de corps et de bien ou le vote de l’aide. À partir de 1465, les États de Namur députent régulièrement des représentants aux États généraux du duché de Bourgogne puis des Pays-Bas espagnols et autrichiens, jusqu’à la fin de l’Ancien Régime. À l’aube de leur disparition en 1791, ils rédigeront une « Constitution du pays et comté de Namur ».

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Frédéric MARCHESANI, 2013

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Perron de Villers-l'Évêque

La seigneurie de Villers-l’Évêque appartenait à la mense épiscopale depuis l’époque ottonienne. Le prince-évêque Hugues de Pierrepont (1200-1229) en acquit l’avouerie. La seigneurie resta propriété du prince jusqu’en 1784, lorsque François-Charles de Velbrück décida de la céder en engagère. Le perron de Villers-l’Évêque porte les armoiries du prince-évêque Charles-Nicolas d’Oultremont (1763-1771). 

Situé sur la place principale du village, le monument date de 1765 et se présente sous la forme d’une colonne frappée des armes du prince-évêque et sommée d’une pomme de pin et d’une croix. Il a remplacé un perron plus ancien, déplacé au fil des ans et institué à nouveau sur ordre de Charles-Nicolas d’Oultremont ; c’est à son pied que se tenaient les plaids généraux.

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Classé comme monument le 15 octobre 1937

Frédéric MARCHESANI, 2013

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Perron de Liège

Le perron liégeois est intimement lié à l’histoire de la cité et aux divers pouvoirs qui y étaient établis. Déjà Godefroid Kurth remarquait qu’au fur et à mesure que l’autonomie urbaine venait se placer à côté de l’échevinage pour lui disputer la juridiction de la cité, le perron changea de signification. 

Sans cesser de servir d’outil au prince et à l’échevinage, il devient de plus en plus un organe de publicité municipale et un symbole de la liberté communale. Ainsi, le perron devient symbole des pouvoirs acquis par la cité contre le prince-évêque. Il participe à la promulgation des édits, des lois et des règlements ; à ses pieds ou à proximité, les échevins jugent les contrevenants, font connaître leurs sentences et appliquent les châtiments. 

Proche de l’hôtel de ville, il est un instrument et un témoin de l’application de la justice. Mentionné pour la première fois sous le règne du prince-évêque Raoul de Zähringen (1167-1194), il symbolise le pouvoir de justice détenu par le souverain liégeois. On retrouve mention du monument une seconde fois lors de l’installation d’une fontaine sur la place du Marché entre 1285 et 1308. Immédiatement, le perron est placé au-dessus de cette fontaine. 

Sa très forte signification fut également à l’origine de ses malheurs : en 1467, Charles le Téméraire enleva le monument pour l’emporter à Bruges et ainsi signifier aux Liégeois leur défaite et la perte de leurs libertés. Rendu par sa fille Marie de Bourgogne, il fut restauré à de nombreuses reprises entre 1568 et 1986. C’est au XVIe siècle que sa restauration lui apporta sa physionomie actuelle : la fontaine est reconstruite, embellie de colonnes et de bassins, de sculptures chimériques. En 1697, l’œuvre est à nouveau renouvelée par Jean Del Cour et ornée du groupe des trois grâces supportant une pomme de pin, symbole de la liberté civique. 

Les marbres sont remplacés par d’autres matériaux, fonte ou pierre de taille au XIXe siècle. De forme hexagonale, le massif du monument est entouré d’un portique qui s’appuie sur des colonnes en forme de balustres renversés et est couronnée par une balustrade. Au-dessus de l’ensemble, le perron s’élève sur un piédestal servant de base à quatre lions couchés.

Son importance est aujourd’hui toujours bien présente : de nombreux endroits conservent des représentations des armoiries de la ville de Liège qui, depuis le XIVe siècle, intègrent le perron. Plusieurs princes-évêques firent également figurer le monument sur leurs monnaies.

Place du Marché 35
4000 Liège

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Frédéric MARCHESANI, 2013

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Musée ducal et hôtel de ville de Bouillon

L’actuel hôtel de ville de Bouillon servait de palais ducal, sous le règne de la famille de la Tour d’Auvergne. Ce vaste ensemble enduit composé d’un bâtiment du XVIIe siècle, fortement reconstruit au XIXe siècle, situé à la pointe nord de l’esplanade du château et dominant la place ducale était donc la résidence du gouvernement bouillonnais. 

Nationalisé après la Révolution française, le bâtiment devint officiellement l’hôtel de ville de Bouillon en 1840. Inscrite dans le périmètre de l’ancien palais ducal, la résidence au gouverneur du duché est intimement liée au palais princier.

L’ancienne résidence du gouverneur © Nancy Perot

Non loin de là, l’actuel musée ducal est installé dans un très bel hôtel particulier édifié par Nicolas-Joseph de Spontin, conseiller à la Cour souveraine du duché de Bouillon. Une cour s’étend face à l’entrée des bâtiments enduits de crépi blanchi et surmontés de toitures à la Mansart couvertes d’ardoises en schiste du pays. L’ensemble témoigne encore de l’esprit du XVIIIe siècle. En tant que musée d’histoire local, l’institution retrace plusieurs siècles d’histoire du duché.

Rue du Petit 1
6830 Bouillon

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Frédéric MARCHESANI, 2013

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Moulin Lampach et moulin Kayser

Du passé autrichien, deux traces sont parvenues jusqu’à nous. Elles font partie de la longue liste de panneaux armoriés datant du règne de l’impératrice Marie-Thérèse (1740-1780) et placés sur des moulins du territoire luxembourgeois. Le moulin Lampach, situé sur le territoire de la ville d’Arlon, a été érigé dans la seconde moitié du XVIIIe siècle à l’initiative de l’impératrice elle-même. 

Une plaque armoriée placée au-dessus de l’entrée témoigne de cette volonté. Elle représente l’aigle impérial portant un écu martelé et sommé de la couronne impériale ; de part et d’autre se trouvent les initiales M et T. Une autre trace similaire est présente sur le moulin Kayser à Udange. Ce complexe de bâtiments crépis a été érigé à la même époque. Une porte du moulin est surmontée d’une plaque sculptée aux armes de Marie-Thérèse d’Autriche et millésimée 1773.

rue du moulin Lampach
6700 Arlon

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Frédéric MARCHESANI, 2013

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Moulin impérial de Nobressart

Faisant partie intégrante de la seigneurie luxembourgeoise de Thiaumont, le ban de Nobressart comprenait également au Moyen Âge les villages de Heinstert, Almeroth et Louchert. 

Les droits seigneuriaux appartenaient directement au duc de Luxembourg jusqu’à leur engagement à la comtesse de Reckem en 1646. 

En 1652, la seigneurie est acquise par l’abbaye de Clairefontaine avant d’être rachetée une dernière fois par les maîtres de forges de Habay-la-Neuve.

Une trace similaire à celles conservées sur le sol arlonais subsiste dans la localité de Nobressart. 

Il s’agit une fois de plus d’un moulin reconstruit en 1776 par l’architecte Nicolas Burton, bien qu’ici remanié au cours des deux siècles suivants. 

Entre la seconde et la troisième travée du volume principal, à l’étage, se trouve un cartouche remarquablement conservé et frappé de l’aigle bicéphale, des initiales M et T et du millésime 1776. 

La composition est analogue à celle des traces liées à l’impératrice Marie-Thérèse : un blason entouré de l’aigle bicéphale et surmonté de deux couronnes.

Quartier du Moulin Impérial 317
6717 Nobressart

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Frédéric MARCHESANI, 2013

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Girouette du moulin de Lacuisine

Fondé selon toute vraisemblance au début du XIVe siècle, le village de Lacuisine est affranchi en 1304 par le comte Arnould IV de Chiny. 

Le village conserve lui aussi un moulin, construit dans le premier tiers du XVIIIe siècle. L’édifice est cette fois caractérisé par la présence d’une girouette représentant l’aigle bicéphale des Habsbourgs d’Autriche installée le 21 novembre 1770. 

La pose de cet élément au sommet de la toiture correspond en effet à l’achat de girouettes pour les usines de l’impératrice d’Autriche et place Lacuisine parmi les douze bâtiments qui obtiennent à l’époque le statut particulier « d’usine domaniale », privilège accordé par l’impératrice aux exploitants d’usines de ce type. 

Le bâtiment était en effet un moulin-scierie fonctionnant avec une roue à aubes et constitue aujourd’hui un témoin privilégié de cette volonté de Marie-Thérèse d’imprimer sa marque sur les bâtiments industriels de ses territoires. 

Les divers exemples luxembourgeois de panneaux armoriés peuvent également être reliés à ce genre d’entreprise.

Rue des Iles 56
6821 Florenville

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Frédéric MARCHESANI, 2013