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Statue Berthe

Au milieu du XIXe siècle, afin de doter l’institution provinciale de Liège d’un bâtiment digne de ce niveau de pouvoir, d’importants travaux sont entrepris autour de l’ancien palais des princes-évêques. Propriétaire des lieux (1844), l’État belge retient le projet du jeune architecte Jean-Charles Delsaux (1850) et lui confie la mission de réaliser la toute nouvelle aile, en style néo-gothique, sur le côté occidental du Palais. Face à la place Notger, Delsaux (1821-1893) achève l’essentiel du chantier en 1853, mais des raisons financières l’empêchent de réaliser la décoration historiée qu’il a prévue pour la façade du nouveau palais provincial. Vingt-cinq ans plus tard, le gouverneur Jean-Charles de Luesemans prend l’avis d’une commission pour déterminer les sujets et les personnes les plus dignes d’illustrer le passé de « la Nation liégeoise ». Placés sous la responsabilité de l’architecte Lambert Noppius (1827-1889), une douzaine de sculpteurs vont travailler d’arrache-pied, de 1877 à 1884, pour réaliser 42 statues et 79 bas-reliefs. Dès la mi-octobre 1880, 27 des 42 statues sont achevées, validées par la Commission et mises à leur emplacement respectif. Celle de Berthe est parmi celles-ci.

Membre de cette équipe, Léon Mignon (1847-1898) va réaliser quatre des 42 statues et représenter deux scènes historiques (La bataille de Steppes et L’institution de la Fête-Dieu). De retour d’un séjour de plusieurs mois à Rome, Léon Mignon s’est installé à Paris ; rentrant à Liège de temps à autre, il apporte sa contribution au chantier de décoration du Palais provincial. C’est aussi durant cette période qui va de 1876 à 1884 que l’artiste réalise ses œuvres majeures, celles qui lui assurent en tout cas une réelle notoriété : Li Toré et son vis-à-vis Le Bœuf de labour au repos.
Réalisée en pierre durant la même période, sa statue de la mère de Charlemagne (c. 720 – 783) ne ressemble en rien aux « monuments » que la ville de Liège implante aux Terrasses.

Sa représentation de Berthe, l’épouse de Pépin le Bref, semble s’inspirer très fortement du gisant de la dame franque de la basilique Saint-Denis à Paris ; par contre, il est loin de la statue qu’Eugène Oudiné (1810-1887) a inaugurée dans la galerie des reines de France et femmes illustres du Jardin du Luxembourg, à Paris. Sans faire allusion au surnom « au Grand Pied » de l’aristocrate franque devenue reine, Mignon lui donne une apparence simple, en insistant sur les signes distinctifs de son pouvoir. La particularité la plus manifeste de cette statue réside dans le fait qu’il s’agit de l’une des deux seules femmes représentées sur la façade du Palais provincial de Liège. Berthe et Gertrude de Moha sont bien seules face à 40 autres hauts personnages historiques masculins. Située entre Charlemagne et Godefroid de Bouillon, la statue de Berthe est placée à l’extrême droite du péristyle, sur la partie supérieure ; elle se situe au-dessus de la statue d’Erard de la Marck.

Elle témoigne aussi que Léon Mignon (1847-1898) n’est pas qu’un sculpteur animalier, même si son œuvre la plus connue à Liège reste Li Toré. Bénéficiaire d’une bourse de la Fondation Darchis, cet élève studieux de l’Académie des Beaux-Arts de Liège, qui fréquentait depuis son plus jeune âge l’atelier de Léopold Noppius, avait trouvé l’inspiration en Italie (1872-1876). Médaille d’or au salon de Paris en 1880 pour son taureau, il s’était installé dans la capitale française (1876-1884), avant d’être contraint à habiter Bruxelles pour pouvoir  exécuter des commandes officielles du gouvernement : c’est l’époque de ses bustes, mais aussi de la statue équestre de Léopold II particulièrement remarquable, d’une série de bas-reliefs pour le Musée d’Art moderne de Bruxelles et le Musée des Beaux-Arts d’Anvers, ainsi que d’une Lady Godiva, sa dernière œuvre.


Julie GODINAS, Le palais de Liège, Namur, Institut du Patrimoine wallon, 2008, p. 89
http://www.chokier.com/FILES/PALAIS/PalaisDeLiege-Masy.html
Michel Péters sur http://fr.slideshare.net/guest78f5a/petit-historique-de-la-sainttor-des-tudiants-ligeois (s.v. août 2013)
Hugo LETTENS, Léon Mignon, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 504-508
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 231
Musée en plein air du Sart Tilman, Art&Fact asbl, Parcours d’art public. Ville de Liège, Liège, échevinat de l’Environnement et Musée en plein air du Sart Tilman, 1996
La Meuse, 2 octobre 1880
 

Façade du Palais provincial, face à la place Notger
4000 Liège

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Paul Delforge

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Stèle CHÂTEAUBRIAND

Sur les hauteurs du village de Bande, dans un endroit particulièrement isolé, le lieu-dit Au Zéro accueille depuis 1948 une borne en souvenir de François-René vicomte de Châteaubriand (Saint-Malo 1768 – Paris 1848). Précurseur du romantisme français, grand nom de la littérature française, Châteaubriand évoque explicitement dans ses Mémoires d’outre-tombe le périple qui le conduit de Longwy à Namur, puis à Bruxelles et finalement à Jersey.

Dans ses jeunes années, celui qui n’a pas encore la notoriété que lui vaudront Atala (1801), René (1802), Génie du christianisme (1802) et ses Mémoires d’outre-tombe (1848) est un lieutenant au service du régiment de Navarre, qui arrive à Paris en 1788, participe aux États de Bretagne et, après avoir effectué un périple dans Le Nouveau monde retrouve Saint-Malo (mars 1792), avant de partir pour Paris « offrir son épée à Louis XVI » ; mais en juillet, fuyant la Terreur, il décide de rejoindre l’armée des émigrés à Coblence (juillet), en passant par Lille, Tournai, Bruxelles et Liège. 

Engagé dans les armées favorables au retour du roi de France contre les armées de la jeune République, Chateaubriand participe au siège de Thionville (août) et arrive à Verdun où, comme l’ensemble de la troupe il attrape ce qu’il appelle « la maladie des Prussiens». 

L’armée de Condé étant licenciée, Châteaubriand obtient son congé le 16 octobre à Longwy et gagne directement Arlon. Il cherche alors à sortir de la République par le Nord et à gagner Jersey via Ostende, pour rejoindre les royalistes en Bretagne. Atteint aussi par la petite-vérole, Châteaubriand entreprend de traverser à pied le pays wallon ; il évoque explicitement Attert, Flamisoul et un endroit nommé Bellevue atteint après six jours de voyage effectué de charrettes en charrettes.

Désormais, il se retrouve seul et obligé de marcher, s’appuyant sur une béquille. Gagné par la fièvre et la fatigue, celui qui tient dans sa besace les premiers pages d’Attala s’évanouit soudain au bord du chemin et la mort l’eut cueilli si des hommes du Prince de Ligne ne l’avaient ramassé et ramené à la vie. Une fois soigné, il gagne Namur où il est aidé par de nombreuses habitantes de la cité, Bruxelles et Jersey convalescent. 

Châteaubriand met alors un terme à sa carrière militaire. Il vit ensuite à Londres jusqu’en 1800 et y publie son premier ouvrage, un essai historique mais surtout politique. De retour à Paris, il y dirige le Mercure de France et y publie ses premières œuvres déjà citées, de même que son Itinéraire de Paris à Jérusalem, dont il a trouvé l’inspiration lors d’un périple dans l’est de la Méditerranée en 1806.

En lisant avec attention le chapitre 1 du livre 10 des Mémoires d’outre-tombe, on ne trouve à aucun endroit une mention explicite du lieu-dit Au Zéro. C’est pourtant dans ce coin perdu qu’est inaugurée la stèle Châteaubriand, le 21 août 1948, soit quasiment un siècle, presque jour pour jour, après la mort de l’écrivain (4 juillet 1848). Pour l’occasion s’est déplacé un aéropage de personnalités dont le ministre C. Hysmans, l’ambassadeur de France à Bruxelles, ainsi que de nombreux écrivains et amis des lettres dont Carlo Bronne, Thomas Braun, Gustave Charlier et bien sûr Pierre Nothomb, président de l’Académie luxembourgeoise depuis le 25 avril 1948. Après avoir commémoré en 1947 le passage de Pétrarque en Ardenne, la dite Académie plante dans le sol wallon une nouvelle « borne au sceau du génie latin ».

Comment l’Académie a-t-elle identifié l’endroit ? Cela reste un mystère, même si aujourd’hui les offices du tourisme, se référant à Émile Tandel, affirment que Châteaubriand fit halte au Zéro, dans ce petit hameau qui comptait alors trois maisons dont une auberge. Placé sur l’ancienne voie de circulation nommée « Vieille Pavée » ou « Route Marie-Thérèse », le bourg aujourd’hui disparu avait déjà vu s’arrêter l’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche lors d’un périple sur ses terres d’en bas. À son tour, Châteaubriand est accueilli, logé et surtout soigné en ce lieu qui, en 1948, est surtout reconnu comme un haut lieu de la Résistance active durant la Seconde Guerre mondiale. Au-delà de la localisation, on peut aussi s’interroger sur la nature du message véhiculé par cette simple stèle de schiste, où les mentions sont réduites au minimum :

CHÂTEAUBRIAND
1792

L’Académie luxembourgeoise voulait-elle célébrer le lieu de (re)naissance de Châteaubriand, écrivain en devenir alors au bord de la mort ? Entendait-elle rendre hommage dans un même ensemble à la Résistance, à la France (représentée officiellement par l’ambassadeur et comte de Hautecloque) et à Léopold III ? On peut le supposer en ces années d’immédiat après-guerre marquées notamment par la question royale, même si la valorisation du Luxembourg est au cœur de la reconstitution historique réalisée par les Compagnons de Saint-Lambert, à l’occasion de l’inauguration officielle du monument.


Sources:

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
La Vie wallonne, 1948, III-IV, n°243-244, p. 276-277
Émile TANDEL, Les communes luxembourgeoises, 1870
http://www.tourisme-marche-nassogne.be/fr/decouvertes-a-loisirs/patrimoine-et-nature/item/17820-lieu-dit-au-zero-et-stele-chateaubriand (s.v. mars 2015)
http://www.ebooksgratuits.com/ebooksfrance/chateaubriand_memoires_outre-tombe.pdf
Les Cahiers de l’Académie luxembourgeoise, Chronique 1938-1958, Arlon, Fasbender, 1959, nouvelle série 1, p. 16

 

Stèle Châteaubriand (Bande - Champlon)

 
 

 

Au Zéro – route de Lignières 
6951 Bande (Champlon)

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Stèle en souvenir de Châteaubriand, réalisée à l’initiative de l’Académie luxembourgeoise, 21 août 1948.
 

Paul Delforge

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Mémorial Albert BONJEAN

Pendant longtemps, les seuls monuments érigés dans la Fagne ont été des croix d’occis, rappelant des moments tragiques où tel garde forestier, tel promeneur patenté ou tel couple de fiancés trouvèrent la mort dans l’étendue sauvage que constitue le parc naturel des Hautes Fagnes. Une nouvelle tradition s’instaure dans les années 1930 lorsque de grands défenseurs de la Fagne sont honorés par leurs amis : c’est le cas pour Léon Frédéricq, décédé en 1935 ; puis d’Albert Bonjean honoré de son vivant, en 1938.

Docteur en Droit de l’Université de Liège (1880), Albert Bonjean a fait carrière comme avocat dans la cité lainière dont il est originaire et où il a fait ses études. Né en 1858, il est plusieurs fois bâtonnier du barreau de Verviers. S’il aime la prise de parole pour défendre ses clients, il trouve cependant son épanouissement profond en parcourant la Fagne voisine qu’il traverse de part en part, solidement équipé de vêtements et de souliers appropriés, de réserves alimentaires et de puissantes jumelles. Il n’oublie ni ses cartes ni surtout ses carnets de note qui constitueront la substance de nombreux écrits (légendes d’abord, poèmes et romans ensuite) dont la Fagne est l’héroïne principale. Déjà à l’Athénée, son professeur, Till Lorrain, l’encourageait à l’écriture. Si d’autres écrivains ont vanté certains coins de Wallonie, Bonjean est le premier chantre des Hautes Fagnes. 

Auteur d’une dizaine d’ouvrages publiés entre 1878 et 1939, il est le signataire d’une série impressionnante d’articles dans de nombreuses revues dont la ligne éditoriale manifeste notamment des sympathies libérales et de l’intérêt pour la Wallonie. Membre responsable du Touring-Club de Belgique (créé en 1895) auquel il apporte des articles pour son magazine, membre de la Commission des Monuments et des Sites, il se fait également le défenseur du patrimoine naturel et bâti, et surtout des sentiers vicinaux. Co-fondateur du Comité des Défenseurs de la Fagne (26 octobre 1911), puis de la Ligue de la Fleur, des Plantations et des Sites, il sera nommé président d’honneur des Amis de la Fagne lorsque cette asbl est constituée en 1935. Il n’eut de cesse d’obtenir la protection intégrale et officielle de la région des Hautes Fagnes et eut la satisfaction de voir ses efforts couronnés par le projet de reconnaissance de la Fagne en réserve nationale.

Mémorial Albert Bonjean

Ce sont ces différents titres qui lui valent l’honneur d’une haute stèle (3,5 mètres) où un bas-relief de bronze figure sa silhouette. L’initiative est prise par « ses amis », comme en témoigne la signature sur la face avant du monument. Le sculpteur ne pouvait omettre d’attirer l’attention sur les jumelles du jubilaire. Le lieu et le jour de l’inauguration du mémorial ont aussi valeur de symboles. Depuis plusieurs années, Bonjean s’était battu pour préserver la Fagne et, en 1931, il avait réussi à faire renaître la Baraque Michel. Cent ans après l’édification de la chapelle Fischbach, le lieu reprenait vie et redevenait un point de rendez-vous pour les amis de la Fagne. Alors que les Hautes Fagnes obtenaient le statut de Parc national, la société des Amis de la Fagne décidait d’une journée annuelle de la Fagne : le 10 juin 1936, lors de cette première, Bonjean fut au centre de tous les discours et des réjouissances. L’année suivante, c’est au tour du professeur Frédéric d’être honoré. Quant à la troisième édition de la Journée de la Fagne, elle est l’occasion d’inaugurer le monument Albert Bonjean, tandis que Jules Feller lui consacre un poème. L’œuvre est installée à la Baraque Michel, à quelques pas des tourbières, du Boultay et de la chapelle Fischbach. En 1975, il sera déplacé en bordure nord du parking de la Baraque Michel.

Les Amis de la Fagne en ont confié la réalisation à un sculpteur liégeois. Né à Grivegnée en 1883, Van Neste est à la fois peintre et sculpteur. Autodidacte pour le premier genre, il a reçu une formation à l’Académie de Liège pour le second. Retenu prisonnier dans un camp allemand pendant la Première Guerre mondiale (il séjournait à Munster en mars 1915), Van Neste représentera les conditions de sa captivité, ainsi que des portraits de prisonnier dans quelques tableaux, mais il privilégiera les paysages, les fleurs et les natures mortes dans son œuvre picturale, voire quelques scènes villageoises. Comme d’autres sculpteurs, il eut diverses commandes de monuments aux morts de la Grande Guerre dont principalement celui de Spa. Il signe aussi le buste placé au sommet du monument aux motocyclistes à Aywaille.


La Vie wallonne, août 1938, CCXVI, p. 357-374
André VLECKEN, Albert Bonjean, le Chantre des Hautes Fagnes, sa vie, son œuvre 1858-1939, Verviers, Vinche, c. 1941
http://www.osotatarl.com/monument_chapuis.86.html#Baraque%20Michel 
http://www.mini-ardenne.be/encyclopedie.phpdisplay=theme&commune=JALHAY&localite=HAUTES_FAGNES&P=1 (s.v. mars 2014)
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 672
Benjamin STASSEN, La Fête des Arbres. L’Album du Centenaire. 100 ans de protection des arbres et des paysages à Esneux et en Wallonie (1905-2005), Liège, éd. Antoine Degive, 2005, p. 60
Bulletin de l’Association pour la Défense de l’Ourthe, juillet-septembre 1939, n°114, p. 190
R. COLLARD et V. BRONOWSKI, Guide du plateau des Hautes Fagnes, Verviers, éd. des Amis de la Fagne, 1977, p. 303

Baraque Michel – 4845 Jalhay

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Plaque Joseph DAMIEN

Plaque commémorative sur la maison natale de Joseph Damien, réalisé à l’initiative du Comité d’initiative de Noville-les-Bois, 16 septembre 1962.
 

Sur la maison natale de Joseph Damien, rue Dachelet, à Noville-les-Bois (plus précisément Sart d’Avril), une plaque commémorative a été apposée le 16 septembre 1962.


L’ARTISTE PEINTRE
JOSEPH DAMIEN
NAQUIT ICI
LE 22 FÉVRIER 1879


Le contexte des Fêtes de Wallonie a été délibérément choisi pour honorer le peintre local, en même temps qu’Ernest Montellier. Les deux hommes sont nés dans le village et une Journée des Arts est organisée avec le soutien des autorités locales pour honorer les enfants du lieu.


Portraitiste renommé, fils du peintre tournaisien Franz Damien, Jos Damien (Noville 22/02/1879 – Schaerbeek 1973) avait été élève à l’Académie de Liège et à l’Institut supérieur d’Anvers, avant d’achever sa formation artistique à Paris. Pratiquant la peinture murale à ses débuts, il se destine plutôt à la décoration quand il s’établit en province de Limbourg, à Halen d’abord (1904-1911) d’où sa femme est originaire, à Hasselt ensuite (1911-). Fondateur du cercle Ars proba, il « invente une nouvelle forme d’art qui fait sensation, sous la forme de toiles de soie flottantes peintes, représentant de grands tableaux historiques, accentuées par une bordure de soie qui était réalisée par son épouse. Ses créations lui permettent de remporter le premier prix au « Concours des Arts décoratifs » de Paris en 1912 » (fernelmont.be) et d’être remarqué à l’exposition internationale de Gand (1913). Attiré à Hasselt en raison d’une importante commande d’une fabrique de céramique, il est déporté en Allemagne au début de la Grande Guerre. Après plusieurs mois au camp de Munster, il est finalement libéré en 1915.


Si les compositions florales et les tableaux de genre constituent une partie de sa production, les figures et les portraits « officiels » vont faire sa réputation à partir de 1915. Surnommé le « peintre des rois », Joseph Damien n’a pas portraituré les seuls représentants de la famille royale belge. D’autres personnalités belges (gouverneurs, magistrats, militaires, professeurs…) ou étrangères (luxembourgeoises, chinoises) ont droit à l’attention du peintre. On estime à 600 le nombre de portraits qu’il aurait réalisé en vingt ans (1934). C’est dans les années 1930 qu’il est invité aux Cours de Laeken et de Luxembourg. Établi à Bruxelles à la fin des années 1930, il continuera d’y peindre jusqu’à son décès, à l’âge de 94 ans, en 1979. Dès lors, il était présent à Noville-les-Bois en 1962 et on lui doit notamment un portrait d’Ernest Montellier habillé en Molon.


L’hommage relevait d’un Comité d’initiative de Noville-les-Bois qui avait obtenu l’étroite collaboration de l’administration communale. Au programme de la Journée des Arts, les autorités locales célèbrent à la fois Montellier et le peintre Joseph Damien par une série d’événements dont la pose des plaques commémoratives. Très remarquée était la présence des Quarante Molons au complet, des amis des Rèlîs Namurwès et de confréries folkloriques.



Sources


La Vie wallonne, IV, 1962, n°300, p. 295-296
Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Françoise JACQUET-LADRIER (dir.), Dictionnaire biographique namurois, Namur, Le Guetteur wallon, n° spécial 3-4, 1999, p. 181
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 283

 

Plaque Joseph Damien (Noville-les-Bois)

 

Rue Dachelet 11

5380 Noville-les-Bois

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Statue Jules BARA

Statue à la mémoire de Jules Bara
Réalisée par Guillaume Charlier et Victor Horta, inaugurée le 20 septembre 1903.

Située place Crombez, à Tournai, un imposant ensemble statuaire figuratif rend hommage à l’action politique de Jules Bara (1835-1900), particulièrement à son rôle en tant que ministre de la Justice. Juriste, ministre de la Justice durant plus de dix ans dans des gouvernements dirigés par Frère-Orban entre 1865 et 1885, il a représenté l’arrondissement de Tournai au Parlement, en tant que mandataire libéral, de 1862 à 1900, comme député d’abord (jusqu’en 1894), comme sénateur provincial ensuite.

La stature nationale de l’homme politique libéral a conduit la ville de Tournai à ériger un monument imposant en son honneur. Sur base d’un projet du célèbre architecte Victor Horta (1861-1947), les socles sont en pierre taillée, tandis que les statues en bronze sont l’œuvre de Guillaume Charlier (1854-1925), artiste apprécié dans la cité des cinq clochers où il s’est occupé du chantier du Musée des Beaux-Arts (Mémorial Van Cutsem et groupe allégorique).

Formé auprès des frères Geefs puis praticien chez Eugène Simonis, le jeune bruxellois Guillaume Charlier a séduit un riche collecteur avec un plâtre intitulé Le déluge. Cette œuvre de 1879 place le jeune orphelin sous la généreuse protection du mécène ; il peut ainsi suivre les cours de l’École des Beaux-Arts de Paris (1880) puis chez Cavelier (1884-1886). Entre-temps, le Prix de Rome 1882 lui offre la possibilité de séjourner en Italie (1882-1884). Honoré par diverses distinctions lors des Salons où il présente ses œuvres d’inspirations diverses, il apporte à la sculpture de son temps un style propre, où s’exprime en permanence une forme de douleur de vivre due aux difficiles conditions matérielles des milieux ouvriers ou des nécessiteux. 

Dans l’ombre de Constantin Meunier, il s’attache à représenter des travailleurs (houilleur, marin, etc.) en pleine activité. Portraitiste reconnu, il répond à de nombreuses commandes officielles ou privées, à Bruxelles comme à Tournai. Dans la cité wallonne, il dépose l’impressionnante scène Les Aveugles (1906), après avoir livré un Louis Gallait, ainsi que le tout aussi monumental Jules Bara, où se mêlent le bronze et la pierre. C’est à la suite d’un concours organisé en 1901 que Guillaume Charlier est retenu par les autorités tournaisiennes.

Le monument Bara est composé de quatre parties ; de part et d’autre de la statue centrale montrant Jules Bara debout, le bras gauche plié et orienté légèrement vers l’avant, se trouvent, à gauche un homme et son fils en train de lire, et à droite, une femme dont on ne sait si elle est en train d’écrire ou de dessiner le portrait de Bara. À l’arrière, sur un très haut socle entouré de quatre colonnes, la Justice couronne l’ensemble du monument situé sur une large place donnant sur la gare. Un seul mot est gravé dans la pierre, le nom de BARA. On peut lire sur le socle du bronze de l’homme politique la signature de Guillaume Charlier, celle de la société « H. Verbyst. Fondeur. Bruxelles » et la mention du nom « Victor Horta » sur la pierre, à l’avant du monument.

L’ensemble a été inauguré en très grandes pompes le 20 septembre 1903, l’inscrivant dans la tradition – maintenue en Wallonie – de la célébration des Journées de Septembre de 1830. Une foule nombreuse eut l’occasion d’entendre le discours prononcé par Paul Hymans, d’assister au défilé de plusieurs centaines de gymnastes, de prendre part à un concert ou d’admirer, le soir, la statue illuminée. C’est à une véritable glorification de la figure de Jules Bara que procède la ville de Tournai, trois ans à peine après sa disparition.


Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 209
Alain DIERKENS, La statuaire publique, dans L'architecture, la sculpture et l'art des jardins à Bruxelles et en Wallonie, Bruxelles, La Renaissance du Livre, 1995, p. 247
Paul HYMANS, Jules Bara. Discours prononcé à la cérémonie d'inauguration de la statue de Jules Bara à Tournai le 20 septembre 1903, Bruxelles, Vanbuggenhoudt, 1903
Jacky LEGGE, Tournai, tome II : Monuments et statues, Gloucestershire, Éd. Tempus, 2005, coll. Mémoire en images
Serge LE BAILLY DE TILLEGHEM, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 321-325
Elia KETELS, dans Biographie nationale, t. 41, col. 110-114.

Place Crombez
7500 Tournai

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Paul Delforge

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Monument Isabelle BRUNELLE

Les personnalités féminines statufiées dans l’espace public de Wallonie sont relativement rares (un monument sur vingt en moyenne). Elles sont encore plus rares au XIXe siècle. Christine de Lalaing a été la toute première à être honorée d’une statue imposante, c’était à Tournai en 1863. Avec la statue réalisée par Guillaume Geefs en l’honneur d’Isabelle Brunelle et inaugurée en 1872, on reste dans le domaine de l’exceptionnel d’autant qu’après le monument Léopold Ier inauguré en 1869, il s’agit du deuxième consacré à une personnalité qui prend place dans l’espace public namurois. En cette deuxième moitié du XIXe siècle, les autorités municipales continuent d’être encouragées par le gouvernement belge à contribuer au renforcement de l’identité belge par l’implantation de statues de personnalités héroïques dans les parcs et sur les places. À Namur, le phénomène commence à se développer au moment où l’enceinte de la ville est démantelée, où les portes et les tours sont détruites, tandis qu’un plan d’aménagement et d’embellissement de Namur trace les grandes orientations du futur. À l’entame de ces importants chantiers, l’Hospice d’Harscamps est aux premières loges : un échange de terrains est conclu entre les autorités municipales et la direction de l’Hospice qui, toujours en accord avec la ville, projette d’adjoindre un parc à ses bâtiments (1868-1869). À l’initiative de la Commission des Hospices civils de Namur, il est par ailleurs décidé qu’au centre du parc viendra prendre place un monument dédié à madame d’Harscamps et dont l’exécution sera confiée à Guillaume Geefs, sculpteur qui est en train d’achever la statue de Léopold Ier.
 

Monument Isabelle Brunelle, comtesse d’Harscamps

Formé à l’Académie d’Anvers, le jeune Geefs (1805-1883) avait été très rapidement repéré par ses professeurs ; une bourse lui a permis de parfaire sa formation à Paris et, à son retour, il était nommé professeur de sculpture à l’Académie d’Anvers (1833-1840). Membre de la classe des Lettres de l’Académie dès 1845, il la préside de 1858 à 1883. Il était membre de l’Institut de France. Présent dans différents salons, il s’impose avec le modèle de la statue du Général Belliard et le monument funéraire du comte Frédéric de Mérode. Le jeune royaume de Belgique venait de trouver l’un de ses sculpteurs capables de figer dans la pierre (ou le bronze) les personnes et les événements les plus illustres du pays. Répondant aux multiples commandes destinées à orner les églises, les places, les édifices, les cimetières ou les salons de toute la Belgique, il livre à Anvers une statue de Rubens (1840) et à Liège, celle de Grétry (1842), à Huy celle de Lebeau (1869), tout en réalisant de nombreuses statues de Léopold Ier, dont celle de Namur. C’est donc un artiste renommé qui réalise, pour Namur, la statue d’Isabelle Brunelle et qui y signera encore celle de Jean-Baptiste d’Omalius d’Halloy en 1881.

En 1869 déjà, G. Geefs a terminé la maquette en plâtre du monument Brunelle et la Commission a validé son projet. Cependant, les événements politiques qui secouent la France (1870-1871) sont à l’origine du retard dans l’acheminement du bloc de marbre qui a été choisi, en l’occurrence de l’Échaillon blanc exploité à une vingtaine de kilomètres de Grenoble. Entre-temps, le marbrier namurois Adolphe Balat est choisi pour réaliser le piédestal en pierres bleues d’Écaussinnes qui a une hauteur de 3,33 mètres. Finalement, la date du 15 mai 1872 retenue pour l’inauguration est respectée. Sous la pluie, la foule importante entend les discours du président de la Commission des Hospices et du sénateur de Woelmont au nom de la famille d’Harscamps. La statue dévoilée présente la comtesse en grande et forte femme, se tenant debout et serrant son testament dans la main gauche. Les habits qu’elle porte sont de l’époque Louis XV ; il s’agit d’une toilette de cérémonie. La robe et ses grands plus ont fait l’objet d’une attention particulière du sculpteur qui s’est par ailleurs inspiré des portraits peints d’Isabelle Brunelle pour réaliser son visage. Comme à son habitude, le sculpteur a laissé son signature sur la plinthe de la sculpture : « Gme Geefs/statuaire du roi ». Quant aux quatre faces du piédestal, elles portent chacune des inscriptions gravées en lettres d’or par Balat.

Sur la face avant :
« ISABELLE BRUNELLE
COMTESSE D’HARSCAMPS.
FONDATRICE
DE L’HOSPICE D’HARSCAMPS.
29 JANVIER 1805.

À droite :
NEE A AIX-LA-CHAPELLE
LE 3 SEPTEMBRE 1724.

À gauche :
DECEDEE A NAMUR


LE 8 MAI 1805.

À l’arrière : 
ERIGE
LE 15 MAI 1872. »

C’est une bienfaitrice des pauvres qu’honorent le monument et les discours, rappelant que celle qui était née à Aix-la-Chapelle en 1724, dans une famille de la petite bourgeoisie, sous le nom d’Isabelle Brunelle, avait épousé, en 1748, en Hongrie, le comte Pontian d’Harscamps, un capitaine de dragons au service de l’Autriche. Elle avait reçu une éducation attentive dans une maison de Liège ; lui était l’héritier d’une famille originaire de Gueldre qui avait fait fortune dans le Namurois et possédait d’importantes propriétés tant ce comté qu’en principauté de Liège et en Hongrie. Après avoir perdu ses trois enfants victimes de maladies, le couple vient s’installer au château de Fernelmont ; c’est là que mourut le comte en 1794. Les événements rendent alors difficiles la possibilité pour la veuve de vivre dans le Namurois. Néanmoins, vers 1800, elle retrouve Namur où elle s’installe dans son hôtel particulier du Marché de l’Ange. Se consacrant à diverses actions de bienfaisance, elle met sa fortune aux services des pauvres. Dans un testament plusieurs fois complété entre 1788 et janvier 1805, elle marque son intention de fonder plusieurs institutions charitables à Aix-la-Chapelle, sa ville natale, et dans les diverses localités où elle possède des immeubles. À Namur, en particulier, elle consacre une part importante de ses biens pour qu’y soit construit un hospice portant le nom de son époux. Quelques semaines plus tard, en mai 1805, elle décède subitement à Namur. En application des dispositions testamentaires, les autorités françaises de l’époque ouvre, le 1er octobre 1812, une maison de retraite qui accueille les personnes d’un certain âge que la bonne fortune a abandonnées. Le lieu choisi est l’ancien Couvent des Récollets supprimé par le nouveau régime. De 40 en 1812, les pensionnaires dépasseront les 200 dans les années 1860.


Sybille VALCKE, dans Jacques VAN LENNEP, La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 415-417
Jean BOVESSE, dans Biographie nationale, t. 41, col. 53-57
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t.
http://www.harscamp.be/index.php/Le-monument-a-Isabelle-Brunelle-comtesse-dHarsca/le-monument-a-la-comtesse-dharscamps.html
http://www.harscamp.be/index.php/Le-monument-a-Isabelle-Brunelle-comtesse-dHarsca/linauguration-du-monument.html
http://www.harscamp.be/index.php/Le-monument-a-Isabelle-Brunelle-comtesse-dHarsca/bibliographies-et-sources9.html (s.v. avril 2014)

parc de l’Hospice d’Harscamps
5000 Namur

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Paul Delforge

Paul Delforge-Diffusion Institut Destrée-Sofam

Plaque Jacques BERTRAND

Initialement, c’est sur la maison natale de Jacques Bertrand (1817-1884), rue Gustave Nalinne, qu’a été apposée une plaque commémorative de ce chansonnier wallon. Par la suite, la plaque a été transférée sur une stèle installée sur la place du Bourdon. Petit artisan – il tenait un atelier de chaisier –, Jacques Bertrand a consacré l’essentiel de ses loisirs à la composition de chanson en langue wallonne, à l’attention du plus grand nombre, en célébrant le pays de Charleroi.

Réalisée par le sculpteur Jules Van der Stock (1897-1944), la plaque commémorative représente, à gauche, dans un médaillon, le chansonnier en pleine inspiration. Sur le côté droit, ses sources d’inspiration apparaissent, de la longue cheminée fumante et de la belle-fleur aux cheminées d'usines du pays de Charleroi. Deux indications sont mentionnées, l’une dans le médaillon évoque ses dates de naissance et décès, l’autre, en plus grand, sur le côté droit :

« Jacques Bertrand
Le chansonnier populaire
Inauguré le 15 juin 1924 ».

Il s’agit d’une œuvre de jeunesse de Van der Stock qui, comme bon nombre de ses collègues va partager ses activités entre des bustes et des monuments aux victimes de la Grande Guerre. Il signe notamment un buste du roi Albert qui fait partie des collections de l’hôtel de ville de Charleroi. D’autres représentations de la famille royale constituent des références de ce sculpteur brugeois venu s’installer à Marcinelle. Médailleur, il fait preuve d’une précision exceptionnelle dans ses réalisations. Influencé par l’Art Nouveau, il a reçu le Prix des artistes au Salon international de Paris avec une œuvre intitulée Guetteur. Résistant durant la Seconde Guerre mondiale, il ne lui survivra pas.

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Maurice PIRON, Anthologie de la littérature dialectale de Wallonie, poètes et prosateurs, Liège (Mardaga), 1979, p. 176-178.

place du Bourdon, rue de France 
6000 Charleroi

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Paul Delforge

Christine Jongen

Statue Childéric

Statue de Childéric, réalisée par Christine Jongen, avril 2004.

Bénéficiant d’un financement inscrit dans le cadre du Phasing out de l’Objectif 1, la ville de Tournai entreprend de valoriser davantage son patrimoine historique, au-delà du beffroi, de la cathédrale et du Pont des Trous. Via l’Intercommunale Ideta qui est le maître d’œuvre, un plan stratégique privilégie en effet depuis 1995 le développement touristique du Hainaut. Se concentrant sur le cœur historique de Tournai, les autorités locales confient à l’artiste plasticienne Christine Jongen (1949-) le soin de mettre en place une quinzaine de statues en bronze dans un parcours d’interprétation à travers la « Cité des cinq Clochers ». 

Ces statues sont les étapes marquantes d’un circuit fortement balisé par une signalétique particulière. Touristes comme habitants de la cité sont ainsi invités à une promenade de deux heures, jalonnées de 43 étapes. Afin de garantir la qualité de l’initiative communale, le bourgmestre, Roger Delcroix, a confié à un comité scientifique composé d’historiens, d’archéologues et de spécialistes des traditions locales la mission d’encadrer le projet. 

Répondant aux critères souhaités, Christine Jongen implante quinze statues sur les trottoirs de Tournai, entre la Grand-Place, l’Escaut, la Tour Saint-Georges et le Fort Rouge. De cette initiative, toutes les étapes ne sont pas restées intactes quelques années plus tard. Étant réalisées en bronze, les statues sont malheureusement convoitées par des ferrailleurs peu scrupuleux qui ne leur reconnaissent qu’une valeur de refonte, estimation bien dérisoire à côté de leur valeur artistique. Durant l’été 2011, la statue de Childéric a été sciée de son mât et dérobée ; les malfrats ont été appréhendés, mais l’œuvre n’est pas retournée place de Nédonchel.

Née à Bruxelles, formée en psychologie à l’Université libre de Bruxelles, Christine Jongen travaille comme journaliste à l’hebdomadaire Notre Temps (1975-1976), avant de se consacrer entièrement à la sculpture. Après une formation en terre cuite à l’École supérieure des Arts plastiques et visuels de Mons (chez Ch. Leroy), elle se perfectionne à l’Académie de Varsovie (chez Gustave Zemla). Laissant son inspiration se nourrir aux sources les plus variées, de la Renaissance européenne aux grandes traditions asiatiques ou d’Amérique, elle s’oriente vers la peinture abstraite quand elle s’installe en France au début des années 1980. Menant aussi une réflexion continue sur l’art dans son essai À la recherche de formes, paru pour la première fois à la fin les années 1980, elle présente ses œuvres à plusieurs reprises (Paris, Bruxelles, Genève, Bordeaux, Bézier, Montréal, Rome, Barcelone, Avignon, Padoue, etc.) et dans divers salons d’art français (2000-2003).

Pour le projet tournaisien, Christine Jongen crée quinze statues, en bronze, de 70 à 75 centimètres de haut, qui toutes sont déposées sur des piliers de 2,8 m de haut. Coulées dans les ateliers de la fonderie Francart, à Crisnée, les statues sont autant de références au passé de Tournai, évoquant des fonctions (chanoine, évêque) ou des « activités » (tailleurs de pierre, portier, arbalétrier), comme des personnages historiques. Inévitablement, Childéric a été retenu à côté de Louis XIV, Pasquier Grenier et Bruno Renard.
D’une taille de 70 centimètres environ, la statue de Childéric présente le roi des Francs debout, s’appuyant légèrement sur son épée. Les rares objets conservés du fameux trésor de Childéric inspirent les vêtements du roi couronné ; l’artiste a en effet retenu des abeilles comme motifs des habits royaux. Dix ans après l’inauguration des quinze statuettes, quelques-unes ont (provisoirement ?) disparu. C’est le cas du Childéric qui a abandonné la place Nédonchel sans laisser d’adresse.


Sources:

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse (dont NordEclair, août 2011)
http://christine.jongen.pagesperso-orange.fr/GrilleJongen.htm (s.v. décembre 2013)
http://www.badeaux.be/Balisages/Bal5/Site15/Site15.html 
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 770

 

Statue de Childéric


 

Place de Nédonchel 
7500 Tournai

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Paul Delforge

Paul Delforge-Diffusion Institut  Destrée-Sofam

Buste BORDET Jules

Très tôt dans le XIXe siècle, la ville de Soignies est dotée d’une gare ferroviaire, ce qui reste relativement rare pour l’époque. Inaugurée en 1841, la gare voit se développer autour d’elle un tout nouveau quartier. L’espace se dessine progressivement ; en 1893, l’ancien kiosque est reconstruit et prend place au milieu d’un square où est érigé, en 1905, un monument dédié au travail « El Cayoteu ». C’est aussi là que les autorités locales vont honorer leur citoyen le plus célèbre. 

En 1919, l’attribution du Prix de médecine et de physiologie à Jules Bordet assied définitivement la notoriété du Sonégien. Professeur à l’Université libre de Bruxelles, chercheur à l’Institut Pasteur, Jules Bordet (1870-1961) s’est spécialisé dans l’étude de la bactériologie, la réalisation de vaccin et a ouvert à la biologie de vastes horizons dans le domaine de l'immunité. Le Prix Nobel consacre ses recherches et met en évidence l’ouvrage qu’il a rédigé durant la Grande Guerre mondiale, à savoir un Traité de l'immunité dans les maladies infectieuses.

La première décision du conseil communal de Soignies consiste à rebaptiser le square de la Station : désormais, il s’appellera le Square Jules Bordet (décision du 4 décembre 1920). Ensuite, en présence de Jules Bordet, une plaque est apposée sur la façade de sa maison natale, rue de Mons. Durant la Seconde Guerre mondiale, cette maison est détruite et la plaque commémorative est sauvegardée dans les locaux de l’Athénée qui va lui aussi porter le nom de l’illustre savant, comme d’ailleurs le Centre culturel. Après son décès, une nouvelle plaque rappelle le souvenir du Prix Nobel, et est apposé au 97 de la rue de la Station.

Quant au buste, installé sur le square Bordet, face à la gare, plus personne ne semble se souvenir de quand il date, qui l’a réalisé et à l’initiative de qui il a vu le jour. Les recherches effectuées par Jean-Philippe Losfeld l’ont conduit à constater que le buste est totalement identique à celui qui se trouve sur la tombe du savant, au cimetière d’Ixelles. Cette ressemblance ainsi que la mention, sur le monument situé à Soignies, des dates 1870-1961 gravées dans la pierre, donnent à penser que le buste a été placé sur le monument au début des années 1960, peu après le décès de l’éminent Sonagien. Peut-être s’agissait-il d’une initiative des autorités communales.

Avec plusieurs effets d’étages réalisés dans la pierre, un socle longitudinal en granit supporte le buste. En plus de la mention des dates dans la partie inférieure, les mots suivants ont été gravés sur le socle, juste en-dessous du buste :

« A J. Bordet »

Très discrètement décorée, une pierre de forme carrée soutient le socle, à l’arrière, à hauteur du sol.

Bulletin de l’Amicale des Anciens élèves de l’Athénée Jules Bordet de Soignies, 2009, n°59 (http://www.amicaleanciens-ars.be/Bulletin%202009.pdf)
Informations communiquées par Jean-Philippe Losfeld (janvier 2014)

square Jules Bordet
7060 Soignies

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Statue Jeanne d’Arc

Statue de Jeanne d’Arc, réalisée par Ernest Toussaint, 1921.
 

Au centre du village de Sibret (commune de Vaux-sur-Sûre depuis la fusion de 1976), sur une petite place arborée, une statue de Jeanne d’Arc surmonte un monument aux morts des deux guerres. Cependant, il semblerait que la Jeanne d’Arc de Sibret soit antérieure à la Grande Guerre, car la statue ressemble aux modèles des années 1890 réalisés par le sculpteur Ernest Toussaint (1845-1911) pour le compte de l’Union artistique de Vaucouleurs. Cette société située dans la Meuse est spécialisée dans les objets en fonte religieux, qu’elle produit et reproduit en très grands nombres. La Jeanne d’Arc de Sibret une vierge guerrière en armure – ceinturon, épée, cotte de mailles, genouillères, etc. –, debout, tenant l’étendard de sa main gauche, tandis que la droite est posée sur son cœur. Des fleurs de lys apparaissent clairement sur le drapeau. À l’arrière de sa jambe droite est posé son casque.


Née vers 1412, celle qui allait devenir « la pucelle d’Orléans » avait déclaré avoir eu des visions de saints lui enjoignant de bouter les Anglais hors de France et d’emmener le Dauphin à Reims pour son couronnement. C’est à Vaucouleurs qu’elle demande un commandement de garnison durant la fameuse Guerre de Cent Ans. Après sa capture à Compiègne (1430), elle est mise sur le bûcher à Rouen, l’année suivante.


Après la guerre franco-prussienne de 1870 et la défaite française, de nombreuses statues de Jeanne d’Arc sont érigées dans les villes et villages français. Employé par une société spécialisée dans les articles catholiques, Ernest Toussaint (1845-1911) réalise plusieurs modèles de Jeanne d’Arc dont celles qui est offerte à Sibret paraît correspondre à la « Jeanne d’Arc au sacre », modèle n°87 de 1895. Sculpteur sur pierre, originaire de Donjeux, en Haute-Marne, Toussaint a nourri de ses productions pendant des années le petit patrimoine de la région Lorraine-Champagne. Cette Jeanne d’Arc, la seule en Wallonie avec celle de Soye, a traversé la frontière en signe d’amitié entre le département de la Meuse et la région de Sibret. Tout indique que cette « Jeanne d’Arc » a pris place sur le monument aux morts de 14-18 inauguré en 1921, mais nos recherches n’ont pas permis de savoir si la statue de l’héroïne française siégeait déjà dans le village de Sibret avant 1914. Le socle inauguré en 1921 est un granit réalisé par la société Nizet Frères de Bastogne.

 

Sources


(Adulphe-)Ernest Toussaint (1845-1911), Sculpteur à Donjeux, Langres, éditions Dominique Guéniot, Langres, 2006
http://www.e-monumen.net/index.php?option=com_monumen&monumenTask=monumenDetails&monumenId=11886&Itemid=19

rue du Centre 

6640 Sibret

carte

Paul Delforge