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Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Mémorial Étienne LENOIR

Mémorial Étienne Lenoir, réalisé par Fernand Tomasi, septembre 1985.

À l’arrière de l’église de Mussy, un solide bloc pesant 10 tonnes en grès d’Esch-sur-Alzette symbolise l’évolution et les progrès de l’automobile, de l’aviation et de la navigation. Inauguré en 1985, il prend place dans le village natal d’Étienne Lenoir (1822-1900), le célèbre inventeur du moteur à explosion. Réalisé par le sculpteur Fernand Tomasi qui a choisi lui-même la pierre dans une carrière de Tétange, au grand-duché de Luxembourg, le mémorial comporte sur son flanc droit, gravées dans la pierre, une dizaine de silhouettes d’automobiles qui reflètent l’évolution de ce moyen de locomotion. Sur la partie centrale, apparaît un moteur stylisé, avec ses bielles et ses pistons ; en bas à droite, un cercle symbolisant sans doute une roue laisse apparaître en son milieu une série de mots gravés et inscrits de manière artistique : « Étienne Lenoir / Inventeur/ 1860 / Mussy »
Le portrait de l’inventeur est, quant à lui, sculpté sur la partie supérieure.

Depuis le début du XXe siècle, diverses initiatives avaient été prises, à Paris comme à Arlon, pour commémorer l’invention d’Étienne Lenoir ; mais à Mussy-la-Ville, aucune initiative ne semblait vouloir naître, ainsi que le déplorait le mouvement Wallonie libre en 1961. Finalement, les autorités locales décidèrent d’un mémorial qui fut érigé à l’arrière de l’église. Les Mussipolitains rendaient ainsi officiellement hommage au plus célèbre des enfants du pays. 

Depuis lors, à diverses reprises, des « concentrations » se déroulent au pied du mémorial, comme celle organisée par la province de Luxembourg, en mai 2010, à l’occasion des 150 ans du dépôt du brevet n°43624 pour « un moteur à air dilaté par la combustion des gaz ». Il ne s’agissait là que l’un des nombreux brevets de ce fils de maraîcher parti à Paris pour gagner sa vie et réaliser ses rêves. Génial inventeur (notamment de la bougie d’allumage), Lenoir entre progressivement dans l’histoire des sciences et des techniques et l’on accorde de plus en plus d’attention à l’importante invention qui fut la sienne. Un musée rappelle l’activité qui fut celle de celui qui fut le premier à rouler en voiture dans Paris. C’était en 1863. 

Sources 

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Mémoires de Wallonie, Les rues de Louvain-la-Neuve racontent…, Luc COURTOIS (dir.), Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 2011, p. 261-262
Jean-Pierre MONHONVAL, Étienne Lenoir. Un moteur en héritage, Virton, Michel frères, 1985
Jean PELSENEER, dans Biographie nationale, t. XXXIII, col. 355-364
 

Mémorial Étienne Lenoir

Rue de Late
6750 Mussy-la-Ville (Musson)

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Paul Delforge

 Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Plaque Ernest MONTELLIER

Plaque commémorative Ernest MontellierSur la maison natale d’Ernest Montellier, rue Isabelle Brunelle, entre la rue roi Albert Ier et la rue du Quambeau, à Noville-les-Bois (plus précisément Sart d’Avril), une plaque commémorative a été apposée le 16 septembre 1962. Le contexte des Fêtes de Wallonie a été délibérément choisi pour honorer l’un des animateurs majeurs de la vie culturelle wallonne de Namur. Connu de tous en raison de ses passions communicatives pour la musique, le folklore, la littérature dialectale et l’histoire de son terroir, Ernest Montellier (Sart d’Avril 1894 – Namur 1993) était présent pour cet hommage tourné principalement vers le compositeur wallon, comme l’indique le texte gravé sur la plaque : 

LI COMPOSITEUR WALLON 
ERNEST MONTELLIER 
EST V’NU AU MONDE VAICI, 
EN 1894 LI 21 DI FÉVRI 

Premier violon dans l’orchestre du théâtre de Namur dès 1909, répétiteur puis chef d’orchestre du théâtre de Namur après la Grande Guerre, professeur notamment au Conservatoire de Namur et à l’Académie de musique d’Auvelais, compositeur de plus de 80 chansons, Ernest Montellier s’intéresse aussi à l’histoire de la musique. 

Ses recherches ont permis de mieux connaître les origines du Bia bouquet, composé par Nicolas Bosret avec lequel il partage la passion du wallon. Cette langue, celui qui est aussi le président de la Société Moncrabeau, la fameuse académie des Quarante Molons, il la connaît, la parle, l’écrit et la chante. 

Que l’hommage qui lui est rendu en 1962 soit rédigé en wallon n’étonne dès lors personne. Pourtant, dans l’espace public de Wallonie, cette plaque commémorative semble être la toute première sur laquelle on a recours au parler wallon pour exprimer la dédicace. Ni Édouard Remouchamps (Liège, 1913), ni Nicolas Bosret (Namur, 1928), ni le monument tournaisien à la littérature et à la chanson wallonnes (1931) n’y ont eu droit précédemment.  

L’hommage à Montellier relevait d’un Comité d’initiative de Noville-les-Bois qui avait obtenu l’étroite collaboration de l’administration communale. Lors d’une Journée des Arts, les autorités locales célèbrent à la fois Montellier et le peintre Joseph Damien par une série d’événements dont la pose des plaques commémoratives. Très remarquée était la présence des Quarante Molons au complet, des amis des Rèlîs Namurwès et de confréries folkloriques. 
 

Sources

- La Vie wallonne, IV, 1962, n°300, p. 295-297 
- Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse 
- Françoise JACQUET-LADRIER (dir.), Dictionnaire biographique namurois, Namur, Le Guetteur wallon, n° spécial 3-4, 1999, p. 181 
- Ernest Montellier (1894-1993) Le semeur de joie, Jacques TOUSSAINT (dir.), Namur, 2008 

Rue Isabelle Brunelle 11
5380 Noville-les-Bois

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Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Mémorial du général PIRON à Couvin

Les monuments d’hommage à la Brigade Piron sont nombreux, en Belgique, comme en France ou aux Pays-Bas. Ils sont une quarantaine à rappeler le rôle de la brigade dans la libération de certains lieux ou à évoquer la mémoire de ses soldats tombés au combat, évocation individuelle ou collective. Un seul monument, cependant, rend hommage individuellement au commandant de la First Belgian Brigade, Jean-Baptiste Piron et il est situé dans sa ville natale. En plus de donner son nom à la place principale de Couvin, les autorités locales y ont érigé une stèle avec un médaillon. L’ensemble a été réalisé à partir d’un médaillon qu’avait réalisé le sculpteur Victor Demanet.

Mémorial général Piron – © Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Le sculpteur Victor Demanet

Né à Givet de parents namurois, Victor Demanet (1895-1964) a grandi au confluent de la Sambre et de la Meuse, ses parents tenant un commerce d’antiquités au cœur de la ville wallonne. Appelé à leur succéder, Demanet fréquente l’académie des Beaux-Arts (1916-1919) où il est l’élève de Désiré Hubin, mais la révélation lui vient des œuvres de Constantin Meunier et surtout de la thématique sociale et ouvrière développée par le peintre/sculpteur bruxellois. Lors d’un séjour à Paris, les œuvres de Rude, Carpeaux et Rodin finissent par convaincre Demanet que sa voie est dans la sculpture. Remarqué au Salon des Artistes français de Paris, en 1923, pour son buste de Bonaparte à Arcole, Victor Demanet s’impose rapidement comme un portraitiste de talent auquel sont confiées de nombreuses commandes publiques. Comme d’autres artistes de son temps, il réalise plusieurs monuments aux victimes des deux guerres. Il est aussi l’auteur de plusieurs dizaines de médailles (dont une du général Piron), ce qui ne l’empêche pas de poursuivre une œuvre plus personnelle à l’inspiration comparable à celle de Constantin Meunier, avec de nombreux représentants du monde du travail. Installé à Bruxelles depuis 1926, il décède à Ixelles en 1964. Sans croiser la route de J.-B. Piron, l’artiste est un contemporain du militaire.

Jean-Baptiste Piron

En effet, c’est en 1896 que Jean-Baptiste Piron naît à Couvin. Entré à l’École militaire à 17 ans, il n’a pas 20 ans quand il est appelé à diriger un peloton au sein du 2e régiment de ligne en août 1914 et combat notamment sur l’Yser. L’armée sera sa destinée. Nommé capitaine en 1933, il fait partie de l'état-major du 5e corps d'armée quand commence la Drôle de Guerre. 

À l’issue de la Campagne des 18 Jours et de la capitulation décidée par Léopold III, J.-B. Piron refuse de se constituer prisonnier et, après plusieurs mois de pérégrination, parvient à atteindre l’Écosse (février 1942). En Grande-Bretagne, après la disparition tragique de Georges Truffaut qui avait tenté de constituer les bataillons d’une armée belge opérationnelle, Piron se voit finalement confier, par Hubert Pierlot, le commandement d’un noyau de combattants capables d’aider les forces alliées. 

À la tête de la First Belgian Brigade, le colonel arrive en Normandie en août 1944 et participe à la campagne de libération, avant d’être propulsé vers l’avant du front : le nord de la France est dégagé plus rapidement que prévu et la Brigade Piron accompagne les troupes britanniques dans leur mouvement de libération, essentiellement du côté des provinces flamandes ; les hommes de la Brigade Piron seront encore de la Bataille des Ardennes et livreront de durs combats aux Pays-Bas (fin 1944 - début 1945). 

Général-Major (décembre 1945), Piron reste à la tête des troupes belges qui occupent une partie de l’Allemagne aux côtés des Alliés (décembre 1946 - décembre 1947), avant d’être nommé Lieutenant-Général (décembre 1947), puis chef de l'état-major de la Force terrestre belge et aide de camp du roi Baudouin (janvier 1951). En 1954, contre son gré, il est placé à la présidence d’un Conseil supérieur des Forces armées. Sa carrière militaire s’achève en juillet 1957 et il consacre ses loisirs à écrire ses mémoires. Il accepte aussi de participer aux hommages rendus à sa brigade, ou à sa personne comme c’est le cas à Couvin, en septembre 1971.

Ce jour-là, les autorités locales dévoilent en effet l’imposante stèle en marbre rouge sur laquelle est incrusté le médaillon en bronze où Demanet avait représenté le profil gauche de J.-B. Piron, le regard autoritaire, fixant l’horizon. Sous le médaillon, apparaissent trois carrés aux couleurs l’un des armes de la Brigade Piron, l’autre de la Belgique, et le troisième de Couvin. Alors que figurent côte à côte, tout en bas, les drapeaux de l’Angleterre, de la France, des Pays-Bas et des États-Unis, une large plaque en bronze, gravée, développe la longue dédicace :

LA VILLE DE COUVIN ET LES ANCIENS
COMBATTANTS DE LA BRIGADE PIRON
EN HOMMAGE
AU LIEUTENANT GENERAL
J.PIRON - D.S.O.
NATIF DE CETTE VILLE QUI EN 1944
A LA TÊTE DE LA FIRST BELGIAN BRIGADE
PARTICIPA AU DEBARQUEMENT EN
NORMANDIE ET CONTRIBUA A LA LIBERATION
DE LA FRANCE, LA BELGIQUE ET LA HOLLANDE

René DIDISHEIM, Au-delà de la Légende : L'histoire de la brigade Piron, Liège, Pim Services, 1946.
Henri BERNARD, dans Nouvelle Biographie nationale, t. I, p. 290-291.
Jean-Baptiste PIRON, Souvenirs 1913-1945, Bruxelles, 1969.
G. WEBER, Des hommes oubliés, Histoire et histoires de la brigade Piron, Bruxelles, 1978.
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 397
Jacques TOUSSAINT, Victor Demanet dans Arts plastiques dans la province de Namur 1800-1945, Bruxelles, Crédit communal, 1993, p. 147.
http://www.brigade-piron.be/monuments_fr.html (s.v. mai 2014)
Informations communiquées par Jean Henrard (juin 2014)

 

Place du général Piron/
rue du Bercet
5660 Couvin

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Monument Jean-Baptiste SCORIEL

Monument  Jean-Baptiste Scoriel, 18 septembre 1954.
Réalisé par Victor Demanet.

Pour découvrir le monument Scoriel, à Tamines, il convient, en venant de Fosses, de bifurquer à droite, à hauteur des feux qui précèdent l’accès au pont sur la Sambre. En prenant la direction de l’ancien abattoir, apparaît non loin de l'écluse de Moignelée, en bord de Sambre, un médaillon incrusté sur une stèle en marbre de Bioul qui rend hommage à 

Jean-B SCORIEL
PEINTRE DE LA SAMBRE

Certaines lettres de la dédicace se sont décrochées avec le temps et ont été repeintes de manière à identifier ce monument solitaire, loin du centre de Tamines, implanté à quelques mètres du chemin de halage, dans un endroit particulièrement calme, en d’autres termes dans un environnement que recherchait particulièrement le peintre honoré.

« Maître de la Sambre », mais aussi « maître de la neige », Jean-Baptiste Schorielle est l’aîné d’une famille de cinq enfants dont le père, venu de Flandre, est mineur au Roton, à Farciennes. Passionné par le dessin et la peinture dès son plus jeune âge, J-B. Schorielle (Lambusart 1883-Tamines 1956) se retrouve orphelin dès 1895 et contraint de subvenir aux besoins vitaux. Dès lors, il travaille en usine (briqueterie et fonderie), mais s’efforce néanmoins de suivre les cours de l’École des Beaux-Arts de Namur, dont Théodore Baron est le directeur. À Tamines où sa famille s’était établie depuis 1886, l’artiste s’imprègne de son environnement immédiat : la Sambre et la Biesme s’imposent comme ses sujets de prédilection, le peintre paysagiste s’attachant à la campagne comme à l’habitat ouvrier. Signant J-B. Scoriel, il s’inscrit dans le courant de l’École d'Émile Claus. Mobilisé durant la Grande Guerre, il est blessé sur le front. En convalescence à Dieppe, il y reste quelque temps, y poursuit sa production picturale, avant de revenir à Tamines, trop attiré par le cadre sambrien. En 1922, il réalise une toile représentant le massacre du 22 août 1914.

À partir des années 1920, s’ajoute à ses sujets de peinture une prédilection pour les paysages enneigés. Les « Neiges de Scoriel » fascinent. Elles lui valent son second surnom. « Maître de la Sambre » et « maître de la neige », Scoriel est en recherche permanente du calme et d’une lumière « du Nord ». L’exode forcé de mai 1940 place Scoriel en face de la lumière du Sud (il est réfugié dans le Tarn et Garonne). Il ne s’agira que d’une parenthèse dans l’œuvre de cet artiste dont le style n’a cessé d’évoluer et qui reste difficile à catégoriser, même si d’aucuns ont identifié cinq périodes dans son œuvre : la période réaliste, sous l’influence de son maître Baron, la période luministe, la période dieppoise, la notoriété et l’après-guerre. Plusieurs jeunes artistes trouvèrent des conseils auprès du maître, dont son fils Jean-Marie devenu peintre lui aussi.

Monument  Jean-Baptiste Scoriel – © Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

L’amitié de Scoriel avec le sculpteur Victor Demanet désignait naturellement celui-ci comme exécuteur du médaillon destiné au monument du peintre. Né à Givet de parents namurois, Victor Demanet (1895-1964) a grandi au confluent de la Sambre et de la Meuse, où ses parents tenaient un commerce d’antiquités. Appelé à leur succéder, Demanet f

réquente l’Académie des Beaux-Arts (1916-1919) où il est l’élève de Désiré Hubin, mais la révélation lui vient des œuvres de Constantin Meunier et surtout de la thématique sociale et ouvrière développée par le peintre/sculpteur bruxellois. Lors d’un séjour à Paris, les œuvres de Rude, Carpeaux et Rodin finissent par convaincre Demanet que sa voie est dans la sculpture. Remarqué au Salon des Artistes français de Paris, en 1923, pour son buste de Bonaparte à Arcole, Victor Demanet s’impose rapidement comme un portraitiste de talent auquel sont confiées de nombreuses commandes publiques. Comme d’autres artistes de son temps, il réalise plusieurs monuments aux victimes des deux guerres. Il est aussi l’auteur de plusieurs dizaines de médailles, ce qui ne l’empêche pas de poursuivre une œuvre plus personnelle à l’inspiration comparable à celle de Constantin Meunier, avec de nombreux représentants du monde du travail. C’est par conséquent un artiste en pleine maturité de son art qui signe le médaillon Scoriel.

En 1954, une rétrospective des œuvres du « peintre de Tamines » se déroule dans sa ville natale qui honore ainsi l’enfant du pays et, à cette occasion, inaugure, en sa présence, le monument du bord de Sambre. La pierre est orientée de telle manière que le portrait du peintre, dans le médaillon, semble continuer à observer le paysage pour ses toiles d’éternité. Des témoignages locaux rapportent que l’emplacement du monument était l’un des endroits préférés du peintre qui y posait une toile de petite taille, avant de rentrer à son atelier, où il donnait libre cours à son talent sur une toile plus grande.

 

Informations communiquées par M. Bernard Janssens (mai 2014)
http://www.sambreville.be/culture-et-loisirs/tourisme/syndicat-d-initiative/patrimoine/tamines (s.v. juillet 2013)
http://www.galeriedupistoletdor.com/gdpo/Scoriel.html (s.v. mai 2014)
Edmond DOUMONT, Jean-Baptiste Scoriel, Tamines 1954, p. 7
Jean FICHEFET, Nouvelle Histoire de Tamines, Gembloux, J. Duculot, 1963
Frédéric MAC DONOUGH Abécédaire des peintres du Pays de Charleroi, Bruxelles, Labor, 2006.
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 417

Rue de l'abbaye, en bord de Sambre
5060 Sambreville

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Monument Arthur WAUTERS

Monument Arthur Wauters, réalisé par Fernand Hubin et, pour le buste, par Louis Dupont, 13 octobre 1963.

Waremme dispose de deux monuments Wauters ; l’un, rue de l’École moyenne, est dédié à Joseph (1875-1929) et remonte à 1931 ; l’autre, place Ernest Rongvaux, à deux pas de la gare, commémore le souvenir d’Arthur (1890-1960) et son inauguration remonte à l’automne 1963.

Licencié en Sciences politiques et sociales et docteur en Sciences économiques de l’Université libre de Bruxelles, volontaire de guerre, Arthur Wauters est tout autant engagé dans le mouvement socialiste que son frère Joseph, son aîné de quinze ans ; quand ce dernier devient ministre du Travail et de l’Industrie (1918-1921), Arthur le rejoint comme chef de Cabinet. Attiré par l’action internationale, auteur de plusieurs rapports sur l’URSS, ainsi que sur la situation au Congo, le fondateur de la maison d’édition L’Églantine (1922) apportera, sa vie durant, des témoignages originaux sur la société russe, voire sur les pays de l’Est et la Chine communiste. Professeur à l’Université libre de Bruxelles (1933), journaliste, il succède à son frère Joseph à la direction du Peuple (1929-1937), ainsi que comme député (1929), avant d’être coopté comme sénateur (1932-1936), puis de revenir à la Chambre (1936-1944), en tant que représentant de l’arrondissement de Huy-Waremme. Lui aussi ministre (1937-1939, 1939, 1939-1940, 1946), il est parmi les tout premiers parlementaires à rejoindre Londres pour y poursuivre la guerre contre l’Allemagne nazie. Nommé à la tête des services de l’Information au ministère des Affaires étrangères, après la Libération, il renonce à son mandat de député, est envoyé comme ministre extraordinaire en Pologne, avant d’être nommé ambassadeur plénipotentiaire de Belgique à Moscou (1952-1955).

Au moment de l’annonce du décès d’Arthur Wauters, le conseil communal de Waremme unanime s’engage à ériger rapidement un monument en son honneur. En 1963, le CLéO de Waremme présente un projet qui est validé par les autorités locales, dont son bourgmestre Edmond Leburton. L’architecte Fernand Hubin est chargé d’exécuter l’ensemble au centre duquel vient prendre place un buste dû au ciseau de Louis Dupont. L’inauguration se déroule en présence de nombreuses personnalités politiques locales, dont le ministre et bourgmestre Leburton, ainsi que les architecte et sculpteur.

Au moment de la préparation du monument, Fernand Hubin (1919-1989) n’est pas encore totalement absorbé par la politique ; certes, comme son père, il milite dans les rangs du Parti socialiste et, depuis 1954, il siège au Conseil provincial de Liège et, depuis 1958, au conseil communal de Huy, mais il est avant tout architecte. Diplômé de l’Académie des Beaux-Arts de Liège, section Urbanisme (1945), le Hutois associé à Jean Dehasque dans leur bureau d’architecture (1946-1984) réalisera notamment l’Hôpital du Bois de l’Abbaye à Seraing. Par la suite, c’est-à-dire à la fin des années 1960, il devient tour à tour échevin puis bourgmestre de la ville de Huy (1979-1982), député (1971-1978) puis sénateur (1979-1985) et membre du Conseil régional wallon (1980-1985) à ses débuts. Mais c’est l’architecte qui réalise les plans du monument Arthur Wauters et ses aménagements, en 1963, et le buste est exécuté, quant à lui, par un sculpteur waremmien à la réputation solidement établie.

Monument Arthur Wauters (Waremme)

Natif de Waremme, élève d’Adrien de Witte, Louis Dupont (1896-1967) a toute sa carrière derrière lui quand lui est confié le buste d’Arthur Wauters. Dans les années 1920, il avait déjà signé le bas-relief Hubert Stiernet (1925), le buste Jean Varin (1928), le médaillon Georges Antoine (1929) et surtout les bustes Ysaÿe (1936) et César Thompson (1939). Boursier du gouvernement (1921), Prix Trianon (1928), il a collaboré avec Adelin Salle et Robert Massart sur l’important chantier des bas-reliefs du Lycée de Waha (1937), il a signé le Métallurgiste pour le monument Albert Ier à l’île Monsin (1939) et au-delà d’autres bas-reliefs, il a réalisé le monument national de la Résistance (1955), ainsi que des allégories sur les bâtiments de la faculté de Philosophie et Lettres de l’Université de Liège (1958). Dessinateur, médailliste et statuaire, professeur de sculpture à l’Académie de Liège (1949-1967), Louis Dupont avait reçu en 1954 le Prix de Sculpture décerné par la province de Liège pour l’ensemble d’une œuvre à laquelle s’ajoutait, en 1963, le buste d’Arthur Wauters, inauguré dans sa ville natale.

 

Lionel JONKERS, 1914-2014. Cent ans de mayorat à Waremme, s.l., s.d. [2014], p. 128-129
Hubert LABY, Joseph Wauters, dans Grands hommes de Hesbaye, Remicourt, éd. du Musée de la Hesbaye, 1997, p. 83-86
Paul VAN MOLLE, Le Parlement belge 1894-1972, Ledeberg-Gand, Erasme, 1972, p. 380-381
Paul DELFORGE, Encyclopédie du Mouvement wallon, Parlementaires et ministres de la Wallonie (1974-2009), t. IV, Namur, Institut Destrée, 2010
Louis Dupont : exposition du 29 avril au 21 mai 1983, Liège, Province de Liège, Service des affaires culturelles, 1983
Salon de la libération : musée des beaux-arts, du 1er juin au 15 juillet 1946... (hommage à la résistance liégeoise) : la peinture française, de David à Picasso, art wallon contemporain, le peintre Jacques Ochs, les sculpteurs Louis Dupont, Robert Massart, Adelin Salle, Liège, imprimerie Bénard, 1946
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 532-533
Musée en plein air du Sart Tilman, Art&Fact asbl, Parcours d’art public. Ville de Liège, Liège, échevinat de l’Environnement et Musée en plein air du Sart Tilman, 1996
La Vie wallonne, janvier 1930, CXIII, p. 165-173

Place Ernest Rongvaux 
4300 Waremme

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Monument Adrien de PREMOREL

Monument à la mémoire d’Adrien de Prémorel, réalisé à l’initiative des autorités locales, 1982.


Dans la rue de la Pépinette, à Nassogne, sur le côté droit de la route en s’éloignant du centre du village, un peu plus bas que la fontaine de Pépin, s’élève une pierre commémorative rappelant que


Adrien de PREMOREL
vécut dans cette propriété
de 1919 à 1935.
Poète, écrivain paysagiste
et animalier
nul mieux que lui
n’a chanté
la beauté sauvage
de nos forêts
et de leurs hôtes.


Sur le côté gauche de la plaque où est gravée cette inscription, le portrait d’Adrien de Prémorel, légèrement de profil, le représente en cravate, avec un air décidé, voire sévère. La plaque qui mentionne aussi les dates de naissance et décès (1889-1968) est apposée sur la partie supérieure d’une stèle en granit, polie sur la surface visible, et laissée brute là où la végétation s’est résolument installée.

Monument Adrien de Prémorel (Nassogne)

S’il naît à Bruxelles en 1889, Adrien de Prémorel passe l’essentiel de son temps en Gaume, en Ardenne, puis en Famenne. Depuis le milieu du XIXe siècle, sa famille possède le petit château de Bleid et c’est dans l’atmosphère des forêts et des châtelains-chasseurs que se déroule sa jeunesse. Après des études secondaires, Adrien de Prémorel bénéficie d’un niveau de vie qui lui permet de se contenter de ses rentes, tout en se consacrant à la chasse et à l’écriture. Par son mariage avec une fille d’Hoffschmidt, il devient le propriétaire de 35 ha de terres et du moulin de Nassogne. Les réceptions qui y sont alors organisées sont grandioses, mais elles épuisent les ressources familiales. En 1933, de Prémorel est forcé de vendre ses propriétés à Nassogne, là même où il a composé son premier ouvrage.
Après diverses publications où déjà se mêlent ses passions pour la chasse, la pêche, les plantes et les animaux, il publie en effet en 1931 un livre qui fait date : Sous le signe du martin-pêcheur, préfacé par Thomas Braun. Cet ouvrage de référence sera suivi, en 1935, par Cinq histoires de bêtes pour mes cinq fils et, en 1959, par sept récits de Nouvelles histoires de bêtes qui constituent les trois ouvrages majeurs de l’écrivain de la nature. Contraint et forcé de quitter Nassogne, de Prémorel s’installe dans son appartement bruxellois ; il le quitte cependant fréquemment pour s’immerger dans « son » Luxembourg, où il continue à partager son temps en parties de chasse ou en réunions de l’Académie luxembourgeoise, dont il est membre depuis 1934 et qu’il préside de 1966 à 1968. Promoteur de la cérémonie de la « Bénédiction de la Forêt » à Saint-Hubert, il est devenu, après la Libération, le rédacteur en chef de la revue Chasse et pêche où il signe la quasi-totalité des articles. Il tient aussi une chronique « nature » dans les pages du journal Le Soir. Cet exercice régulier d’écriture lui donne matières à d’autres livres : Au beau domaine des bêtes (1956), Dans la forêt vivante (1959), Le vrai visage des bêtes (1962).

 

 


Frédéric KIESEL, dans Nouvelle Biographie nationale, t. II, p. 121-123
La Vie wallonne, II, 1949, n°246, p. 118
La Vie wallonne, IV, 1962, n°300, p. 305-306
La Vie wallonne, IV, 1982, n°380, p. 273
Georges JACQUEMIN, Adrien de Prémorel, Dossiers L, Arlon, Service du livre luxembourgeois, 4e fascicule du n°21, 27 p.
Jean-Pierre LAMBOT, L’Ardenne, Liège, Mardaga, 1987, p. 18
http://www.tvlux.be/video/nassogne-adrien-de-premorel_8484.html (s.v. mars 2015)
Informations communiquées grâce au Syndicat d’Initiative de Virton et à madame Françoise Fincœur.
Informations communiquées par Jean-Luc Duvivier de Fortemps

Rue de la Pépinette

6950 Nassogne

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Paul Delforge

IRPA

Buste Auguste DONNAY

Buste à la mémoire d’Auguste Donnay, réalisé par Georges Petit, 30 juin 1956 ( ?).

Ce n’est pas la première fois qu’il est demandé à Georges Petit de réaliser un portrait d’Auguste Donnay. En 1927, il avait signé un bas-relief au bois des Manants à Esneux. Trente ans plus tard, le sculpteur réalise un buste destiné au parc de la Boverie à Liège. Au lendemain de l’Exposition universelle de 1905, ce parc est progressivement devenu le lieu privilégié pour accueillir des monuments dédiés principalement à des artistes liégeois. Dès 1907, a été inauguré un buste dédié au peintre Léon Philippet ; en juillet 1923, Gilles Demarteau est honoré à son tour, avant que ne les rejoignent, sans être exhaustif, Louis Boumal (1925), Jean Varin (1928), Jean-Barthélémy Renoz (1930), Armand Rassenfosse (1935), Adrien de Witte (1938), Georges Antoine (1938) et Richard Heintz (1956). Une galerie des bustes prend ainsi place dans la pergola du parc de la Boverie ; elle permet au public de croiser une palette d’artistes de renom, du moins jusqu’au début du XXIe siècle. On assiste en effet alors à une série de disparitions et d’actes de vandalisme (vols, dégradation, « lancer de buste » dans la Meuse…) contraignant les autorités liégeoises à placer à l’abri les bustes restants. Si quelques monuments restent intacts, d’autres ont entièrement disparu, comme en témoignent certains socles nus dont celui d’Auguste Donnay. Enlevé de l’espace public de Wallonie, son buste a trouvé refuge dans les réserves du BAL.

Surnommé « le maître de Méry », professeur à l’Académie de Liège nommé en 1901, Auguste Donnay (1862-1921) avait choisi de résider à la campagne pour profiter en permanence du ravissement de la vallée de l’Ourthe. Cherchant l’endroit idéal à Méry même, il changea d’adresse à quatre reprises, trouvant finalement le nid idéal dans un repli du vallon, dans une demeure discrète qui transformait l’artiste en ermite ; c’est là qu’il vécut jusqu’en 1921. Là, Donnay disposait du paysage recherché, avec ses multiples variations de couleurs. Membre de la section liégeoise des Amis de l’Art wallon (1912), Donnay avait marqué le Congrès wallon de 1905 par un rapport où il apporta des arguments convaincants en faveur de l’existence d’un sentiment wallon en peinture.

Ami d’Auguste Donnay, Georges Petit (1879-1958) était né à Lille, de parents liégeois. Il grandit à Liège et reçoit une formation artistique à l’Académie des Beaux-Arts où il est l’élève de Prosper Drion, Jean Herman et Frans Vermeylen. Il deviendra plus tard professeur de cette Académie. « Depuis 1901, date de ses premières œuvres, jusqu’à la guerre de 1940, Georges Petit a occupé avec autorité la scène artistique liégeoise », affirme Jacques Stiennon qui explique qu’il devait sa position aux multiples commandes officielles reçues autant qu’à sa maîtrise précoce de son art. Sa sensibilité et sa capacité à transformer une anecdote en symbole universel ont influencé durablement ses élèves, parmi lesquels Oscar et Jules Berchmans, Robert Massart, Louis Dupont et Adelin Salle. 

D’abord attiré par les portraits, Petit a livré plusieurs bustes de grande facture (ainsi par exemple un buste d’Auguste Donnay conservé par le Musée de l’Art wallon), tout en s’intéressant à la condition humaine. Marqué par la Grande Guerre, l’artiste y puise une force qui se retrouve dans ses réalisations des années 1917 à 1927. C’est aussi à cette époque (1919 précisément) qu’il réalise la médaille commémorant la remise par la France de la Croix de la Légion d’honneur à la ville de Liège. Ensuite, comme épuisé par tant de souffrances, il choisit la peinture de chevalet et devient plus léger, sans tomber dans la facilité. Les visages humains tendent à disparaître et tant les paysages que les traditions wallonnes l’inspirent : en peinture, comme dans ses médailles (qui sont très nombreuses et d’excellente facture), voire dans les quelques sculptures qu’il exécute encore, comme la Tradition commandée par le Musée de la Vie wallonne. Le buste qu’il consacre à Auguste Donnay et qui vient orner le parc de la Boverie semble avoir été réalisé entre 1901 et 1910 ; il semble aussi avoir été installé au parc de la Boverie vers 1956. 

Sources 

La Vie wallonne, septembre 1927, LXXXV, p. 25-28
La Vie wallonne, octobre 1927, LXXXVI, p. 42-53
La Vie wallonne, III-IV, 1970, n°331-332, p. 234 + ill
Liliane SABATINI, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2000, t. I, p. 507-508
Jacques PARISSE, Auguste Donnay, un visage de la terre wallonne, Bruxelles, 1991
Maurice KUNEL, dans Biographie nationale, 1967-1968, t. 34, col. 244-247
Paul DELFORGE, Société des Amis de l’Art wallon, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. III, p. 1484-1486
Jacques STIENNON (introduction), Georges Petit, catalogue de l’exposition organisée à Liège du 9 janvier au 2 février 1980, Verviers, 1980
Charles BURY, Les Statues liégeoises, dans Si Liège m’était conté, n°35, printemps 1970, p. 15
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 282

 

Buste Auguste Donnay (Liège)

Parc de la Boverie 
4020 Liège

carte

Paul Delforge

J. Tordoir

Monument Goblet D'ALVIELLA

Sur la place communale de Court-Saint-Étienne, un monument « de style éclectique » rend hommage à Albert Goblet, comte d’Alviella, principalement en raison du rôle qu’il joua au moment de la révolution de 1830, puis en tant que ministre de la Guerre aux tout premiers temps de la Belgique. Imposant avec ses 4 mètres de haut, le monument a fait l'objet d'une restauration en 2010. Avec son buste en bronze, inauguré en 1887, et œuvre de Jef Lambeaux, il est situé juste en face de la rue Sambrée, dans le tournant de la longue place communale, à quelques dizaines de mètres du monument aux morts de Court-Saint-Étienne, localité dont l’histoire récente est marquée par la présence et l’activité de la famille Goblet d’Alviella.

Pourtant, Albert Goblet est d’origine picarde (Tournai 1790 – Bruxelles 1873). Fils d’un magistrat éminent, Albert Goblet avait lui-même reçu une solide formation de juriste dans les meilleures écoles parisiennes et militaires de son temps. Officier, il se distingue durant les dernières batailles livrées par les troupes napoléoniennes et c’est avec la Légion d’honneur qu’il entame, en 1815, une carrière dans la nouvelle armée des Pays-Bas. Mêlé à la bataille de Waterloo, il s’y distingue à nouveau, mais dans le camp des alliés cette fois. Chargé de la reconstruction de places fortes, il est surpris par les événements de 1830 alors qu’il est affecté à Menin. Partagé entre sa fidélité à Guillaume d’Orange et l’invitation à soutenir les révolutionnaires, il gagne Bruxelles début octobre 1830 et y est nommé, par le gouvernement provisoire, colonel et directeur du génie de l’armée belge en formation. Son ascension est fulgurante : début 1831, il est ministre de la Guerre sous la régence. Chef d’état-major durant la campagne des 10 jours (août 1831), il est ensuite désigné par Léopold Ier comme ministre plénipotentiaire à la conférence de Londres, et comme négociateur du système défensif de la Belgique. 

Devenu ministre des Affaires étrangères (1832-1833), il parvient à obtenir l’évacuation des forces hollandaises qui occupaient encore la citadelle d’Anvers et à faire accepter – à l’exception des Pays-Bas – une convention internationale garantissant la Belgique dans ses possessions de 1830. Mais celui qui était le représentant de l’arrondissement de Tournai depuis 1831 ne convainc pas les électeurs censitaires de lui apporter leur soutien (1832) et c’est dans l’arrondissement de Bruxelles que, sous les couleurs libérales, il retrouve un mandat de député (1833-1834, 1836-1837). Pressenti – sans succès – pour représenter la Belgique à Berlin, il est nommé lieutenant général en 1835. Conseiller particulier de la jeune reine du Portugal (1837-1838), il reçoit à Lisbonne le titre de comte d’Alviella, nom d’un des domaines appartenant à la maison du duc de Bragance. Confirmé en Belgique et rendu transmissible, ce titre sera désormais accolé à son nom de famille (1838). À nouveau ministre des Affaires étrangères (1843-1845), il s’est réconcilié avec les électeurs de Tournai dont il redevient le député (1843-1847). Mais c’est avec le roi qu’il est désormais en désaccord : devenu « inspecteur des fortifications et du corps du génie », il ne partage pas le point de vue de Léopold Ier sur le système militaire du pays. Admis à la retraite de l’armée (1854), il ne reste pas inactif : il conquiert encore les suffrages des libéraux bruxellois (1854-1859). Le mariage de son fils avec Coralie d’Auxy dont la famille possède le château de Court-Saint-Étienne amène la famille Goblet d’Alviella à prendre pied en Brabant wallon ; le général se porte d’ailleurs acquéreur des forges locales (1858), dont il confie la direction à son fils ; par la suite, cette entreprise modernisée deviendra l’usine Henricot. Enfin, il consacre les dernières années de sa vie à l’écriture, racontant pour la postérité les événements qu’il avait vécus et façonnés à l’échelle européenne, en 1831 et 1832. Et finalement, ce n’est ni à Tournai ni à Bruxelles que Goblet d’Alviella fait l’objet d’un monument, mais à Court-Saint-Étienne, sur ses terres d’adoption. 

Sur le modèle d’un buste en marbre blanc déjà réalisé par Jef Lambeaux pour la salle de lecture de la Chambre des Représentants à Bruxelles, une reproduction en bronze fait l’objet d’une installation particulière : le piédestal comprend à sa base une série de blocs de pierre bleue à bossage ; vient ensuite un niveau intermédiaire où s’inscrit la dédicace :

GENERAL COMTE GOBLET D’ALVIELLA
INSPECTEUR GENERAL DU GENIE
MINISTRE DE LA GUERRE ET DES AFFAIRES ETRANGERES
MINISTRE PLENIPOTENTIAIRE MINISTRE D’ETAT
1790-1873

Enfin, apparaît le buste posé sur un support, le tout s’inscrivant dans une niche creusée au milieu d’une stèle pyramidale, tandis que les armoiries familiales sont gravées dans la partie supérieure. Inauguré en 1887, à Court-Saint-Étienne, ce monument est une initiative du petit-fils d’Albert Goblet d’Alviella, en l’occurrence Eugène (1846-1925), lui-même parlementaire de la même famille libérale que son ancêtre (député de 1878 à 1884, puis sénateur de 1892 à 1921 avec des interruptions). Sur le buste, le sculpteur n’a pas omis de représenter le plus grand nombre possible des décorations auxquelles son sujet avait eu droit.

Monument Goblet d’Alviella

Inscrit à l’Académie d’Anvers dans les années 1860, Jef Lambeaux (Anvers 1852 – Bruxelles 1908) s’est orienté rapidement vers la sculpture et a fréquenté l’atelier de Joseph Geefs dans la métropole anversoise. Dès le début des années 1870, il expose ses œuvres et s’il échoue finalement à la 2e place du Prix de Rome 1872, il rencontre rapidement le succès par des œuvres très personnelles, s’inspirant souvent de scènes de la vie quotidienne. Les premiers bustes résultant de commandes officielles lui ouvrent de nouvelles portes, même si son séjour parisien s’avère désastreux (1879-1880). Grâce à des subsides de l’État et de la ville d’Anvers, le voyage en Italie lui est permis ; son style s’en trouve transformé et sa « Fontaine de Brabo » devient sa première grande œuvre de référence (1883). A partir des années 1880, le public et les critiques acclament Lambeaux qui, parmi d’autres commandes, reproduit alors le buste de Goblet d’Alviella. Après l’œuvre du Brabant wallon, Lambeaux est d’abord occupé à la reproduction en grand du Triomphe de la Lumière sur base de la maquette laissée par Wiertz. Ensuite, il se consacre quasi exclusivement à la réalisation d’un relief monumental sur le thème de l’humanité qui fera largement controverse et qui constituera son chef-d’œuvre. Au tournant des deux siècles, une version en marbre commandée par l’État est installée dans un pavillon du Cinquantenaire, tandis que l’artiste décline sous toutes les formes des versions partielles de son relief connu sous le nom Passions humaines. Artiste prolifique, Lambeaux signe d’autres réalisations sur le thème des lutteurs, des animaux, etc., principalement en Flandre et à Bruxelles. Son Faune mordu, présenté lors de l’Exposition universelle de Liège en 1905, provoque une polémique féroce ; la ville achètera l’œuvre pour l’exposer au parc de la Boverie. Hormis dans le parc de Mariemont, on chercherait cependant en vain d’autres Lambeaux dans l’espace public wallon.

 

Th. JUSTE, Albert Goblet, dans Biographie nationale, t. 7, col. 822-838
http://fr.wikipedia.org/wiki/Monument_au_comte_Goblet_d%27Alviella 
Joseph TORDOIR, Des libéraux de pierre et de bronze. 60 monuments érigés à Bruxelles et en Wallonie, Bruxelles, Centre Jean Gol, 2014, p. 35-37
Jean-Luc DE PAEPE, Christiane RAINDORF-GÉRARD (dir.), Le Parlement belge 1831-1894. Données biographiques, Bruxelles, 1996, p. 323
Hugo LETTENS, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 477-483
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 16

Place communale
1490 Court-Saint-Étienne

carte

Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Plaque Georges ISTA

Plaque commémorative Georges Ista, réalisée à l’initiative des amis de l’écrivain, date inconnue.


Se confondant quasiment avec les matériaux utilisés pour réaliser la façade du rez-de-chaussée de la maison sise au 25 de la rue du Pâquier, dans le quartier d’Outremeuse, à Liège, une plaque commémorative est dédiée à Georges Ista. Gravée dans la pierre, avec un ornement floral discret sur le bord supérieur, la mention précise :


ICI A ŒUVRE
GEORGES ISTA
ECRIVAIN WALLON
1874-1939


Artiste touche-à-tout avec un égal talent, Georges Ista a animé la vie culturelle wallonne sur les scènes liégeoises durant les années précédant la Grande Guerre. 

Amoureux de la langue française, défenseur de la langue wallonne, pionnier de la bande dessinée, dessinateur, aquafortiste, peintre, graveur sur armes, Ista a hérité de ses ancêtres tapissiers-garnisseurs d’une grande sensibilité artistique, à laquelle il ajoute un grand souci d’exactitude et un esprit certain de fantaisie. 

Entre 1905 et 1912, il écrit et fait jouer huit comédies qui sont autant d’études de mœurs, de portraits ciselés de « types locaux ». 

Celui qui fait alors les beaux jours du Pavillon de Flore et du « nouveau » théâtre communal wallon séjourne dans la maison du quartier d’Outremeuse où est apposée la plaque commémorative. 

C’est aussi là qu’il rédige les chroniques qu’il destine à la presse liégeoise (Journal de Liège, de 1906-1912). 

Tout en restant en contact régulier avec ses amis wallons, Ista prend cependant la route de Paris, où il s’établit à partir de 1909 et où il parvient à vivre de sa plume. Pendant trente ans, il fréquente avec bonheur les milieux artistiques parisiens. Celui qui accueillit Georges Simenon lorsque le jeune Liégeois arriva à Paris a aussi donné son nom à une place de sa ville natale.

Sources

Paul DELFORGE, Georges Ista, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. II, p. 854-855
Frédéric PAQUES, http://reflexions.ulg.ac.be/cms/c_40738/la-bd-belge-des-premiers-temps?part=4 (s.v. septembre 2014)
Daniel DROIXHE, La Vie wallonne, IV, 1975, n°352, p. 204-207
Maurice WILMOTTE, Mes Mémoires, Bruxelles, 1919, p. 120 et ssv.

 

Plaque Georges Ista (Liège)

 
 

 

Rue du Pâquier 25
4020 Liège

carte

Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Monument Amand MAIRAUX

Statue à la mémoire d’Amand Mairaux, réalisée par Victor Rousseau, 30 août 1890.
 
Considéré comme le fondateur de La Louvière, Amand Mairiaux (1817-1869) a été statufié dans l’espace public dès la fin du XIXe siècle. Dans ce siècle particulièrement dynamique et prospère que connaît la Wallonie, la petite commune de Saint-Vaast n’échappe pas au phénomène de transformation qu’impose le développement des industries et des moyens de communication. Située à proximité du canal Charleroi-Bruxelles et de la ligne ferroviaire Mons-Manage, Saint-Vaast accueille tant de nouveaux ateliers que sa population explose. Ainsi, en vingt ans, ils sont six fois plus nombreux à s’être installés dans le petit hameau de La Louvière qui fait partie de la localité dirigée, depuis 1854, par Amand Mairaux. Et dans cette localité, il est très tôt question de séparation administrative.

Pour faire face à l’afflux d’habitants et à ses conséquences, le bourgmestre a élaboré avec son collège un projet visant à développer le quartier jusqu’alors négligé de La Louvière. Par son mariage avec une fille de Nicolas Thiriar, Mairaux y possède des biens fonciers. Ce conflit d’intérêt, les opposants au déplacement du centre de gravité de Saint-Vaast vers La Louvière le dénoncent. Dans les quartiers de Baume et du vieux Saint-Vaast, on considère que les investissements déjà réalisés (une église a été construite et deux classes d’école ouvertes) suffisent et l’on s’oppose vivement au plan d’agrandissement défendu par Amand Mairaux et ses partisans. Entre les partisans du maintien de l’unité de Saint-Vaast et ceux qui prônent l’autonomie et la séparation administrative, l’opposition locale est particulièrement vive. C’est le parti de Mairaux qui s’impose quand un arrêté royal valide en 1866 le plan d’aménagement de La Louvière : de nouvelles rues sont tracées, de nouvelles infrastructures sont construites (église, école, maison communale) et une structuration de l’espace est imposée.

Quant à la scission de l’entité communale, elle est débattue et approuvée par le Conseil provincial du Hainaut en 1867, puis par le Sénat le 10 avril 1869. Dès le mois d’août, La Louvière dispose du statut de commune autonome. Amand Mairaux n’est cependant plus là pour assister à l’événement. Homme d’affaires, défenseur des idées et du programme du Parti libéral, il était décédé en février 1869.

C’est donc à « son bienfaiteur » que La Louvière rend hommage en août 1890, en inaugurant une imposante statue réalisée par le sculpteur Victor Rousseau (1865-1954). L’artiste est alors tout jeune. Il n’est pas encore professeur de sculpture à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles (1901-1919), ni directeur de la dite Académie (1919-1922, 1931-1935). À ce moment, il n’a pas encore reçu le Grand Prix de Rome 1911, ni le Grand Prix des arts plastiques (1931), ni celui des amis du Hainaut 1935. Il n’a pas encore travaillé à la décoration du Pont de Fragnée à Liège, ni dans la cour d’honneur de l’ancien château de Mariemont (Vers la Vie), ni à la réalisation du Memorial in Gratitude à Londres. Victor Rousseau n’est pas encore le représentant actif de l’art wallon dont on cherche à cerner la définition tout au long des premières années du XXe siècle. Il n’est pas encore le « Grand » Victor Rousseau, mais sa participation au chantier pharaonique du Palais de Justice de Bruxelles (dans les années 1880) l’a poussé à suivre les cours de l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles et, en 1890, le prix Godecharle distingue ce jeune talent promis à un bel avenir. C’est ce « sculpteur d’âmes », originaire de Feluy, qui fige Mairaux dans le bronze pour l’éternité.

Représentant Mairaux debout, tête nue et en redingote, il tient son bras gauche le long du corps avec la main ouverte pointée vers le sol, tandis que la main droite tient le plan d’aménagement du quartier du centre de 1866. La statue en bronze fait 3 mètres de haut et est posée sur un socle en pierre qui fut d’abord installé sur la place communale. De nombreux travaux d’aménagement de La Louvière ont conduit le monument au bas du boulevard Mairaux, avant d’être (définitivement) installé dans le haut de la même avenue.
Le monument ne met en évidence que l’action politique locale. 

Particulièrement explicites, les inscriptions mentionnées sur le socle identifient clairement le personnage et les intentions de ceux qui  ont pris l’initiative de lui élever une statue. De face, on peut lire :

« Amand Mairaux
bourgmestre de Saint-Vaast – La Louvière
1854-1869 »
Du côté gauche : 
« Né à Frasnes-lez-Couvin le 28 janvier 1817
décédé à Soignies siégeant au conseil de milice le 26 février 1869 »
À l’arrière : 
« Inauguré le 30 août 1890 »
Du côté droit
« Au fondateur de La Louvière les habitants reconnaissants ».

 

Jean-Jacques HEIRWEGH, Patrons pour l’éternité, dans Serge JAUMAIN et Kenneth BERTRAMS (dir.), Patrons, gens d’affaires et banquiers. Hommages à Ginette Kurgan-van Hentenryk, Bruxelles, Le Livre Timperman, 2004, p. 434
http://lalouviere-ville.skyrock.com/425448810-Amand-Mairaux.html 
Richard DUPIERREUX, Victor Rousseau, Anvers, 1944, coll. Monographie de l’art belge
Marcel BOUGARD, Victor Rousseau. Sculpteur wallon, Charleroi, Institut Destrée, 1968, coll. Figures de Wallonie
Denise VANDEN EECKHOUDT, Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 539

Place Maugrétout 
7100 La Louvière

carte

Paul Delforge