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Wincqz Pierre-Joseph

Socio-économique, Entreprise

Soignies 24/10/1811, Soignies 03/04/1877


Descendant d’une longue série de maîtres-carriers – qui furent d’abord commerçants et tailleurs de pierre, avant de s’imposer en directeurs d’exploitation et en patrons d’industrie –, Pierre-Joseph Wincqz connaît parfaitement bien le métier quand il se retrouve seul héritier de Grégoire-Joseph, en 1852. Formé au métier et à la gestion de l’entreprise depuis plusieurs années aux côtés de son père, Pierre-Joseph poursuit et achève la modernisation des exploitations familiales : d’une part, il invente un appareil qu’il fait breveter (pour élever l’eau et le sable nécessaire au sciage des pierres, 1846) ; d’autre part, il investit, comme ses devanciers, dans de nouvelles machines. À la différence de ses prédécesseurs, P-J. Wincqz bénéficie de surcroît de facteurs de développement extérieurs favorables : le chemin de fer lui ouvre de nouveaux marchés, en toutes saisons et en toute sécurité ; les routes sont plus nombreuses et en bon état.

Directeur d’une exploitation de pierre bleue établie à Soignies (1847), Pierre-Joseph Wincqz en devient le propriétaire-exploitant (1852-1877), avant de prendre la tête de trois autres sites carriers, qu’il dote des moyens modernes d’exploitation (1855, 1866, 1876) et où il emploie plusieurs centaines de personnes. En 1850, il aurait été « le premier à employer une machine à vapeur avec treuil et chemin de fer en rampe pour extraire les blocs de pierre ». En 1856, il achète ainsi une puissante machine à vapeur destinée au fonctionnement d’une scierie de pierre ; il en possèdera trois vingt ans plus tard.

En plus de la qualité des produits, le sens de la communication et de la publicité donne aux carrières Wincqz une renommée européenne. Les foires et expositions internationales sont de belles occasions d’exposer, spectaculairement, son savoir-faire. La société de Wincqz ne se contente plus du marché wallon ; il ambitionne d’introduire ses produits sur le marché international, et y parvient. Elle se lance aussi dans la production sucrière, comme l’indique son nom « SA des Carrières et de la Sucrerie P-J. Wincqz ».

S’imposant sur le plan local comme un important notable, P-J. Wincqz est, contrairement à ses ancêtres, actif dans de nombreuses associations professionnelles ou non (Société d’Agriculture, Caisse de Prévoyance pour les Ouvriers carriers de Soignies en 1863, chambre de Commerce de Mons en 1864, présidence du Conseil de Milice…) et en politique. Ardent défenseur des idées libérales, il entre au conseil communal de Soignies en 1841, exerce la fonction d’échevin (1843-1845, 1851) avant d’être désigné à la tête de la cité, exerçant le maïorat sans interruption pendant un quart de siècle (1852-1877) : un nouvel hôtel de ville, une école moyenne et une école primaire pour filles sont à inscrire à son actif, de même qu’une école de dessin et de modelage. Conseiller provincial du Hainaut (1848-1857), il grimpe d’un échelon quand il est appelé à remplacer A. Daminet au Sénat : représentant direct de Soignies pendant vingt ans (1857-1877), membre de la commission des Travaux publics, il se révèle un défenseur du développement du rail (à l’origine de la prospérité de son industrie) et de l’obligation scolaire.

Dans les années 1840, à titre personnel, P-J. Wincqz fait construire une importante demeure de style néoclassique, dénommée le château Wincqz avant de passer dans le patrimoine des Paternoster. Père de 14 enfants, P-J. Wincqz les mariera à des descendants d’importantes grandes familles locales, tissant ainsi un intense réseau économique, politique et social. En 1880, une statue lui est dédiée ; elle est alors installée devant l’hôtel de ville.

À son décès – il dispose de la 75e fortune de la province de Hainaut –, la famille constitue une société en commandite, la Société des carrières, devenue Société anonyme, qu’administre l’un de ses fils, Pierre-Joseph, ingénieur civil diplômé de l’École centrale des arts et manufactures de Paris.

 

Sources

Jean-Louis VAN BELLE, Une dynastie de bâtisseurs. Les Wincqz. Feluy-Soignies XVIe-XXe siècle, Bruxelles, ciaco, 1990, p. 69-87 notamment
Jean-Luc DE PAEPE, Christiane RAINDORF-GÉRARD (dir.), Le Parlement belge 1831-1894. Données biographiques, Bruxelles, 1996, p. 624-625
Histoire du Sénat de Belgique de 1831 à 1995, Bruxelles, Racine, 1999, p. 445
Jean-Louis VAN BELLE, dans Nouvelle Biographie nationale, t. III, p. 353-354


Conseiller communal de Soignies (1841-1877)
Echevin (1843-1845, 1851)
Conseiller provincial du Hainaut (1848-1857)
Bourgmestre (1852-1877) 
Sénateur direct (1857-1877)

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Wincqz Grégoire-Joseph

Socio-économique, Entreprise

Soignies 17/05/1783, Soignies 22/05/1852

Petit-fils de Grégoire et fils de Thomas, Grégoire-Joseph Wincqz va perpétuer l’activité de cette dynastie de maîtres carriers de la région de Soignies en lui donnant une nouvelle dimension que son fils, Pierre-Joseph, portera à son paroxysme. Les Wincqz sont en effet actifs dans la pierre depuis plusieurs générations ; leur présence est attestée en pays wallon depuis le XVIe siècle, dans la région de Feluy depuis le XVIIe siècle, et dans celle de Soignies depuis le XVIIIe.

À la mort de son père, Grégoire-J. a 24 ans et les biens familiaux sont partagés entre les très nombreux enfants ; parmi divers biens, lui hérite de la carrière qu’exploitait déjà son grand-père (Grégoire), mais il ne dispose pas de la machine à feu que ce dernier avait introduite en 1785 et qui est revenue à ses sœurs. Mais durant la période française, Grégoire-Joseph – bien aidé par un mariage avec une riche fille de la bonne bourgeoisie – procède à de nombreux achats ; des maisons, mais aussi une 3e carrière qui s’ajoute à celle apportée dans sa dot par sa jeune épouse. En 45 ans, son patrimoine ne va cesser de s’agrandir, pas à pas, au point de disposer, à la veille de sa mort, de près d’une cinquantaine d’hectares, et d’une petite dizaine de carrières bien outillées. En l’absence d’archives, l’historien Jean-Louis Van Belle avance l’hypothèse que Grégoire-J. Wincqz a bénéficié de commandes nombreuses tant les autorités publiques construisaient en pays wallon à cette époque : canaux, routes, fortifications, agrandissement des villes… sans oublier d’importants chantiers aux Pays-Bas, voire des commandes de riches particuliers.

Pour rencontrer ces commandes, l’entrepreneur wallon modernise ses exploitations, les dotant d’un moulin à vent (1823), pour faciliter le pompage des eaux, mais aussi mener d’autres activités. En 1826, il investit dans une « petite » machine à vapeur selon le modèle de Watt. Poussé par la concurrence locale, Grégoire-Joseph, comme ses ancêtres, reste à la pointe des nouvelles techniques du temps et continue à faire preuve d’audace et œuvre de pionnier. En 1840, il récupère l’ancienne machine de Newcomen de son père. D’autres machines sont installées en 1843, 1847 et 1850. Par ailleurs, l’industriel est l’un des bénéficiaires de l’amélioration des voies de communication, qu’il s’agisse des routes (qu’il contribue à construire) ou du chemin de fer qui va lui ouvrir de nouveaux marchés, en toutes saisons et en toute sécurité.

Si l’industriel a connu la prospérité et participé à la décision politique sur le plan local, l’homme a cependant été frappé par le malheur. Il a perdu très tôt son épouse et six de ses 7 enfants presque tous décédés à l’heure où ils entraient dans l’âge adulte. L’aîné, Pierre-Joseph, sera son seul héritier. 

Sources

Jean-Louis VAN BELLE, Une dynastie de bâtisseurs. Les Wincqz. Feluy-Soignies XVIe-XXe siècle, Bruxelles, ciaco, 1990, p. 58-67 notamment.
Jean-Louis VAN BELLE, dans Nouvelle Biographie nationale, t. III, p. 353-354

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Wincqz Thomas

Socio-économique, Entreprise

Soignies 07/03/1752, Soignies 03/01/1807


Au milieu du XVIIIe siècle, Grégoire Wincqz (1708-1794) a donné à une activité familiale traditionnelle une dimension jamais atteinte. Ce n’est plus un simple marchand ou tailleur de pierre qui est installé dans la région de Soignies, mais un véritable patron d’entreprise. Parmi ses 11 enfants, un seul reprend finalement le métier de carrier ; il s’agit de Thomas, frère de Jean-François l’architecte et de Jean Baptiste l’avocat. Formé aux côtés de son père et de ses ouvriers, Thomas ne reprend que très progressivement les affaires familiales, le père ayant travaillé jusqu’à son dernier souffle.

Ayant contracté un premier « bon » mariage avec la fille d’un riche bourgeois (1778), Thomas Wincqz hérite d’une importante fortune au décès de Grégoire en 1794. Outre les biens et le savoir-faire, il avait hérité de son père une machine à feu, la première installée dans la région de Soignies en 1785. Propriétaire foncier, exploitant de carrières, Thomas Wincqz est un entrepreneur, bourgeois prospère, qui commerce, surveille la bonne exécution des commandes et emploie du personnel.

Lors des événements politiques qui agitent les provinces wallonnes au lendemain de la Prise de la Bastille à Paris, Wincqz est étroitement associé à la gestion publique de la cité. Magistrat (1792), agent national (1794), il représente la République dans la région sonégienne, mais il ne paraît pas apprécier les nouvelles idées, se contentant de maintenir et de poursuivre ses affaires, en acquérant au passage quelques « biens nationaux ». Parmi ses 17 enfants, nés de deux mariages, Grégoire-Joseph Wincqz (1783-1852) sera son principal héritier et continuateur de la dynastie des Wincqz, maîtres de carrière.

 

Sources

Jean-Louis VAN BELLE, Une dynastie de bâtisseurs. Les Wincqz. Feluy-Soignies XVIe-XXe siècle, Bruxelles, ciaco, 1990, p. 51-58
Jean-Louis VAN BELLE, dans Nouvelle Biographie nationale, t. III, p. 353-354

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Wincqz Jean-François

Culture, Architecture

Soignies 24/10/1743, Bruxelles 27/05/1791


Le travail dans les carrières est un secteur d’activités important dans la région de Feluy, Arquennes et Soignies. La famille Wincqz y est active depuis plusieurs générations quand Grégoire (1708-1794) s’impose comme un véritable patron d’entreprise au milieu du XVIIIe siècle. Parmi ses 11 enfants, Jean-François optera par une activité quelque peu différente, mais toujours en rapport avec celle de ses ancêtres.

Très jeune, il paraît avoir des prédispositions pour le dessin et il est envoyé à Gand pour se former dans une école qui deviendra plus tard l’Académie. Ensuite, il se rend à Paris, où il suit les cours publics du Louvre puis ceux de l’Académie parisienne (1766-1773). Auréolé de son séjour parisien, J-Fr. Wincqz reçoit plusieurs sollicitations et reconnaissances à Bruxelles où il s’est installé à partir de 1776. Bien introduit dans les milieux de cour relevant de Vienne, il est nommé architecte de la cour de Charles de Lorraine (2 mars 1780), évinçant ainsi le célèbre Laurent-Benoît Dewez qui n’est plus très en cour (démis de ses fonctions le 5 février 1780). En 1784, Wincqz est nommé professeur d’architecture à l’Académie de Bruxelles.

Spécialiste de la reconstruction ou de l’agrandissement de petites églises rurales, celui qui appartenait à la Logue bruxelloise des « vrais amis de l’Union » est choisi comme expert architecte auprès du Conseil de Brabant pour les églises et le patrimoine religieux. Veuf et sans enfant, il décède en 1791 des suites de maladie et laisse sa signature d’architecte sur une série d’églises du Hainaut, du Brabant, du Namurois et du pays de Liège (Cambron-Casteau, Hennuyères, Folx-les-Caves, Uccle, Grand Rosière, Tourneppe, Hermalle-sous-Argenteau, Floreffe, Grand-Leez, Neufchâteau-lez-Visé, Lathuy…). Outre des aménagements au château de Feluy, il intervient aussi à l’abbaye Saint-Pierre de Gand et au château de Marchin dans un style néo-classique rigoureux, avec des influences baroques.

 

Sources

Jean-Louis VAN BELLE, Une dynastie de bâtisseurs. Les Wincqz. Feluy-Soignies XVIe-XXe siècle, Bruxelles, ciaco, 1990, p. 47-51
Anne-Françoise GOFFAUX, Bernard WODON, Répertoire des architectes wallons du XIIIe au XXe siècle, Namur, 1999, Études et documents, série Aménagement et Urbanisme n°4, p. 153
Eugène DE SEYN, Dictionnaire biographique des sciences, des lettres et des arts en Belgique, Bruxelles, 1935, t. II, p. 1176
Jean-Louis VAN BELLE, dans Nouvelle Biographie nationale, t. III, p. 353-354
La Vie wallonne, IV, 1982, n°380, p. 270-271

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Wincqz Grégoire

Socio-économique, Entreprise

Feluy 27/06/1708, Soignies 18/09/1794


Cinquième enfant du couple Jean Wincqz-Thérèse Seutin, (Joseph-)Grégoire Wincqz assure la relève de l’activité familiale exploitée à Soignies par son père depuis 1720. Formé dans la tradition familiale, Grégoire contribue avec son père au décollage de son activité industrielle vers 1730-1750. Après les guerres de Louis XIV, l’époque est encore à la reconstruction, mais d’autres besoins apparaissent : outre les grandes chaussées et les canaux, le XVIIIe siècle est marqué par d’importantes constructions d’abbayes, de châteaux, de grosses fermes et l’agrandissement comme la modernisation des villes. En raison des incendies meurtriers des sièges « récents », des instructions sont données pour que les maisons soient construites « en dur » et, dans le Hainaut, pour que les soubassements soient en pierre sur 70 cm. Mons et la partie romane du duché de Brabant s’approvisionnent notamment auprès des Wincqz. Jusqu’en 1748, Grégoire est reconnu, comme son père, maître tailleur de pierre. À partir de 1750, il semble avoir réussi à acquérir une carrière, car il est appelé « maître de carrière et marchand ». Ce statut est confirmé par une commande exceptionnelle – un million de florins de l’époque – qu’il parvient à décrocher le 26 décembre 1754.

Au début du XVIIe siècle avait été creusé un canal reliant Ostende à Bruges, qui fut élargi dans la deuxième moitié du siècle. Cependant, début 1654, la base du système d’écluse du sas de Slijkens s’écroule et plus de 250 mètres de berges sont à emmurailler. Soucieux de la qualité de la pierre et de délais courts, les États de Flandre portent leur choix sur la pierre de Soignies, préférée à celle de Tournai, et sur un Grégoire Wincqz qui a su se montrer convaincant, en se lançant dans cette entreprise périlleuse. Décrivant ce « contrat du siècle », Jean-Louis Van Belle en détaille l’exécution : en vingt mois, 103 bateaux sont lourdement chargés. 9.000 tonnes de pierres bleues sont livrées dans les temps, alors que jusque-là, annuellement, les petits maîtres de carrière de Feluy-Arquennes travaillaient à peine 57 tonnes ! Pour réussir un tel challenge, Grégoire Wincqz a sans doute dû mobiliser tous ses confrères de la région, fédérant des esprits pourtant fort individualistes.

Même s’il fournit d’autres beaux chantiers (châteaux, fermes, abbayes), Grégoire Wincqz n’aura plus jamais l’occasion de réaliser une commande similaire à celle du canal flamand. Sa prospérité et sa réputation étaient faites. Elle ne l’empêche pas d’être le carrier le plus productif de son temps, la trace de sa « marque de maître de carrière », un W, se retrouvant « sur plus de 270 bâtiments », dans plus de 80 localités (Van Belle), surtout du Brabant wallon et du Hainaut oriental. Riche propriétaire terrien (plusieurs maisons à Soignies et 27 hectares de terre), resté un chef d’entreprise actif jusqu’en 1790, il introduisait la première machine à feu dans les carrières de la région en 1785. Le coût de la machine de Newcomen était à ce point exorbitant que rares étaient les industriels qui pouvaient se permettre un tel investissement. C’est par conséquent un entrepreneur annonçant les patrons d’industries du XIXe siècle qui remet ses affaires à l’un de ses fils, l’architecte Jean-François Wincqz (1743-1791), mais c’est finalement François Joseph Thomas (1752-1807), le carrier, qui lui succèdera.

 

Sources

Jean-Louis VAN BELLE, Une dynastie de bâtisseurs. Les Wincqz. Feluy-Soignies XVIe-XXe siècle, Bruxelles, ciaco, 1990
Jean-Louis VAN BELLE, dans Nouvelle Biographie nationale, t. III, p. 353-354

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Wincqz Arnould

Socio-économique, Entreprise

( ? – Feluy 03/12/1667)


Bien installée dans la région de Feluy dans la première moitié du XVIIe siècle, la famille Wincqz acquiert la prospérité grâce au travail de la pierre. Marchands et tailleurs de pierre, sachant lire et écrire, certains membres de la famille sont des notables qui occupent parfois des fonctions publiques. Arnould Wincqz ( ? – Feluy 03/12/1667), son fils Pierre Wincqz (Feluy c. 1635, Feluy 04/11/1728), et ses petit-fils Jean (Feluy 16/09/1674-Soignies 02/02/1742) et Robert (Feluy 11/02/1681-21/01/1728) sont les premiers représentants significatifs de ces carriers qui bénéficient des effets secondaires des nombreuses guerres du temps qui ont le pays wallon comme champs de bataille.

En effet, après le passage des armées, il faut reconstruire, bâtiments civils comme fortifications des places fortes, et les commandes affluent, procurant du travail chez les Wincqz. Plus tard, c’est la construction des routes et surtout des canaux qui assureront leur prospérité avec la pierre de Soignies.
Mais c’est à Feluy que l’extraction et l’exploitation de la pierre commencent dans le deuxième quart du XVIIe siècle, avant de gagner plus tard la région de Soignies : au XIXe siècle, la renommée de la pierre de Soignies dépassera les frontières du pays wallon. Selon Jean-Louis Van Belle, c’est Jean Wincqz, « maître tailleur de pierre », arrivé à Soignies vers 1720, qui est à l’origine de l’extraction et de l’exploitation de la pierre de Soignies. En quittant les carrières de Feluy où l’exhaure des eaux était de plus en plus difficile, pour Soignies, il investit dans un site neuf, mieux situé par rapport aux voies de communication.

 

Sources

Jean-Louis VAN BELLE, Une dynastie de bâtisseurs. Les Wincqz. Feluy-Soignies XVIe-XXe siècle, Bruxelles, ciaco, 1990
Jean-Louis VAN BELLE, dans Nouvelle Biographie nationale, t. III, p. 353-354

Willame Georges

Culture, Lettres wallonnes

Nivelles 09/07/1863, Nivelles 10/02/1917


À la fin du XIXe siècle, l’intérêt pour le wallon suscite l’émergence de nombreux foyers à travers le pays wallon : cercles dramatiques, feuilles et journaux patoisants se multiplient. Il ne s’agit pas d’une tendance visant à entendre la langue du peuple, voire à comprendre ce qu’il veut exprimer sur sa condition, mais, globalement, d’une production massive d’écrits faciles et sans grande qualité, où quelques initiatives font exception. L’une ou l’autre pièce de théâtre émerge, tandis que des cercles littéraires se constituent pour valoriser un wallon de qualité. Du côté de Nivelles, Georges Willame participe de ce mouvement.

Depuis plusieurs générations, les Willame sont installés dans la cité de sainte Gertrude et bien qu’il fasse carrière dans l’administration à Bruxelles, Georges restera toujours fidèle à sa cité d’origine, tant dans son activité d’écrivain wallon, de conteur français, d’archéologue, de folkloriste et surtout d’historien. À la fin des années 1880, celles au cours desquelles Albert Mockel invente et popularise le mot Wallonie, Georges Willame est à l’origine d’une feuille en patois appelée L’Aclot (1888) ; la valeur n’attendant pas le nombre des années, il signe, en 1890, avec El Rouse dé Sainte Ernelle, le premier drame poétique et folklorique en wallon, en mettant en scène la légende de Sainte Renelde. En 1893, on le retrouve parmi les fondateurs de la revue Wallonia qui, après des débuts modestes, s’imposera comme la revue de référence de la culture wallonne.

Entré au ministère de l’Intérieur en 1881, le fonctionnaire s’installe dans « la capitale » en 1897 pour faciliter une carrière qui le conduira à occuper le poste de directeur général, jusqu’à son décès, en 1917, au moment où les occupants allemands commençaient à imposer la séparation administrative aux institutions belges. «L’éloignement » renforce l’attachement de Willame à sa terre natale. Déjà en 1894, il a notamment rejoint le cercle qui s’est constitué autour de l’abbé Michel Renard et où se retrouvent nombre de « régionalistes wallons » de passage à Bruxelles ; assidument fréquenté, le cercle avait pris le nom de Café wallon. Bien avant que ne s’organise le Congrès wallon de 1905 auquel il participe, il avait contribué à la mobilisation des forces wallonnes qui réclamaient des autorités belges des subventions plus élevées en faveur de la littérature régionale (dès 1892).

Quant à l’histoire de Nivelles, celui qui est membre de la Société d’Archéologie de Nivelles lui consacre également de son temps pour lui consacrer une étude sur La Révolution de 1830 à Nivelles (1895), des Notes sur les Serments nivellois (1903), ainsi qu’un Essai de bibliographie nivelloise (1911), publiés dans le bulletin de la société, ou sous forme de brochures. En 1914, il tire surtout de l’oubli le sculpteur Laurent Delvaux, en lui consacrant une biographie conséquente, dont la préface de l’ouvrage est signée par Jules Destrée. Des aspects plus anecdotiques de cette riche histoire de Nivelles alimenteront ses Causeries nivelloises (1910) et serviront de cadre à deux romans régionalistes, écrits en français, Le puison (1908) et Monsieur Romain (1913). À titre posthume, seront réunis et publiés la vingtaine de sonnets en wallon où Georges Willame chantait la bonne ville de Nivelles. Une édition critique, en 1960, est due au professeur Jean Guillaume. Georges Willame achevait une importante Histoire de Nivelles lorsqu’une congestion l’emporta soudainement.

 

Sources

Maurice PIRON, Anthologie de la littérature dialectale de Wallonie, poètes et prosateurs, Liège (Mardaga), 1979, p. 295
Alain COLIGNON, Georges Willame, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. III, p. 1674
Bibliothèque publique centrale du Brabant wallon, Ces écrivains qui ont aimé, honoré et raconté Nivelles, Nivelles, 2011, p. 62-63
Jean GUILLAUME, Georges Willame. Sonnets. Edition critique, Liège, Société de Langue et de Littérature wallonnes, 1960
La Terre wallonne, 1929, t. 19, n°113, p. 304
Le Guetteur wallon, janvier 1929, n°12, p. 253
Hubert KRAINS, dans La Vie wallonne, n°8, avril 1922, t. XX, p. 341-388 (numéro spécial consacré à Willame et à Nivelles)
La Vie wallonne, III, 1964, n°307, p. 193-197
Freddy JORIS, Natalie ARCHAMBEAU (dir.), Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 1995
Histoire de la Wallonie (L. GENICOT dir.), Toulouse, 1973, p. 477
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. II, p. 488 ; t. III, p. 194

Hubert Krains a dressé une bibliographie assez complète des œuvres de Georges Willame dans La Vie wallonne, n°8, avril 1922, t. XX, p. 353-355

Wérotte Charles

Culture, Lettres wallonnes

Namur 05/03/1795, Namur 24/04/1870


Deux noms apparaissent à l’origine de la littérature wallonne dans le Namurois : Nicolas Bosret, d’une part, Charles Wérotte d’autre part. Ils sont contemporains. En raison de son fameux Bia bouquet, le premier semble mieux connu que le second qui signe le chant des Salzinnois (Les Tris d’Salzènes) et fut surtout le président de la société Moncrabeau pendant douze années ; au milieu du XIXe siècle, par les multiples chansons qu’il écrit et publie, Charles Wérotte contribue à la transmission écrite du langage parlé par le petit peuple et ce dernier le lui rend bien en vouant une admiration sans borne à ses textes il est vrai légers et au style facile.

Né sous le régime français, ayant grandi sous celui des « Hollandais », Charles Wérotte accueille le nouvel État belge en conservant et en entretenant ce qui lui paraît le plus important la pratique de la langue wallonne. Celui qui devient fonctionnaire au gouvernement provincial de Namur et qui y terminera sa carrière au rang de chef de service signe quelques œuvres dialectales et des pièces en français qu’il rassemble dans un fort volume intitulé Chansons wallonnes et otes poésies. Édité chez Godenne, son beau-frère, l’ouvrage qui vaut essentiellement par les textes en wallon connaîtra quatre éditions (entre 1844 et 1867).

Après avoir composé un long poème où il évoque les jeux de son enfance, il semble avoir adopté la mode de l’époque qui consiste à transformer en wallon les fables de La Fontaine, mais cette production est de peu d’importance, comparée aux très nombreuses chansons qu’il va composer, à partir de 1844, pendant un quart de siècle. Il n’est donc pas étonnant de le retrouver, le 27 septembre 1843, parmi les fondateurs d’une nouvelle société d’agrément tournée vers la chanson wallonne et composée d’artistes facétieux. Prenant le nom du village français de Moncrabeau qui entretient une solide réputation de menteurs, l’association se donne pour objectifs de conserver les traditions populaires et de défendre la langue wallonne. De 1858 à 1870, Wérotte préside cette Académie composée des Quarante Molons (quarante toqués). Maniant aisément l’ironie, adepte de la satire, il chantera des sujets variés, liés à la vie quotidienne voire à l’actualité de son temps. Par son activité inlassable et son étonnante popularité, Wérotte contribue à faire éclore à Namur un fort foyer de littérature dialectale.

 

Sources

Maurice PIRON, Anthologie de la littérature dialectale de Wallonie, poètes et prosateurs, Liège (Mardaga), 1979, p. 109
Histoire de la Wallonie (L. GENICOT dir.), Toulouse, 1973, p. 403
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. II, p. 467, 470 ; t. III, p. 243
http://wa.wikipedia.org/wiki/Charles_W%C3%A9rotte (s.v. novembre 2014)
Félix ROUSSEAU (dir.), Molons èt rèlîs namurwès: La littérature dialectale à Namur de Charles Wérotte à Joseph Calozet : [Exposition dialectale organisée à Namur, au siège du Crédit communal de Belgique pour la province de Namur, du 29 novembre au 21 décembre 1968], Namur, Crédit communal, 1969
Le Guetteur wallon, Namur, 1981, 57e année, n°2, p. 39
Willy BAL, dans Biographie nationale, t. 42, col. 781-783

© Musée de Mariemont

Warocqué Abel

Socio-économique, Entreprise

Morlanwelz 07/11/1805, Mariemont 17/08/1864


Si son invention, la warocquière, n’a pas révolutionné le monde de l’exploitation minière, elle témoigne cependant qu’Abel Warocqué était davantage qu’un patron de houillère, profitant de l’aisance de son milieu familial : son oncle, Isidore, banquier et industriel, était considéré comme la 4e fortune de la place de Mons à la fin du régime français, et son père, Nicolas, frère d’Isidore, venait de créer la Société minière de Mariemont quand Abel vit le jour. Mais Isidore fera faillite et Nicolas devra investir pour développer ses activités.

Fils aîné de Nicolas (1773-1838), Abel est appelé à lui succéder dans les diverses industries et participations familiales. Dès 1827, il devient administrateur-adjoint de la Société de Mariemont, puis administrateur de la Société de Bascoup quand ce charbonnage tombe dans l’escarcelle des Warocqué. Seul propriétaire de Mariemont en 1838, il poursuit la politique industrielle ambitieuse de son père, faite d’investissements portant à la fois sur l’amélioration des voies de communication, sur les conditions de travail (logements ouvriers) et la prise de participation dans d’autres activités (sidérurgie, assurance, chemins de fer, etc.). Abel Warocqué ne ménage pas ses efforts pour moderniser ses entreprises de Mariemont et de Bascoup, en retirant un important surcroît de productivité en quelques années. Par ailleurs, en dépit de l’opposition de puissants concurrents, il parvient à imposer la construction de la ligne ferroviaire Manage-Erquelinnes : inaugurée en 1857, elle permet de vendre son charbon sur les marchés français. Propriétaire foncier étendu, spéculateur, il contribue aussi à la naissance de La Louvière. Il est aussi inventeur.

En 1855, Abel Warocqué décroche en effet une médaille d’or à l’Exposition universelle de Paris pour la « warocquière ». Machine de son invention, elle est en fait une « échelle à vapeur » destinée à faciliter la montée et la descente des mineurs. Elle a été mise au point dans son charbonnage de Mariemont dès les années 1840 et elle sera adoptée dans le bassin français de Saint-Étienne. Elle semblait révolutionner le secteur des échelles mobiles quand une série d’inconvénients apparurent à  l’usage. Pêchant par un manque de sécurité, elle ne parviendra pas à s’imposer comme le standard dans les houillères européennes.

À l’instar de son paternel, Abel est aussi actif en politique, mais contrairement à lui, il n’affiche pas d’opinions orangistes. Désigné par le roi comme bourgmestre de Morlanwelz, il dirige l’entité de 1836 à 1864 : défenseur du programme libéral, il y crée une école gardienne gratuite et fait construire une église. Abel Warocqué est le grand-père de Raoul Warocqué.

 

Sources


Hervé HASQUIN, La Wallonie, Son histoire, Bruxelles, Luc Pire, 1999, p. 144
La Vie wallonne, IV, 1971, n°336, p. 410-413
Jean-François POTELLE (dir.), Les Wallons à l’étranger, hier et aujourd’hui, Charleroi, Institut Destrée, 2000, p. 2001
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Histoire. Économies. Sociétés, t. II, p. 99
Jean-Jacques HEIRWEGH, Patrons pour l’éternité, dans Serge JAUMAIN et Kenneth BERTRAMS (dir.), Patrons, gens d’affaires et banquiers. Hommages à Ginette Kurgan-van Hentenryk, Bruxelles, Le Livre Timperman, 2004, p. 434
Ginette KURGAN, Serge JAUMAIN, Valérie MONTENS, Dictionnaire des patrons en Belgique, Bruxelles, 1996, p. 656-657
Maurice VAN DEN EYNDE, Raoul Warocqué, seigneur de Mariemont (1870-1917), Mariemont, 1970

Verdickt Jean-Jacques

Socio-économique, Entreprise

Bruxelles, 09/07/1944


Après le Collège Saint-Michel, à Bruxelles, Jean-Jacques Verdickt entame à Louvain des études d’ingénieur ; l’étudiant va alors connaître la période du Walen buiten qui va amener à la scission de l’Université ; ce sera après la fin de ses études, car, en 1969, il achève son cursus. Ingénieur civil mécanicien diplômé de l’Université catholique de Louvain, il entre à la Générale de Banque attiré par les perspectives d’un développement de l’informatique (1970). Mais en 1971, son employeur l’envoie en Argentine où il exerce différentes fonctions à la Banque Européenne pour l’Amérique Latine (BEAL) et à la Générale de Banque s.a. (1971-1976).  Ensuite, il arrive au Brésil où il est chargé de réorganiser la structure en place afin de la faire passer à l’ère de l’informatique (1976-1979).

Rappelé en Europe, J-J. Verdickt officie au sein du département Financement du Commerce Extérieur, pour y développer de grands projets de développement industriel à l’étranger avec un financement commun émanant de l’Office du Ducroire (1979-1982). Mais une nouvelle mission l’attend en Argentine, remplie d’embûches car, au lendemain de la guerre des Malouines, Buenos-Aires est frappé par une inflation qui atteint parfois 20% par mois et a cessé de payer sa dette extérieure : le banquier vient sauver les meubles d’une filiale de la Générale (1982-1986). 

Quand il revient en Europe pour s’occuper des intérêts de la Générale à Liège, la sidérurgie liégeoise est en pleine reconstruction et en plein redéploiement, mais, à ses côtés, la FN est en péril, de même qu’une série d’autres sociétés dans lesquelles la holding est engagée. Entre 1985/1986 et 1992/1993, à la tête de la zone Liège-Verviers de la Société Générale qui compte alors près de 1.500 personnes et 200 agences, J-J. Verdickt est chargé de mener un important plan de restructuration, principalement dans le secteur des fabrications métalliques, et de mettre en place un nouveau tissu industriel autour de nouvelles PME ; avec le programme « starter », 200 millions sont investis dans une centaine de projets, avec un très haut taux de réussite (80%).

Quittant Liège pour Bruxelles en 1993, au moment où il devient membre du Comité de Direction en charge de l’informatique, des paiements et des titres. Cinq ans plus tard, il est l’un des trois membres du comité de direction de G-Banque à accepter de passer sous la bannière de Fortis (1998). À ce titre, il contribue au regroupement de plusieurs banques sous la même enseigne et à lui donner une dimension européenne.

Vice-président de l’Union wallonne des Entreprises créée en 1968, il est choisi, en 2000, pour prendre la succession de Jean Stéphenne. Celui qui devient le 13e président de l’UWE est le premier qui est issu du monde bancaire. Après le monde de l’industrie, celui de la finance est ainsi invité à participer au redéploiement de la Wallonie, au moment où le gouvernement wallon arc-en-ciel présidé par Elio Di Rupo lance le Contrat d’Avenir pour la Wallonie. Le responsable de l’UWE d’octobre 2000 à octobre 2003) se rallie à l’initiative politique wallonne dont il évalue l’état d’avancement ; parallèlement, il lance une large campagne sur le thème « Entreprendre est un acte citoyen » : faciliter les démarches pour créer une société, insuffler l’esprit d’entreprise, améliorer l’apprentissage des langues et se tourner davantage vers l’extérieur sont ses leitmotive, avec comme objectif la création de 20.000 PME wallonnes à l’horizon 2010.

Jusqu’en 2002, année où il prend sa « pré-pension », J-J. Verdickt est administrateur délégué, membre du Comité de Direction et membre du Conseil d’Administration de Fortis Banque, y étant le responsable du secteur « Crédit » qui pèse annuellement plus de 300 milliards d’€. Responsable des opérations de paiement et titres. Il préside Banksys et Proton World International. Sa retraite active prend la forme d’une SPRL constituée afin de faire valoir son expertise. Le Brabançon wallon poursuit en effet d’importantes activités après sa période à la Générale. 

Désigné comme expert au sein de la cellule chargée de la reconversion liégeoise après la première annonce de la cessation de l’activité sidérurgique (2003), il exerce des responsabilités majeures dans des entreprises tournées vers les technologies nouvelles. Directeur général et administrateur délégué du groupe Magotteaux (2003-2006), il intensifie les activités du sidérurgiste liégeois vers l’international. Vice-président du conseil d'administration d’Euroclear Bank, président de celui de Techspace Aero (2003-2006), administrateur de CBC, d’Alcatel Bell et d’IBA, président du comité d’Audit de Bone Therapeutics (2005), il remplit aussi des fonctions d’expertise au sein de l’AWEX (2003). Président de la Fondation pour la Recherche et l'Enseignement de l'Esprit d'Entreprise, il signe un manifeste encourageant à une réforme sereine de l’enseignement supérieur (janvier 2013).

 

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
http://www.uwe.be/uwe-1/historique 
http://www.fabi.be/ing2/meca3.htm (s.v. octobre 2014)