Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Monument Camille RONFLETTE

Monument Camille Ronflette, 11 octobre 1931.
Réalisé par César Battaille.

Au bout de la rue, là où les habitations de Beloeil s’arrêtent et où les prairies reprennent leurs droits, s’élève un imposant monument rendant hommage au docteur Camille Ronflette. Depuis son esplanade spécialement aménagée, encerclé par une épaisse haie basse de legustrum, le monument donne l’impression de dominer l’horizon ; en fonte, une barrière basse entoure encore le monument précédé d’un petit sentier d’accès, tandis qu’un bas-relief représente le profil gauche du médecin décédé dix-huit mois à peine avant la double commémoration organisée par les autorités locales et les amis de Camille Ronflette. Non seulement une stèle lui est dédiée, mais en plus la rue est rebaptisée à son nom dans un délai inhabituellement court (à l’époque, on exige un délai de cinq années avant d’attribuer le nom d’une personnalité décédée à une voirie publique). Cette impatience à célébrer Camille Ronflette n’est que partiellement compréhensible à la seule lecture de la dédicace placée sous le bas-relief :

Monument Camille Ronflette – © Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam



A
CAMILLE RONFLETTE
MÉDECIN
1855 – 1930
SES AMIS ET SES CONCITOYENS
RECONNAISSANTS.
 

Ce sont l’humilité et le dévouement d’un médecin de campagne que ses contemporains ont souhaité immortaliser. Pendant cinquante ans, en effet, Camille Ronflette s'est volontairement investi, sans compter son temps et ses efforts, à s’occuper de tous les malades de Beloeil et de toute la région alentour. À travers Ronflette, tous les médecins sont ainsi remerciés pour le réconfort qu’ils apportent discrètement à la communauté villageoise.

Fils d’un médecin originaire d’Ath venu s’installer à Beloeil, Camille Ronflette (1855-1930) a accompli ses humanités au collège épiscopal d’Enghien, avant de mener des études en médecin à l’Université libre de Bruxelles. Interne aux hôpitaux bruxellois, il paraît promis à des fonctions de direction importantes tant les rapports de service de ses chefs étaient élogieux. À tout le moins, il pourrait se constituer une patientèle cossue dans la « bonne » société de la capitale. Pourtant, Ronflette quitte l’atmosphère de la ville et revient à Beloeil seconder son père et lui succéder comme médecin de campagne. L’attention témoignée par le médecin à ses contemporains prend aussi la forme d’un engagement politique : pendant un quart de siècle, il siège comme conseiller communal et exerce les fonctions d’échevin. Par ailleurs, chacun connaît dans la région de Beloeil sa passion pour la colombophilie et son grand intérêt pour la botanique. Ses observations de la végétation de la région de Beloeil et ses découvertes d’espèces rares ont fait l’objet de diverses publications et Ronflette a été accueilli, en 1884, au sein de la Société royale de Botanique de Belgique.

Pour inscrire dans la durée le souvenir de l’humble médecin, un comité s’est formé et a confié au sculpteur César Battaille la confection du monument. Originaire de Basècles, Battaille (1882-1963) s’est d’abord passionné pour l’aviation avant de poursuivre sa carrière en tant qu’industriel et sculpteur. Il est le fils d’Octave Battaille, industriel spécialisé dans les engrais chimiques et les aliments pour bestiaux et par ailleurs sénateur et bourgmestre de Basècles. Porteur d’un diplôme d’ingénieur civil (Mons et Bruxelles), César Battaille semble avoir aussi suivi les cours de l’École nationale des Arts et Métiers à Paris quand il conçoit et construit un avion au début des années 1910 ; son triplan est d’ailleurs breveté en 1911. Après des essais de vol fructueux, l’invasion puis l’occupation allemandes de 14-18 contraignent cependant Battaille à renoncer à son aventure. Engagé dans l’armée belge, il se retrouve à Calais où il met au point différents types de bombes et d’explosifs. Après l’Armistice, ce pionnier de l’aviation aide son frère dans l’usine familiale et, à partir des années 1930, se consacre principalement à son hobby. Avant la guerre déjà, César Battaille avait présenté quelques-unes de ses sculptures dans des Salons. Ses sujets d’inspiration sont variés, même si deux thématiques influencent manifestement sa production : d’une part, son autre passion pour la chasse et la nature fait de lui un sculpteur animalier ; d’autre part, après la Grande Guerre, Battaille est régulièrement sollicité pour réaliser des stèles et monuments en l’honneur d’aviateurs (ainsi, le monument Edmond Thieffry, en 1932) ; après la Libération, il signe son œuvre maîtresse, en 1950, un imposant monument à la mémoire des aviateurs belges décédés durant le second conflit mondial, au cimetière de Bruxelles. Vingt ans plus tôt, il réalisait le mémorial Ronflette, à Beloeil, plus discret mais au style déjà caractéristique de l’artiste, influencé par la sculpture funéraire italienne et qui signait C.O. BATT.

 

http://www.beloeil.be/fr/officiel/index.php?page=90 (s.v. novembre 2013)
http://www.genealogieonline.nl/fr/stamboom-guy-spillebeen/I5136.php 
La Vie wallonne, janvier 1933, CXLVIII, p. 185-188
Louis POPULAIRE, Le docteur Camille Ronflette, savant et philanthrope, dans Coup d’œil sur Beloeil, n°27, 2/1986, p. 72-77
Félicien LEURIDANT, Bibliograpgie beloeilloise. Camille Ronflette 1955-1930, dans Annales du Cercle archéologique dAth et de la région, 1934, t. XX, p. 101-106
Michel MANDL, Pierre CRYNS, César Battaille, Héros de la guerre 1914-1918, avionneur, officier armurier, artiste sculpteur, Les Vieilles Tiges de l’Aviation belge asbl, s.l., s.d., http://www.vieillestiges.be/files/memorials/MABBattaille-FR.pdf (s.v. mai 2014)
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 63

Rue docteur Ronflette
7970 Beloeil

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Banc Maurice Roland

Banc Maurice Roland, 28 septembre 1947.
Sculpteur et architecte inconnus.

Banc Maurice Roland – © Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam


À la Louvière, le parc communal Warocqué rassemble plusieurs monuments commémoratifs importants. Parmi ceux-ci, un banc rend hommage au chanteur wallon Maurice Roland. Il a été inauguré au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, au moment où la stèle dédiée à Léopold Dupuis a été déplacée, soit très précisément à l’occasion des Fêtes de Wallonie, le 28 septembre 1947. Les Mouchons d’aunias fêtent alors leur 35e anniversaire. Ce petit monument dédié à Maurice Roland est installé face au monument Vî-Stou. Érigé à l’initiative du groupement wallon Les scryeus du Centre, il se présente sous la forme d’un petit banc dont le nom complet est  « le banc de la chanson wallonne » et d’une stèle comportant une inscription en wallon :
 

Banc del canson walone al memwâre du fel canteû Maurice Roland.

Chansonnier wallon bien connu, Maurice Roland fait partie de la troupe de Coop Parade avec Marcel Vanbrabant et bien d'autres (Chaumont les rejoindra). À la Louvière, l’équipe du journal El Mouchon d’Aunias (né en 1912) met sur pied un cabaret wallon ; s’y produisent les Brismé, les Nopère, Isidore Collin, ainsi que Maurice Roland. Après l’interruption de la Grande Guerre, les activités reprennent.
Aussi ritualisé que le parcours namurois des plaques lors des Fêtes de Wallonie, un cortège folklorique se rend chaque année aussi, à La Louvière, à l’occasion des Fêtes de Wallonie, en différents endroits, dont le parc communal, et l’on s’arrête devant chaque monument. Des discours sont prononcés. Lors de l’inauguration du mémorial Maurice Roland, en 1947, la ville de La Louvière est remerciée pour avoir réalisé le « banc de la chanson wallonne » et pour le soutien attentif qu’elle apporte à la littérature wallonne en général.

Sources

Le Mouchon d’aunias, Revue wallonne, La Littérature patoisante. La chanson. Le folklore du Centre, octobre 1947, 35e année, p. 2-8
http://www.lalouviere.be/Front/c2-772/Promenade-au-Parc-communal.aspx (s.v. mai 2014)
Promenade au parc, La Louvière, archives de La Louvière, s.d., p. 21

Parc communal
7100 La louvière

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Paul Delforge

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Monument Cantoria à la mémoire de Roland de LASSUS

Monument « Cantoria » à la mémoire de Roland de Lassus, réalisé par Christian Leroy, 12 septembre 1970.

Le premier monument élevé dans l’espace public montois remonte à 1853 et était une statue de Roland de Lattre, ainsi qu’on le nommait à l’époque. Œuvre du jeune sculpteur tournaisien Barthélemy Frison (1816-1877), elle fut controversée, suscitant railleries et ricanements. Certains ne reconnaissaient pas de qualités particulières au musicien, d’autres s’amusaient à ne retenir que quelques événements peu flatteurs dans la vie du personnage, alors que l’on se moquait aussi de l’orthographe « Roland Delattre » gravée sur le socle de la statue, car l’école favorable à « Roland de Lassus » avait déjà démontré la justesse de ses arguments. Les railleries cessèrent au moment de la Grande Guerre : la statue disparaît en effet, durant l’année 1918, ayant été fondue par l’occupant allemand.

Il faut attendre 1970 pour que Mons érige à nouveau un monument en l’honneur de Roland de Lassus, dont un certain nombre d’études avaient établi à la fois l’importance dans l’histoire de la musique et ses origines hennuyères. Ce natif de Mons est en effet considéré comme la plus grande figure de la musique de la deuxième moitié du XVIe siècle. Enfant de chœur à l’église Saint-Nicolas de Mons, sa voix a enchanté plusieurs grandes cours d’Europe. Parti très tôt pour l’Italie, il s’est ensuite rendu en Angleterre, s’est fixé un moment à Anvers, avant d’être engagé comme ténor par le duc de Bavière (1556) et d’être nommé maître de chapelle à Munich (1563-1594), ville où il devait décéder. Compositeur prolifique, peut-être l’un des plus prolifiques de son temps, Roland de Lassus n’a cessé d’alimenter les plus importants éditeurs d’Europe, à l’heure où l’imprimerie en est à ses débuts. Son répertoire est nourri d’une soixantaine de messes, de passions, de Magnificat, ainsi que de diverses pièces liturgiques, de motets et de chansons françaises, de madrigaux italiens et de lieder allemands. En étant le premier à « commercialiser » ses « chansons » et sa musique religieuse, de Lassus sort des sentiers battus et, partout, il est accueilli comme « le prince des musiciens ».

Très éloigné du style de Barthélemy Frison, le « nouveau » monument situé au pied de la collégiale Sainte-Waudru est d’une toute autre facture. Inauguré à Mons le 12 septembre 1970, dans le cadre des Fêtes de Wallonie, il s’intitule « Cantoria ». Pour le découvrir, une manifestation officielle rassembla les hommes politiques locaux Abel Dubois et Léo Collard, mais aussi l’évêque de Tournai, le recteur du Centre universitaire montois et un représentant de la ville de Munich. L’hommage explicite au musicien wallon est gravé dans la tranche du socle de quelques centimètres qui soutient le bronze de trois choristes réunis pour interpréter une partition de Roland de Lassus. L’œuvre est due au sculpteur Christian Leroy (1931-2007).

Monument « Cantoria » à la mémoire de Roland de Lassus (Mons)

Né à Charleroi, Leroy a bénéficié rapidement des conseils artistiques de sa mère, la peintre Simone Leroy, et a suivi des cours de sculptures à Bruxelles, à l’Institut supérieur Saint-Luc d’abord (où il croise la route de Harry Esltröm), à l’Académie des Beaux-Arts ensuite (1955-1956), avant de fréquenter l’Institut supérieur d’Anvers. Prix Godecharle 1955, prix de la province du Hainaut 1957, lauréat du Prix de Rome 1957, Ch. Leroy voyage au Congo (1958), avant de s’installer à Binche quand il

 entame une carrière de près de 35 ans comme professeur à l’École technique de Saint Ghislain et à l’Académie de Mons (qui deviendra par la suite l’École supérieure des Arts plastiques et Visuels). Membre fondateur des groupes Sextant, Maka (1971-1976) et Art Cru (1976-1979), il est aussi membre du groupe Polyptyque (1980-1983). Dessinateur et céramiste, il travaille le verre aussi bien que la terre, et réalise principalement des formes humaines qu’il singularise dans un style qui lui est propre. Outre plusieurs expositions personnelles en Wallonie comme en Europe, Christian Leroy a répondu à plusieurs commandes publiques comme à Marche (Le Gand Georges), à Binche (Les Mineurs), à Battignies (Le Paysan), ou à Mons où il livre ce trio de petits chanteurs en bronze, en mémoire du célèbre musicien wallon Roland de Lassus, dont chacun s’accorde, désormais, à reconnaître unanimement le talent.

Sources

Yvon VANDYCKE, Christian Leroy. Sculpteur, s.l., 1977
http://www.sinaforchi.be/v2/nafraiture_patrimoine_christianleroy.php 
http://users.skynet.be/philippe.mathy/page11.html (s.v. mars 2015)
Combat, 23 mai 1974, n°21, p. 3
Mémoires de Wallonie, Les rues de Louvain-la-Neuve racontent…, Luc COURTOIS (dir.), Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 2011, p. 244-245
La Vie wallonne, III-IV, 1970, n°331-332, p. 546-547
Jean WUILBAUT, Mons 1853-1868. Controverses autour de la statue de Baudouin de Constantinople, dans Annales du Cercle archéologique de Mons, Mons, 1988, t. 73, p. 1-45
Serge LE BAILLY DE TILLEGHEM, dans Jacques VAN LENNEP, La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 402-403
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 68

Au pied de la Collégiale Sainte-Waudru
Rue du Chapitre
7000 Mons

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Paul Delforge

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Ensemble monumental Roger de la Pasture

Ensemble monumental à la mémoire de Roger de le Pasture, réalisé par Marcel Wolfers, 20 septembre 1936.

Longtemps considéré comme un peintre flamand, sous le nom de Rogier Van der Weyden, Roger de le Pasture commence à être mieux connu depuis la moitié du XIXe siècle, moment où deux Tournaisiens – Charles-Barthélemy Dumortier et Alexandre Pinchart – établissent que son  lieu de naissance est à Tournai, sous le nom de Roger de le Pasture. Au début du XXe siècle, cependant, ce lieu d’origine n’en fait pas un artiste de Wallonie, ses œuvres continuant d’être présentées comme appartenant à l’école flamande (dans le sens ancien de cet adjectif), mais aussi comme réalisées par un artiste flamand (dans le sens politique acquis par l’adjectif à la fin du XIXe siècle). C’est en s’interrogeant sur l’existence d’un art wallon, exercice pratique tenté en 1911 dans le cadre de l’Exposition internationale de Charleroi, que Jules Destrée va accorder une place toute particulière à Roger de le Pasture.

Ensemble monumental Roger de le Pasture (Tournai)

Étudiant l’œuvre de l’artiste tournaisien du XVe siècle sous toutes ses coutures, l’esthète Jules Destrée y voit un peintre essentiellement wallon, figure de proue d’une « école » dont la création en 1912 et l’activité de la société des « Amis de l’Art wallon » doivent encore démontrer l’existence. Cité dans la Lettre au roi sur la séparation de la Wallonie et de la Flandre (août 1912), Roger de le Pasture se devait d’être honoré dans sa ville natale, et la Cité des Cinq Clochers comme partie prenante de la Wallonie. Avant la Grande Guerre, la revue Wallonia et les Amis de l’Art wallon s’y emploieront en collaboration avec les autorités locales et quelques érudits. Dans l’Entre-deux-Guerres, une initiative plus spectaculaire est prise à l’initiative de Jules Destrée et un imposant monument est inauguré au pied de la cathédrale, sur la place Vieux Marché aux Poteries.

À l’entame des années 1930, Jules Destrée publie une forte synthèse sur Roger de le Pasture – van der Weyden et, dans la perspective de l’Exposition internationale de Bruxelles en 1935, le projet d’ériger un monument est confié à Marcel Wolfers (1886-1976). Son œuvre sera placée devant le Palais de l’Art Ancien lors de l’Exposition de 1935, puis offerte à la ville de Bruxelles ; cachée pendant la Seconde Guerre mondiale, elle restera dans les collections de l’hôtel de ville de Laeken. Parallèlement, Jules Destrée suggère qu’une « réplique » trouve place à Tournai. Dès 1934, il prend contact avec le bourgmestre Henri Carton et, très vite, pour acquérir l’œuvre s’associent « les Amis du Hainaut », la Société de l’Art wallon, la société historique de Tournai, le ministère de l’Instruction publique et les autorités tournaisiennes. Par rapport à l’œuvre présentée à Bruxelles, seule la couleur des émaux diffère sur la statue « tournaisienne » qui est inaugurée le 20 septembre 1936, dans le cadre des Fêtes de Wallonie. La presse locale affirme que les couleurs correspondent à celles du tableau de Pasture.

L’œuvre installée à Tournai en 1936 sera fortement détériorée par les bombardements allemands que subit la cité en mai 1940 ; la polychromie de Wolferts disparaît. Une rénovation récente s’est inspirée des couleurs du tableau peint par de le Pasture en 1435. Pour retrouver les couleurs choisies par Wolfers pour l’expo de 1935, il faut se référer à l’œuvre restaurée en 2012 qui se trouve à la maison communale de Laeken.

Le célèbre orfèvre bruxellois Marcel Wolfers transpose dans un ensemble en bronze émaillé le tableau de Roger de le Pasture présentant Saint Luc en train de peindre le portrait de la Vierge à l’Enfant. L’œuvre est spectaculaire et singulière. Sur un large socle en pierre bleue, quatre volumes rectangulaires se succèdent formant une sorte de long escalier. Sur la marche la plus basse, à gauche, Luc agenouillé est en train de représenter la Vierge allaitant Jésus, assise sur le cube le plus haut. La polychromie étonne, surtout sous les rayons du soleil. Au centre du socle en pierre bleue, a été gravée l’inscription :


ROGER DE LE PASTURE
DIT VAN DER WEYDEN
NE A TOURNAI EN 1399
MORT A BRUXELLES EN 1464


Marcel Wolfers est le fils de Philippe (1858-1929) et le petit-fils de Louis (1820-1892) Wolfers, maîtres-orfèvres établis à Bruxelles depuis la fin du XIXe siècle ; ils y possèdent et gèrent les ateliers « Wolfers frères » qui emploient une centaine de personnes et qui vont se spécialiser aussi dans la joaillerie et les arts décoratifs au début du XXe siècle en s’inscrivant résolument dans le courant de l’Art nouveau. Marcel Wolfers poursuit la tradition familiale en matière d’orfèvrerie et de sculpture, dans l’ombre de l’exceptionnel talent paternel, tout en innovant et en devenant l’un des meilleurs laqueurs du monde. Sans possibilité de vérifier l’information, on affirme qu’il avait retrouvé le secret des laques bleues perdu depuis les Ming.

Sculptant aussi bien la pierre que le bois, Marcel Wolfers a réalisé notamment le Chemin de croix de l’église de Marcinelle, ainsi que les monuments commémoratifs de la guerre à Louvain, Jodoigne et Woluwe-Saint-Pierre, sans oublier l’impressionnante statue du Cheval dit Wolfers, à La Hulpe. En orfèvrerie, le milieu de table Ondine, acquis en 2003 par la Fondation roi Baudouin, est une pièce exceptionnelle réalisée pour impressionner les visiteurs étrangers lors de l’Expo de 1958.

Sources

Marnix BEYEN, Jules Destrée, Roger de le Pasture et « les Maîtres de Flémalle ». Une histoire de science, de beauté et de revendications nationales, dans Philippe DESTATTE, Catherine LANNEAU et Fabrice MEURANT-PAILHE (dir.), Jules Destrée. La Lettre au roi, et au-delà. 1912-2012, Liège-Namur, Musée de la Vie wallonne-Institut Destrée, 2013, p. 202-217
Wallonia, 1913, p. 543-550
Jacky LEGGE, Mémoire en images : Tournai, t. II : Monuments et statues, Gloucestershire, 2005, p. 52-53, 97-98
Marcel Wolfers. Sculpteur-Laquer, Bruxelles, 1970
Marcel Wolfers. Ondine, pour l’Expo 58, Bruxelles, Fondation roi Baudouin, 2006
Anne-Marie WIRTZ-CORDIER, Nouvelle Biographie nationale, t. III, p. 304-312
Suzette HENRION-GIELE et Janine SCHOTSMANS-WOLFERS, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 616-618
La dynastie des Wolfers, maîtres de l’argent, exposition présentée au Design Museum de Gand, janvier-avril 2007
Françoise URBAN, Marianne DECROLY, Redécouverte d’un bronze laqué monumental de Marcel Wolfers, dans Association professionnelle de conservateurs-restaurateurs d’œuvres d’art, asbl, Bulletin, 2013, 4e trimestre, p. 21-28

Place Vieux Marché aux Poteries
7500 Tournai

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Stèle et bas-relief Léon RINQUET

Stèle et bas-relief Léon Rinquet, 1984
Réalisé par G. Leven
 

Stèle et bas-relief Léon Rinquet – © Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Située le long du chemin du Grand Biseû, à Hockai, face au cimetière, une stèle dédiée à Léon Rinquet, surnommé le Négus, rend hommage à une personnalité atypique des Hautes Fagnes. Le bas-relief a été réalisé en 1984, par G. Leven.

Docteur en Sciences physiques et mathématiques, Léon Rinquet (Liège 1891 – Xhoffraix 1974) est un professeur de mathématiques qui enseigne dans un athénée du Namurois lorsqu’il perd sa mère à l’entame des années 1930. Cette disparition le rend inconsolable, d’autant qu’il nourrit un profond ressentiment à l’égard du Ministère de l’Instruction publique qui, par une mutation, l’a éloigné de sa mère et l’a empêché de s’en occuper comme il le souhaitait. Fâché avec le monde qui l’entoure, Rinquet abandonne son métier et sa maison ; il a décidé de rechercher la solitude dans les Fagnes. En 1935, il arrive à Xhoffraix où il souhaite ouvrir un refuge pour les « vrais fagnards » et choisit d’acheter quatre hectares de landes et de l’installer sur « le Fraineu », entre la route de Hockai et le ru des « Trôs Marêts » d’où le panorama est inégalable.

En quelques mois, et malgré l’opposition des Amis de la Fagne qui craignaient la multiplication de tels projets, Rinquet construit une imposante cabane en bois, au toit de chaume, capable d’accueillir plusieurs hôtes, dans des conditions de vie consciemment « spartiates ». Le mauvais sort devait cependant s’acharner sur Rinquet : le 26 août 1937, la foudre s’abattait sur sa construction et la transformait en torchère, ruinant ses espoirs comme ses ressources. Néanmoins, il se remit à l’ouvrage et une cabane plus modeste était accessible quand survinrent les hostilités de la Seconde Guerre mondiale. Prise pour cible par les Allemands opérant des manœuvres dans les territoires annexés, la cabane de Rinquet ne résiste pas. Rinquet est contraint de trouver refuge à Hockai. Après la Libération, délivrant des cours particuliers dans la région, Rinquet reconstruit un troisième abri, bien différent des deux premiers, car aménagé dans le sol et finalement à son seul usage. C’est la neige cette fois qui a raison de la résistance du toit… Surnommé le Négus notamment en raison de son faciès, Rinquet réintègre progressivement la société et fait partie intégrante de la communauté villageoise de Xhoffraix. Son itinéraire atypique a fait l’objet de diverses légendes et les médias se sont intéressés à son histoire.

Le souvenir du Négus reste à ce point vivant dans la région qu’un monument lui a été consacré. Sur une stèle en pierre assez rustique, un sobre et artistique bas-relief signé G. Leven, et datant de 1984, représente le facies du personnage avec l’indication :

LEON RINQUET
DIT
« LE NEGUS »
1891-1974


Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse (articles de (Vers) l’Avenir)
http://lunoveleup.e-monsite.com/pages/dans-la-region/les-hautes-fagnes.html 
http://gite-ardennais.com/cabanedunegus.html 
http://www.neve-trek.be/roadbook/roadbook1/test.html (s.v. juin 2014)

 

Chemin du Grand Biseû
Face au cimetière
4970 Hockai

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Stèle Jean REY

Stèle à la mémoire de Jean Rey, réalisée à l’initiative des autorités communales, 17 mai 1996.
 

Stèle Jean Rey

Né à Liège en 1902, dont il fut conseiller communal de Liège (1935-1958) et député (1939-1958), ministre belge à deux reprises (1949-1950, 1954-1958), membre (1958-1970) puis premier président de la Commission économique européenne de 1967 à 1970, ministre d'État (1972), député européen (1979-1980), c’est finalement d’Esneux, dont il était devenu conseiller communal après la fusion des communes en 1976, que Jean Rey a reçu la première manifestation de reconnaissance posthume par l’élév

ation d’une stèle à sa mémoire. Depuis plusieurs années, en effet, il avait choisi de vivre dans le hameau de Cortil et il avait accepté, en octobre 1976, de participer au scrutin communal du « grand Esneux ». Sans surprise, il avait été élu en même temps qu’une jeune candidate socialiste, Jenny Levêque, qui allait devenir par la suite la bourgmestre de la localité, de 1995 à 1998 et de 2001 à 2006.
C’est sous sa présidence qu’une cérémonie inaugurale eut lieu le 17 mai 1996, en présence de la famille de Jean Rey, du président du parti libéral, Louis Michel, et d’un représentant du bourgmestre de Liège. Autour de la stèle commémorative, l’ensemble des convictions libérales, démocratiques, protestantes, wallonnes, fédéralistes et européennes de Jean Rey ont été rappelées. Premier président de la Commission européenne unifiée, Jean Rey avait aussi figuré parmi les tout premiers députés européens élus au suffrage universel (1979), même s’il fut forcé par la suite de céder son siège à Luc Beyer.

Sur une pierre calcaire relativement brute, une plaque métallique carrée est apposée de manière centrale. Entouré de douze étoiles, un cercle foncé laisse apparaître la tête de Jean Rey, légèrement tournée vers la droite. Sous ce portrait, sont mentionnées trois références à ses multiples engagements :

« Jean Rey
1902-1983
Ministre d’État
Conseiller communal d’Esneux
Président de la Commission
des Communautés européennes
1967-1970 ».

Un parterre de fleurs entoure l’avant de la stèle, tandis qu’un arbre a été planté à l’arrière, destiné à abriter le monument d’ici quelques années.

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse, dont Le Soir, 18-19 mai 1996
Francis BALACE, Willy DE CLERCQ, Robert PLANCHAR, Jean Rey, liégeois, européen, homme politique, Éditions de l’Université de Liège, Liège, 2002
Paul DELFORGE, Jean Rey, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. III, p. 1424-1427
Demain, Études et Expansion, Numéro spécial à la Mémoire de Jean Rey, 1983, n° 295
Robert FENAUX, Jean Rey, Enfant et artisan de l’Europe, Éditions Labor, Bruxelles, 1972

 

Parc du château Brunsrode, dit château Lieutenant 
4130 Tilff (Esneux)

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Monument Paul REUTER

Monument Paul Reuter, 1948 
Réalisé par Victor Demanet.


Au pied de l’Église Saint-Donat, près de la rue du Bastion, un monument  dédié à Paul Reuter (Clausen 1865 – Arlon 1949) rappelle le souvenir du bourgmestre d’Arlon. Placé dans un espace arboré, le buste réalisé par Victor Demanet a été inauguré au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en présence

Monument Paul Reuter – © Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

du mandataire communal qui, quelques mois avant sa disparition, recevait ainsi le témoignage public de la reconnaissance de ses administrés.

Successeur de Numa Ensch-Tesch en 1921, Paul Reuter est avant tout un municipaliste qui perpétue une tradition libérale bien ancrée dans le chef-lieu de la province de Luxembourg. Depuis 1830 en effet, le parti libéral a toujours compté l’un de ses représentants à la tête du collège communal. Après Numa "le bâtisseur" (bourgmestre de 1901-1921), auquel il était apparenté, Paul Reuter abandonne l’échevinat de l’Instruction publique qu’il exerçait depuis 1895 pour ceindre l’écharpe maïorale. Il conforte la majorité libérale durant toute la durée de son mandat qui s’achève en 1949. Seules les occupations allemandes de 14-18 et de 40-45 ont été des périodes de contestation des choix politiques de Paul Reuter. Pour celui qui est né à Clausen, au grand-duché de Luxembourg en 1865, et qui défend la primauté de l’usage du français, la question de l’emploi des langues restera en permanence un enjeu important. Bourgmestre d’Arlon siégeant à l’Assemblée wallonne (1927-1940), Paul Reuter est écarté du maïorat d’Arlon par les autorités allemandes en 1941. Après trois années d’activités clandestines périlleuses, il reprend son maïorat le 10 septembre 1944, jour de la libération d’Arlon.

L’inauguration du monument Reuter, en 1948, est l’occasion d’honorer plus de cinquante ans d’activités communales. Le monument a été commandé à Victor Demanet (Givet 1895 – Namur 1964). Ayant grandi au confluent de la Sambre et de la Meuse où ses parents tiennent un commerce d’antiquités au cœur de la ville, le jeune Namurois était appelé à leur succéder si ses études à l’Académie des Beaux-Arts (1916-1919) où il est l’élève de Désiré Hubin, ne lui avaient pas donné le goût de la pratique de la sculpture. La révélation lui vient des œuvres de Constantin Meunier et surtout de la thématique sociale et ouvrière développée par le peintre/sculpteur bruxellois.

Lors d’un séjour à Paris, les œuvres de Rude, Carpeaux et Rodin finissent de convaincre Demanet que sa voie est dans la sculpture. Remarqué au Salon des Artistes français de Paris, en 1923, pour son buste de Bonaparte à Arcole, Victor Demanet s’impose rapidement comme un portraitiste de talent auquel sont confiées de nombreuses commandes publiques. Comme d’autres artistes de son temps, il réalise plusieurs monuments aux victimes des deux guerres. Tout en poursuivant une œuvre plus personnelle à l’inspiration comparable à celle de Constantin Meunier, avec de nombreux représentants du monde du travail, Victor Demanet est aussi l’auteur de plusieurs dizaines de médailles. C’est un artiste renommé et en pleine maturité qui signe le buste de Paul Reuter, placé à Arlon sur un piédestal en grès d’Esch-sur-Alzette, à la facture simple. En bronze, ce buste présente la particularité d’être plus élancé que les bustes habituels. 

La dédicace sur la face avant mentionne simplement :

A PAUL REUTER
LA POPULATION ARLONAISE RECONNAISSANTE 
1865 - 1948

 

http://www.routeyou.com/location/view/47438337/le-buste-au-bourgmestre-paul-reuter.fr (s.v. juillet 2013) 
Paul DELFORGE, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, 2001, t. III, p. 1416 
Bulletin trimestriel de l’Institut archéologique du Luxembourg, 1949, 25e année, p. 40-41 
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 397 
Jacques TOUSSAINT, Victor Demanet dans Arts plastiques dans la province de Namur 1800-1945, Bruxelles, Crédit communal, 1993, p. 147

Au pied de l’Église Saint-Donat
6700 Arlon

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Buste Jean-Simon Renier

Buste Jean-Simon Renier, réalisé par Clément Vivroux en 1883.
 

Buste Jean-Simon Renier (Verviers)

C’est en 1930, dans le cadre du centenaire de l’Indépendance belge, que des « citoyens reconnaissants » de Verviers prennent l’initiative d’élever un monument en l’honneur de Jean-Simon Renier, le fondateur du Musée communal. À l’origine, ce mémorial est inauguré sur le square du théâtre de Verviers ; par la suite, il est déplacé et il se trouve désormais, toujours à proximité du théâtre, mais dans la rue Xhavée, au cœur du parc Fabiola. Victime de multiples inscriptions et graffitis, le buste ainsi que son socle ont fait l’objet d’une rénovation majeure à l’automne 2011.

Dessinateur particulièrement doué, Jean-Simon Renier (1818-1907) révéla ses talents au moment où il fréquentait les cours de l’École industrielle et commerciale de Verviers (vers 1831). Intégré chez l’industriel Houget dans son bureau de dessinateur de machines pendant trois ans, Renier obtient une bourse de la Loge des Philadelphes, tandis que, nouveau directeur de l’Académie de Liège, le peintre verviétois Vieillevoye attire le jeune homme vers cette formation (1838) qui sera suivie d’un séjour à l’Académie de Bruxelles (auprès de Navez), puis à celle des Beaux-Arts de Paris (auprès d’Eugène Delacroix). Lauréat de la Fondation Darchis, le jeune Verviétois quitte Paris (1844-1848) pour Rome (1

848-1853), où le contact des antiques et de l’archéologie l’influence définitivement. Après un détour par Naples, il est nommé professeur de dessin à Verviers (1854), où il se consacre davantage à l’art, à l’archéologie et à l’histoire locale qu’à la peinture. En effet, excellent « copieur », il ne parvient pas à exceller et à trouver son originalité. Parti peintre à Rome, il revient à Verviers archéologue… Si plusieurs de ses tableaux sont accrochés dans des églises des villages du pays de Herve, l’essentiel de son œuvre disparaîtra dans un incendie. Conscient de ses limites, Renier met son don pour le dessin au service de l’histoire et de l’archéologie. Dessins édités dans ses nombreuses publications, les œuvres de Renier témoignent du souci du détail et du don d’observation. Faisant œuvre de collecteur et de collectionneur, il rassemble chez lui une grande quantité d’objets et de documentations qui constituent le fonds du Musée communal quand la ville de Verviers décide de le créer en 1884 : l’ancien hospice des Vieillards, désaffecté mais en bon état, devient le Musée Renier. Lors de l’inauguration du musée, le sculpteur Clément Vivroux offrit le buste en marbre blanc à J-S. Renier. Co-fondateur de la Société de langue et de littérature wallonnes (1856), auteur de plus de 500 spots rimés en wallon (1871), il est aussi le fondateur de la Société verviétoise d’archéologie et d’histoire (1897) dont il est le premier président, ainsi que du Cercle littéraire verviétois et de la Société des Fous.
C’est la reproduction d’un buste réalisé en 1883 par Clément Vivroux et offert à J-S. Renier en 1884, déposé sur un haut socle en pierre bleue, qui est inaugurée en 1930, à la suite d’une souscription publique. Sur la face avant, apparaît la mention suivante :


J.S.RENIER
1818–1907
PEINTRE
HISTORIOGRAPHE
__
FONDATEUR
DU
MUSEE COMMUNAL


Né à Liège aux premiers jours de la Belgique, Clément Vivroux (1831-1896) reçoit une formation artistique à l’Académie de sa ville natale, avant de prendre la route de Paris où il devient l’élève de Toussaint à l’École des Beaux-Arts. Sculpteur sollicité pour la réalisation de plusieurs autres monuments verviétois importants (comme la fontaine Ortmans ou la fontaine David, ainsi que les quatre « pères de l’Église », en pierre de France, dans l’église Saint-Remacle), Clément Vivroux est le frère d’Auguste Vivroux et appartient à une dynastie liégeoise qui s’adonne à la sculpture, à la peinture et à l’architecture depuis le début du XIXe siècle et jusqu’à la fin du XXe siècle, signant de multiples constructions dans l’est de la Wallonie.

Sources

La Vie wallonne, 2e année, n°XVII, 15 janvier 1922, p. 219-223
Jules PEUTEMAN, Un Verviétois illustre. Jean-Simon Renier (1818-1907), dans Avant-Poste, numéro spécial J-S. Renier, octobre 1929, n°4, p. 2-40
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. II, p. 556
Musée des Beaux-Arts, Exposition Le romantisme au pays de Liège, Liège, 10 septembre-31 octobre 1955, Liège (G. Thone), s.d., p. 70, 142
LEJEAR, dans Bulletin de la société d’archéologie et d’histoire de Verviers, Verviers, 1911, t. XI, p. 1-21
Charles DEFRECHEUX, Joseph DEFRECHEUX, Charles GOTHIER, Anthologie des poètes wallons (…), Liège, Gothier, 1895, p. 62-63
Anne-Françoise GOFFAUX, Bernard WODON, Répertoire des architectes wallons du XIIIe au XXe siècle, Namur, 1999, Études et documents, série Aménagement et Urbanisme n°4, p. 142-152
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 760

 

 
 

 

rue Xhavée, parc Fabiola (1930) – 4800 Verviers

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Statue Renard JAMAR ou JAYMAERT

Statue Renard Jamar ou Jaymaert, réalisée par Maurice de Mathelin, 16 décembre 1901.


Quelques années après la décoration de la façade du Palais provincial de Liège par de multiples statues et bas-reliefs évoquant l’histoire de la principauté, est construit un nouveau bâtiment destiné à accueillir les services de la poste. Situé entre la rue de la Régence, la place Cockerill, le quai sur Meuse et la rue Matrognard, l’imposante construction est l’œuvre de l’architecte Edmond Jamar (1853-1929) qui s’inspire du style ogival du XVIe siècle qui avait présidé à la (re)construction du Palais des Princes-Évêques. Ce style se retrouve sur la façade des trois premières rues citées. Afin de décorer la partie supérieure du bâtiment qualifié de néo-gothique, l’architecte confie au statuaire Maurice de Mathelin (Tintigny 1854-Liège 1905) le soin de réaliser six grandes statues en bronze, représentant six bourgmestres de Liège des XVe, XVIe et XVIIe siècles, soit la période où le style du bâtiment prévalut. Les six statues sont nichées sur les façades et, à leur pied (plus exactement entre leurs pieds), un petit écu représente les armoiries du bourgmestre en question.

D’autres décorations apparaissent sur les façades du bâtiment construit sous l’impulsion du ministre Van den Peereboom : ainsi, neuf autres statues, plus petites, n’illustrent pas un personnage particulier, mais une fonction en rapport avec un métier exercé aux XVe et XVIe siècles ; elles ont été réalisées par l’atelier de Mathelin. À l’origine, elles étaient dorées (BROSE). Outre un grand blason au-dessus de la porte d’entrée principale, où apparaît la devise « l’Union fait la force », une série d’autres blasons, plus petits, dus au sculpteur Joseph Wéra, évoquent quelques bonnes villes, tandis qu’on retrouve encore le blason du gouverneur de la province de Liège en fonction au moment de la construction de l’hôtel des postes, ainsi qu’un cor postal, un lion de bronze tenant drapeau et trompette et un médaillon de près de 3 mètres de diamètre qui représente le bâtiment lui-même… Parmi les six grandes statues, celle qui est la plus proche de la rue de la Régence représente Renard Jamar (c. 1613-), aussi orthographié Jaymaert. 

Ancien colonel au service de la France, seigneur de Fréloux, Renard Jamar épouse Catherine de Bex, la fille de Pierre de Bex (c. 1570-1651) qui, après Guillaume

Statue Renard Jamar ou Jaymaert (Liège)

 Beeckman et Sébastien La Ruelle, est devenu l’un des porte-parole du parti populaire liégeois au XVIIe siècle, les Grignoux. Avocat, « jurisconsulte distingué », négociateur de la paix de 

Tongres (1640), exilé, Pierre de Bex exerce la fonction de bourgmestre pour la 3e fois en 1647, succédant à… Renard Jamar élu dans des conditions confuses et surtout insurrec

tionnelles l’année précédente à la suite de ce que l’histoire a appelé la « Saint Grignou ». Affolée par l’idée que le parti des Chiroux a introduit des soldats espagnols dans l’hôtel de ville, la foule a envahi les rues de Liège au moment où l’on procède à l’élection annuelle des magistrats ; Grignoux et Chiroux s’affrontent violemment, tandis que l’élection de deux bourgmestres Chiroux est vivement contestée (24 et 25 juillet 1646). Plusieurs dizaines de morts sont dénombrés. Le retrait de Charles de Méan contribue à la pacification des deux ca

mps. Candidat du parti des Grignoux, Renard Jamar exercera la magistrature pendant un an avec François de Liverlo. Alors que la plupart des Chiroux fuient Liège, la cité sera aux mains, sans partage, des Grignoux jusqu’en 1649. Le rôle de Jamar dans l’excitation de la foule en juillet 1646 paraît établi (Polain). En juillet 1649, les soldats impériaux in

vestissent Liège et rétablissent le prince-évêque. La répression est terrible ; à la tête des Liégeois qui tentèrent de s’opposer aux assaillants à hauteur de Cornillon, Jamar disparaît de la vie politique liégeoise sous le régime sévère du prince-évêque Maximilien-Henri de Bavière. Sa statue sur la Grand Poste le pose en conquérant, vêtu d’une lourde cuirasse, le regard fixant l’horizon, tandis qu’il tient une longue épée dans la main droite. C’est ainsi que Maurice de Mathelin se le représentait.

Fils de Jean-Baptiste de Mathelin de Papigny, le jeune Luxembourgeois a été l’élève de Prosper Drion à l’Académie de Liège, avant de faire une carrière à la fois de peintre, de médailleur et de sculpteur. Décédé à l’âge de 50 ans, il laisse principalement des bustes et des portraits. Marié à Louise d’Andrimont, il est notamment l’auteur du buste du bourgmestre Jules d’Andrimont conservé au Musée de l’Art wallon (du moins avant son démantèlement). Plusieurs commandes publiques permettent à Mathelin de réaliser des sculptures le plus souvent allégoriques, tant à Bruxelles, qu’en Wallonie. Ainsi est-il l’auteur de l’une des sculptures en bronze de la façade de l’Université de Liège, place du XX août (L’Étude). Peu avant sa mort, il avait réalisé les grandes statues situées au-dessus du fronton central du Palais des Fêtes de l’Exposition universelle de Liège, en 1905. Les statues réalisées pour la Grand Poste furent inaugurées en même temps que le bâtiment de Jamar, l’architecte, le 16 décembre 1901.

Sources

Yvon LABARBE, Hôtel des Postes de Liège, Fexhe, 1999, en particulier p. 47-48
Charles BURY, Les Statues liégeoises, dans Si Liège m’était conté, n°37, hiver 1970, p. 26
http://gw.geneanet.org/gounou?lang=fr&p=maurice&n=de+mathelin+de+papigny 
http://www.chokier.com/PDF/Devolution.pdf (s.v. mars 2015)
Louis ABRY, Jean-Guillaume LOYENS, Recueil héraldique des bourguemestres de la noble cité de Liège…, Liège, 1720, p. 413-414
Mathieu-Lambert POLAIN, Esquisses ou récits historiques sur l’ancien pays de Liège, Bruxelles, 3e éd., 1842, p. 285-294
Bruno DEMOULIN, Recueil des instructions aux ambassadeurs et ministres de France, Principauté de Liège, Paris, Ministère des Affaires étrangères, 1998, XXXI p. 28-29
Christine RENARDY (dir.), Liège et l’Exposition universelle de 1905, Bruxelles, La Renaissance du livre, 2005, coll. « Les Beaux livres du Patrimoine », p. 197
Noémie WINANDY, La Grand-Poste d’Edmond Jamar, dans Un Siècle de néogothique 1830-1930, numéro spécial de Les Nouvelles du Patrimoine, janvier-février-mars 2010, n°126, p. 30-31
Ulysse CAPITAINE, dans Biographie nationale, t. 2, col. 395-398
Félix MAGNETTE, dans La Vie wallonne, novembre 1933, CLIX, p. 69-78 ; décembre 1933, CLX, p. 114-115
Félix MAGNETTE, Précis d’histoire liégeoise à l’usage de l’enseignement moyen, Liège, 1929, 3e éd., p. 222-240
Jean BROSE, Dictionnaire des rues de Liège, Liège, Vaillant-Carmanne, 1977, p. 152

 

 

Rue de la Régence 
4000 Liège

carte

Paul Delforge

Diffusion Institut Destrée - Sofam

Statue Bruno RENARD

Statue de Bruno Renard, avril 2004.
Réalisée par Christine Jongen.

Bénéficiant d’un financement inscrit dans le cadre du Phasing out de l'Objectif 1, la ville de Tournai entreprend de valoriser davantage son patrimoine historique, au-delà du beffroi, de la cathédrale et du Pont des Trous. Via l’Intercommunale Ideta qui est le maître d’œuvre, un plan stratégique privilégie en effet depuis 1995 le développement touristique du Hainaut. Se concentrant sur le cœur historique de Tournai, les autorités locales confient à l’artiste plasticienne Christine Jongen (1949-) le soin de mettre en place une quinzaine de statues en bronze dans un parcours d’interprétation à travers la « Cité des cinq Clochers ». Ces statues sont les étapes marquantes d’un circuit fortement balisé par une signalétique particulière. Touristes comme habitants de la cité sont ainsi invités à une promenade de deux heures, jalonnée de 43 étapes. Afin de garantir la qualité de l’initiative communale, le bourgmestre, Roger Delcroix, a confié à un comité scientifique composé d’historiens, d’archéologues et de spécialistes des traditions locales la mission d’encadrer le projet. Répondant aux critères souhaités, Christine Jongen implante quinze statues sur les trottoirs de Tournai, entre la Grand-Place, l’Escaut, la Tour Saint-Georges et le Fort Rouge. De cette initiative, toutes les étapes ne sont pas restées intactes quelques années plus tard. C’est le cas de Bruno Renard qui a quitté la place Saint Pierre sans laisser d’adresse. Étant réalisées en bronze, les statues sont malheureusement convoitées par des ferrailleurs peu scrupuleux qui ne leur reconnaissent qu’une valeur de refonte, estimation bien dérisoire à côté de leur valeur artistique. Dès l’été 2011, les autorités tournaisiennes avaient enregistré les premiers actes malveillants.

Née à Bruxelles, formée en psychologie à l’Université libre de Bruxelles, Christine Jongen travaille comme journaliste à l'hebdomadaire Notre Temps (1975-1976), avant de se consacrer entièrement à la sculpture. Laissant son inspiration se nourrir aux sources les plus variées, de la Renaissance européenne aux grandes traditions asiatiques ou d’Amérique, elle s’oriente vers la peinture abstraite quand elle s’installe en France au début des années 1980. Menant aussi une réflexion continue sur l’art dans son essai À la recherche de formes, paru pour la première fois à la fin les années 1980, elle présente ses œuvres à plusieurs reprises (Paris, Bruxelles, Genève, Bordeaux, Bézier, Montréal, Rome, Barcelone, Avignon, Padoue, etc.) et dans divers salons d'art français (2000-2003).

Pour Tournai, Christine Jongen crée quinze statues, en bronze, de 70 à 75 centimètres de haut, qui toutes sont déposées sur des piliers de 2,8 m de haut. Coulées dans les ateliers de la fonderie Francart, à Crisnée, les statues sont autant de références au passé de Tournai, évoquant des fonctions (chanoine, évêque), des « activités » (tailleurs de pierre, portier, arbalétrier), voire des personnages historiques, tels Childéric, Louis XIV, Pasquier Grenier et l’architecte Bruno Renard (Tournai 1781 - Saint-Josse-ten-Noode 1861).

Ce dernier n’est pas seulement le concepteur du Grand Hornu avec l’industriel Henri De Gorge. Architecte « municipal » de Tournai depuis 1808, il résistera aux révolutions politiques. Professeur à l’Académie de dessin, où il introduit un cours de dessin industriel, il a un véritable don pour le dessin (en témoignent les planches parues dans la Monographie de Notre-Dame de Tournai, et celles de l’ouvrage de Lecoq intitulé : Coup d’ail sur la statistique commerciale de la ville de Tournai, 1817). Après la construction de la monumentale Manufacture impériale de Tapis (1811), il contribue au développement urbanistique de la cité aux cinq clochers, laissant poindre son goût pour un romantisme s’inspirant du Moyen Âge. Ses plans façonnent le visage de la ville (Salle des Concerts, abattoirs, cour d’honneur de l’Hôtel de ville, la galerie et la salle carrée du Musée d’histoire naturelle, restauration du beffroi, etc.). Quant à ses constructions personnelles (Maison du Jeu de Paume, hôtel Peeters, Château de la Chartreuse à Chercq, etc.), elles sont aussi remarquables que son projet industriel pour Hornu. Membre de la Commission des Monuments (1837), membre fondateur de la Société historique et littéraire de Tournai (1846), membre effectif de la classe des Beaux-Arts de l’Académie de Belgique (1852), déjà honoré de son vivant par la ville de Tournai, en 1858, pour ses cinquante années passées comme architecte communal et comme professeur à l’Académie, Bruno Renard reste une personnalité majeure du riche passé tournaisien.

 

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse (dont NordEclair, août 2011)
http://christine.jongen.pagesperso-orange.fr/GrilleJongen.htm (s.v. décembre 2013)
http://www.badeaux.be/Balisages/Bal5/Site15/Site15.html 
Anne-Françoise GOFFAUX, Bernard WODON, Répertoire des architectes wallons du XIIIe au XXe siècle, Namur, 1999, Études et documents, série Aménagement et Urbanisme n°4, p. 123
E-J. SOIL DE MORIALMÉ, dans Biographie nationale, t. XIX, col. 42-45
Histoire de la Wallonie (L. GENICOT dir.), Toulouse, 1973, p., p. 255, 391
Marie-Laure ROGGEMANS, Jean-Marie DUVOSQUEL, Autour du Grand-Hornu, Bruxelles, Crédit communal & Fondation roi Baudouin, 1989, p. 12

Place Saint Pierre, 7500 Tournai

carte

Paul Delforge