
Gourmet Olivier
Culture, Cinéma
Namur 22/07/1963
Déjà repéré par les frères Dardenne au milieu des années 1990, le comédien Olivier Gourmet obtient son premier rôle au cinéma (un père de famille odieux) quand il tourne dans La Promesse (1996), film qui vaut aux cinéastes wallons leur première participation au festival de Cannes, à la Quinzaine des réalisateurs. Au Festival International du Film francophone de Namur, le film rafle le Bayard d’Or du meilleur film, le prix du public, tandis que le Bayard d’Or 1996 du meilleur comédien revient à Olivier Gourmet qui reçoit ainsi une première belle reconnaissance en son pays pour sa première au cinéma. Toujours dans un second rôle, Olivier Gourmet est aussi de l’aventure Rosetta (film qui remporte la Palme d’Or en 1999). En 2002, il tient le premier rôle dans Le Fils, film des frères Dardenne à nouveau sélectionnés dans la compétition officielle du Festival de Cannes. Alors que des candidats aussi prestigieux que Jack Nicholson, Adrien Brody et Ralph Fiennes sont pressentis pour le Prix d’Interprétation masculine, le Jury du Festival, présidé par David Lynch, retient la prestation d’Olivier Gourmet. Il reçoit, ce jour-là, sa toute première récompense internationale d’envergure, pour son interprétation d’un professeur en menuiserie dans un centre de réinsertion sociale, qui partage un secret avec un jeune apprenti. Pour ce rôle de menuisier, il reçoit également le Prix Joseph Plateau 2002 attribué dans le cadre du festival du film à Gand, ainsi que pour son rôle d’avocat dans Une part du ciel (2002) de Bénédicte Liénard. Il est encore distingué au festival de Téhéran 2003.
Menuisier, tel était le métier de son grand-père, tandis que son père était marchand de bestiaux et que sa mère tenait un hôtel-restaurant au cœur de l’Ardenne. En grandissant à Mirwart, le jeune Gourmet rêvait de devenir clown, commentateur sportif, voire de faire du théâtre, surtout depuis ce jour de 1977 où il a dû monter sur scène au pied levé dans le spectacle du Collège d’Alzon, à Bure (Tellin), où il suit des humanités latin-sciences. Inscrit en Biologie à l’Université de Liège pour se conformer aux volontés parentales, il n’y trouve pas son bonheur intellectuel, préférant suivre en élève libre les cours d’Histoire de l’art. En 1983, il est autorisé à s’inscrire au Conservatoire de Liège, où il clôture son parcours en deux ans, avec le Premier Prix (1985). De ses professeurs engagés aux valeurs fortes, il reçoit un enseignement qui le marquera durablement. Souhaitant poursuivre sa formation à Paris, il veut intégrer l’ancien Centre dramatique national de Nanterre, devenu en 1982 le Théâtre Nanterre-Amandiers dirigé par Patrick Chéreau et Catherine Tasca ; en attendant une audition, il suit avec succès le cours Florent comme élève libre, et quand Chéreau renonce à poursuivre ses formations à Nanterre, Olivier Gourmet a déjà commencé à jouer, sur les planches à l’Opéra de Liège, le rôle de D’Artagnan, dans Scaramouche.
Acteur de théâtre pendant dix ans, Gourmet se glisse dans une quinzaine de rôles au Théâtre de la Place à Liège, ainsi qu’à Bruxelles au Théâtre national ou au Varia. Jouant dans Le Mariage de Figaro ainsi que dans Victor ou les enfants au pouvoir monté par Charlie Degotte, le comédien soutenu par Jean-Louis Colinet interprète volontiers du Brecht – La Mère par Jacques Delcuvellerie –, tout en se présentant à l’affiche de L’Annonce faite à Marie, de L’Histoire du soldat, ainsi que de Café des patriotes mis en scène par Philippe Sireuil. En 1990, il tourne un premier court-métrage, Hostel Party, de Roland Lethem, mais c’est au milieu des années 1990 qu’il rencontre Jean-Pierre Dardenne au Conservatoire de Liège et que l’homme de théâtre découvre vraiment le monde du cinéma, avec le succès que l’on sait auprès des frères Dardenne.
En 1997, Olivier Gourmet joue dans Le Signaleur, court-métrage de Benoît Mariage, avec Benoît Poelvoorde et Bouli Lanners. Il croise surtout la route de Patrick Chéreau qui lui confie un rôle dans Ceux qui m’aiment prendront le train (1998), aux côtés notamment de Jean-Louis Trintignant. Happé par le cinéma, il s’éloigne définitivement du théâtre. En 2000, acteur principal dans National 7, il incarne un myopathe émouvant, révolté par l’infantilisation dont il est victime dans un foyer. Les frères Dardenne lui confient encore le rôle du patron d’une pâtisserie dans Rosetta (1999), puis celui d’un menuisier qui engage l’assassin de son fils dans Le Fils (2002). Une fidélité certaine aux frères Dardenne guide l’acteur que l’on retrouve dans L’Enfant (2005), Le Silence de Lorna (2008), Le Gamin au vélo (2011), Deux Jours, une nuit (2014) et La Fille inconnue (2016), dans des compositions diverses. Il vole désormais de ses propres ailes, le nom d’Olivier Gourmet apparaissant au générique de plus d’une centaine de films depuis 1996.
Le cinéma d’auteur comme le cinéma populaire lui offrent de nombreux rôles, lui permettant de tourner sous la direction de Cédric Klapisch, Bertrand Tavernier, Michaël Haneke, Bruno Podalydès, Costa-Gavras, Régis Warnier, Dany Boon, Kiyoshi Kurosawa et bien d’autres réalisateurs. Professeur attentif, ministre impitoyable, amoureux transi, gangster, docker-syndicaliste, forain sadique, chef de bande, avocat à plusieurs reprises, celui qui incarne Pierre-Joseph Proudhon dans Le Jeune Karl Marx (2017) et le ministre Paul Reynaud dans De Gaulle (2020) adore se glisser dans les rôles les plus divers. Aux côtés de Vincent Cassel et d’Emmanuelle Devos, il participe au succès de Sur mes lèvres (2001) de Jacques Audiard, le film décrochant trois César en 2002. Souvent associé à des productions françaises, il accepte volontiers des projets « belges », ou belgo-français. Avec Benoît Mariage, il apparaît dans son propre rôle au casting de Cowboy (2007), aux côtés de Benoît Poelvoorde qu’il retrouvera à l’affiche de Rien à déclarer (2010), interprétant alors un moine de l’abbaye de Chimay. Acteur principal de Robert Mitchum est mort (2010), un road movie qui l’emmène sur les routes de la Pologne et de la Norvège, il est aussi à l’affiche du thriller Blanc comme neige (2010) de Christophe Blanc. Pour le réalisateur Benoît Streker, il joue dans Le monde nous appartient (2012), ainsi que dans Noces (2017) ; il participe à La Marche (2013) de Nabil Ben Yadir, film qui s’inspire de la marche pour l’égalité et contre le racisme de 1983 ; pour Marion Hänsel, il intervient dans La Tendresse (2013) et En amont du fleuve (2017) ; pour François Troukens et Jean-François Hensgens, il accepte d’être à l’affiche des Tueurs (2017), dans un thriller noir, premier film du genre du cinéma wallon qui s’inspire fortement de l’énigme judiciaire belge que demeure l’affaire des Tueurs du Brabant ; pour son rôle de tueur, il est nommé au Magritte 2019 du meilleur acteur ; dans Tortues (2023), de David Lambert, il forme un couple gay avec Dave Johns.
Présent dans des films relatant des épisodes historiques et à contenu politique, il est aussi partie prenante de productions grand public, comme Le Mystère de la Chambre jaune (2003), Les fautes d’orthographe (2004), ou encore Les brigades du Tigre (2006), Coluche (2008), Mesrine (2008), Go Fast (2008), Bancs publics (Versailles Rive-Droite) (2009) ou encore Vénus noire (2010)… En 2019, dans le film d’Alexis Michalik Edmond, il interprète Constant Coquelin, créateur du rôle de Cyrano de Bergerac lorsque la pièce fut jouée la première fois. La même année, il endosse l’habit et l’habitus de l’avocat éric Dupont-Moretti dans Une intime conviction. Il est aussi cadre supérieur dans une grande compagnie de fret maritime, victime du système auquel il avait consacré sa vie (Ceux qui travaillent, prix du public au festival d’Angers et sélection officielle au festival de Locarno 2019). En 2021, il interprète Félix Grandet, dans Eugénie Grandet, œuvre inspirée du roman de Balzac. Il joue aussi beaucoup pour la télévision, dans des téléfilms comme dans des mini-séries à succès, en tant que gendarme (Sambre, 2023) ou docker-syndicaliste (De Grâce, 2024). Son rôle dans L’Exercice de L’État (2011) lui vaut le prix du meilleur acteur lors de la troisième remise des Magritte du cinéma 2014, ainsi qu’une nomination au César 2012 du meilleur acteur. Pour le Magritte 2011, il avait été nommé pour Un ange à la mer et, en 2014, il reçoit le César du meilleur acteur dans un second rôle pour Grand Central, un film de Rebecca Zlotowski, avec Léa Seydoux et Tahar Rahim. Trouvant un plaisir infini à jouer tous ces rôles dans tous ces films, Olivier Gourmet se ressource au cœur de la nature ardennaise, où il continue de résider avec les siens.
Lorsqu’il reçoit son prix à Cannes, en 2002, les premiers mots que prononce Olivier Gourmet devant le public enthousiaste et la presse internationale sont destinés aux comédiens belges : voulant partager ce prix avec eux, il rappelle les difficultés matérielles dans lesquelles ils font leur métier. Aimant souligner avec le sourire être « un comédien des films fauchés », il évoque volontiers le fait qu’il lui est arrivé de mener la lutte pour la création d’un réel statut des acteurs et un salaire décent, n’hésitant pas à faire grève pour obtenir satisfaction. Professeur au Conservatoire de Liège où, depuis 2004, il donne le cours de Jeu devant la caméra avec Benoît Dervaux aux étudiants de dernière année, il est fortement impliqué dans une série de mouvements qui défendent le maintien de norme élevée d’encadrement dans les formations de comédiens (2017/2019) et qui prônaient l’autonomie de l’école liégeoise de Théâtre par rapport au Conservatoire (2006/2009).
Cinéma
Hostel Party (1990)
La Promesse (1996)
Le Signaleur (1997)
Le Bal masqué (1998)
Je suis vivante et je vous aime (1998)
J’adore le cinéma (1998)
Ceux qui m’aiment prendront le train (1998)
Cantique de la racaille (1998)
Nadia et les Hippopotames (1998)
Le Voyage à Paris (1999)
Rosetta (1999)
Peut-être (1999)
Nationale 7 (2000)
Toreros (2000)
Sauve-moi (2000)
Princesses (2000)
Sur mes lèvres (2001)
Petite Sœur (2001)
Mercredi, folle journée ! (2001)
Le Lait de la tendresse humaine (2001)
De l’histoire ancienne (2001)
Un moment : de bonheur (2002)
Une part du ciel (2002)
Peau d’ange (2002)
Le Fils (2002)
Laissez-passer (2002)
Le Temps du loup (2003)
Les Mains vides (2003)
Le Mystère de la chambre jaune (2003)
Adieu (2003)
Trouble (2004)
Pour le plaisir (2004)
Les Fautes d’orthographe (2004)
Folle Embellie (2004)
Quand la mer monte... (2004)
Le Pont des Arts (2004)
La Petite Chartreuse (2005)
Le Couperet (2005)
L’Enfant (2005)
Le Parfum de la dame en noir (2005)
Mon fils à moi (2005)
Sauf le respect que je vous dois (2005)
Les Brigades du Tigre (2006)
Congorama (2006)
Mon colonel (2006)
Jacquou le Croquant (2007)
Pars vite et reviens tard (2007)
Cowboy (2007)
Le Silence de Lorna (2008)
Home (2008)
Go Fast (2008)
Coluche : L’Histoire d’un mec (2008)
Mesrine : L’Ennemi public no 1 (2008)
Bancs publics (Versailles Rive-Droite) (2009)
Pour un fils (2009)
L’Amour caché (2009)
Altiplano (2009)
Vénus noire (2010)
Blanc comme neige (2010)
Un ange à la mer (2010)
Rien à déclarer (2010)
Robert Mitchum est mort (2010)
Légitime Défense (2011)
Le Roman de ma femme (2011)
Le Gamin au vélo (2011)
L’Exercice de l’État (2011)
Hénaut Président (2012)
Le monde nous appartient (2012)
Le Guetteur (2012)
La Tendresse (2013)
Violette (2013)
Grand Central (2013)
La Marche (2013)
Deux Jours, une nuit (2014)
Terre battue (2014)
L’Affaire SK1 (2014)
Madame Bovary (2014)
Le Temps des aveux (2014)
Jamais de la vie (2015)
En mai, fais ce qu’il te plaît (2015)
L’Odeur de la mandarine (2015)
Chocolat (2016)
La Fille inconnue (2016)
L’Ami, François d’Assise et ses frères (2016)
Noces (2017)
Le Secret de la chambre noire (2017)
Sage Femme (2017)
En amont du fleuve (2017)
Le Jeune Karl Marx (2017)
Grand Froid (2017)
La Promesse de l’aube (2017)
Tueurs (2017)
L’Échange des princesses (2017)
Un peuple et son roi (2018)
Edmond (2019)
Une intime conviction (2019)
Ceux qui travaillent (2019)
Qu’un sang impur... (2020)
De Gaulle (2020)
La Terre des hommes (2020)
Rouge (2020)
Eugénie Grandet (2021)
Entre la vie et la mort (2022)
Simone, le voyage du siècle (2022)
Couleurs de l’incendie (2022)
L’Établi (2023)
Farang (2023)
Les Tortues (2023)
Colocs de choc (2024)
Retro Therapy (2024)
Sources
Centre de Recherche & Archives de Wallonie, Institut Destrée, Revue de presse (-12/2024), dont Le Soir, 7 octobre 1996, 27 mai 2002, 9 octobre 2002, 27 mai 2006, 3 août 2014
https://www.youtube.com/watch?v=7mGQjIQjk5s
L’Envers de l’écran, https://auvio.rtbf.be/media/l-envers-de-l-ecran-l-envers-de-l-ecran-2855436, RTBf, 2005
https://www.dalzon.be/anciens/rencontres/olivier-gourmet.html (s.v. janvier 2025)
Allociné, http://www.allocine.fr/personne/fichepersonne-21316/biographie/
Cinenews, http://www.cinenews.be/fr/acteurs/329/olivier-gourmet/filmographie/
Comme au Cinéma, http://www.commeaucinema.com/personne/olivier-gourmet,15012
Le Coin du Cinéphage, http://www.lecoinducinephage.com/2007/01/fragments-dun-dictionnaire-amoureux-olivier-gourmet/ (s.v. septembre 2014)