L’octroi d’une charte ou franchise ne résulte pas nécessairement d’exigences formulées contre le prince. Celui-ci peut en effet y trouver ses propres avantages. Un des moyens auxquels les ducs de Brabant ont recours pour s’attacher des villes ou des domaines ruraux et rendre ainsi leur territoire plus cohérent consiste à octroyer des franchises rurales ou urbaines, et à encourager la construction de villes neuves. Soucieux « de créer une communauté d’intérêt autant qu’une communauté juridique », les ducs recourent aux leges lovanienses. Comme l’écrit W. Steurs à la suite de L. Genicot, « le duc impose littéralement le droit de Louvain pour unifier tant bien que mal certains usages administratifs et judiciaires », pour améliorer l’économie et aussi pour que les habitants des localités concernées se sentent brabançons (p. 68).
La ville chef-lieu qui impose son droit règlemente les activités dans sa sphère d’influence, rend son tribunal compétent pour toutes les affaires locales délicates et exerce une sorte de tutelle sur les échevins des localités concernées (Rousseau).
Le droit de Louvain va toucher essentiellement la partie « sud-orientale » du duché ; la partie septentrionale, quant à elle, est influencée par le droit d’Anvers qui a gardé une autonomie certaine. À l’ouest, Bruxelles fait de même. Au sud, dans « le Brabant wallon », il existe enfin un droit de Nivelles et un « droit de Gembloux » (fin du XIe, début du XIIe siècle), et certaines localités dépendent du droit de Liège. Les droits et avantages octroyés peuvent différer considérablement d’un endroit à l’autre, d’une commune à l’autre. Le caractère arbitraire des redevances seigneuriales est cependant partout éliminé et les personnes recouvrent un statut d’hommes libres. Comme le montre la carte, il n’y a pas d’homogénéité territoriale ; le droit de Liège est d’application dans un secteur proche d’où émane le droit de Nivelles. Pour être complète, la carte aurait dû montrer aussi les quelques villages influencés par le droit de Louvain. Telle qu’elle, elle montre cependant bien que des villages limitrophes peuvent disposer de « droits » d’origines différentes, tout en cohabitant harmonieusement.
Références
Byl ; Geni13-124 ; RouNa-17-31 ; SteuBbt68 ; VuBrbt-68, 76-77
Institut Destrée (Paul Delforge et Marie Dewez) - Segefa (Pierre Christopanos, Gilles Condé et Martin Gilson)