
Theroigne dite de Méricourt Anne-Josèphe
Révolutions
Marcourt 13/08/1762, Paris 9 ou 23/06/1817
La Liégeoise Anne-Josèphe Terwagne (ou Théroigne, les orthographes varient très fort) a-t-elle été l’ardente militante républicaine ou la grande avocate de la cause des femmes que certains auteurs présentent ? Elle constitue à tout le moins une figure mythique de cette période troublée qui va de 1789 à 1794.
Ayant grandi dans un milieu rural, la jeune fille connaît une éducation chahutée, malgré l’aisance financière familiale. Servante dans une maison bourgeoise de la principauté, elle devient dame de compagnie, à Anvers, auprès d’une riche femme du monde, qu’elle accompagne en Angleterre (1782), où une autre vie l’attend. Londres, Paris, Naples, Gènes, Rome sont autant de villes et de rencontres, dont les péripéties varient selon ses biographes. La jeune fille semble courtisée, mais elle est surtout indépendante. Au printemps 1789, elle est à Paris. Après la vie de bohème, voici le temps de la politique.
Certains auteurs imaginent Anne-Josèphe Théroigne accompagnant les révolutionnaires à la Bastille (14 juillet 1789) et la présentent à la tête du cortège populaire qui entend ramener le roi de Versailles à Paris (5 octobre 1789). Il semble établi, par contre, qu’elle assiste à la visite du roi à l’hôtel de ville (17 juillet), qu’elle s’assied fréquemment dans la tribune de l’Assemblée nationale pour assister aux débats Se faisant appeler Anne-Josèphe Théroigne de Méricourt (autre orthographe pour Marcourt), celle qui tient salon rue du Boulay est entourée de prétendants et d’aventuriers admirateurs qui la surnomment « La Belle Liégeoise ». Qu’elle constitue avec Romme un cercle politique, le « Club des Amis de la loi » qui s’intègre dans le Club des Cordeliers témoigne de ses idéaux démocratiques.
Le vent révolutionnaire est cependant tourbillonnant. Adulée puis honnie, « l’adorable wallonne » (autre surnom créé par un publiciste) est à ce point endettée qu’elle décide de retourner à Liège, d’autant plus vite qu’elle est soupçonnée d’avoir semé le désordre à Versailles (5 octobre 89). Le choix de la date de son arrivée en principauté est inadéquat : la restauration autrichienne est en cours et la répression implacable.
Suspectée d’avoir voulu assassiner Marie-Antoinette, l’extravagante est arrêtée et emprisonnée dans des conditions sévères, en Autriche, pendant plusieurs mois. Cette séquestration lui procure une nouvelle aura. Libérée fin 1791, elle est accueillie en triomphe à Paris, par les Jacobins (début 1792). Prenant résolument le parti des républicains contre les royalistes, prenant en tout cas le parti de Brissot, elle semble vouloir développer un programme dans lequel la femme est appelée à jouer un rôle actif dans la société, quand ce n’est pas dans la Révolution elle-même. Certains biographes lui attribuent un programme d’émancipation de la femme véritablement avant-gardiste.
Peu suivie par les femmes elles-mêmes, regardée avec circonspection par ses « amis » politiques, Théroigne de Méricourt devient par contre le porte-fanion de tous les combats sous la plume de certains biographes : ils lui accordent un premier rôle dans les différents événements sanglants qui marquent 1792 et le début de 1793. Le 13 mai 1793, elle est elle-même victime des événements. Passée à tabac et outragée par des « jacobines », elle sombre dans la dépression nerveuse et mentale. Si sa démence lui évite d’être guillotinée, sa tête ne lui reviendra jamais. Sa situation empire au point de nécessiter son internement définitif à l'hôpital de la Salpêtrière, achevant les 20 dernières années de sa vie, obsédée par les événements de 1792.
Une vie à ce point mouvementée ne pourra qu’inspirer les imaginations, au siècle du romantisme, et même plus tard ; écrits à vocation historique, œuvres littéraires ou dramatiques narreront le destin tragique de cette féministe en la faisant entrer dans la légende.
Sources
Félix MAGNETTE, dans Biographie nationale, t. 24, col. 760-768
Félix MAGNETTE, Théroigne de Méricourt, la belle Liégeoise. Légendes littéraires et réalité historique, dans Wallonia, XXIe année, mars 1913, p. 163-187
Ursmer LEGROS, Double destin de Théroigne de Marcourt, dite de Méricourt, Marquain (Hovine), Hotton, 1969
La Vie wallonne, II, 1970, n°330, p. 175-177
Marcellin PELLET, Étude historique et biographique sur Théroigne de Méricourt, dans les Variétés révolutionnaires, 3e série, Paris, 1890
Léopold LACOUR, Trois femmes de la Révolution : Olympe de Gouges. Rose Lacombe, Théroigne de Méricourt, Paris, 1900
E. et J. DE GONCOURT, Histoire de la Société française pendant la révolution, Paris, 1889
©, Paul Delforge
Contenus liés
Patrimoine
Dictionnaire des Wallons
- GOSSEC François-Joseph
- LEBRUN Pierre (né Pierre Marie Henri TONDU)
- CHAPUIS Grégoire-Joseph
- DE CHESTRET Jean-Remy
- DEFRANCE Léonard
- FABRY Jacques-Joseph
- PIRSON François-Gérard
- BOUQUETTE Jean-Denis
- FYON Jean Joseph
- RANSONNET Jean-Pierre
- BASSENGE Pierre-Nicolas
- DE FASSIN Nicolas-Henri
- DETHIER (ou DE THIER) Laurent-François
- SMITS Jean Joseph
- TUTOT Jean-Jacques
- QUEVREUX Jean Thomas Louis
Atlas historique
- La Révolution liégeoise de 1789
- La principauté de Liège
- L’Europe à la veille de la Révolution française de 1789
- Les Pays-Bas autrichiens à la veille des révolutions de 1789
- La principauté de Liège, état indépendant du Saint-Empire germanique à la veille des révolutions de 1789
- Principauté de Liège et Pays-Bas autrichiens à la veille des révolutions de 1789
- La République des États-Belgiques-Unis (1790)
- La « République Belgique » de Dumouriez (6 novembre 1792-18 mars 1793)
- La seconde restauration autrichienne (mars 1793 - mars 1794)
- De Fleurus au décret de réunion à la France (26 juin 1794-1er octobre 1795)
- Partition des pays réunis en deux administrations générales (15 octobre 1794-1er octobre 1795)
- L’organisation du nord de la France en départements (1790-1815)