Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Statue Paul PASTUR

Au cœur du piétonnier qui longe les bâtiments de l’Université du Travail, une imposante statue en bronze représentant Paul Pastur (1866-1938) rend hommage à celui qui contribua à la fondation de l’établissement scolaire et fut, pendant de longues années, un bâtisseur tant à Charleroi que dans la province du Hainaut, préoccupé aussi par la question wallonne. Réalisé par Alphonse Darville, à la demande de la province du Hainaut, le monument a été inauguré en octobre 1950, quelques semaines à peine après la fin de la Question royale.

Statue Paul Pastur (Charleroi)

Paul Pastur

Avocat au barreau de Charleroi, grand ami de Jules Destrée, Pastur resta marqué toute sa vie par les événements sociaux de 1886 et se fera le défenseur acharné du suffrage universel et de législations sociales favorables aux travailleurs. Dirigeant du POB naissant, échevin de Charleroi entre 1896 et 1900, il n’acceptera que des mandats à l’échelon provincial : de 1900 à 1938, il est l’un des députés permanents du Hainaut et, à ce titre, consacre ses meilleurs efforts pour démocratiser l'enseignement et la culture, et pour favoriser une société des loisirs qui contribue à l’émancipation des individus. Initiateur de l'École industrielle supérieure provinciale (1903), qui devient l'Université du Travail en 1911, au moment de l’Exposition internationale de Charleroi, il est considéré comme le père de cet instrument destiné à former une main-d’œuvre qualifiée pour l’industrie en pleine expansion. 

De Paul Pastur, on retient aussi volontiers qu’il introduit en Hainaut, sur l'exemple américain, une fête des mamans, le dernier dimanche de mai (1927), qui deviendra nationale 10 ans plus tard. Il consacre aussi une attention particulière à l’obtention puis à l’amélioration de loisirs pour les travailleurs (temps de travail, infrastructures, etc.).

L'artiste Alphonse Darville

La réalisation du monument Pastur a été confiée à Alphonse Darville (1910-1990). Né à Mont-sur-Marchienne en 1910, formé à l’académie des Beaux-Arts de Bruxelles, le jeune Darville a bénéficié très tôt de la confiance de ses contemporains, en particulier de celle de Jules Destrée et de Paul Pastur. À 20 ans, il est encore fort peu connu quand il se voit confier la réalisation du buste de Pierre Paulus. Ce n’est que l’année suivante, en 1931, que Darville recevra le Prix Godecharle puis, en 1935, le Premier Grand Prix de Rome. 

Co-fondateur de L’Art vivant au pays de Charleroi (1933), attaché à la promotion de la création artistique en Wallonie, co-fondateur de la section de Charleroi de l’Association pour le Progrès intellectuel et artistique de la Wallonie (1945), Darville contribue aussi à la création de l’académie des Beaux-Arts de Charleroi, qu’il dirige de 1946 à 1972. En 1951, il signe l’insolite monument au pigeon-soldat, qui trouve place dans le parc Astrid de Charleroi.

En 1950, le monument que Darville consacre à Pastur est l’un des plus spectaculaires ; en tout cas, l’ensemble est l’un des plus grands jamais réalisés par l’artiste. À l’arrière de la statue en bronze d’un Paul Pastur qui se tient debout, tenant son chapeau de la main droite, s’élève une sorte de tour de près de 10 mètres de haut sur laquelle sont délivrés plusieurs messages. D’abord, au-dessus de la statue elle-même, apparaît la mention :


PAUL PASTUR
1866 – 1938
AVOCAT
DEPUTE PERMANENT
FONDATEUR DE L’ENSEIGNEMENT TECHNIQUE
DU HAINAUT
PRÉSIDENT DE L’UNIVERSITÉ DU TRAVAIL
1902 – 1938


Au sommet de cette face de la tour, est gravé le sigle de l’UT. Sur les faces latérales, Darville a donné libre cours à son inspiration pour réaliser une allégorie de la jeunesse et de la culture ; à l’arrière, le blason de la province est gravé dans la pierre, avec la mention :


A PAUL PASTUR
LE HAINAUT RECONNAISSANT
INAUGURE LE 28 – 10 – 1950




Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse dont La Nouvelle Gazette, le Journal et Indépendance, 15 juillet 1991
Jacques GUYAUX, Paul Pastur, la grandeur du Hainaut, Bruxelles, éd. Labor, Institut Destrée, Fonds Pastur, 1978, p. 115-116
Paul DELFORGE, Paul Pastur, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. III, p. 1240-1241
Geneviève ROUSSEAUX, Alphonse Darville sculpteur, Charleroi, Institut Jules Destrée, 1982, coll. « Figures de Wallonie »
Alphonse Darville : 60 [soixante] années de sculpture, catalogue d’exposition, 20 novembre 1982 - 16 janvier 1983, Jean-Pol DEMACQ [préface],  Charleroi, Musée des Beaux-Arts, 1982
Alphonse Darville 1977, Charleroi, Impaco, 1977
Paul DELFORGE, Essai d’inventaire des lieux de mémoire liés au Mouvement wallon (1940-1997), dans Entre toponymie et utopie. Les lieux de la mémoire wallonne, (actes du colloque), sous la direction de Luc COURTOIS et Jean PIROTTE, Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 1999, p. 285-300
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 290 ; t. II, p. 190

 

 

Piétonnier de l’Université du Travail
6000 Charleroi

carte

Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Plaque Paul PASTUR

Encastrée dans la façade de la maison située au coin de l’avenue Rêve d’Or et de la rue Warocqué, à La Louvière, une plaque rend hommage à l’action menée par Paul Pastur (1866-1938) en faveur des loisirs des travailleurs.

 

Paul Pastur

Avocat au barreau de Charleroi, grand ami de Jules Destrée, Pastur resta marqué toute sa vie par les événements sociaux de 1886 et se fera le défenseur acharné du suffrage universel et de législations sociales favorables aux travailleurs. Dirigeant du POB naissant, échevin de Charleroi entre 1896 et 1900, il n’acceptera que des mandats à l’échelon provincial : de 1900 à 1938, il est l’un des députés permanents du Hainaut et, à ce titre, consacre ses meilleurs efforts pour démocratiser l'enseignement et la culture. 

Initiateur de l'École industrielle supérieure provinciale (1903), qui devient l'Université du Travail en 1911, il introduit en Hainaut, sur l'exemple américain, une fête des mamans, le dernier dimanche de mai (1927), qui deviendra nationale 10 ans plus tard. Il consacre aussi une attention particulière à l’obtention puis à l’amélioration de loisirs pour les travailleurs (temps de travail, infrastructures, etc.).

Dès 1919, il avait créé une structure provinciale active sur le Hainaut : la « Commission des loisirs des travailleurs » était chargée de réfléchir à la manière de procurer aux ouvriers des occupations de leur temps libre équivalant à celles des bourgeois aisés. Ensuite, en constituant 7 sections (habitation, jardinage, petit élevage, étude, éducation physique, éducation artistique, éducation intellectuelle), il les chargea de mener des animations, des concours, des ateliers afin de structurer « positivement » le temps libre obtenu par la diminution des horaires de travail. 

Se constituèrent des sociétés d’habitation à bon marché, des compagnies de théâtre, des groupes d’animateurs socio-culturels, des sociétés de gymnastique et d’éducation physique, plus de 200 bibliothèques, et furent organisées des expositions, des « projections lumineuses », des conférences, etc. En 1924, Pastur lance l’idée d’un congrès international des loisirs de l’ouvrier : il se tiendra en 1935 à Bruxelles, dans le cadre de l’Exposition.

Quelques mois après la disparition de Paul Pastur, l’ouverture d’une Maison des loisirs, à La Louvière, perpétue son œuvre. L’inauguration a lieu le 9 juillet 1939. C’est là qu’est apposée la plaque, en présence d’Alexandre André, président du Conseil provincial. Dans son discours, ce dernier compare l’activité de Paul Pastur à celle de Jules Destrée. Sur la plaque, apparaissent aussi les armoiries de la province de Hainaut.



Jacques GUYAUX, Paul Pastur, la grandeur du Hainaut, Bruxelles, éd. Labor, Institut Destrée, Fonds Pastur, 1978, p. 77-81, 115-116.
Paul DELFORGE, Paul Pastur, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. III, p. 1240-1241.

Rue Warocqué
7100 La Louvière

carte

Paul Delforge

IPW

Monuments du parc communal de La Louvière

Inauguré en 1898 non loin du centre-ville, le parc communal de La Louvière accueille trois monuments rendant hommage aux artistes wallons.

Un mémorial dédié à l’auteur-compositeur wallon Léopold Dupuis se trouve en bordure de la rue Warocqué. Né à Saint-Vaast le 27 mars 1859 et mort à La Louvière le 9 janvier 1932, il était surnommé Vî-Stou. Compositeur attaché pendant plus de quarante ans à la faïencerie Boch, il nous laisse des œuvres variées et nombreuses, très appréciées du public. En 1912, il crée le journal wallon Wallonia et El’ mouchon d’Aunias auquel il collaborera jusqu’à sa mort. Il y publiera notamment un glossaire du wallon du Centre. Auteur de deux opérettes et de pièces de théâtre, il en a composé toutes les musiques. Le monument lui rendant hommage a été érigé en 1934 à l’initiative du Mouchon d’Aunias et comporte un buste de Dupuis réalisé par Hector Brognon (1888-1977), sculpteur originaire de Bois-d’Haine et créateur de plusieurs monuments commémoratifs dans le Hainaut. Sous ce buste, une inscription : « Hommage de la Wallonie à Vî-Stou (Léopold Dupuis), littérateur – poète – musicien wallon (1859-1932) ».

Face à ce mémorial, un petit monument rend hommage au chanteur wallon Maurice Roland. Érigé à l’initiative du groupement wallon Les scryeus du Centre, il se présente sous la forme d’un petit banc dont le nom est  « le banc de la chanson wallonne » et d’une stèle comportant une inscription en wallon : « Banc del canson walone al memwâre du fel canteû Maurice Roland ».

Enfin, à quelques mètres de ces deux monuments, un troisième rend pour sa part hommage aux auteurs et interprètes wallons du Centre. Érigé en 1962 pour les cinquante ans de la revue El’ mouchon d’Aunias, il consiste en une sculpture en bronze réalisée par l’artiste louviéroise Louise Nopère (née en 1933), spécialiste des figures de jeunes filles. Elle représente une jeune femme en tablier, levant les yeux au ciel et tenant un coq dans ses bras.

À quelques mètres du parc, l’immeuble faisant le coin de la rue Arthur Warocqué et de l’avenue Rêve d’or conserve une plaque rendant hommage à Paul Pastur. Comportant un blason, elle nous indique que « cette maison, inaugurée le 9 juillet 1939, perpétue l’œuvre de Paul Pastur, père des loisirs du travailleur. »

Rue Arthur Warocqué
7100 La Louvière

carte

Freddy Joris & Frédéric Marchesani, avril 2009

IPW

Tombe commune Jules DESTRÉE et Paul PASTUR

Image étonnante, à l’entrée du cimetière de Marcinelle195, que celle de la sépulture commune de Jules Destrée et de son ami et collègue Paul Pastur (1866-1938), autre figure du Mouvement wallon, mais surtout fondateur de l’Université du Travail de Charleroi. Entre deux médaillons présentant les profils des deux illustres occupants du caveau, la phrase « Les familles Pastur et Destrée, unies dans la vie, réunies dans la mort » fut ajoutée à la mort de Pastur, survenue deux ans après celle de Jules Destrée, lorsque son urne funéraire fut placée à côté de celle de son ami d’enfance dans le caveau familial.

La tombe est la première de l’Allée 1, à gauche en entrant.

Cimetière de Marcinelle 
Rue du Repos 12
6001 Charleroi

carte

Freddy Joris & Frédéric Marchesani, avril 2009

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Monument Jules DESTRÉE

Statue dédiée à Jules Destrée, réalisée par Alphonse Darville, 23 juin 1957

Située boulevard Audent, au cœur de Charleroi, une imposante statue rend hommage à Jules Destrée (1869-1936). Avocat, juriste, homme politique socialiste, préoccupé par la question sociale, orateur brillant, militant wallon, esthète, écrivain, critique d’art, Jules Destrée a été élu député le 14 octobre 1894 dans l’arrondissement de Charleroi : il figure ainsi parmi les tout premiers parlementaires du jeune Parti ouvrier belge. Rapidement, il s’impose comme l’un des leaders de ce parti, présent sur le plan national, régional et local. En 1910-1911, il prend une part active au succès de l’Exposition internationale organisée à Charleroi. Durant la Grande Guerre, il représente la Belgique en Italie et en Russie. 

Devenu Ministre des Sciences et des Arts en 1919, et l’un des tout premiers ministres socialistes wallons, il crée notamment l’Académie de Langue et de Littérature française et établit la loi sur les Bibliothèques publiques. En 1922, il devient le délégué de la Belgique à la Commission internationale de Coopération intellectuelle de la SDN, mandat qu’il exerce jusqu’au début des années trente... Son engagement wallon se manifeste à de multiples reprises dont les plus marquantes sont la Lettre au roi sur la séparation de la Wallonie et de la Flandre(août 1912), la création de l’Assemblée wallonne dont il reste le secrétaire général d’octobre 1912 à décembre 1919, et sa contribution au Compromis des Socialistes belges en 1929. Ami des arts et des artistes, responsable de la Société des Amis de l’Art wallon, Jules Destrée a été pris comme modèle par plusieurs peintres, médailleurs ou sculpteurs, d’initiative ou sur commande.

Monument Jules Destrée

La monumentale statue du boulevard Audent est l’œuvre d’Alphonse Darville (1910-1990). Né à Mont-sur-Marchienne en 1910, il étudie à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles, reçoit le Prix Godecharle 1931 et le Premier Grand Prix de Rome 1935. Co-fondateur de L’Art vivant au pays de Charleroi (1933), attaché à la promotion de la création artistique en Wallonie, il participe aux travaux clandestins de la section culturelle du Conseil économique wallon de Charleroi et figure parmi les fondateurs de la section de Charleroi de l’Association pour le Progrès intellectuel et artistique de la Wallonie (1945). Co-fondateur de l’Académie des Beaux-Arts de Charleroi, il la dirige de 1946 à 1972. Réali

sant des œuvres d’inspiration, Darville réalise également des commandes comme sa participation à la décoration du Pont des Arches, à Liège, après la guerre, aux bâtiments du gouvernement provincial à Mons, voire à l’hôtel de ville ou au Palais des Expositions à Charleroi. 

Quand René Thône – député provincial du Hainaut – lance l’idée d’élever un monument en l’honneur de Jules Destrée, relayé par les autorités de la ville de Charleroi, tous se tournent naturellement vers Alphonse Darville pour la réalisation. Sur un socle de pierre bleue où est gravé l’hommage « À Jules Destrée », s’élève une haute statue d’un Destrée debout, la main droite en poche, la main gauche ouverte légèrement en avant, tendue dans un dialogue auquel invitent les traits de son visage. Ce sont toutes les facettes de l’activité de Destrée que les autorités carolorégiennes et hennuyères ont souhaité mettre en évidence. Il s’agit du second monument dédié à Destrée inscrit dans l’espace public wallon, après le buste de Bonnetain installé, en 1936, à Marcinelle.

L’inauguration du boulevard Audent qui s’est déroulée le 23 juin 1957 a été solennelle. Les plus hautes autorités du pays ont fait le déplacement à Charleroi. Les plus hautes autorités du pays ont fait le déplacement à Charleroi. Chacun a pu admirer l’œuvre de Darville, même si plus tard, Jean Place – alias Pierre-Jean Schaeffer – se permettra cette critique : 
« Sauf le respect que j'ai pour Alphonse Darville, c'est un Destrée salonnard, qui pérore... Face au Palais du Peuple, il aurait fallu plutôt un tribun haranguant la foule... ».Lieu de rassemblement pour le Mouvement wallon, et étape indispensable lors des Fêtes de Wallonie, la statue de Jules Destrée fait l’objet d’un réaménagement au cours de l’année 2013 ; la végétation d’où le tribun semblait parfois sortir a été éliminée au profit d’une mise en évidence totale, au centre d’un lieu de grand passage urbain. 

 

Geneviève ROUSSEAUX, Alphonse Darville sculpteur, Charleroi, Institut Jules Destrée, 1982, coll. « Figures de Wallonie »
Alphonse Darville : 60 [soixante] années de sculpture, catalogue d’exposition, 20 novembre 1982 - 16 janvier 1983, Jean-Pol DEMACQ [préface],  Charleroi, Musée des Beaux-Arts, 1982
Alphonse Darville 1977, Charleroi, Impaco, 1977
Philippe DESTATTE, Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2000, t. I, p. 483-490
Paul DELFORGE, Essai d’inventaire des lieux de mémoire liés au Mouvement wallon (1940-1997), dans Entre toponymie et utopie. Les lieux de la mémoire wallonne, (actes du colloque), sous la direction de Luc COURTOIS et Jean PIROTTE, Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 1999, p. 285-300
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 290

Boulevard Audent 
6000 Charleroi

carte

Paul Delforge

© Institut Emile Vandervelde

Pastur Paul

Militantisme wallon, Politique

Marcinelle 07/02/1866, Marcinelle 08/06/1938

Avocat inscrit au Barreau de Charleroi, Paul Pastur a été impressionné par les émeutes de 1886 et par le Procès dit du Grand Complot. Avec Jules Destrée, son grand ami, il est parmi les fondateurs de la Fédération démocratique (1892) et se fait le défenseur du suffrage universel et de législations sociales favorables aux travailleurs. Interpellé par les revendications flamandes, il soumet à l’Assemblée wallonne un essai de solution à la question belge par l’accroissement de l’autonomie des communes et des provinces (1919). 

Élu à diverses reprises député de l’arrondissement de Charleroi, Paul Pastur démissionne rapidement, rejetant tout mandat le conduisant hors de sa province du Hainaut à laquelle, en tant que député permanent socialiste, il consacre ses meilleurs efforts par une politique dynamique de démocratisation de l’enseignement et de la culture. À l’origine de l’École industrielle supérieure provinciale (1903) qui devient l’Université du Travail en 1911, il introduit en Hainaut, sur l’exemple américain, une fête des mères, le dernier dimanche de mai (1927). Cette nouvelle habitude sera adoptée partout dans le pays dix ans plus tard.

En 2012, il est fait officier du Mérite wallon, à titre posthume, cent ans après la création de l’Assemblée wallonne.

Sources

Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, 2001, t. III
DELFORGE Paul, Cent Wallons du Siècle, Liège, 1995
La Wallonie. Le Pays et les hommes (Arts, Lettres, Cultures), Bruxelles, t. III, p. 11
La Wallonie. Le Pays et les hommes (Arts, Lettres, Cultures), Bruxelles, t. IV, p. 276, 289, 307

Mandats politiques

Conseiller provincial du Hainaut (1894-1900)
Conseiller communal de Charleroi (1896-1900)
Échevin (1896-1900)
Député (1899-1900, 1908, 1912, 1919)
Député permanent du Hainaut (1900-1938)

Destrée Jules

Militantisme wallon, Politique

Marcinelle 21/08/1863, Bruxelles 02/01/1936

Considéré comme l’éveilleur de la conscience wallonne en raison notamment de La Lettre au roi sur la séparation administrative de la Wallonie et de la Flandre et de sa présidence de l’Assemblée wallonne (1912), Jules Destrée fut aussi l’un des tout premiers socialistes élus au Parlement (1894) et désignés comme ministre (1919).

Docteur en Droit de l’Université libre de Bruxelles (1883), stagiaire chez Edmond Picard, Jules Destrée fréquente les écrivains de la Jeune Belgique, ainsi que des peintres et sculpteurs (1885-1886), mais ce sont les événements de 1886 qui orientent à tout jamais la vie de l’esthète bourgeois. Touchant l’ensemble du bassin industriel wallon, les émeutes de la misère ouvrière sont réprimées avec violence et le jeune avocat est appelé à défendre l’un des syndicalistes de l’Union ouvrière ; sans succès. Par contre, il fait acquitter les suspects du pseudo « Grand Complot », traînés devant les Assises (1889). Il franchit un pas supplémentaire en s’engageant sur le terrain politique. 

Soutenant les ouvriers en lutte pour le suffrage universel, il crée la Fédération démocratique de Charleroi en 1892 et, en 1894, à l’occasion des premières élections législatives au suffrage universel masculin tempéré par le vote plural, il figure parmi les 28 premiers parlementaires du POB, tous élus en Wallonie. Les électeurs de l’arrondissement de Charleroi lui feront régulièrement confiance jusqu’à son décès, en 1936. Auteur avec Émile Vandervelde – qu’il a connu à l’ULB – de l’ouvrage Le Socialisme en Belgique (1898), Jules Destrée s’affirme comme l’un des ténors du socialisme wallon, défenseur du suffrage universel, d’une législation sociale et de l’instruction obligatoire. Ses interventions parlementaires sont unanimement saluées. Son souci de lutter contre l’injustice l’amène à prendre position en faveur de l’égalité entre Flamands et Wallons.

L’affirmation du sentiment wallon chez Destrée apparaît comme une réponse à une dynamique belge et flamande, injuste et oppressante pour les Wallons. Il répétera de façon constante et incessante son souci de voir la Belgique se maintenir malgré l’originalité de ses composantes, mais il affirme son identité wallonne et son appartenance à la civilisation française. Faire prendre conscience d’elle-même à la Wallonie, s’appuyer sur la France et sa culture, rendre l’autonomie aux communes et aux provinces sont ses objectifs lorsqu’il accepte de patronner les manifestations culturelles et artistiques de l’Exposition de Charleroi (1911), lorsqu’il fonde et préside la Société des Amis de l’art wallon (1911-1936), et lorsqu’il écrit la Lettre au Roi (15 août 1912). Quand est créée l’Assemblée wallonne (1912), premier Parlement informel de la Wallonie, Jules Destrée est désigné à sa tête comme secrétaire général (1912-1914, 1919) : son objectif est d’étudier la meilleure formule de décentralisation, voire de fédéralisation de la Belgique afin de défendre les intérêts wallons.

Durant la Grande Guerre, chargé de mission par le gouvernement belge en exil, le socialiste contribue au ralliement de l’Italie dans le camp des alliés. À Pétrograd, le ministre plénipotentiaire établit un contact avec les forces socialistes antibolchéviques. Au lendemain de l’Armistice et des premières élections au suffrage universel, le POB est associé pour la première fois à un gouvernement. Jules Destrée est désigné comme Ministre des Sciences et des Arts (1919-1921) et, en peu de temps, fait adopter une série de mesures de protection des artistes et de leurs œuvres (rénovation du Prix de Rome, création de l’Académie royale de Langue et de Littérature françaises) et d’accompagnement à l’instruction obligatoire (loi sur les bibliothèques) en permettant l’accès gratuit à la culture pour le plus grand nombre.

Ayant quitté la tête de l’Assemblée wallonne quand il devient ministre, Jules Destrée reste attentif à la résolution de la question wallonne et se rallie à l’idée de l’homogénéité linguistique de la Flandre et de la Wallonie, refusant de se mêler des francophones de Flandre. Partisan de la formation d’États-Unis d’Europe, il tente d’apporter une solution au problème des nationalités par le Compromis des Belges - étape vers le fédéralisme - qu’il signe avec le socialiste flamand Camille Huysmans (1929). Ses actions en faveur de la Wallonie, de la culture et du monde ouvrier ne l’empêchent pas d’entretenir ses dons de littérateur. Critique d’art, il rend à de le Pastur ses racines tournaisiennes ou évoque le Maître de Flémalle (1930). Conteur (Les Chimères, 1889), il parle aussi de lui-même (Mons et les Montois, 1933). Politique, il alimente la pensée socialiste (Introduction à la Vie socialiste, 1929), relate ses expériences (Les fondeurs de neige, 1920) ou livre ses réflexions (Wallons et Flamands, 1923).

Sources

Philippe DESTATTE, Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, 2000, t. II, p. 483-490
Philippe DESTATTE, Destrée, Extrait de Hervé HASQUIN (dir.), Dictionnaire d’histoire de Belgique, Vingt siècles d’institutions, Les Hommes, les faits, Bruxelles, Didier Hatier, 1988, p. 157-158
Georges-H. DUMONT, dans Nouvelle Biographie nationale, Bruxelles, t. V, p. 117-123

Mandats politiques

Député (1894-1936)
Conseiller  communal de Marcinelle (1904-1910)
Échevin (1904-1910)
Ministre des Sciences et des Arts (1919-1921)

Forgé au cours du XIXe siècle, le mot « Wallonie » fut rapidement popularisé tant au sein de la région qu’il désigne que chez ses voisins. Point de départ de l’affirmation de l’unité wallonne, cette dynamique a conduit, voici un siècle, à l’adoption d’un drapeau et d’une fête que le Parlement wallon a consacrés officiellement en 1998. De la revue littéraire d'Albert Mockel jusqu'à la régionalisation, cette leçon met en lumière les grands repères symboliques de l'identité wallonne au travers d'une synthèse et de documents.

Pastur Paul

Officier (Historique)

MARCINELLE 07.02.1866 - MARCINELLE 08.06.1938

Issu d’une famille bourgeoise - son père, ingénieur-régisseur des charbonnages, se préoccupait du sort des ouvriers de la mine – Paul Pastur est Docteur en droit de l’Université de Liège. Très impressionné par les émeutes de 1886, qui ont vu des milliers d’ouvriers se mobiliser contre leurs conditions de travail dans toute la Wallonie, il s’engage dans le mouvement socialiste naissant.

Ami d’enfance de Jules Destrée, il fonde, en 1892, avec ce dernier ainsi que Jean Caeluwaert et Jules des Essarts la Fédération démocratique qui revendique des augmentations de salaire, le suffrage universel et le premier mai férié. Représentant de Charleroi de 1899 à 1900 et de 1908 à 1912, il manifeste son attachement à sa province en refusant le poste de Ministre des Sciences et des Arts qui lui est proposé.

Paul Pastur déploie son énergie à développer l’enseignement dans le Hainaut. Afin de tendre vers plus d’égalité, il milite, notamment, pour rendre celui-ci obligatoire. Il est ainsi à l’origine de plusieurs institutions d’enseignement provincial, à Tournai, Ath et Ghlin. Son œuvre la plus emblématique est cependant l’Université du Travail de Charleroi - qui porte désormais son nom - ouverte en 1903 et dont l’objectif est de répandre, par des moyens intensifs, dans toutes les couches professionnelles, l'instruction scientifique et technique utile à l'avancement et au progrès des industries et des métiers.

Très attentif à la question wallonne, il fait partie de l’Assemblée wallonne - premier parlement, officieux, de Wallonie - dès sa création en 1912. C’est Paul Pastur qui sollicite l’artiste Pierre Paulus pour réaliser le coq hardi, symbole que les Wallons viennent de choisir pour marquer leur identité et qui figure sur le drapeau wallon. Il travaille alors, tant au sein de l’Assemblée wallonne que du Parti ouvrier belge, à des projets de décentralisation qu’il base sur les provinces.

Selon son modèle, l’Etat central ne conserverait plus que des compétences d’intérêt général comme la politique extérieure, les finances, les grands travaux et l’armée. En matière linguistique, Paul Pastur propose la reconnaissance de trois régimes (français, flamand ou bilingue) que les communes choisiraient par referendum. La langue de l’enseignement et le recrutement de l’armée seraient ainsi définis sur base régionale, ce qui était alors une grande revendication du Mouvement wallon qui ne sera satisfaite que des années plus tard.

Egalement connu pour être l’instigateur de la fête des mères en 1927, Paul Pastur décède en juin 1938, après avoir accepté d’être membre du comité d’honneur du premier Congrès culturel wallon. Jules Destrée a dit de lui qu’il incarnait « la volonté de la terre wallonne ».

Il fut fait officier du Mérite wallon, à titre posthume, en 2012, cent ans après la création de l’Assemblée wallonne.