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 Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Monument Paul M-G LEVY

Monument Paul M-G. Lévy, réalisé à l’initiative des autorités de Gembloux et de Wallonie, avec le sculpteur Jean-Marie Mathot, 25 novembre 2005.

Situé à hauteur d’un rond-point au nord-ouest de Gembloux, à l’intersection entre le début de la chaussée de Namur et celle de Charleroi, un mémorial rend hommage à Paul M-G. Lévy (Ixelles 1910 – Sainte-Ode 2002), résistant, reporter de guerre et militant européen. Déjà nommé citoyen d’honneur de la ville de Gembloux où il s’était établi au début des années 1970, Paul M-G. Lévy inscrit désormais son nom dans l’espace public de Wallonie tant par le rond-point d’entrée de Gembloux que par le mémorial qui lui est consacré.

Reporter radio, pionnier de l’INR, Paul M-G. Lévy s’était imposé comme une des voix les plus populaires des auditeurs francophones belges dans les années 1930. Son refus de devenir la voix des Allemands, au moment de l’invasion de mai 1940, lui valut une incarcération à Saint-Gilles, puis à Breendonk : annoncé pour mort par la radio de Londres qui connaît les tortures qu’il subit, Lévy bénéficie d’un important mouvement de l’opinion publique qui contraint la Gestapo à le libérer. Après avoir jeté les bases du réseau Samoyède, il parvient à gagner l’Angleterre (printemps 1942). Là, aux côtés du ministre Antoine Delfosse, en charge de l’Information, il prépare l’après-guerre, avant de participer à la Libération de la Belgique : il parvient à rétablir les ondes de l’INR dès les premiers jours de septembre 1944. Grand reporter et correspondant de guerre, Paul Lévy est présent lors de la libération du camp de Dachau et est le premier journaliste occidental à entrer dans Berlin libérée. Élu député dans l’arrondissement de Nivelles, il est le seul représentant de l’Union démocratique belge (1946-1947), cette expérience travailliste qui resta sans lendemain. Déçu par l’immobilisme qui règne en Belgique, il s’éloigne de la politique et est engagé par le Conseil de l’Europe (fin des années 1940). Directeur de l’Information, il contribue à l’évolution de l’idée et du projet européens. Professeur associé de l’Université de Strasbourg, il deviendra également professeur à l’Université catholique de Louvain ; après le Walen Buiten, il s’installe à Gembloux : la maison où il va vivre trente ans est à quelques mètres du rond-point aménagé. Président du Mémorial national du Fort de Breendonk, il entretiendra la mémoire de la tragique période de guerre et sera un actif porteur du message de paix.
 

Monument Paul M-G. Lévy à hauteur du rond-point avec monument du sculpteur Jean-Marie Mathot (montage)

Un tel parcours de vie nécessitait un hommage durable de la part des autorités publiques. En inaugurant une stèle au croisement d’un important axe routier, celui qui relie les trois capitales européennes (Bruxelles, Luxembourg, Strasbourg), les autorités locales de Gembloux se sont associées aux autorités régionales wallonnes pour poser un geste symbolique de forte portée, renforcé par le choix d’installer au centre du rond-point une œuvre monumentale de Jean-Marie Mathot. L’occasion était fournie par la transformation de l’ancien carrefour de la Croisée. En place depuis 2004 déjà, l’œuvre en acier Corten de Mathot est une clé stylisée qui souligne l’importance du lieu comme porte d’entrée de la ville et qui renvoie aux armoiries de Gembloux. En présence du ministre wallon des Transports (André Antoine) et du bourgmestre de Gembloux (Gérard Bouffioux), le rond-point Lévy est inauguré le 25 novembre 2005 en présence de la famille de Paul M-G. Lévy.

Le choix de Jean-Marie Mathot, namurois de naissance (1948) et habitant de Gembloux s’est imposé de lui-même. Après sa formation à l’Académie de Bruxelles à la fin des années 1960, il y enseigne la sculpture et le modelage (1978) et est aussi professeur à l’École des Arts de Braine-l’Alleud. Issu d’une famille de marbriers, il opte d’abord pour la peinture et le dessin avant de se tourner résolument vers la sculpture. Il a commencé par la création de figures en taille directe, avant de mener diverses expériences qui rompent ponctuellement avec sa production habituelle. Délaissant les représentations figuratives, il s’oriente vers « l’exploration des potentialités expressives de la matière ». Tour à tour, il intègre des pierres peintes dans ses compositions, il s’attaque à des « déchets » de carrière, s’essaye au travail du béton et de l’acier. Deux de ses œuvres ornent un rond-point à La Louvière et à Gembloux. Artiste expérimental, il a reçu plusieurs récompenses (le Prix Donnay, le Prix Georges Van Zevenbergen, le Prix de la Gravure au Festival de la Jeunesse à Auderghem, le Premier Prix de la présélection au Concours International Musée 2000 à Luxembourg, le Prix Eugène Delattre de sculpture et le Prix Constant Montald de l'Académie Royale de Belgique, il est aussi  lauréat de la Fondation belge de la Vocation et de la Bourse triennale Maurice et Henri Evenepoel).

À côté de l’imposante sculpture en acier de J-M. Mathot (8,8 m de dimensions extérieures, 5,5 de dimensions intérieures, sur 1 mètre de profondeur), la stèle portant la plaque commémorative se fait humble et discrète, à l’image de Paul Lévy. Faite en briques et en pierre, percée comme une sorte de fenêtre, la stèle est surmontée d’une pierre bleue identifiant le lieu tout en rendant hommage au citoyen d’honneur de Gembloux :

ROND-POINT
BARON
PAUL M.G. LEVY
 

 

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de presse (La Libre, Vers l’Avenir, fin novembre 2005)
Discours de Gérard Bouffioulx, http://www.rond-point-paul-levy.blogspot.be/2005/11/1-7-discours-grard-bouffioux.html 
http://www.rond-point-paul-levy.blogspot.be/ 
http://www.rond-point-paul-levy.blogspot.be/2005/11/1-7-discours-grard-bouffioux.html (s.v. juin 2014)
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 147
http://mathot-sculpture.be/ 
http://acabat.blogspot.be/2010/03/vitaminesarts-20-0309.html 
http://commission-des-arts.wallonie.be/opencms/opencms/fr/integrations/createurs/mathot.html (s.v. mai 2014)

Rond-point Paul M-G. Lévy, entre la chaussée de Namur et la chaussée de Charleroi
5030 Gembloux

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Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Plaque Édouard NED

Six ans après la disparition du poète et romancier, une plaque commémorative est apposée sur la maison natale d’Athanase-Camille Glouden (1873-1949), mieux connu en littérature sous le pseudonyme d’Édouard Ned et considéré comme l’un des chantres de la Gaume.

Plaque Édouard Ned (Châtillon, Saint-Léger)

L’initiative d’une plaque commémorative sur la maison natale d’Édouard Ned revient à l’Académie luxembourgeoise ; il ne s’agit pas de sa première initiative quand elle confie à Jean Godard le soin de la réaliser. En dessous du portrait de l’écrivain, et de la discrète signature Jg, apparaît la mention suivante :


ICI NAQUIT
ATHANASE GLOUDEN
QUI SOUS LE NOM D’
ÉDOUARD NED
CELEBRA LA GAUME SES
PAYSAGES ET SON ESPRIT
ACADEMIE LUXEMBOURGEOISE 15 IX 1955


Athanase-Camille Glouden alias Édouard Ned

Après des humanités classiques au Séminaire à Bastogne, et des études littéraires aux facultés universitaires Saint-Louis à Bruxelles, Athanase-Camille Glouden enseigne d’abord à Chimay, puis à Bruxelles, où il est finalement nommé professeur de littérature et d'histoire au Collège Saint-Michel et à l'Institut supérieur de pédagogie. Parallèlement, il développe une intense activité littéraire ; ainsi est-il le collaborateur de diverses revues et journaux engagés, catholiques, patriotiques et littéraires, comme Le Drapeau, Le Florilège, La Belgique artistique et littéraire, Le Journal de Bruxelles, Le Patriote, Le national bruxellois

En 1895, avec les poètes Georges Ramaekers (1875-1955) et Paul Mussche, il crée La Lutte, revue catholique où l'art est considéré comme un hymne à la gloire de Dieu. En 1906, dans L’énergie belge 1830-1905, opinion d'une élite, il part à la recherche de personnalités belges et dégage de leurs activités un sentiment de fierté, « stimulant efficace du patriotisme ». En 1910, à la suite d’une conférence et sous le parrainage de l’Association des écrivains belges, il publie aussi Le type wallon dans la littérature, brochure qui part à la découverte d’auteurs qui ont célébré la Wallonie et où il tente de définir et de faire comprendre la sensibilité wallonne.  À la même époque, il est membre d’un Comité de soutien destiné à faire de l’Église de Hastière un centre de l’art wallon.

Conteur et romancier exaltant un patriotisme belge teinté de foi catholique, il est particulièrement affecté par les événements de 1914-1918 : il est vrai que le 24 août 1914, son frère Maurice Glouden, curé de Latour, fait partie des otages exécutés froidement par les Allemands. Ce sera le sujet d’un des nombreux ouvrages publiés après-guerre par Ed. Ned. 

Directeur de la collection Selecta, éditée par E. De Seyn à partir de 1912, il fonde, 20 ans plus tard la maison Durendal, puis, en 1936, les éditions Roitelet. Au milieu des années 1930, répondant à une initiative de Joseph-Maurice Remouchamps, le secrétaire général de l’Assemblée wallonne, Ned est l’auteur d’une adaptation gaumaise du Chant des Wallons.

Essayiste, sociologue, philosophe, journaliste, professeur, Ned aimait l’héroïsme et l’idéal ; un peu sentimental, il était surtout poète et c’est à ce titre qu’il a exalté la Gaume, admirant Maurice Barrès, comme un maître.

 

Jean Godard

S’il est né à Grez-Doiceau, en 1921, Jean Godard le doit au hasard de la désignation de son père, gendarme. Néanmoins, les Godard sont de Meix-le-Tige, et la maison familiale que le père fait construire en 1928 sera le point d’ancrage du peintre et sculpteur Jean Godard, même lorsque sa carrière l’appelle à Bruxelles, à l’Académie des Beaux-Arts de Watermael-Boitsfort, en particulier, où il est professeur. 

Maniant le crayon avec aisance dès sa jeunesse – plusieurs caricatures l'attestent – Jean Godard suit des cours en Allemagne, est d’abord peintre, avant de se laisser bercer par l’influence des O. Jespers, O. Zadkine, A. Penalba et F. Wotruba quand la sculpture, en particulier murale, devient sa marque principale. 

Outre une fresque monumentale au Palais des Arts graphiques, lors de l’Exposition universelle de 1958, Godard signe notamment plusieurs compositions inspirées des traditions de Meix et Châtillon, témoignages de son attachement à sa région d’enfance. Une autre preuve, en 1955, en est sa contribution à l’hommage à Édouard Ned, dont il réalise la plaque commémorative. Le bois et la pierre sont les matières de prédilection de cet artiste d’art contemporain. La tuberculose l’emporte soudainement en 1967.

 


Informations communiquées par la Bibliothèque « À livre ouvert », Saint-Léger (novembre 2015)
Les Cahiers de l'Académie luxembourgeoise, Chronique 1938-1958, Arlon, Fasbender, 1959, nouvelle série 1, p. 25.
La Wallonie. Le Pays et les hommes (Arts, Lettres, Cultures), t. IV, p. 482.
La Vie wallonne, mars 1931, CXXVII, p. 313-321.
http://www.mayeur-saint-leger.be/realisations/files/20120305.pdf
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0776-5541_1906_num_13_49_1929_t1_0098_0000_2 (s.v. novembre 2015)
Robert FRICKX et Raymond TROUSSON, Lettres françaises de Belgique. Dictionnaire des œuvres, t. I, Le Roman, Paris-Gembloux, Duculot, 1988, p. 268.
Jules DESTRÉE, Wallons et Flamands. La Querelle linguistique en Belgique, Paris, 1923, p. 93
Jules-Louis TELLIER, Édouard Ned : l’homme, l’écrivain, Bruxelles, 1946.
Au fil du Ton, bulletin du Cercle de recherche et d’histoire de Saint-Léger, n°36, p. 11-13
ENGELEN-MARX, La sculpture en Belgique à partir de 1830, Bruxelles, août 2006, t. III, p. 1699.
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 635.

121 Grand Rue
6747 Châtillon (Saint-Léger)

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Paul Delforge

Plaque et banc Charles PLISNIER

Plaque commémorative et banc Charles Plisnier, 1981 et 8 mars 1997.
Réalisé à l’initiative des autorités communales.

Charles Plisnier a-t-il écrit ses plus beaux livres à Ohain ? En tout cas, il réside dans cette commune du Brabant wallon de 1935 à 1937 et c’est en 1936 qu’il publie Mariage et en 1937 qu’il reçoit le Prix Goncourt pour Faux-Passeports. Circonstance ou coïncidence ? Sans trancher définitivement la question, tout en soulignant que l’écrivain y acheva la rédaction du livre couronné à Paris, les autorités locales de Lasne ont pris deux initiatives qui rappellent le passage de l’écrivain dans la localité d’Ohain, partie intégrante de Lasne depuis la fusion des communes. En 1981, en effet, dans l’écrin exceptionnel que constitue le parc communal, espace arboré niché au centre du village et entouré de petites maisons du passé, un des bancs installés autour du kiosque à musique rend explicitement hommage à Charles Plisnier. Son nom est gravé sur l’un des larges bords du siège, tandis que, de l’autre côté, on peut lire :

« Il n’est pas trop tard pour faire le monde ».

C’est la même place communale qui accueille aussi la fontaine dite des frères Mascart. Quelques années plus tard, une seconde initiative conduit à apposer une plaque commémorative sur le devant la maison où a résidé l’écrivain de 1935 à 1937.

Charles PLISNIER
Académicien belge
a séjourné en ce lieu
de 1935 à 1937
 

Banc Charles Plisnier – © Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

L’inauguration de cette plaque s’est déroulée le 8 mars 1997, en présence des autorités locales qui poursuivent ainsi une politique résolue visant à honorer tous les écrivains et artistes qui choisirent Ohain comme lieu de résidence à l’un ou l’autre moment de leur existence.
Plisnier n’était pas né à Ohain, mais à Ghlin en 1896. Installé très vite à Mons où il fait ses études, ce fils d’industriel progressiste avait rallié la Troisième Internationale en 1919, alors qu’il achevait ses études de Droit à l’Université libre de Bruxelles. Il vit des années difficiles, dans les années ’20, étant finalement dénoncé comme trotskyste, puis exclu par les staliniens qui contrôlaient l’Internationale. Se lançant dans l’écriture, il rencontre un grand succès de librairie en 1936 avec Mariages, son premier roman, et obtient le Prix Goncourt en 1937, pour Faux-Passeports. Ce prix est exceptionnel à deux titres : c’est la première fois qu’il est attribué à un auteur ne possédant pas la nationalité française et il couronne aussi le roman Mariages avec retard. Renonçant au barreau, Plisnier s’installe en France où il se consacre exclusivement à l’écriture, mais l’on ne retrouve dans son parcours aucune date qui pourrait faire chorus avec 1974 et l’inauguration de son buste. Militant wallon actif, partisan de la réunion de la Wallonie à la France, ainsi qu’il exprime lors du Congrès national wallon d’octobre 1945, il est aussi distingué par l’Académie (Destrée) de Langue et de Littérature françaises dont il est membre de 1937 à 1952, année de son décès à Paris. 

Paul DELFORGE, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. III, p. 1284-1285
Marie-Thérèse BODART, Charles Plisnier, dans Biographie nationale, t. 33, col. 596-601
Philippe DESTATTE, Actualité politique de Charles Plisnier sur la question wallonne, dans Francophonie vivante, n°4, décembre 1996, p. 245-250, (Bruxelles, Fondation Charles Plisnier.)
Roger FOULON, Charles Plisnier, Institut Jules Destrée, collection Figures de Wallonie, 1971
Charles BERTIN, dans Bulletin de l’Académie royale de Langue et de Littérature françaises, Bruxelles, 1974, t. LII, n°3-4, p. 273-278
Informations communiquées par les services administratifs d’Ohain, dont le fascicule Balade à la découverte du Patrimoine d’Ohain, s.d.

Place communale et 29 route de la Marache
1380 Ohain

Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Plaque Fernand SEVERIN

Plaque commémorative Fernand Severin, à l’initiative des autorités locales, 13 septembre 1953.

Si l’œuvre principale du poète Fernand Severin, La Source au fond des bois (1924) trouve une partie de son inspiration à la ferme de Penteville, à Gembloux, et dans les environs où le jeune garçon a longtemps vécu, le souvenir de l’écrivain ne fut sauvé de l’oubli que dans les années 1950. En septembre 1953, très précisément, une série d’initiatives sont menées à Grand-Manil en l’honneur du poète, professeur de l’Université de Gand et membre de l’Académie de Langue et de Littérature françaises de Belgique.

Le dimanche 13 septembre 1953 fut la « Journée Fernand Severin » : exposition de peintures, dépôt de fleurs, réception officielle des autorités par l’administration communale, discours, et inauguration de plaques commémoratives furent au programme, ainsi que l’attribution officielle à la drève de Penteville  du nom d’avenue Fernand Severin. Peu connu de son vivant, Severin sortait d’un purgatoire que nombre de critiques littéraires trouvaient injuste.

Formé à la Philologie classique, collaborateur des revues La Jeune Belgique, avec Camille Lemonnier, et La Wallonie, lieu de rencontre des symbolistes sous le patronage d’Albert Mockel, Severin avait enseigné tour à tour à Virton (1892-1896) et à Louvain (1896-1907), avant de se voir attribuer la chaire de littérature française de l’Université de Gand (1907). Critique littéraire, il publie plusieurs recueils de poèmes (Le Lys, 1888), Le don d’enfance (1891), Le chant dans l’ombre (1895), Poèmes ingénus (1899), La solitude heureuse (1904), ainsi que deux essais, l’un consacré à Théodore Weustenraad (1914), l’autre à Charles Van Lerberghe (1922). Membre de l’Académie royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique, la fameuse Académie Destrée, dès 1920, son dernier recueil, La source au fond des Bois, est son dernier opus (1924).

Sobrement, la plaque apposée sur le mur de l’école, à l’ombre de l’« Arbre du Centenaire », s’efforce de rappeler aux habitants de Grand-Manil – et aux autres – le souvenir de leur illustre concitoyen :

 

EN SOUVENIR DE
FERNAND SEVERIN
POÈTE ET ACADÉMICIEN
NÉ À GRAND-MANIL
(FERME DE PENTEVILLE)
LE 4 FÉVRIER 1867
DÉCÉDÉ À GAND
LE 4 SEPTEMBRE 1931


Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
La Wallonie. Le Pays et les hommes (Arts, Lettres, Cultures), t. II, p. 409-411
Robert-O.-J. VAN NUFFEL, dans Biographie nationale, t. 40, col. 741-777
Académie royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique, http://www.arllfb.be/composition/membres/severin.html

Carrefour rue Paradis et rue Verlaine 
5030 Grand-Manil (Gembloux)

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Paul Delforge

Statue François-Charles de VELBRÜCK

Statue du prince-évêque Fr-Ch. de Velbrück, réalisée par Léon Mignon, c. 15 octobre 1880.


Au milieu du XIXe siècle, afin de doter l’institution provinciale de Liège d’un bâtiment digne de ce niveau de pouvoir, d’importants travaux sont entrepris autour de l’ancien palais des princes-évêques. Propriétaire des lieux (1844), l’État belge retient le projet du jeune architecte Jean-Charles Delsaux (1850) et lui confie la mission de réaliser la toute nouvelle aile, en style néo-gothique, sur le côté occidental du Palais. Face à la place Notger, Delsaux (1821-1893) achève l’essentiel du chantier en 1853, mais des raisons financières l’empêchent de réaliser la décoration historiée qu’il a prévue pour la façade du nouveau palais provincial. Vingt-cinq ans plus tard, le gouverneur Jean-Charles de Luesemans prend l’avis d’une commission pour déterminer les sujets et les personnes les plus dignes d’illustrer le passé de « la Nation liégeoise ». Placés sous la responsabilité de l’architecte Lambert Noppius (1827-1889), une douzaine de sculpteurs vont travailler d’arrache-pied, de 1877 à 1884, pour réaliser 42 statues et 79 bas-reliefs qui racontent l’histoire de la principauté de Liège. Dès la mi-octobre 1880, 27 des 42 statues sont achevées, validées par la Commission et mises à leur emplacement respectif. Celle de Velbrück est parmi celles-ci.

Membre de cette équipe, Léon Mignon (Liège 1847 – Schaerbeek 1898) va réaliser quatre des 42 statues et représenter deux scènes historiques (La bataille de Steppes et L’institution de la Fête-Dieu). De retour d’un séjour de plusieurs mois à Rome, Léon Mignon s’est installé à Paris ; rentrant à Liège de temps à autre, il apporte sa contribution au chantier de décoration du Palais provincial. C’est aussi durant cette période qui va de 1876 à 1884 que l’artiste réalise ses œuvres majeures, celles qui lui assurent en tout cas une réelle notoriété : Li Toré et son vis-à-vis Le Bœuf de labour au repos.
Réalisée en pierre durant la même période, sa statue du prince-évêque Velbrück (Düsseldorf 1719 – Tongres 1784). Située juste à côté de la statue de Saint-Hubert, celle de Velbrück est à l’extrême-droite du péristyle, sur la partie inférieure, dans l’angle de retrait. Initialement réservée à des personnalités du Moyen Âge (pour éviter des polémiques), la façade du Palais provincial réserve quelques exceptions : décédé moins d’un siècle avant le chantier de décoration, François-Charles Velbrück est le plus « récent » d’entre tous et son règne est considéré unanimement comme l’un des plus remarquables de l’histoire de la principauté. Cette unanimité n’était guère rencontrée pour un personnage comme Sébastien Laruelle, dont la statue était initialement prévue à l’endroit où se trouve désormais Velbrück Contrairement au projet de décoration initial, aucune statue ne sera d’ailleurs consacrée à Laruelle, mais un bas-relief – placé juste à côté de Velbrück – évoque l’assassinat du bourgmestre de Liège.

Chanoine de la Cathédrale Saint-Lambert dès les années 1730, François-Charles de Velbrück est venu habiter Liège à partir de 1745 ; il entre alors dans le Conseil privé du prince-évêque. En l’absence de Jean-Théodore de Bavière, il s’occupe de la direction des affaires liégeoises et, jouissant de l’appui des « Français », est même pressenti à sa succession en 1763. Fin diplomate et ecclésiastique apprécié, Velbrück devra patienter : ce n’est qu’en 1772 qu’à l’unanimité du chapitre, il est élu prince-évêque de Liège (1772-1784). Chacun s’accorde à reconnaître que son règne a été remarquable et profitable à l’évolution des idées, du commerce et de l’industrie, ainsi que de la santé et de l’instruction. Le contraste avec son successeur accentue encore l’image positive de ce grand protecteur des artistes, ouvert aux idées nouvelles, qui permit la création de la Société d’Émulation, de la Société littéraire, des Académies et des Écoles. Mis à part le mausolée Velbrück, œuvre de François-Joseph Dewandre, il n’existe aucune sculpture de l’ancien prince-évêque à Liège quand Léon Mignon entreprend de le représenter.

L’éloignement ne permet pas d’apprécier à sa juste valeur le travail de précision réalisé par le sculpteur : outre le portrait très ressemblant, les plis, les effets des vêtements du prince-évêque et surtout les broderies et dentelles de sa chasuble sont d’une qualité exceptionnelle. Cette statue de Velbrück témoigne aussi que Léon Mignon n’est pas qu’un sculpteur animalier, même si son œuvre la plus connue à Liège reste Li Toré. Bénéficiaire d’une bourse de la Fondation Darchis, cet élève studieux de l’Académie des Beaux-Arts de Liège, qui fréquentait depuis son plus jeune âge l’atelier de Léopold Noppius, avait trouvé l’inspiration en Italie (1872-1876). Médaille d’or au salon de Paris en 1880 pour son taureau, il s’était installé dans la capitale française (1876-1884), avant d’être contraint à habiter Bruxelles pour pouvoir  exécuter des commandes officielles du gouvernement : c’est l’époque de ses bustes, mais aussi de la statue équestre de Léopold II particulièrement remarquable, d’une série de bas-reliefs pour le Musée d’Art moderne de Bruxelles et le Musée des Beaux-Arts d’Anvers, ainsi que d’une Lady Godiva, sa dernière œuvre.

Sources

Julie GODINAS, Le palais de Liège, Namur, Institut du Patrimoine wallon, 2008, p. 96
http://www.chokier.com/FILES/PALAIS/PalaisDeLiege-Masy.html
Michel Péters sur http://fr.slideshare.net/guest78f5a/petit-historique-de-la-sainttor-des-tudiants-ligeois (s.v. août 2013)
Hugo LETTENS, Léon Mignon, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 504-508
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 231
Musée en plein air du Sart Tilman, Art&Fact asbl, Parcours d’art public. Ville de Liège, Liège, échevinat de l’Environnement et Musée en plein air du Sart Tilman, 1996
Georges DE FROIDCOURT, Velbrück, dans Biographie nationale, t. 26, col. 523-531 
La Meuse, 2 octobre 1880
 

Statue du prince-évêque Fr-Ch. de Velbrück – © Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Façade du Palais provincial
Face à la place Notger
4000 Liège

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Plaque Camille DEBERGHE

Plaque commémorative Camille Deberghe, à l’initiative des autorités locales.


À hauteur des n°5/7 de la rue Charles Nicaise, dans le centre de la ville, sur la façade latérale d’un petit bâtiment affecté comme cabine électrique, une plaque commémorative en marbre noire rend hommage à une personnalité libérale de La Louvière assassinée en octobre 1944.


Originaire de Houdeng-Aimeries, Camille Deberghe (1879-1944) est une personnalité majeure de La Louvière et de la région du Centre dans l’Entre-deux-Guerres. Journaliste, chroniqueur politique, directeur-administrateur du quotidien libéral louviérois Les Nouvelles, il défend aussi les idées libérales au Conseil communal (1921-1944) de La Louvière, et au Conseil provincial du Hainaut (1924-1932). Président de multiples associations et fédérations – libérales, de journalisme et culturelles – Camille Deberghe est le président-fondateur et animateur-mécène des Amitiés françaises de La Louvière; grâce à ses initiatives, La Louvière connaît une importante vie artistique d’inspiration parisienne. Représentant de l’arrondissement de Soignies (1934-1940) à l’Assemblée wallonne et membre de son Bureau permanent, Deberghe s’occupe aussi de bienfaisance. En mai 1940, il reste à La Louvière. Des quatre conseillers communaux (sur 17) encore présents, c’est lui qui émerge pour exercer les fonctions de bourgmestre. Mais dès le 15 août, il est arrêté en raison de ses activités antinazies manifestes depuis longtemps ; privé de liberté, il est interdit de toute fonction politique. Résistant actif, membre du groupe Mill, Deberghe contribue à la libération de La Louvière et participe à sa reconstruction quand, le 3 octobre 1944, il est assassiné devant son domicile (14 rue Warocqué), victime d’un règlement de comptes commandité par le docteur Célestin Rinchard.


L’animosité entre les deux hommes remonte à la fin des années trente. Chirurgien diplômé de l’Université libre de Bruxelles, Rinchard est bien connu dans la région du Centre en raison de son train de vie et de débordements qui lui valent à la fois des ennuis professionnels et une solide réputation de noceur. Néanmoins, ayant obtenu le soutien d’élus socialistes de La Louvière (Roger Roch principalement), il décroche une place de chirurgien chef adjoint à l’hôpital civil de La Louvière, en dépit de candidats mieux cotés (1939). Dans son journal, Deberghe dénonce une « combine politique », mais en vain.

Commence alors un mano a mano qui va dégénérer. À peine désigné comme bourgmestre, Deberghe s’empresse de casser la nomination de Rinchard. Mais après l’arrestation de Deberghe, Rinchard parvient à récupérer son poste. À l’approche de la fin de la guerre, Rinchard se porte acquéreur d’une clinique à Braine-l’Alleud et s’éloigne de La Louvière. Avec Le Pays réel dans sa poche droite et Le Drapeau rouge dans sa poche gauche, celui qui fréquentait des représentants de l’Etat-major allemand dans le Roman Pays parvient à devenir le chef du Front de l’Indépendance de Braine-l’Alleud, à embobiner le sénateur-bourgmestre Jules Hans comme d’ailleurs Achille Chavée, et à bénéficier aussi du soutien d’un jeune magistrat de Nivelles. 

Privé de liberté, Deberghe est quant à lui occupé à monter un dossier contre celui qu’il soupçonne d’être à l’origine de ses problèmes : dès le 8 septembre 1944, il dépose une plainte très étayée devant le parquet de Nivelles. Sentant de fortes réticences du côté de Nivelles, Deberghe s’apprête à remettre son dossier à l’auditeur militaire de Charleroi, le 4 octobre. Il n’en aura pas l’occasion. Après une enquête minutieuse et laborieuse, la Justice parviendra à confondre Rinchard et ses acolytes, tous membres d’un « comité de vigilance », auquel d’autres crimes et forfaitures furent explicitement attribués. « L’Affaire Rinchard » a fait la une des journaux pendant des mois ; enfin, le 1er février 1952, la Cour d’Assises de Bruxelles rend son jugement et condamne Rinchard aux travaux forcés à perpétuité.


Ce contexte explique pourquoi, au cœur de La Louvière, une plaque commémorative rend :

« HOMMAGE A
CAMILLE DEBERGHE
CONSEILLER COMMUNAL
CONSEILLER PROVINCIAL
HOMME D’ŒUVRES
NE LE 31 JANVIER 1879
LACHEMENT ASSASSINE
LE 3 OCTOBRE 1944 »

 

Sources


Paul DELFORGE, Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2000, t. I, p. 401
Yves VANDER CRUYSEN, Un siècle d’histoire en Brabant wallon, Bruxelles, Racine, 2007, p. 99-101
René HAQUIN, Pierre STÉPHANY, Les grands dossiers criminels en Belgique, Bruxelles, Racine, 2005, vol. 1, p. 95-112

5-7 rue Charles Nicaise 

7100 La Louvière

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Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Plaque Albert DU BOIS

Plaque commémorative Albert du Bois, réalisé par le maître tailleur de pierres Dhyne, , à l’initiative du Cercle d’information et d’histoire locale des Écaussinnes, 25 septembre 1982.

La maison familiale de la famille du Bois, appelée au XIXe siècle « le château du Bois » et devenue à la fin du XXe siècle « la pharmacie Poulet », se trouve au cœur d’Écaussinnes, sur la Grand Place. Y ont vécu plusieurs générations de « du Bois », dont le grand-père d’Albert qui fut garde d’honneur de Napoléon puis bourgmestre d’Écaussinnes d’Enghien (entre 1836 et 1843). C’est là qu’a grandi Albert (1872-1940) ; c’est là aussi qu’un précepteur lui apprend à lire et à calculer, avant son inscription au Collège Saint-Michel, à Bruxelles (1881), puis au Collège Notre-Dame de la Paix à Namur, auprès des pères Jésuites pour son école secondaire (1884-1890). Élève brillant, il obtient son diplôme de docteur en Droit de l’Université catholique de Louvain dès 1895, année où son talent littéraire est déjà bien connu ; il a en effet commencé à écrire dès ses humanités à Namur (Fatalité, une œuvre jamais éditée, date de cette période, de même que la poésie Dernier chant qui est distinguée par un prix de l’Académie Mont Réal de Toulouse en 1889). En 1892, certaines de ses pièces sont déjà jouées à Paris. Un séjour prolongé en Grèce, au début des années 1890, inspire son premier roman (Amour antique), suivi de plusieurs autres qui forment une sorte de cycle où l’écrivain exprime sa nostalgie de la civilisation antique. Engagé dans la carrière diplomatique, le comte Albert du Bois est nommé en décembre 1897 comme attaché de Légation. Il entre en fonction à Londres durant l’été 1898 et est promu Secrétaire de Légation de 2e classe en 1899.

Très vite, le jeune diplomate perçoit un sentiment anti-français généralisé dans la population anglaise et s’irrite de l’impérialisme dont font preuve les hauts-responsables britanniques à l’égard de tout ce qui leur est étranger. Parallèlement, il élabore une grille de lecture particulièrement critique à l’égard de la Belgique. Observant le débat parlementaire sur la loi dite d’Égalité adoptée en 1898, son inquiétude à l’égard du sort qui est réservé en Belgique à la culture française alimente une pensée qui s’exprime dans des libelles et des romans qui ne passent pas inaperçus. En 1902, à la manière de Defuisseaux, il rédige une brochure à grand tirage populaire intitulée Le catéchisme des Wallons. Nos droits. Nos devoirs. Nos espérances. Cette démarche attire l’attention de la diplomatie belge sur les idées de son fonctionnaire en poste à Londres. Représenté pour la première fois au théâtre de Mons le 9 février 1903, son drame intitulé La veille de Jemmapes attise la polémique. Publié aussi en 1903, Belges ou français est l’œuvre d’un Secrétaire de Légation qui a fait l’objet d’une révocation (arrêté royal du 10 février 1903), en dépit du congé illimité qu’Albert du Bois avait demandé et obtenu en novembre 1901 pour préparer ses écrits incendiaires.

Considérant les Wallons comme des Français éloignés de leur mère patrie, il suggère, dans La république impériale publié en 1905, des formes pratiques d’unions entre la Belgique et la France. Considéré comme le théoricien de l’irrédentisme français de la Wallonie, il contribue par ses articles et par ses moyens personnels à la vie de revues wallonnes (comme Le Réveil wallon) et à l’élévation de symboles forts (les pierres du Coq de Jemappes – monument inauguré en 1911 – venaient de carrières d’Écaussinnes appartenant à la famille du Bois). En novembre 1913, il est élu comme représentant de Nivelles à l’Assemblée wallonne, mais il n’en est plus membre après 1919. Pendant la Grande Guerre, il a trouvé refuge en Suisse ; depuis Lugano, il semble maintenir un contact régulier avec plusieurs militants. Dans l’Entre-deux-Guerres, il apporte son patronage aux premiers rassemblements à l’Aigle blessé (dès 1928), préside différents cercles, mais est davantage une référence disponible qu’un acteur du mouvement qu’il a lancé.

Ses talents d’écriture sont aussi au service d’une œuvre littéraire personnelle tournée principalement vers le théâtre, où il privilégie la versification, assurément d’inspiration romantique. Avec le Cycle des XII génies, du Bois crée douze pièces dramatiques qui chacune porte le nom d’un « grand homme ». A côté de Rabelais, Hugo, Voltaire et même Shakespeare, L’Hérodienne est la plus connue. Il signe aussi un drame en prose Notre Déesse ou Dea Gallia, où il fait notamment un éloge de la politique extérieure du cardinal de Richelieu. S’inspirant à nouveau de la Grèce antique, du Bois signe d’autres ouvrages qui forment le cycle des Romans de l’hécatombe. Il use aussi des pseudonymes Albert d’Haufremont et Eugène Renaud. Ayant quitté Écaussinnes pour Nivelles déjà avant la Grande Guerre (le château de Fonteneau est une propriété de la famille de Prelle de la Nieppe dont il est issu par sa mère), du Bois aménage un théâtre de verdure dans sa propriété où se joueront des pièces interprétées par des sociétaires de la Comédie française. Marié dans la cathédrale de Nantes en 1929, il n’aura pas de descendant. L’exode de mai 1940 – il quitte Nivelles précipitamment pour Paris avant de rentrer au pays et de retrouver son château occupé les Allemands – a raison de sa santé.

Si un timbre-poste sort à son effigie en 1961, Albert du Bois reste oublié pendant quelques années dans ses deux communes wallonnes d’élection, Écaussinnes et Nivelles. En 1970, Nivelles organise une exposition en son honneur en même temps qu’une stèle est inaugurée au Parc de la Dodaine, à la suite de Franz Dewandelaer et de Paul Collet. En 1982, les autorités communales d’Écaussinnes s’associent au Cercle d’information et d’histoire locale pour inaugurer une plaque commémorative sur sa maison natale, à l’occasion des Fêtes de Wallonie. Bien sûr, c’est une pierre sortie d’une carrière d’Écaussinnes qui a servi de support au travail de gravure réalisé par M. Dhyne, maître tailleur de pierres choisi par le Cercle historique, initiateur du projet. S’inscrivant dans le cadre des Fêtes de Wallonie, l’inauguration se déroule le 25 septembre 1982, en présence de la veuve d’Albert du Bois. 

 

Plaque Albert du Bois (Écaussinnes)

 
La plaque commémorative Albert du Bois a été inaugurée sur la maison de famille d’Écaussinnes, en présence de madame de Prelle de la Nieppe et de Marcel Jacobs, premier bourgmestre du « Grand Écaussinnes ». 

Inauguration de la plaque commémorative Albert du Bois sur la maison de famille d’Écaussinnes, en présence de madame de Prelle de la Nieppe et de Marcel Jacobs, premier bourgmestre du « Grand Écaussinnes ». Photographie extraite de la revue Val Vert, 4e trimestre 1982, n°40, p. 82-84

 

Sources

Pierre PELTIER, Albert du Bois, romancier, poète, doctrinaire écaussinnois méconnu, dans Val Vert, 3e trimestre 1982, n°39, p. 52-59
Jules LEMAIRE, Discours prononcé à l’inauguration de la plaque commémorative, dans Val Vert, 4e trimestre 1982, n°40, p. 82-84
Philippe MURET, dans Paul DELFORGE, Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2000, t. I, p. 520-521

Grand Place
Boulevard de la Sennette
7190 Écaussinnes

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Monument Eugène GODIN

Dans le Parc de l'Avenue Delchambre, à Huy, non loin de l’imposante statue de Joseph Lebeau, un buste tout aussi important rend hommage à Eugène Godin (1823-1886), prospère industriel, protecteur des arts. C’est le même sculpteur qui a réalisé les deux monuments, à trois ans de distance, à savoir le réputé Guillaume Geefs (1805-1883), qui signe sa réalisation par la mention « Gme Geefs/statuaire du roi/Bruxelles » gravée dans le bronze. Formé à l’Académie d’Anvers, le jeune Geefs avait été très rapidement repéré par ses professeurs ; une bourse lui a permis de parfaire sa formation à Paris et, à son retour, il était nommé professeur de sculpture à l’Académie d’Anvers (1833-1840). Membre de la classe des Lettres de l’Académie dès 1845, il la préside de 1858 à 1883. Il était membre de l’Institut de France. Présent dans différents salons, il s’impose avec le modèle de la statue du Général Belliard et le monument funéraire du comte Frédéric de Mérode. Le jeune royaume de Belgique venait de trouver l’un de ses sculpteurs capables de figer dans la pierre (ou le bronze) les personnes et les événements les plus illustres du pays. Répondant aux multiples commandes destinées à orner les églises, les places, les édifices, les cimetières ou les salons de toute la Belgique, il livre à Anvers une statue de Rubens (1840) et à Liège, celle de Grétry (1842), avant de réaliser de nombreuses statues de Léopold Ier, et le Joseph Lebeau des Hutois, avant d’entreprendre le buste d’Eugène Godin (1824-1886).

Directeur et propriétaire principal des papeteries Eugène Godin (1869), ce patron d’industrie développe une importante activité près de la cité hutoise et possède d’importantes participations dans d’autres secteurs économiques et financiers. Avec d’autres familles locales, il fonde notamment le comptoir d’escompte de la Banque nationale à Huy (1855), la Banque populaire de Huy (1865), et est partie prenante lors de la création de la Banque de Bruxelles, dont il est administrateur (1871-1877) ; il est aussi le patron de La Gazette de Huy. Il prend aussi des participations dans les secteurs de la verrerie, de la construction du chemin de fer, de l’assurance, de la Société de Vezin-Aulnoye et dans l’Asturienne des Mines. Conseiller provincial de Liège (1861-1875) et échevin de Huy (1870-1879), il défend le programme du parti libéral ; attentif à la situation sociale de ses nombreux ouvriers, il crée plusieurs écoles, cercles caritatifs et groupes de loisirs. Il préside d’ailleurs une association musicale, la Société d'Amateurs de Huy. C’est cette association qui l'honore de son vivant en commandant, en 1872, un grand buste en bronze à Guillaume Geefs (un buste en marbre est aussi conservé à Huy). Eugène Godin assiste à l’inauguration de l’imposant monument qui lui est dédié.

Car le bronze qui présente un Godin au visage sévère n’est qu’une petite partie de l’ensemble monumental : le buste est en effet posé sur un haut socle (près de 3 mètres) élancé, décoré sobrement dans sa partie supérieure ; à sa base, le socle comprend plusieurs niveaux qui s’intègre, au centre, dans un très large banc précédé d’une esplanade de pierres, à laquelle on accède par trois marches agencées sur toute la superficie de cet sorte de podium. On devine que l’espace devait accueillir les membres de l’association de musique. Le monument est placé dans le parc de l’avenue Delchambre.

 

Jean-Jacques HEIRWEGH, Patrons pour l’éternité, dans Serge JAUMAIN et Kenneth BERTRAMS (dir.), Patrons, gens d’affaires et banquiers. Hommages à Ginette Kurgan-van Hentenryk, Bruxelles, Le Livre Timperman, 2004, p. 430 et 434
Ginette KURGAN, Serge JAUMAIN, Valérie MONTENS, Dictionnaire des patrons en Belgique, Bruxelles, 1996, p. 318-319
Jean-Marie DOUCET (dir.), Hommes de fer et de fonte, Huy, 1994, coll. Histoire d’une ville
Michel LAFFUT, Le libéralisme à Huy (1846-1914), Bruxelles, 1968, p. XXVIII
Jacques VANDENBROUCKE, De Godin à Intermills. Histoire de l’industrie papetière à Andenne 1828-1983, Seilles, 1994
Le CLXXVe anniversaire de la fondation des papeteries Godin, Huy, 1932

Parc Delchambre
4500 Huy

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Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Plaque Luc JAVAUX

Plaque Luc Javaux, 18 septembre 2003.



Après la Première Guerre mondiale, François Bovesse a donné ses lettres de noblesse au décret de l’Assemblée wallonne instaurant une fête de la Wallonie. Avec la création en 1923 du Comité de Wallonie, l’organisation des fêtes à Namur est désormais structurée et pérennisée : désormais, des manifestations rendent hommage aux volontaires wallons qui ont contribué aux Journées de Septembre 1830. Mêlant discours politique, folklore wallon et namurois, le rendez-vous annuel de septembre prend plusieurs déclinaisons dont l’inauguration de plaques commémoratives en souvenir de « grands Namurois ». 

Depuis 1925 et la plaque apposée sur la « maison natale » de Félicien Rops, d’autres plaques sont régulièrement inaugurées. 

Ainsi en est-il en septembre 2003, rue Fumal, avec la plaque honorant Luc Javaux. L’avocat, militant wallon et pilote de la Royal Air Force ainsi « statufié » dans l’espace public bénéficie depuis lors d’un arrêt lors du « parcours des plaques », manifestation devenue traditionnelle dans le programme des fêtes de Wallonie, à Namur.
 

Élève de l’historien wallon Fernand Danhaive, Luc Javaux s’est engagé dans la défense de la Wallonie dès l’Athénée de Namur : président de la Fédération des Élèves du dudit Athénée, cofondateur de la Fédération des Universitaires wallons quand il étudie le Droit à l’Université, fondateur de la première Bibliothèque publique de Wallonie, il participe aux congrès wallons des années 1930, rédige des articles et donne des conférences : son combat pour la Wallonie s’accompagne d’un engagement contre la montée des dictatures, et en faveur d’une politique de solidarité avec les puissances démocratiques d’Europe. Docteur en Droit de l’Université libre de Bruxelles (1935), avocat inscrit au barreau de Namur (1937), animateur des Amitiés françaises (1938), responsable de la section namuroise de la Ligue des Intellectuels wallons (1938), il est proche de François Bovesse dont il partage les idées wallonnes et libérales, tout en se prononçant davantage en faveur du fédéralisme.


En 1939-1940, cet intellectuel tire les conclusions pratiques de son engagement. 

Ayant choisi d’effectuer son service militaire dans l’aviation (1935), il avait poursuivi à ses frais sa formation professionnelle de pilote. Dès août 1939, il est rappelé au 3e régiment d’aéronautique et, quelques mois plus tard, il participe activement à la Campagne des Dix-huit Jours. Incapable d’accepter la capitulation du 28 mai 1940, l’aviateur s’engage dans la Royal Air Force (RAF) et est l’un des premiers volontaires belges à participer en vol à la Bataille d’Angleterre.
 

Promu Flight Lieutenant (capitaine) en 1943 en raison de ses nombreux faits d’armes, Croix de Guerre cité à l’ordre du jour, il est chargé à sa demande d’une mission aérienne jusqu’en Chine. 

Aux manettes de son Mosquito, Luc Javaux se tue le 18 octobre 1943 à Ranchi, aux Indes britanniques, lorsque son avion est pris dans un violent typhon. 

Le texte de ses dernières volontés précise : je désire être incinéré. Pas de participation religieuse quelconque. Sur les simples choses qui pourraient rappeler ma mémoire, indiquer uniquement :
                                                            Luc Javaux / Namur 16 août 1911 : Tombé le…/ Mort pour la Wallonie française.
Toute inscription modifiant la dernière ligne du texte ci-dessus constituerait une véritable trahison de mes volontés les plus chères.
 

Ce sera chose faite en 1961, lorsque les cendres de Luc Javaux sont rapatriées au cimetière de Fleurus : il s’agissait alors du tout premier hommage public rendu tout à la fois au pionnier, au militant de la cause wallonne et au héros du ciel pour la défense des libertés. 

Après la monographie que lui consacra Laurent Lévêque sur base d’archives familiales inédites (1993), Luc Javaux fut mieux connu des Namurois et la plaque apposée en 2003, au 8 de la rue Fumal, contribue à entretenir son souvenir en évoquant ses engagements passés. Aux couleurs de la Wallonie, les lettres rouges sur fond jaune rappelle :

Plaque Luc Javaux (Namur)


 

 

ICI VECUT              1911 - 1943

LUC        JAVAUX
Militant universitaire wallon. Avocat.
Volontaire à la Royal Air Force
durant la « Bataille d’Angleterre ».
Il a dédié sa vie et ses combats
à la liberté et l’avenir de
LA  WALLONIE

 

 

 

 

 

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Laurent LÉVÊQUE, Luc Javaux. Combats pour la Wallonie, Charleroi, Institut Jules Destrée, 1993
Laurent LÉVÊQUE, Luc Javaux, dans Nouvelle Biographie nationale, t. IV, p. 232-234
Paul DELFORGE, Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. II, p. 866-867
http://www.canaris1790.be/fr/index.php?id=13&viebat=2003 (s.v. juillet 2015)

 

 
 

 

 

Rue Fumal 8 
5000 Namur

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Paul Delforge

Plaque Martin-Pierre MARSICK

Martin-Pierre Marsick (1847-1924) est l’un des remarquables représentants de l’école liégeoise de violon. Formé très tôt au Conservatoire de musique de Liège, il apprend l’instrument auprès de M. Dupont, puis de Heynberg (1857-1864), avant d’entrer au Conservatoire de Bruxelles, où Hubert Léonard est alors son professeur (1865), avant de se rendre à Paris, chez Joseph Massart, au Conservatoire national supérieur (1868). 

Son Premier Prix en 1869 lui ouvre de grandes perspectives. Entre 1875 et 1886, il fait les beaux jours de la Société nationale de musique. Premier violon du « quatuor Marsick », il interprète les grands compositeurs de son temps, classiques comme modernes, sans oublier les compositeurs wallons Vieuxtemps et Franck. 

Lui-même compose une quarantaine d’œuvres, essentiellement pour violon. Professeur de violon au Conservatoire national supérieur de musique de Paris (1892-1899), il entreprend alors, comme soliste, plusieurs tournées en Angleterre, en Russie et aux Amériques et tente de vivre de son art à Chicago où s’est ouverte une école belge de violon. 

Mais c’est à Paris qu’il achève sa carrière comme enseignant, non sans cultiver ses racines liégeoises. S’il meurt à Paris, c’est à Liège qu’ont lieu ses obsèques en 1924. Moins de dix années plus tard, avec le soutien de la Société liégeoise de musicologie, ses amis et sa famille organisent une cérémonie d’hommage en apposant une plaque commémorative sur sa maison natale, à Jupille, et en organisant un concert qui réunit, sous la direction d'Armand Marsick, son neveu, trois grands violonistes que Martin Marsick avaient formés : Jacques Thibaud, Carl Flesch et Georges Enesco. Chacun interprète personnellement une œuvre composée par Marsick après avoir joué le Concerto pour trois violons et orchestre de Vivaldi. 
 

La plaque a été posée le 4 juin 1933; délicatement gravés sur une plaque de cuivre, deux blocs de textes sont séparés par un archet en diagonale.

 


-http://chljupille.over-blog.com/article-30890667.html 
-http://armand.marsick.pagesperso-orange.fr/biographie2.htm 
-http://www.marsick.fr/
-La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. III, p. 392, 411 ; t. IV, p. 351

Rue Lassaux 3
4020 Jupille

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Paul Delforge