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Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Mémorial PETRARQUE à Habay-la-Neuve

L’étonnement est grand de rencontrer un monument dédié à l’illustre Pétrarque au milieu de la forêt d’Anlier. Pourtant, le long de la rue Bonaparte, depuis 1947, une plaque commémorative rend hommage au père de l’humanisme. Originaire d’Arezzo (1304-1374), Francesco Petrarqua est considéré comme l’un des plus grands auteurs de la littérature italienne. Depuis sa première rencontre, en 1327, avec une jeune femme de haut rang, il nourrit à son égard un amour platonique qui inspire ses meilleurs poèmes, dont notamment le Canzoniere. En dépit de la mort de Laure en 1348 des suites de la peste noire, elle ne cessera d’occuper les pensées de Pétrarque. Diplomate, appelé à mener de nombreux voyages à travers l’Europe, cet érudit s’adonne aussi à l’écriture de textes religieux et de nature historique. Si sa poésie est rédigée en toscan, ses autres écrits sont en latin.

L’idée d’un mémorial Pétrarque émane de l’Académie luxembourgeoise et de ses 40 membres, dont l’actif animateur Pierre Nothomb. Créée dans l’Entre-deux-Guerres, cette société d’écrivains et artistes relance justement ses activités après un long silence imposé par la guerre. En présence d’une foule nombreuse, de représentants de l’Académie de Langue et de Littérature françaises et l’Académie Pétrarque d’Arezzo, ainsi que de Camille Huysmans, ministre de l’Instruction publique en personne qui prononça un long discours, une stèle est dévoilée, le 2 août, mêlant l’ardoise de Martelange et le marbre de Carrare. 

Mémorial Pétrarque

Sur la plaque de marbre, a été gravée l’inscription suivante :

MILLE PIAGE IN UN GIORNO E MILLE RIVI
MOSTRATO M’HA PER LA FAMOSA ARDENNA
AMOR

EN
MCCCXXXIII
FRANCESCO PETRARCA
PARCOURUT CE CHEMIN
OU LE SOUVENIR DE LAURE
L’INSPIRA

ERIGÉ
PAR L’ACADÉMIE LUXEMBOURGEOISE
MCMXLVII

S’appuyant sur des textes anciens, les membres de l’Académie luxembourgeoise ont observé qu’au retour d’un voyage d’études l’ayant mené dans l’Entre-Sambre-et-Meuse, et à Liège en particulier, Pétrarque a écrit avoir emprunté un chemin qui traversa l’Ardenne pour regagner l’Italie. Si le chemin parcouru n’est pas décrit avec précision, Pierre Nothomb a reconnu sans discussion qu’il ne pouvait s’agir que de la voie sacrée de 1333, un vieux chemin rocailleux entre Habay et Wissembach. Mieux même, le savant littérateur luxembourgeois est convaincu que l’endroit précis où Pétrarque songea à Laure, son célèbre amour, est un lieudit cadastré « Doux pommier », à quelques dizaines de mètres de la place Bonaparte, surtout « à la frontière des langues romane et thioise, à la zone de partage des rivières coulant les unes vers la France, les autres vers la dépression rhénane, à la jonction enfin de l’Ardenne mystique et de la Gaume tarasconnaise ». Si non e vero, e bene trovato serait-on tenté d’écrire à propos de cette « démonstration » signée Pierre Nothomb dont la seule intention est de sceller symboliquement un pacte d’amitié indissoluble entre Pétrarque et le Luxembourg.

Annuellement, par la suite, l’Académie luxembourgeoise prendra plaisir de déposer d’autres monuments commémoratifs originaux en terre ardennaise. Pour trouver le mémorial Pétrarque, il faut suivre la rue Bonaparte sur un kilomètre à partir de l’entrée du parc du Châtelet (en direction de Martelange).



Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
La Vie wallonne, II, 1947, n°238, p. 212-213.
La Vie wallonne, IV, n°252, 1950, p. 300.

Rue Bonaparte
6720 Habay-la-Neuve

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Pour trouver le mémorial Pétrarque, il faut suivre la rue Bonaparte sur un kilomètre à partir de l’entrée du parc du Châtelet (en direction de Martelange).

Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Plaque Félicien ROPS

Plaque commémorative Félicien Rops, 20 septembre 1925.
Réalisé à l’initiative des Amis de l’Art wallon.

Au sortir de la Grande Guerre, un certain temps est nécessaire pour que d’anciennes associations culturelles reprennent leurs activités. C’est le cas de l’association des Amis de l’Art wallon et surtout de ses sections. À Namur, sous l’impulsion de Jean Grafé, la section ne renaît qu’en 1925. Sa première activité consiste à placer une plaque commémorative sur la maison natale de Félicien Rops. Depuis son inauguration, le 20 septembre 1925, dans le cadre des Fêtes de Wallonie, une pierre bleue figure ainsi à mi-hauteur, entre le rez-de-chaussée et le premier étage du n°33 de la rue du Président, dans le vieux Namur. Gravées et surchargées de rouge, les lettres de la dédicace indiquent :

ICI EST NÉ
FÉLICIEN ROPS
LE 7 JUILLET 1833

S’inscrivant dans le cadre des Fêtes de Wallonie, l’inauguration rassemble de très nombreuses personnalités : parmi d’autres et notamment les membres de la famille Rops, on reconnaît le bourgmestre Golenvaux, trois échevins et de nombreux conseillers communaux dont François Bovesse, des représentants du ministère des Sciences et des Arts et des institutions culturelles namuroises, des artistes (Pierre Paulus, Victor Rousseau et Armand Rassenfosse), ainsi que les responsables des sections de Liège et de Namur des Amis de l’Art wallon. Les discours sont l’occasion de rappeler à la fois la personnalité de l’artiste honoré et les prolégomènes de la plaque commémorative.

En effet, dès 1912, les Amis de l’Art wallon avaient pris la décision d’inscrire un monument dans l’espace public de Wallonie en l’honneur de Rops. Chargé d’en étudier les modalités pratiques, Jean Grafé avait fait adopter les conclusions à l’unanimité : des soutiens nombreux étaient assurés pour garantir une souscription généreuse quand la Grande Guerre éclata. Au lendemain du conflit, la section de Liège des Amis de l’Art wallon se mobilise autour d’un projet tout aussi ambitieux, mais en l’honneur de César Franck dont on doit célébrer le centenaire de la naissance en 1922. Pour éviter confusion et concurrence, les « Namurois » patientent, mais ne voyant rien se concrétiser, décident d’aller de l’avant : la plaque commémorative apposée en 1925 n’est cependant qu’une étape. La section namuroise des Amis de l’Art wallon ne désespère pas en effet de réaliser un monument plus imposant, digne du « plus grand graveur que le monde ait engendré », selon la formule de Jean Grafé.

Peintre, aquafortiste, dessinateur, illustrateur et graveur, Félicien Rops (Namur 1833 – Essonnes 1898), le provocateur, le compositeur du Pornocratès, n’avait pas consenti beaucoup d’efforts pour éviter de tomber dans un purgatoire justifié seulement par la pudibonderie de son temps. Les esthètes de l’art wallon ne s’y étaient cependant pas trompés ; ils avaient rapidement reconnu dans l’œuvre de Rops des qualités exceptionnelles qu’il fallait absolument partager avec le plus grand nombre, tout en faisant de Rops un représentant majeur de l’art produit en Wallonie. Dans les milieux artistiques que fréquente le jeune Rops alors qu’il est inscrit aux cours de Droit de l’Université libre de Bruxelles, on a très vite reconnu aussi le talent du caricaturiste et du lithographe. Illustrateur des Légendes flamandes (1858) de Charles de Coster, il est poussé par Charles de Groux et Constantin Meunier. Maîtrisant toutes les techniques (vernis mou, pointe sèche, aquatinte), il excelle dans la gravure à l’eau-forte qu’il a étudiée à Paris. Illustrateur de Baudelaire (Épaves en 1866, et les poèmes condamnés des Fleurs du mal), Rops devient l’un des illustrateurs les plus recherchés de la capitale française où il s’installe définitivement en 1874, sans renoncer à voyager à travers l’Europe et l’Amérique du Nord. Il en ramène d’éblouissants paysages ; mais à côté de cette peinture à l’huile, le dessinateur continue d’affoler les bourgeois bien-pensant par ses thématiques provocatrices. Membre du Groupe des XX, Félicien Rops a encore croisé la route d’Armand Rassenfosse (1886). De leur profonde amitié naissent une technique particulière de gravure et un vernis mou transparent, au nom évocateur, le « Ropsenfosse ».

En inaugurant la plaque commémorative du côté de la rue du Président, les Amis de l’Art wallon n’ignorent pas que Rops est né dans un logis provisoire dont l’entrée est située du côté du Marché au Beurre ; choisissant de rendre la plaque plus visible, ils optent cependant pour l’hôtel de maître principal qui a sa façade principale du côté de la rue du Président. Ainsi, estiment-ils, la plaque commémorative rendra davantage le service pédagogique attendu, à savoir « rendre à Rops la place qu’il devrait occuper depuis longtemps dans l’esprit de chacun ». Saluant en Félicien Rops « un artiste wallon », le bourgmestre Golenvaux accepte au nom de la ville de Namur de prendre sous sa garde la plaque commémorative.

Insistant sur les très nombreux liens qui rattachent Rops à Namur, les Amis de l’Art wallon organiseront par la suite une rétrospective de l’artiste, envisageront l’érection d’un monument plus imposant et manifesteront leur intention de créer, à Namur, un Musée qu’ils enrichiraient progressivement, afin de remplacer le Musée des Beaux-Arts détruit pendant la Première Guerre mondiale (l’acquisition par les pouvoirs publics de l’Hôtel de la Croix, rue Saint-Antoine, permettrait d’en faire un musée des arts anciens majeurs et mineurs du Namurois). Ils ont fait l’annonce de leurs intentions lors d’une courte réunion solennelle dans la salle des séances du conseil communal de Namur.

Sources

Wallonia 1912, p. 561
La Vie wallonne, 15 août 1921, n°12, p. 573 et ssv
La Vie wallonne, 15 octobre 1925, LXII, p. 81
La Vie wallonne, 15 décembre 1925, LXIV, p. 133-146
La Vie wallonne, octobre 1933, CXLVIII, p. 66-68
Maurice KUNEL, dans Biographie nationale, t. 33, col. 627-631

Rue du Président 33
5000 Namur

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Stèle Henri TUDOR

Stèle commémorative Henri Tudor, réalisée par Georges Vandevoorde, date inconnue.

À Florival (Grez-Doiceau), sur le site de l’ancienne usine Tudor, au cœur d’une large pelouse, s’élève un monument en pierre rouge dédié à Henri Tudor. Le nom de l’industriel est la seule mention qui subsiste sur la face avant du monument abîmé par le temps, tandis qu’un bas-relief, exécuté par Georges Vandevoorde (1878-1964), représente le profil gauche de l’industriel barbu. Un plant de rhododendrons semble vouloir continuer à fleurir au pied de ce souvenir en pierre d’une prospérité passée. D’usine Tudor, il n’est en effet plus question depuis 1995. Succède à Tudor producteur de batterie le distributeur Exide Technologies qui continue d’occuper les bâtiments que l’investisseur luxembourgeois avait fait construire au XIXe siècle.

Durant ses études à l’Université libre de Bruxelles, à l’école polytechnique (1879-1883), Henri Owen Tudor, citoyen du grand-duché de Luxembourg, se passionne pour l’électricité, en particulier pour la dynamo inventée par Zénobe Gramme en 1869 et pour la lampe à incandescence que commercialise Edison. Dès 1881, Tudor parvient à mettre au point un système pour stocker l’énergie électrique à partir d’accumulateur au plomb, perfectionnant ainsi l’invention de Gaston Planté (remontant à 1859). Depuis son village natal de Rosport, il parvient à valoriser son invention (l’électrode à grande surface) et à passer le cap de la fabrication industrielle. Dès 1886, Tudor parvient à convaincre les autorités d’Echternach de remplacer les réverbères à pétrole par un éclairage électrique : l’expérience est concluante et, très vite, Tudor doit constituer un Société anonyme belge pour l’Éclairage Public par l’Électricité afin de répondre à des sollicitations de localités belges, avant de se tourner aussi vers de nouveaux marchés en Allemagne, en Scandinavie et en Europe centrale.

Quand son usine de Rosport devient trop petite et alors que le grand-duché reste confiné dans le Zollverein imposé par Berlin, Henri Tudor décide de s’implanter en Brabant wallon, rachetant l’ancienne abbaye cistercienne de Florival, à Grez-Doiceau. C’est là, de 1901 jusqu’en 1995, que vont être fabriquées les batteries Tudor. Inventeur et investisseur, Tudor était présent à l’exposition universelle de Liège en 1905, avec un chariot dit « energy-car ». Peut-être est-ce là que sa route croise celle de Henri Pieper. Les deux hommes participent alors à la mise au point de l’Auto-Mixte, Tudor fournissant les accumulateurs électriques. À partir de 1908, il construit des batteries pour voitures à Florival sous la dénomination SA Accumulateurs Tudor. « Auto-Mixte », modèle exceptionnel de voiture hybride (pétrole, batterie électrique), rencontrera un certain succès en Europe jusqu’à la Grande Guerre, mais finalement ne parviendra pas à percer.

Si les successeurs des entreprises Tudor sont aujourd’hui dispersés à travers le monde, c’est à Grez-Doiceau que subsiste le monument honorant l’initiateur de cette aventure industrielle qui dure depuis plus d’un siècle. Le bas-relief est dû au talent de Georges Vandevoorde, sculpteur originaire de Courtrai, où il fit ses études à l’Académie sous la direction de Constant Devreese. Formé également auprès de Julien Dillens et de Charles Van der Stappen, Vandevoorde est occupé durant sept années aux côtés du sculpteur wallon Victor Rousseau, dans son atelier bruxellois (en 1958, il signera le monument Rousseau inauguré à Forest). Médailles et sculptures n’ont guère de secrets pour cet artiste qui affectionne les portraits, les nus et les allégories. Comme ses contemporains, il est souvent sollicité pour des monuments aux morts des deux guerres (Gembloux, Jemelle, Braine-le-Comte, etc.), tout en réalisant des œuvres d’inspiration personnelle ou de commande (comme des décorations pour des parcs publics à Bruxelles). Professeur à l’Académie de Molenbeek-saint-Jean, il en devient le directeur, tout en étant inspecteur dans l’enseignement artistique provincial du Brabant.

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Michel BEDEUR, Henri Pieper : Un génie créateur : 1867-1952, Andrimont, Vieux-Temps, 2003, p. 61-65
Henri WERNER, Ernest REITER, Henri Owen Tudor - l'impact d'une idée, Luxembourg 2009
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 613

 

Stèle Henri Tudor (Florival, Grez-Doiceau)

Rue de Florival 
1390 Florival (Grez-Doiceau)

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Paul Delforge

Plaque Roger DE LE PASTURE

Plaque commémorative de Roger de le Pasture, réalisée à l’initiative des autorités communales de Tournai ; de l’Institut Jules Destrée,19 juillet 1913 ; septembre 1978.


« Ici naquit en 1399
Roger de le Pasture
Dit Van der Weyden
peintre célèbre
mort à Bruxelles en 1464 »

Telle est l’inscription qui figure sur la plaque apposée sur la maison natale du peintre, à Tournai, rue Roc-Saint-Nicaise, et inaugurée le 13 juillet 1913. Longtemps considéré comme un peintre flamand, Van der Weyden commence à être mieux connu depuis la moitié du XIXe siècle, moment où deux Tournaisiens – Charles-Barthélemy Dumortier et Alexandre Pinchart – établissent que son  lieu de naissance est à Tournai, sous le nom de Roger de le Pasture. Au début du XXe siècle, cependant, ce lieu d’origine n’en faisait pas un artiste de Wallonie, ses œuvres continuant d’être présentées comme appartenant à l’école flamande (dans le sens ancien de cet adjectif), mais aussi comme réalisées par un artiste flamand (dans le sens politique acquis par l’adjectif à la fin du XIXe siècle). C’est en s’interrogeant sur l’existence d’un art wallon, exercice pratique tenté en 1911 dans le cadre de l’Exposition internationale de Charleroi, que Jules Destrée va accorder une place toute particulière à Roger de le Pasture. Étudiant l’œuvre de l’artiste tournaisien du XVe siècle sous toutes ses coutures, l’esthète Jules Destrée y voit un peintre essentiellement wallon, figure de proue d’une « école » dont la création en 1912 et l’activité de la société des « Amis de l’Art wallon » doivent encore démontrer l’existence. Cité dans la Lettre au roi sur la séparation de la Wallonie et de la Flandre (août 1912), Roger de le Pasture se devait d’être honoré dans sa ville natale, et la Cité des Cinq Clochers comme partie prenante de la Wallonie. La revue Wallonia publie d’ailleurs, sous la direction d’Adolphe Hocquet, un numéro spécial consacré à Tournai dans l’Art et dans l’Histoire (mai-juin 1913). Et le 19 juillet 1913, le cercle des « Amis de l’art wallon » tient son assemblée générale à Tournai, avant de procéder à l’inauguration du mémorial de le Pasture.
En collaboration avec les autorités locales, les responsables des Amis de l’Art wallon » ont en effet pris l’initiative de faire apposer la plaque mentionnée ci-dessus sur la maison natale de l’artiste. Archiviste à Tournai, Adolphe Hocquet, par ailleurs membre de l’Assemblée wallonne, a contribué à identifier officiellement la maison natale, au 78 de la rue Roc-St-Nicaise. L’échevin Maurice Houtart, Jules Destrée en tant que président de la SAAW et Eugène Soil de Moriamé, président de la Société historique et archéologique de Tournai, prennent la parole lors de l’inauguration du 19 juillet 1913.

En mai 1940, lors des bombardements allemands sur Tournai, la maison natale du peintre figure parmi les décombres. Il faut attendre 1978 pour qu’une initiative soit prise par Jacques Hoyaux, président de l’Institut Jules Destrée. Le propriétaire d’une des nouvelles maisons construites dans le haut de la rue Roc saint Nicaise a accepté qu’une nouvelle plaque commémorative soit intégrée dans la façade de son immeuble. Inaugurée en septembre 1978, elle mentionne simplement :

« Ici est né en 1399
le peintre
Roger de le Pasture
Hommage de
l’Institut Jules Destrée  ».

Par ailleurs, un monument (un bronze polychrome de Marcel Wolfers représentant « Saint-Luc peignant la Vierge) a été installé par la ville de Tournai, en 1936, en l’honneur du peintre (vieux marché aux Poteries), tandis qu’un médaillon figure aussi sur une façade de la rue des Maux.


 

Marnix BEYEN, Jules Destrée, Roger de le Pasture et « les Maîtres de Flémalle ». Une histoire de science, de beauté et de revendications nationales, dans Philippe DESTATTE, Catherine LANNEAU et Fabrice MEURANT-PAILHE (dir.), Jules Destrée. La Lettre au roi, et au-delà. 1912-2012, Liège-Namur, Musée de la Vie wallonne-Institut Destrée, 2013, p. 202-217
Wallonia, 1913, p. 543-550
Jacky LEGGE, Mémoire en images : Tournai, t. II : Monuments et statues, Gloucestershire, 2005, p. 53-53, 97-98
Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Archives.

 

rue « Roc-saint-Nicaise » – 7500 Tournai

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Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Plaque Franz DEWANDELAER

Plaque commémorative en hommage à Franz Dewandelaer, réalisée à l’initiative de la section de Nivelles de Wallonie libre, 15 septembre 1968.

Les admirateurs du poète Franz Dewandelaer (1909-1952) affirment que « son œuvre est une des plus fortes et des plus pathétiques de la poésie wallonne ». Nivelles, sa ville natale, est le thème central de nombreux écrits où il utilise souvent des images fortes, parfois violentes. Ayant exercé divers métiers avant de se fixer comme employé à l’administration communale de Nivelles (1934), il s’est lancé très tôt dans l’écriture poétique, en langue française comme en langue wallonne, avant de se lancer dans la composition de pièces de théâtre, au contenu engagé dans le combat politique, dans l’écriture de sketches radiophoniques, de contes, voire de chroniques pour des journaux et revues. 

Après la Libération, il militera très activement dans le Mouvement wallon : mêlant ses convictions politiques à ses talents littéraires, il propose un hymne wallon en composant deux chœurs parlés, Bloc et Il était une fois, d’après la Lettre au roi de Jules Destrée. Puisant son inspiration dans des sources identiques à celles des surréalistes wallons, Dewandelaer compose la plupart de ses poèmes entre 1930 et 1936, mais beaucoup ne seront publiés que bien plus tard.  Mobilisé en 1939, le soldat est arrêté au soir de la Campagne des Dix-Huit Jours, et emprisonné en Bavière. Rapatrié malade en 1941, il conservera toujours des séquelles de sa captivité. Il mourra en clinique des suites lointaines de sa captivité.

En septembre 1968, dans le cadre des fêtes de Wallonie, les autorités locales de Nivelles rendent un hommage appuyé à Franz Dewandelaer, figure marquante du roman païs de Brabant. Sans conteste, cette initiative doit beaucoup à Émile Delvaille, ancien résistant, président de la section de Nivelles de Wallonie libre et conseiller communal, qui a su convaincre les échevins Vander Heggen et Hemberg. Avant qu’un mémorial soit inauguré dans le parc de la Dodaine, un cortège officiel fait halte devant le n°3 de la rue Paradis pour inaugurer une plaque apposée sur la façade de la maison natale du poète :

ICI VECUT
FRANZ DEWANDELAER
CHANTRE DE SA BELLE VILLE DE
NIVELLES. LE PLUS POETE DE
NOS POETES DIALECTAUX.
1909-1952

Au-delà de la personnalité du poète dialectal, la manifestation organisée en 1968 vise à affirmer l’appartenance du Roman pays de Brabant à la Wallonie et la défense des intérêts wallons au moment où est débattue la question de l’implantation d’une activité de pétrochimie à Feluy. En septembre 1967, le bourgmestre Jules Bary avait conféré un caractère davantage officiel à la Fête de Wallonie organisée à Nivelles depuis les années 1930. La collaboration des autorités locales avec le Comité communal des Fêtes, le Syndicat d’initiative et de tourisme et la Fédération nivelloise de Wallonie libre contribue à l’organisation d’un programme structuré et ambitieux, visant à étoffer la commémoration wallonne. Ainsi en 1968, au-delà des discours officiels, du cortège musical et d’un feu d’artifice, le spectacle offert au public le samedi soir a été préparé par Willy Chaufoureau qui met en scène des poèmes, des chansons et des saynètes tirés des œuvres de Dewandelaer. 

Sources 

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Archives Paul Collet, 14-22, Chemise Commémoration 1969, notamment article du Peuple, 24 septembre 1969
Paul DELFORGE, Essai d’inventaire des lieux de mémoire liés au Mouvement wallon (1940-1997), dans Entre toponymie et utopie. Les lieux de la mémoire wallonne, (actes du colloque), sous la direction de Luc COURTOIS et Jean PIROTTE, Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 1999, p. 285-300
Paul DELFORGE, Franz Dewandelaer, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2000, t. I, p. 498
Georges LECOCQ, Pierre HUART, Dis, dessine-moi un monument… Nivelles. Petite histoire d’une entité au passé bien présent, Nivelles, Rif tout dju, mars 1995, p. 17
La Vie wallonne, 1952, p. 220 ; 1953, p. 118-140
Le Gaulois, n° 245, 30 août 1952, p. 6
Wallonie libre,  septembre 1968, p. 15 ; octobre 1968, p. 10.

 

Plaque Franz Dewandelaer (Nivelles)

Rue Paradis 3
1400 Nivelles

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Stèle George GARNIR

Au détour d’un sentier, dans le parc du Waux-Hall, à Mons, une stèle rend discrètement hommage à George Garnir (1868-1939) que l’on identifie généralement comme le fondateur de l’hebdomadaire Pourquoi Pas ? Il est en effet exact qu’en 1910, avec Léon Souguenet et Louis Dumont-Wilden, Garnir a fait partie du trio de fondateurs de ce magazine politique et de société, qui a traversé quasiment tout le XXe siècle avant de s’éteindre en 1989. À l’époque de cette création, Garnir a déjà acquis le statut d’écrivain. Docteur en Droit et en Sciences politiques de l’Université libre de Bruxelles, avocat, il côtoie dès les années 1880 les Severin et Mockel qui le mettront sur les rails de la littérature et de la poésie. Considéré comme « un conteur wallon authentique », l’écrivain – reconnu pour une certaine drôlerie et la bonne humeur de ses ouvrages – sera durablement inspiré par son Condroz d’origine, tout en s’intéressant « aux mœurs bruxelloises ». Abandonnant le pseudonyme initial de George Girran, il supprimera le S final de son prénom lorsqu’il se fera un nom dans la littérature et le journalisme. 

Né à Mons où son père travaillait alors en tant du fonctionnaire des Chemins de Fer, Garnir a passé l’essentiel de son existence à Bruxelles, mais a toujours cultivé le souvenir des racines condruziennes de sa famille (originaire du village d’Ocquier). Il vénéra aussi la ville de Mons qui occupe une place toute particulière dans le cycle des Gardedieu (Tartarin est dans nos murs, 1927 ; Le Commandant Gardedieu, 1930 ; Le Crépuscule de Gardedieu, 1932). Comme Schaerbeek qui a donné le nom de Garnir à l’une de ses rues, la ville de Mons a tenu à honorer l’écrivain en acceptant la stèle dans le parc du Waux-Hall, érigée à l’initiative des Amitiés françaises de Mons, au printemps 1939 : souffrant, Garnir doit renoncer à assister à l’inauguration ; il devait décéder quelques mois plus tard.

Un médaillon figurant le profil gauche de l’écrivain est inséré dans la partie supérieure d’une pierre de granit. Une inscription simplifiée rappelle son lieu de naissance, en respectant l’orthographe de son nom de plume :


« George Garnir
Né à Mons le 12-4-1868 »

Le monument a été réalisé par Godefroid Devreese (1861-1941). Fils du sculpteur Constant Devreese, ce Courtraisien a été formé à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles auprès d’Eugène Simonis illustre représentant de la sculpture liégeoise, puis de Charles Van der Stappen. Remarqué très tôt pour son talent, cet ami et collaborateur de Victor Horta qui est deuxième du Prix de Rome 1885, s’est installé à Bruxelles depuis 1881, où il fait toute sa carrière. Outre de nombreux Salons en Belgique comme à l’étranger, il puise son inspiration dans l’antiquité, réalise des bustes tant d’intérieur que d’extérieur, des fontaines, avant de se spécialiser aussi comme médailleur à la fin du XIXe siècle (plus de 400 médailles), tout en continuant à recevoir de nombreuses commandes publiques. Parmi ses principaux monuments figure celui des Éperons d’Or, inauguré à Courtrai en 1906. Mais Devreese partage aussi avec Garnir, Souguenet et Gavage notamment, un engagement en faveur de la préservation de la nature, des monuments et des sites ; avec d’autres écrivains et artistes, tous trois ont été parmi les promoteurs des journées des arbres, si bien que, régulièrement et même grâcieusement, Devreese signe les médaillons de ses amis.

 

Sources 

Paul DELFORGE, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. II, p. 700
Paul DELSEMME, dans Biographie nationale, t. 44, col. 505-523
Denise CLUYTENS-DONS, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 364-366
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 471
Bulletin de l’Association pour la Défense de l’Ourthe, mai-juin 1939, n°113, p. 142

 

Parc du Waux-Hall
7000 Mons

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Paul Delforge

Paul Delforge

Monument Magloire HOTTON

Monument à la mémoire de Magloire Hotton, réalisé à l’initiative du notaire Florimond Durieu, 4 et 5 avril 1911.

Sur le bord d’un trottoir, devant le 57 de la rue d’Ath à Belœil se dresse un petit monument construit en grès rose extrait des carrières voisines de Granglise. À l’origine, il était entouré d’un grillage en fer forgé qui a aujourd’hui disparu. Avec la construction de maisons dans la rue, le monument est certes moins isolé qu’au moment de son inauguration, mais il perd en visibilité. Sous son sommet arrondi, on peut lire qu’il a été élevé


À LA MEMOIRE
DE
MAGLOIRE HOTTON
ECRIVAIN – AGRONOME
1781-1854


comme l’indiquent les lettres dorées qui ont été gravées dans une pierre bleue rectangulaire.
S’il s’agit bien d’un monument et non d’une pierre tombale, il est clairement établi que lors de son inauguration en avril 1911, ce mémorial était destiné à apporter davantage de dignité à la mémoire d’une personnalité qui avait continuellement été en conflit avec le curé du village et qui avait été enterrée civilement, dans un endroit isolé du village, sur un coin de terre lui appartenant, qu’il cultivait et qui était son laboratoire.
S’il ne fut pas le citoyen de Belœil le plus célèbre, Magloire Hotton a marqué les esprits de ses concitoyens, voire les a hantés. Son anticléricalisme dynamisé par ses conflits permanents avec le représentant local de l’Église avait profondément divisé le village de Belœil en deux camps, à la fin des années 1840 et au début des années 1850 : Magloire Hotton était le chef des pestiférés, sorte de représentant du diable sur terre, dont l’esprit rôdait encore dans les campagnes et dont la tombe imposait aux crédules et superstitieux un important détour. Le clergé s’était opposé à son enterrement dans le cimetière paroissial ; ce fut par conséquent le premier enterrement civil de Belœil.
Près de soixante ans plus tard, le journal catholique L’Indicateur, rendant compte de l’inauguration du monument de la rue d’Ath, persiflait encore en suggérant de remplacer le texte du mémorial « élevé par des libres penseurs » de la manière suivante :


« Pauvre inconnu
Aux survivants

Monument Magloire Hotton (Belœil)


Pour chanter gloire
Cinquante-sept ans
Il a fallu. »


Né dans le XVIIIe siècle finissant, Magloire Hotton s’était pourtant révélé un « homme moderne », précurseur d’idées nouvelles, agronome visionnaire dont les idées étaient davantage appréciées à l’étranger que dans le petit monde agricole traditionnaliste dans lequel il vivait.


Dans le Paris des années 1820 où il avait cherché fortune, Hotton fait commerce de bois et acquiert une réelle expertise dans l’entretien des propriétés. En 1823 lui est confiée la responsabilité de l’entretien du Bois de Boulogne. Ses techniques d’élagage (apprises à Belœil et perfectionnée depuis lors) lui valent la supervision des travaux aux parcs de Vincennes, de Saint-Germain et de Marly. Pour répondre à la demande, il s’entoure d’une équipe d’élagueurs wallons, venus de Belœil. Inventeur d’outils forestiers spécifiques, auteur d’un Manuel de l’élagueur (1829), fondateur d’un mensuel dédié à la science forestière (1829-1830), Hotton apporte une contribution théorique à la révolution agricole du XIXe siècle en étant l’auteur d’ouvrages où il développe une approche physique et chimique des cultures, où il plaide en faveur de la culture du colza et où il explique comment supprimer les jachères et pourquoi renoncer aux labours répétés. De retour sur sa terre natale en 1840, il reste attentif aux questions agronomiques en s’intéressant davantage à la politique. Libéral progressiste, voire socialiste, il se distingue par des libelles, des pamphlets et des chansons qui plaisent à un certain public, mais suscitent l’hostilité des autres, comme en témoigne son ostracisation post mortem.
 


Sources
 


http://www.beloeil.be/fr/officiel/index.php?page=90
Félicien LEURIDANT, Un agronome wallon. Magloire Hotton (1781-1854), dans La Vie wallonne, 15 mai 1929, n°105, p. 263-281
Félicien LEURIDANT, dans Wallonia, 1911, t. XIX, p. 188-190
Félicien LEURIDANT, La tribune horticole, Bruxelles, 15 février 1908, n°86, p. 106

Rue d’Ath 57
7970 Belœil

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Monument Marie-Anne LIBERT

Afin de marquer le centième anniversaire de la disparition de la botaniste Marie-Anne Libert (1782-1865), le Cercle naturaliste de Malmedy organise toute une série d’activités entre janvier et juin 1965. Après une messe de Requiem et la pose d’une plaque commémorative sur sa maison natale (17 janvier), une exposition (5-19 avril), une soirée littéraire (26 mai) et une nouvelle exposition (5 juin), le Cercle naturaliste Marie-Anne Libert de la Région de Malmedy inaugure, le 6 juin, un monument en présence des édiles locaux et d’autorités académiques comme le professeur Marcel Florkin. Le lieu choisi est le parc des Tanneries récemment aménagé par les autorités communales. Le mémorial est dans un cadre arboré, avec un important parterre de fleurs sur l’avant. Après cette manifestation, le Cercle éditera encore un livre collectif retraçant le parcours de la botaniste.

Monument Marie-Anne-Libert

Née en 1782 dans un village faisant encore partie de la principauté abbatiale de Stavelot-Malmedy, Marie-Anne Libert ne prend pas aucune part active dans les révolutions politiques qui marquent les premières années de son existence. Dans les années qui précèdent son décès – le 13 janvier 1865, Malmedy était une localité prussienne – elle s’intéressera au passé de la principauté et écrira quelques articles d’histoire et d’archéologie ; mais là n’est pas l’essentiel des activités de celle qui s’exprime en français et étudie aussi les langues anciennes. Passionnée de botanique comme son mari, le médecin verviétois Simon Lejeune (1777-1838), elle le seconde dans une mission que le préfet du département de l’Ourthe lui a confiée : dresser le tableau méthodique du règne végétal de la circonscription. On retrouve ainsi la contribution de la jeune femme dans les différents ouvrages que publie Simon Lejeune. 

Auteur de la collection de Plantae Cryptogamicae quas in Arduenna collegit MA Libert, quatre fascicules parus dans les années 1830, elle donne ensuite une description détaillée du champignon responsable de la maladie de la pomme de terre. Elle est en effet l’une des premières à identifier la responsabilité du mildiou, dans un mémoire publié en 1845 ; en 1876, le mycologue allemand Anton de Bary en fera la démonstration. D’autres avancées sont encore à mettre à l’actif de la botaniste qui inspire le nom du Cercle naturaliste de la région de Malmedy créé en 1951.

Ce cercle confie à Jacques de Biolley (Bruxelles 1911 – Uccle 1990) le soin de réaliser le monument. Créateur de monnaies, dessinateur, le sculpteur est un autodidacte qui signe ses principaux bas-reliefs dans la région de Stavelot et Malmedy. Lointain descendant des industriels verviétois faisant commerce de la laine depuis le début du XVIIIe siècle, arrière-petit-fils du vicomte Raymond de Biolley (1789-1846), le sculpteur Jacques de Biolley est surtout connu pour son buste du violoniste Henri Koch (Liège, 1972). À Malmedy, il réalise surtout le médaillon carré, en bronze, où il représente le profil gauche de la botaniste. Daté de 1964, il est incrusté sur une imposante pierre sur laquelle trouve aussi place la dédicace :

MARIE-ANNE LIBERT
BOTANISTE
1782-1865

L’idée d’élever un monument à Marie-Anne Libert avait déjà été émise en 1913. Conseillers communaux, Alfred Brindels et Henri Bragard soutiennent en effet le projet d’élever un monument à Saint-Remacle auquel seraient associées des personnalités wallonnes marquantes : l’industriel papetier Jules Steinbach, l’historien Augustin-François Villers, le philanthrope Jean-Hubert Cavens et la botaniste Marie-Anne Libert sont explicitement cités. L’arrière-pensée politique d’un tel projet défendu notamment par Henri Bragard (du Cercle wallon de Malmedy) n’échappe pas au pouvoir de tutelle allemand : le landrat von Korff confisque l’idée du monument et le détourne en décidant de le dédier au prince François d’Arenberg (député de Malmedy au parlement prussien puis au Reichstag, entre 1882 et 1907), récemment décédé. Henri Bragard mène alors bataille – avec succès – pour faire échouer ce projet prussien que les années suivantes feront tomber dans l’oubli. 
 

 

La Vie wallonne, IV, 1964, n°308, p. 263-264
La Vie wallonne, III, 1965, n°311, p. 203-206
André LAWALRÉE, J. LAMBINON, F. DEMARET, Marie-Anne Libert (1782-1865). Biographie, généalogie, bibliographie, (préface de R. BOUILLENNE), Liège, 1965
Catherine JACQUES, dans Dictionnaire des femmes belges, Bruxelles, Racine, 2006, p. 375-376
François CRÉPIN, dans Biographie nationale, t. 11, col. 724-727
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 302
http://gw.geneanet.org/bengos?lang=fr;pz=benoit+philippe+paul+marie+ghislain;nz=gosuin;ocz=0;p=jacques+antoine+francois;n=de+biolley (s.v. mai 2014

parc des Tanneries
4960 Malmedy

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Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Monument Jean NOTE

Lorsqu’il est inauguré, le 20 mai 1929, devant une foule impressionnante, le monument Jean Noté (1858-1922) est installé au coin du boulevard Léopold et de la chaussée de Lille. Depuis lors, il n’a pas changé de place, mais son environnement s’est modifié : le buste en bronze du chanteur lyrique a notamment vu se construire la Maison de la Culture de Tournai et a assisté au changement de nom de la chaussée, devenue avenue du Général de Gaulle.

Enfant de Tournai, où il est né en 1858 dans une famille modeste, Jean-Baptiste Noté vivote de divers métiers avant d’être tiré au sort pour le service militaire et d’entrer pour six ans dans l’armée belge (1880). Bon vivant, interprète spontané de toutes les chansons lors des réunions et fêtes amicales, il attire l’attention de l’un de ses supérieurs, qui l’incite à mettre ses talents au service de la musique. Celui qui a fréquenté quelques cours au Conservatoire de Tournai s’inscrit au Conservatoire de Gand, où il est caserné, et reçoit les premiers prix de chant et de déclamation lyrique en 1884. 

Commence alors une carrière de baryton qui permet au Tournaisien de fréquenter quelques grands opéras d’Europe, faisant essentiellement carrière en France : pensionnaire de l’Opéra de Lyon, puis premier baryton à l’Opéra de Paris. Comme nom de scène, Jean Noté a simplifié son prénom en éliminant Baptiste.

Resté fidèle à sa ville de Tournai, Noté avait exprimé, de son vivant, le souhait qu’un buste (qu’il avait offert) soit installé dans le parc de l’Hôtel de ville. Peu de temps après son décès, un comité du Monument Jean Noté se met en place, à Tournai (septembre 1922) et il rencontre un tel succès, du côté flamand et du côté français, qu’un projet de monument grandiose représentant le baryton en pied voit le jour. Combattue, cette idée fait place au monument définitivement inauguré en 1929 : le buste offert et souhaité par Noté étant oublié. Commentant l’œuvre finalement réalisée par Fortuné Deroubaix (1879-1947), Walter Ravez devait regretter ouvertement les errements de ses contemporains : à ses yeux, le monument finalement retenu est « disgracieux, sans rythme ni noblesse (…) Noté méritait mieux », écrit-il en 1934.

Quoi qu’il en soit de cet avis, nombreux furent ceux qui se réjouirent de voir honorer l’illustre baryton quand fut révélé l’ensemble du mémorial : une allégorie de la musique tient l’avant-bras d’un très jeune enfant un peu potelé, tout en tenant une lyre dans sa main droite. Ce groupe femme/enfant orne la face avant de la longue colonne qui supporte le buste en bronze du chanteur. Un large socle en quatre parties soutient l’ensemble, avec un effet de marches arrondies sous l’allégorie à l’enfant. Une place est réservée pour l’inscription sobre :

« NOTÉ
1858 1922
DE L’OPÉRA ».
 

Quant à Fortuné Deroubaix, il s’agit d’un statuaire tournaisien, auteur de plusieurs commandes pour les autorités locales (notamment le monument du P’Tit chasseur).

Placé à un endroit de grand passage, le monument Noté a fait l’objet d’un important entretien à l’occasion du 150e anniversaire de la naissance du « Pavarotti » tournaisien. Une série de manifestations remettent alors l’artiste à l’honneur, comme, par exemple, la mise en vente de 150 exemplaires numérotés d’un nouveau buste de Jean Noté, réalisé en pierre par le sculpteur tournaisien David Dos Santos.



Jacky LEGGE, Tournai, tome II : Monuments et statues, Gloucestershire, Éd. Tempus, 2005, coll. Mémoire en images, p. 89-91.
http://www.tournai.be/fr/officiel/index.php?page=71 (s.v. septembre 2013)
Walter RAVEZ, Jean Noté, Tournai, 1922.
Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse

Avenue Charles de Gaulle
7500 Tournai

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Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Fontaine et buste de Pierre Ponthier à Marche-en-Famenne

Au cœur de Marche-en-Famenne, sur la place actuellement appelée du roi Albert, s’élève une impressionnante fontaine, au centre de laquelle se dresse le buste du commandant Pierre Ponthier (Ouffet 1858 – Kassongo 1893). Inauguré en 1897, le monument est l’œuvre d’Alphonse de Tombay (Liège 1843 – Liège 1918). 

Cette initiative communale rencontre une triple préoccupation. D’abord, mettre en évidence le progrès technique et social que constitue la fourniture d’eau potable aux habitants de la localité ; d’autres communes de Wallonie optent aussi, au XIXe siècle, pour un monument-fontaine dédié à un personnage historique « local » : c’est là le deuxième objectif poursuivi : rendre hommage à un enfant du pays mort au combat au Congo. Enfin, il s’agit aussi de vénérer un héros qui a perdu la vie dans un fait d’armes destiné à libérer des esclaves. Les cartes postales représentant le monument qui circulent au début du XXe siècle insistent sur la campagne antiesclavagiste que mena alors l’État indépendant du Congo.

Construite sur le pignon aveugle du 18 de la rue Dupont, elle accompagne la moitié de la partie inférieure de la façade. Les pierres taillées en forme de pyramide lui donnent un aspect d’Egypte ancienne, le genre égyptisant étant fort en vogue à l’époque. En tout cas, Alphonse de Tombay n’a pas lésiné avec les effets apportés aux diverses parties de la fontaine. Installé au centre d’un portique incurvé en son centre, un socle à trois faces vient soutenir le buste en bronze de Ponthier. 

Fontaine Ponthier – © Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Gravée dans un cartouche, l’inscription suivante, redorée, surmonte le buste :

AU COMMANDANT Pierre PONTHIER
TUÉ AU COMBAT DE KASSONGO
LE 19 OCTOBRE 1893

Du bas du socle portant le buste, sortent trois têtes de lion distribuant de l’eau dans trois doubles bassins en cascade. Trois autres têtes de lion apportent de l’eau dans les bacs semi-circulaires les plus grands : c’est là que l’on voit, sur les cartes postales anciennes, les habitantes de la localité remplir leur seau ou laver le linge.

Militaire moustachu, portant casquette et décorations, le buste de Ponthier évoque ce sous-lieutenant d’infanterie qui s’engage en mars 1887 au service du jeune État indépendant du Congo appartenant à Léopold II. Après une première affectation au service topographique, il participe à l’expédition qui établit le camp de Basoko destiné à faire obstacle aux incursions des marchands d’esclaves (1888). Les escarmouches sont nombreuses. Après un bref retour en Europe, il repart en 1890 en obtenant le commandement de l’avant-garde de l’expédition Van Kerckhoven dans le Haut-Uele. Il s’y signalera par l’attaque d’un camp de trafiquants, par l’écrasement de dizaines d’entre eux et par la libération de plus de deux cents Africains promis à l’esclavage. Après un rapide retour en Europe pour soigner une blessure, il repart au Congo en 1893. À la tête des Stanley-Falls, Ponthier succombera à ses blessures après une bataille livrée par l’armée commandée par Dhanis contre les trafiquants du chef arabe Rumaliza, près de Kassongo. Sur place, son nom est donné à une station de Wabundu sur le fleuve Congo (Ponthierville).

Fils et petit-fils de sculpteurs liégeois, Alphonse de Tombay a appris le métier dans l’atelier paternel, avant de fréquenter l’Académie de Liège où il bénéficie notamment des conseils de Prosper Drion. Ami de Léon Mignon, il bénéficie comme lui d’une bourse de la Fondation Darchis et séjourne plusieurs mois à Rome (1874-1878). De retour à Liège, il répond à plusieurs commandes officielles dont un buste de Charles Rogier (1880) à Bruxelles qui aura beaucoup de succès. C’est aussi à ce moment qu’il participe au chantier de décoration du palais provincial de Liège auquel il livre six statues et trois bas-reliefs évoquant des scènes historiques. Exposant ses propres œuvres tout en répondant à de nombreuses commandes officielles à Bruxelles, il devient professeur à l’Académie de Saint-Gilles, avant d’en assurer la direction (1902). L’œuvre réalisée à Marche-en-Famenne est une œuvre de maturité.

Hotton, Marche-en-Famenne et Nassogne, Patrimoine architectural et territoires de Wallonie, Liège (Mardaga), 2006, p. 190.
Frère M-G. ALEXIS, Léopold II, souverain de l’État indépendant du Congo, Soldats et missionnaires au Congo de 1891 à 1894, Bruxelles, Desclée, de Brouwer, 1897.
http://search.arch.be/BE-A0510_000280_002648_DUT.ead.pdf (s.v. mars 2014)
http://balat.kikirpa.be/photo.php?path=A4216&objnr=10031033
http://www.ftlb.be/fr/attractions/architecture/fiche.php?avi_id=4140 
http://www.congoposte.be/ponthier.htm 
http://www.lemuseedeleauetdelafontaine.be/fontaines-de-belgique/rechercher-une-fontaine/luxembourg/marche-en-famenne-fontaine-ponthier.aspx (s.v. juin 2014)
Jacques VAN LENNEP, La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 350-351.
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 457-458.
Serge ALEXANDRE, dans Musée en plein air du Sart Tilman, Art&Fact asbl, Parcours d’art public. Ville de Liège, Liège, échevinat de l’Environnement et Musée en plein air du Sart Tilman, 1996.

Place roi Albert Ier
6900 Marche-en-Famenne

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Paul Delforge