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Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Buste Georges Simenon

Buste Georges Simenon, réalisé par Ursula Förster et Angelo Monteforte, 17 juin 1992.

Au cœur du rond-point de la place du Congrès, dans le quartier d’Outremeuse, à Liège, surgit un buste de Georges Simenon, chapeau sur la tête, et désormais sans sa célèbre pipe aux lèvres, dans la mesure où de pseudo-collectionneurs ou de véritables vandales ont décidé, à plusieurs reprises, d’en priver le buste, en dépit des efforts des autorités publiques. Inaugurée le 17 juin 1992, cette statue est la première qui rende hommage à l’écrivain dans sa ville natale. L’initiative en revient au comité de quartier « Outremeuse promotion », présidé par Guy Rutten, qui, dès l’annonce du décès du citoyen d’Outremeuse, décide de lancer une large souscription publique : celle-ci rencontre un franc succès et bénéficie du soutien d’un mécène anonyme ainsi que de la Loterie nationale. Avec l’accord des autorités communales liégeoises, la place du Congrès est choisie pour installer sur un socle de pierre bleue, polie sur les faces avant et arrière, un buste en bronze sculpté par Ursula Förster et Angelo Monteforte et fondu par le fondeur ciseleur José Lhoest et son atelier installé à Herstal. Sur la face avant, une plaque en bronze mentionne simplement le prénom et le nom de l’écrivain. L’ensemble est placé au sommet d’une petite butte et le rond-point est ceinturé par des bornes en petit granit reliées par une forte chaîne.

Né à Liège où il fut notamment journaliste, le romancier Georges Simenon (1903-1989) s’est fait un nom à Paris, avant de s’installer en Amérique puis finalement en Suisse. Ses romans policiers sont parsemés de références à ses années passées en bord de Meuse ; ainsi en est-il par exemple de Pedigree, ou du Pendu de Saint-Pholien, histoire où le Commissaire Maigret impose son personnage. Avec une apparente indifférence, les meilleurs de ses romans et la série des Maigret (au total plus de 300 titres en 34 ans) brossent un panorama du temps comme Balzac et Zola l’ont fait pour leur époque. Un grand nombre de ses livres sont adaptés au cinéma, conférant une dimension supplémentaire à l’œuvre de l’écrivain.
En raison du caractère international du parcours de l’illustre Wallon, plusieurs localités « se disputent » les honneurs de l’écrivain. Depuis quelques années, la ville de Liège – aidée par la province et la Région wallonne – est attentive à honorer la mémoire de l’enfant de la cité, qui a d’ailleurs légué une partie de ses archives littéraires à l’Université de Liège (1977). Si une rue de Liège porte le nom de Simenon depuis 1978, le buste installé en Outremeuse anticipe, dans une certaine mesure, une série de manifestations d’hommage à Simenon : exposition de prestige (1993) ; « Année Simenon » en pays de Liège (2003) ; un géant représentant le Commissaire Maigret dans le folklore local ; un parcours permanent de promenade truffé de références à l’écrivain et à son œuvre ; une place du Commissaire Maigret avec un banc Simenon (2004) ; ouverture d’un Musée (2015) ; etc. 

Ursula Förster (Saint-Vith 1944) a suivi une formation en sculpture monumentale, en peinture au chevalet et en dessin à l’Académie de Liège avant de faire de la sculpture le hobby qui occupe l’essentiel de son temps. Recourant aussi bien au bronze, à la pierre, à la résine ou à la terre cuite, celle qui a installé son atelier à Seny privilégie la femme comme thème d’inspiration, même si d’autres sujets (enfants, animaux, scènes quotidienne, etc.) donnent aussi forme à des réalisations de taille moyenne ou monumentale ; le buste de Simenon est celle qui est la plus connue, mais elle est aussi l’auteur des Joueurs de billes à Huy, de L’homme au banc à Durbuy, Les Macralles à Vielsalm (2000) et de Lison à Waremme (2010). Lauréate de plusieurs prix internationaux, elle expose régulièrement. Quant à Angelo Monteforte, le mari d’Ursula Förster, il prend une part active dans la réalisation de plusieurs des œuvres monumentales de sa complice artistique, tout en appréciant travailler le frigolite. Outre les œuvres déjà citées, le couple signe, en 2005, un duo Tchantchès et Nanèsse pour le restaurant du même nom, en Grande-Bèche.
 

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
http://mobilart-2009.be/artiste2007.php?prenom=Ursula&nom=F%F6rster (s.v. juillet 2015)
Paul DELBOUILLE, Nouvelle Biographie nationale, t. IV, p. 354-359
Pierre ASSOULINE, Simenon, Paris, éd. Julliard, 1992
Jean-Christophe CAMUS, Simenon avant Simenon. Les Années de journalisme (1919-1922), Bruxelles, Didier-Hatier, 1989.
Centre d’études Georges Simenon, Simenon, l’homme, l’univers, la création, Bruxelles, Complexe, 2002
Anne RICHTER, Simenon sous le masque, Bruxelles, Racine, 2007
Jean-Denys BOUSSART, Dans les pas de Georges Simenon. De la place Saint-Lambert à Outremeuse, Liège, Céfal, 2003, p. 20-21

 

Buste Georges Simenon (Liège)

Place du Congrès
4020 Liège

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Monument Achille VIEHARD

Monument à la littérature et à la chanson wallonnes, 15 août 1931.
Réalisé par Paul Du Bois avec l’aide de l’architecte Jules Wilbaux

Inauguré à Tournai, rue des Jésuites, dans le quartier populaire Saint-Piat, le 15 août 1931, en présence de nombreux cercles et sociétés (de littérature) wallonnes, ce monument présente plusieurs particularités. D’abord, il est installé à l’endroit même où se trouvait auparavant la fontaine du « pichou saint Piat » dans un état de délabrement évident depuis plus d’un demi-siècle ; ensuite, le monument est une fontaine, ce qui devient relativement rare au fur et à mesure que l’on avance dans le XXe siècle ; il est aussi dédié à la fois à une personne, Achille Viehard, et à une thématique « À la littérature et à la chanson wallonnes ». Outre le fait que le monument soit coloré (du rouge et du doré), on observera enfin que si le monument honore une personnalité historique, celle-ci n’apparaît que par l’intermédiaire de son nom inscrit sur la pierre et par l’évocation de son activité secondaire, de son hobby, la littérature wallonne.

En effet, Achille Viehard (Tournai 1850 – Tournai 1926) a d’abord travaillé comme ouvrier typographe, avant d’exercer des fonctions administratives dans sa ville natale, et d’être nommé à la direction de l’hospice des vieillards de la rue Sainte-Catherine. Or, c’est le souvenir de ses activités de loisir que ses amis décident de figer dans la pierre quelque temps après son décès. Dans les « sociétés démocratiques » qu’il fréquente vers 1880, il se révèle un rimailleur apprécié pour ses traits d’humour et ses analyses psychologiques fines. Publiés dans Les Étrennes tournaisiennes, ses chansons et monologues en picard vont frapper les esprits. Ensuite, il est le premier à mettre en scène des comédies et tableaux de mœurs populaires tournaisiennes : dès 1888, on se précipite dans les salons de l’hôtel des Neuf Provinces pour assister à ses spectacles. À partir de 1891, le théâtre communal accueille les représentations. En 1907, celui qui utilise le pseudonyme d’A. Viart figure parmi les fondateurs du Cabaret wallon tournaisien. Les jurys des Concours de littérature wallonne ne s’y étaient pas trompés quand ils accordèrent les premiers prix à ce jeune fonctionnaire communal qui était avant tout écrivain. Le monument/fontaine ne parle que de cet aspect. En témoigne la stèle en petit granit de Soignies qui accueille, de haut en bas, sept macarons disposés en arrondi, les armoiries de Tournai dans un cercle coloré en rouge et rehaussé en or, puis l’inscription

A LA LITTÉRATURE
ET À 
LA CHANSON
WALLONNES

Ensuite vient un faune (doré) qui crache l’eau par sa bouche ; des grappes de raisins sont mêlés à sa chevelure. La stèle principale se termine par l’identification des dédicants :
ERIGE PAR LA VILLE LA
PROVINCE ET LES AMIS
D’ACHILLE VIEHARD

L’architecte Jules Wilbaux (Tournai 1884 – Tournai 1955) a conçu cet ensemble que relève une sculpture signée Paul Dubois représentant le « titi » tournaisien, assis en déséquilibre sur le bord inférieur de la fontaine. La générosité des Tournaisiens sollicités par une souscription publique a permis au « comité Viehard » présidé par Walter Ravez d’installer un monument dans l’espace public du centre de Tournai plutôt qu’un seul médaillon dans le cimetière. Dans le même temps, le monument dépassait la seule personne d’Achille Viehard pour associer tous les écrivains patoisants tournaisiens : Leray et Delmée, Auguste Mestdag, Auguste Vasseur, Adolphe Wattiez, Auguste Leroy, Arthur Hespel et bien d’autres auxquels le discours inaugural rendra hommage.

Confier l’essentiel du monument à Jules Wibaux était une évidence. Formé à la toute nouvelle École Saint-Luc de Tournai, il en est l’un de ses tout premiers diplômés en architecture, en 1919. Sa carrière, il la réalise essentiellement à Tournai et aux alentours, restaurant des châteaux, construisant des maisons comme des maisons de maître, voire s’occupant de l’aménagement de la Maison tournaisienne. Aquarelliste, Wibaux prend aussi Tournai comme principal sujet de ses toiles. Historien amateur, c’est encore Tournai, avec sa cathédrale et ses quartiers qui constitue le centre de sa curiosité. 

Quant à Paul Dubois (Aywaille 1859 – Uccle 1938), il n’est pas du Tournaisis, mais il avait accepté dès le début du projet de réaliser le médaillon pour le cimetière, avant de se voir confier le « titi tournaisien dans son geste goguenard et libéré, symbole immuable de la gaité et de l’ironie wallonne ». Né au bord de l’Amblève, formé à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles (1877-1884), condisciple de Rombeaux, Rousseau et Bonnetain, notamment, élève de Charles Van der Stappen, Dubois a remporté le prix Godecharle 1884 et, dès ce moment, il a choisi de signer « Du Bois », pour éviter toute confusion avec son parfait homonyme français, voire avec  Fernand Dubois. Après trois années passées à visiter les musées d’Europe, l’artiste wallon installe son propre atelier à Bruxelles, avec Guillaume Van Strydonck. Ouvert à l’avant-garde sans renier son attachement à la Renaissance, membre-fondateur du groupe bruxellois d’avant-garde le Cercle des XX, puis de la Libre Esthétique, il excelle dans les portraits quand lui parviennent les premières commandes officielles de la ville de Bruxelles. 

Monument à la littérature et à la chanson wallonnes – © Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Sans abandonner des œuvres de son inspiration qui sont remarquées et primées lors de Salons et d’Expositions à l’étranger, il réalise le monument Félix de Mérode (Bruxelles, 1898) qui symbolise le début de son succès. En 1900, il est nommé professeur à l’Académie de Mons (1900-1929) et, deux plus tard, il est chargé du cours de sculpture ornementale (1902-1905), puis de sculpture d’après l’antique (1905-1910) à l’Académie de Bruxelles où il reste en fonction jusqu’en 1929. En 1910, il succède à Charles Van der Stappen à l’École des Arts décoratifs. Vice-président du jury d’admission des œuvres pour le Salon des œuvres modernes de l’Exposition internationale de Charleroi (1911), il signe plusieurs monuments commémoratifs à Bruxelles et en Wallonie : déjà en 1924, Tournai lui avait confié la réalisation du monument Gabrielle Petit. Son œuvre variée et abondante (près de 200 sculptures) est faite aussi de bijoux et de médailles (dont celle de l’Exposition universelle de Liège en 1905). C’est par conséquent un artiste en pleine maîtrise de son art qui réalise le monument Viehard.

 

La Vie wallonne, septembre 1931, CXXXIV, p. 36-41
Gaston LEFEBVRE, Biographies tournaisiennes des XIXe et XXe siècles, Tournai, Archéologie industrielle de Tournai, 1990, p. 269 ; p. 279-180
Jacky LEGGE, Tournai, tome II : Monuments et statues, Gloucestershire, Éd. Tempus, 2005, coll. Mémoire en images, p. 92-93
Judith OGONOVSZKY, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 374-378
Anne MASSAUX, dans Nouvelle Biographie nationale, t. 4, p. 142-145
Paul Du Bois 1859-1938, édition du Musée Horta, Bruxelles, 1996
Anne MASSAUX, Entre tradition et modernité, l’exemple d’un sculpteur belge : Paul Du Bois (1859-1938), dans Revue des archéologues et historiens d’art de Louvain, Louvain-la-Neuve, 1992, t. XXV, p. 107-116
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. 1, p. 517-518

Rue des Jésuites
7500 Tournai

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Paul Delforge

Paul Delforge-Diffusion Institut Destrée-Sofam

Plaque et médaillon François BOVESSE

À divers endroits et sous diverses formes, le souvenir de François Bovesse est bien présent dans l’espace public de la capitale wallonne : une plaque avec inscription sur sa maison natale (1946), une esplanade devant la Maison de la Culture et une plaque avec un médaillon sur un mur de la Halle al’Chair (1960), une plaque sur la maison de l’avenue Cardinal Mercier à Salzinnes sur le lieu de son assassinat (1962), le mémorial François Bovesse (1964), une présence sur la Fresque des Wallons, une rue et une place dans la périphérie. Depuis peu, l’Athénée a cependant officiellement enlevé son patronyme (sans évoquer la fin du dragueur de mines « M909 Bovesse »).

Défenseur de sa ville natale, militant wallon, député, figure de proue du parti libéral dans l’Entre-deux-Guerres, ministre – des PTT (1931-1932), de la Justice (1934-1935 et 1936-1937) et de l’Instruction publique, des Lettres et des Arts (1935-1936) – François Bovesse avait abandonné tous ses mandats électifs lorsqu’il avait été nommé gouverneur de la province de Namur (16 avril 1937). Quelques mois plus tard, il allait être démis de ses fonctions par l’occupant. Celui qui a repris officiellement ses activités d’avocat maintient ses convictions et prend des risques. Le 1er février 1944, il est assassiné par des collaborateurs rexistes qu’il n’a jamais cessé de dénoncer. Malgré les interdictions, son enterrement donne lieu à un impressionnant rassemblement de citoyens qui manifestent ainsi leur opposition à l’Ordre nouveau et surtout leur admiration à un homme qui a défendu son pays et ses libertés.

Sur le pignon de la Halle al’Chair, a été placée une pierre bleue où le nom de François Bovesse apparaît au-dessus d’un médaillon avec le portrait de François Bovesse gravé de profil. Sous ce médaillon, apparaît la mention :

« Mon domaine n’est
qu’un bout de sol
wallon »

Cette réalisation est l’œuvre d’un artiste d’origine italienne, Guido Casci (1917-2001). Né à Barga en Toscane, il habite la Belgique depuis 1919 et a obtenu la naturalisation dans les années 1950. Artiste-peintre et médailleur, il reprend l’industrie familiale installée à Namur, son père Jean étant couleur de plâtre et fondeur de bronze, spécialisé dans les œuvres religieuses et statues de saints. Guido Casci a déjà réalisé un mémorial en 1959, à la demande des anciens condisciples de Bovesse à l’Athénée. Le 31 mai 1959, ce premier mémorial est accroché sur le grand palier du premier étage du bâtiment central de l’établissement scolaire. Il présente un médaillon représentant François Bovesse identique à celui que l’on va retrouver l’année suivante, dans la petite rue de Namur. Cet endroit devient une étape obligatoire sur « la route des plaques », parcours créé par le Comité central de Wallonie à la fin des années 1920, afin de rendre hommage aux « grands Namurois » et redynamisé à l’entame du XXIe siècle. La plaque d’hommage à François Bovesse est peut-être une initiative du Comité central de Wallonie, de la ville de Namur et des Amis et disciples de François Bovesse.


Jacques VANDENBROUCKE (texte), Pierre DANDOY (photos) : 40 ans de fêtes de Wallonie à Namur, Bruxelles, Luc Pire, 2000
Paul DELFORGE, Essai d’inventaire des lieux de mémoire liés au Mouvement wallon (1940-1997), dans Entre toponymie et utopie. Les lieux de la mémoire wallonne, (actes du colloque), sous la direction de Luc COURTOIS et Jean PIROTTE, Louvain-la-Neuve, 1999, p. 285-300
Renseignements fournis par Jacques Vandenbroucke, janvier 2014 et par Marie Dewez, février 2014.
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 194 

Pignon de la Halle al’Chair
Rue du Pont, sur l’esplanade de l’Entre-Sambre et Meuse 
5000 Namur

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Paul Delforge

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Monument Nicolas DEFRECHEUX et à « l’âme wallonne »

Monument La Légende, initialement dédié à Nicolas Defrecheux et à « l’âme wallonne », réalisée par Joseph Brouns sur un modèle de Joseph Rulot, c. 1965.
 

À la fin du XIXe siècle, le poète wallon Nicolas Defrecheux (1825-1874) jouit d’une célébrité incontestée depuis le succès rencontré par sa fameuse complainte, le Lèyîz-m’ plorer. Celle-ci est parue dans le Journal de Liège en 1854 et est devenue en peu de temps un immense succès populaire grâce à une adaptation d’un air en vogue, extraite de l’œuvre Gastibelza, du compositeur français Hyppolite Monpou. Balayant les vieux préjugés qui perduraient à l’égard du wallon, Leyîz-m’plorer est la première chanson à exprimer en wallon une véritable poésie lyrique. 

Deux ans plus tard, Defrecheux connaît une autre grande réussite avec le cråmignon L’avez-v’vèyou passer ?, à la fois succès populaire et œuvre célébrée en raison de la qualité de son écriture et du vocabulaire wallon utilisé. Collaborateur de l’Almanach de Mathieu Laensbergh (1857-1874) et du Dictionnaire des spots et proverbes wallons de Joseph Dejardin, Nicolas Defrecheux contribue encore à l’émergence de la Société liégeoise de Littérature wallonne, fondée en 1856. Par conséquent, au tournant des XIXe et XXe siècles, l’idée d’ériger un monument en l’honneur de celui qui est considéré comme l’un des précurseurs de la littérature wallonne est vivement soutenue dans tous les milieux wallons, qu’ils soient littéraires ou non.

À la suite d’une idée émise par Paul Gérardy, un simulacre de concours est lancé au printemps 1895 ; un Comité de l’Œuvre du Monument Defrecheux est mis en place qui précise que le monument devra avoir « le caractère d’une manifestation en l’honneur de l’idée wallonne ». Huit projets sont en compétition (ils seront exposés à la vue du public après la délibération), mais déjà une esquisse de Joseph Rulot a été retenue à l’unanimité : articulées autour d’un tertre rocheux surmonté d’un tronc d’arbre, quatre figures allégoriques – la Légende, la Poésie, la Fantaisie, la Naïveté – sont entourées de 7 personnages empruntés aux textes de Defrecheux ; occupant une surface de près de 40 m² au sol, et sur une hauteur de 6 mètres, l’ensemble est complété par trois scènes : un cråmignon d’enfants, une femme racontant des histoires à deux enfants, une jeune fille – près d’une fontaine – en admiration devant le médaillon du poète.

Sculpteur en vogue, Joseph Rulot (1853-1919) a été formé à l’Académie des Beaux-Arts de Liège (1871-1881) et plusieurs récompenses saluent cet artiste scrupuleux et tourmenté. Nul ne conteste son talent ; c’est d’ailleurs pour cela qu’il est nommé professeur de sculpture à l’Académie de Liège en 1904, en remplacement de Prosper Drion. Nul ne conteste non plus sa sensibilité wallonne : amis de nombreux jeunes artistes et écrivains qui se revendiquent Wallons (revues Floréal et La Wallonie notamment), il est l’un des rapporteurs importants du Congrès wallon de 1905. Nul ne conteste davantage sa large culture classique, son imagination débordante et sa créativité originale. Pourtant, candidat malheureux à la réalisation d’un monument César Franck à Paris (1904), il pêche par une forme d’insatisfaction permanente qui le conduit à rarement concrétiser ses projets. Ainsi en est-il du monument Defrecheux auquel il consacre l’essentiel de son existence, en penser aux formes idéales à lui donner, sans jamais le réaliser. Pour reprendre l’expression utilisée par Serge Alexandre, ce projet a été un véritable roman-feuilleton à rebondissements durant lequel, notamment, de vifs débats auront lieu tant sur la question de l’emplacement, du financement que de la forme et de la taille du monument.


Pourtant, les efforts de mobilisation n’ont pas manqué. Ainsi, en 1896, la Fédération wallonne publie une plaquette d’une trentaine de pages reprenant plusieurs œuvres wallonnes, dont Tot seu de N. Defrecheux, afin de rassembler les premiers deniers nécessaires au financement du monument ; une large souscription est aussi lancée ; plusieurs manifestations sont organisées  et des financements publics sont obtenus, non sans mal. Alors que plusieurs monographies s’intéressent au poète Defrecheux, confirment la qualité de son œuvre et consolident sa notoriété, le sculpteur se fait aussi attendre. Son esquisse originelle ne cesse d’évoluer. Elle prend du volume, de nouveaux personnages (34 figures et 5 moutons) sont ajoutés. Finalement, après dix-neuf ans d’attente, le but semble presque atteint : dans son atelier, Rulot peut présenter, fin juillet 1914, une maquette où l’on retrouve le programme iconographique de 1895 enrichi et disposé autour d’un massif qui évoque le rocher Bayard à Dinant, l’ensemble faisant désormais 12 mètres de haut. Des premiers travaux de fondation ont été entamés en 1913. La validation de cette œuvre doit passer la dernière étape du conseil communal quand éclate la Grande Guerre… L’ambitieux projet ne verra jamais le jour.

Monument Nicolas Defrecheux et à « l’âme wallonne » (Liège)


Après l’Armistice, alors que les pouvoirs publics financent principalement des monuments d’hommage aux victimes de la guerre, le monument Defrecheux continue d’être défendu, notamment par le plus fidèle disciple de Rulot, Jules Brouns, ainsi que par l’architecte Paul Jaspar, voire par Xavier Neujean. Néanmoins, l’année 1925, date du centième anniversaire de la naissance de Defrecheux, s’écoule sans qu’aucun monument n’émerge. L’Exposition internationale de l’Eau, en 1939, est un nouveau prétexte invoqué par le Comité auprès de Georges Truffaut pour réaliser l’œuvre de Rulot. Sans succès : bien d’autres monuments s’élèvent à Liège, mais toujours pas celui décidé en 1895. En 1946, le projet intégral est définitivement abandonné (la maquette – plâtre – du projet définitif – 165 cm – est conservée au Musée communal de Herstal). Finalement, on se souvint que Léon Souguenet vanta un jour le moulage de la statue représentant la Légende et qu’en face de cette seule figure-là, il y vit l’âme wallonne et déclara qu’à elle seule cette statue suffisait (1925). 

À partir d’une maquette de Rulot, Jules Brouns sculpta la « Légende » dans la pierre ; en 1956, cette statue est acquise par la ville de Liège et, en 1965, elle trouve place dans le Parc de la Boverie. Le « Comité Defrecheux » ayant disparu, Jules Brouns (1885-1971) sera l’un des rares à se souvenir des ambitions initiales de Rulot et en mesure de les confronter avec cette statue solitaire, bien loin d’évoquer spontanément tant l’idée wallonne que la mémoire de Nicolas Defrecheux. Sauf à y déceler de l’ironie, la seule inscription figurant sur le monument n’aide d’ailleurs pas à comprendre son histoire :


LA LÉGENDE
DE
JOSEPH RULOT
1858 – 1919

 

 

Maurice PIRON, Anthologie de la littérature wallonne, Liège, Mardaga, 1979, p. 189-190
Alain COLIGNON, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2000, t. I, p. 416
Freddy JORIS, Natalie ARCHAMBEAU (dir.), Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 1995
Histoire de la Wallonie (L. GENICOT dir.), Toulouse, 1973, p. 403
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. 2, p. 114, 468-469 ; t. III, p. 243 et 359
[Daniel DROIXHE], Quatre poètes wallons de Herstal, Littérature et monde du travail, Herstal, Musée communal, 1975, p. 20
Charles et Joseph DEFRECHEUX, Anthologie des poètes wallons, Liège, 1895
Wallonia, t. IV, 1896, p. 34 ; t. IX, 1901, p. 147-148 ; t. XI, 1903, p. 21 ; t. XIII, 1905, p. 169 ; t. XVI, 1908, p. 180
La Vie wallonne, n° LVI, mars 1925, p. 300-301
Alexandre GERARD, Nicolas Defrecheux, extrait de L’Ami de l’Ordre, Namur, 1901.
Une identité taillée dans la pierre. Le monument wallon dédié à Nicolas Defrecheux, dans Enquêtes du musée de la Vie wallonne, Liège, 2002-2004, t. XX, n°241-244, p. 307-346
Paul DELFORGE, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. III, p. 1449
Serge ALEXANDRE, Joseph Rulot et Jules Brouns. Deux Sculpteurs à Herstal, dans Art & Fact. Revue des Historiens d’Art, des Archéologues, des Musicologues et des Orientalistes de l’Université de l’Etat à Liège, (1993), vol. 12, p. 124-148, en particulier p. 129 et ssv.
Fabienne MASSON-RUSINOWSKI, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 544-546

Parc de la Boverie
4020 Liège

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Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Monument André-Hubert DUMONT

Monument  André-Hubert Dumont, réalisé par Eugène Simonis, 15 juillet 1866.

Pendant près d’un quart de siècle, entre 1842 et 1866, l’une des toutes premières statues présentes dans l’espace public de Wallonie et dédiées à un personnage historique était celle d’André-Modeste Grétry, figé dans le bronze par Guillaume Geefs, et placée sur la place de Liège située entre la salle académique de l’Université de Liège et la façade de la Société libre d’Émulation. Lorsque le monument « Grétry » est déplacé devant l’opéra (1866), la statue d’André-Hubert Dumont vient le remplacer sur cette place baptisée plus tard « place du XX août », suite aux événements tragiques des premières journées de la Grande Guerre.

L’inauguration du monument Dumont a lieu le 15 juillet 1866, en présence de Léopold II qui effectue à Liège l’une de ses toutes premières sorties depuis son intronisation comme deuxième roi des Belges (17 décembre 1865). Cette présence souligne toute l’importance accordée à l’époque à la « statuomanie » officielle qui vise à peupler l’espace public de monuments en l’honneur des « grandes gloires nationales belges ». Les peintures d’histoire ne suffisent pas. Il faut toucher le plus grand nombre et lui inspirer un sentiment national. Dès les années 1840, les gouvernements belges ne manquent pas d’inciter les pouvoirs locaux et provinciaux à faire preuve d’initiative. En honorant Grétry (1842) puis A-H. Dumont, « ses enfants », Liège participe à ce mouvement qui se poursuivra avec le monument « Charlemagne » (1868), les statues de la façade du Palais provincial (1884) puis de la Grand Poste (1901), ainsi qu’avec les monuments Zénobe Gramme et Charles Rogier en 1905.

Déjà auteur d’un buste d’André-Hubert Dumont destiné au Palais des Académies à Bruxelles en 1856, le sculpteur Louis-Eugène Simonis est presque naturellement choisi pour réaliser la statue « liégeoise ». Formé à l’Académie de Liège, sa ville natale, Eugène Simonis (1810-1882) a bénéficié d’une bourse de la Fondation Darchis qui l’a mené en Italie (1828-1832) ; à son retour, il refuse la place de professeur à l’Académie de Liège qui lui est proposée afin de consacrer tout son temps à la fois au développement de ses propres œuvres et aux commandes qui lui parviennent. La statue équestre de Godefroid de Bouillon inaugurée à Bruxelles (1848) est sans doute la plus connue, mais elle occulte souvent les multiples œuvres d’imagination qu’il expose dans les Salons et celles qu’il réalise à Bruxelles. Ayant installé son atelier à Koekelberg, le sculpteur wallon anime l’école de sculpture bruxelloise. Sur le tard (1859-1881), il a accepté de donner des cours – composition historique et d'expression –, et il accède à la direction de  l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles de 1863 à 1877. Travaillant le plâtre, le marbre, le bronze ou la pierre de France, Simonis ne se contente pas d’exécuter des œuvres monumentales ; ses bustes sont nombreux, représentant des proches ou des personnalités célèbres, voire les deux, comme le buste d’Henri-Joseph Orban, son beau-père, par ailleurs père de Walthère Frère-Orban.

Tandis que Jéhotte – l’autre sculpteur liégeois qui fait carrière à Bruxelles – se démène pour installer son Charlemagne à Liège, Simonis est donc convié à laisser sa signature sur un autre monument marquant de « la capitale de la Wallonie » de l’époque. S’inspirant du buste de l’Académie, il réalise en bronze la statue d’un André-Hubert Dumont qui se tient debout, la jambe droite légèrement en avant, et la tête légèrement inclinée vers le bas. Vêtu de sa toge académique, le géologue tient un plan roulé dans sa main gauche, tandis que son index droit pointe un endroit précis sur le sol. Placé sur un haut piédestal en grès rouge (près de 3 mètres), où repose aussi une lampe de mineur, l’ensemble est imposant. L’attitude donnée à A-H. Dumont par le sculpteur vise sans aucun doute à insister sur les travaux originaux de ce scientifique.

Autodidacte repéré par d’Omalius d’Halloy, professeur extraordinaire de la toute jeune Université de Liège (1835), Dumont avait entrepris seul la réalisation d’une carte géologique des quatre provinces wallonnes. Le modèle mathématique qu’il met au point lui permet de décrire la formation des couches géologiques et, avec une précision redoutable, les diverses stratifications du sous-sol. Ses travaux permettent notamment d’identifier la présence de gisements charbonniers. Grâce à lui, l’exploitation houillère connaît un essor spectaculaire en pays wallon ; par ailleurs, l’intérêt pour la géologie fait naître une véritable école auprès des universitaires. Couvert d’honneurs et de récompenses de son vivant, tant dans sa propre ville que dans son pays et à l’étranger, nommé recteur de l’Université (1856-1857), Dumont ne résistera pas à la fatigue engendrée par son dynamisme débordant. Moins de dix ans après sa disparition, le monument réalisé par Eugène Simonis rend hommage à sa brillante carrière.

Dès 1860, un comité s’était constitué pour l’érection d’un tel hommage. Une souscription publique avait permis de rassembler un capital initial qu’une intervention publique (la ville pour le piédestal) vient compléter. Quant à l’emplacement actuel de la statue, il diffère de celui inauguré en 1866. En effet, les travaux d’agrandissement du bâtiment central de l’Université ont contraint un déplacement – périlleux et mouvementé – du monument d’une vingtaine de mètres en 1890. L’œuvre n’en est pas sortie indemne. Depuis lors, un grillage en fer forgé encercle l’ensemble monumental. 

Sources 

Liège, Patrimoine architectural et territoires de Wallonie, Liège (Mardaga), 2004, p. 363
Charles BURY, Les Statues liégeoises, dans Si Liège m’était conté, n°35, été 1970, p. 5
G. DEWALQUE, dans Biographie nationale, t. VI, col. 283-295
Frédéric BOULVAIN, Jacqueline VANDER-AUWERA, Géologie de terrain. De l’affleurement au concept. Géologie, Liège, 2011, p. 7-15 (en ligne http://www.editions-ellipses.fr/PDF/9782729863333_extrait.pdf) (s.v. mai 2013)
Musée des Beaux-Arts, Exposition Le romantisme au pays de Liège, Liège, 10 septembre-31 octobre 1955, Liège (G. Thone), s.d., p. 150-151
Edmond MARCHAL, dans Biographie nationale, t. XXII, col. 572-579
Chantal JORDENS, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 557-561
Alexia CREUSEN, dans Musée en plein air du Sart Tilman, Art&Fact asbl, Parcours d’art public. Ville de Liège, Liège, échevinat de l’Environnement et Musée en plein air du Sart Tilman, 1996

Monument  André-Hubert Dumont

Actuelle place du XX août
4000 Liège

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Mémorial Jean GOL

Dans le parc communal de Chaudfontaine, près de l’hôtel de ville et de ses services administratifs, un mémorial Jean Gol borde la grande pelouse de ses quatre hautes stèles réalisées par Halinka Jakubowska. L’initiative en revient aux autorités communales calidifontaines qui tenaient à honorer rapidement celui qui était encore conseiller communal et échevin de la localité lorsqu’il est victime d’une hémorragie cérébrale fulgurante en septembre 1995. Objet d’un concours public lancé à l’automne 1997, la lauréate a été désignée par un jury présidé par Félix Roulin en mars 1998 et sa réalisation inaugurée en septembre 1998, pour le troisième anniversaire de la disparition de Jean Gol.

Artiste d’origine polonaise, née à Slubice en 1952, Halinka Jakubowska avait découvert Liège en 1972 et s’y est définitivement fixée ; elle y mène des études à l’Académie des Beaux-Arts avant de poursuivre sa formation à Anderlecht à l’Académie, où elle se spécialise dans la rénovation de la pierre et du bois. En 1990, le prix de la pierre lui est décerné par l’Association des Maîtres Tailleurs de pierre de la province de Liège ; il s’agit de la première des nombreuses reconnaissances accordées à son travail : la pierre, puis le bronze, et progressivement la fonte sont autant de matières qui font l’objet de ses sculptures abstraites, d’intérieur ou d’extérieur, de petits formats ou monumentales. Jouant souvent sur la dualité, confrontant les matériaux (pierre et bronze) ou leur traitement (pierre polie aux bords rugueux), elle remporte plusieurs concours publics, dont celui de la fontaine de la place Saint-Séverin à Huy (1991), celui de la fontaine pour la Place saint-Lambert à Liège (1997), voire la fontaine de la place Patria à Soumagne (intitulée La Porte, en 2008), ainsi que pour le mémorial Van den Berg à Cointe (2010). L’année où elle remportait le concours du mémorial Jean Gol, elle venait d’achever l’hommage aux soldats polonais destiné au monument Interallié de Cointe. Prix Techni-Pierre de la Région wallonne 1992, prix Hembecca de la sculpture (1995) et prix Louis Schmidt (1995), prix de la Galerie Juvénal de la biennale d’art contemporain de Huy (2007), celle qui a été élue « Polonaise de l’année 2011 en Belgique » a exposé dans de nombreux endroits en Wallonie, plus particulièrement en province de Liège, ainsi qu’à Bruxelles, à Paris, en Suisse et aux Pays-Bas, seule ou lors d’expositions collectives.

Caractéristique de son œuvre, la verticalité est bien présente dans le mémorial Jean Gol, installé à Chaudfontaine, de même que la répétition de formes similaires. Halinka Jakubowska a en effet travaillé quatre pierres de granit bleu offertes par les carrières de Sprimont. Silhouettes abstraites, elles sont posées sur une tranche étroite et leur disposition donne une impression de progression. Étroite vers le haut, de plus en plus large vers le bas, la forme de chaque stèle peut aussi donner l’impression que des ailes vont s’ouvrir. Faisant ainsi allusion au disparu qui s’est envolé vers un autre monde, les quatre stèles sont travaillées d’un côté avec force détails ; de l’autre, restent gravées dans la pierre des paroles que Jean Gol avait l’habitude de prononcer souvent. À ces contrastes s’ajoute que la tranche du côté droit est polie et droite, tandis que le côté gauche est irrégulier et « brut ». 

Les formules gravées sont brèves et rassemblent les valeurs qui lui étaient chères : la justice, l’universalité, la recherche de l’excellence, la défense de la langue française. La première fait explicitement référence au discours d’investiture (refusée) de Pierre Mendès France (3 juin 1953) à l’Assemblée nationale.


« PARLER
LE LANGAGE
DE LA VÉRITÉ,
C’EST LE PROPRE
DES OPTIMISTES
QUI PENSENT
QUE LE PAYS
ACCEPTERA 
LA VÉRITÉ ET
QUE LE SAVOIR
EST, POUR LUI,
LA SEULE CHANCE
DE COMMENCER
A RÉAGIR
ET À GUÉRIR
C’EST POURQUOI
SI NOUS VOULONS
ÊTRE DIGNES
DE LA CONFIANCE
DU PAYS 
NOUS NE DEVONS
JAMAIS PROMETTRE
AU-DELÀ DU
POSSIBLE. »    
« RIEN
N’EST PLUS
ESSENTIEL
A L’AVENIR
DE LA
BELGIQUE
FRANCOPHONE
QUE SON OUVERTURE
LA PLUS
GRANDE SUR
L’EUROPE ET
SUR LE MONDE.
A CET EGARD,
NOUS AVONS
UNE GRANDE
CHANCE,
UN ATOUT
IRREMPLACABLE.
NOTRE LANGUE,
NOTRE CULTURE
ONT UN ROLE
UNIVERSEL. »
« JE CROIS
QUE LE ROLE
DU POLITIQUE
COMME
LE ROLE DE LA
POLITIQUE
EST DE
CHANGER
LES CHOSES
ET NON
DE LES SUBIR. »
« SEULS
LES HOMMES
RESPONSABLES
SONT
VRAIMENT
LIBRES »

JEAN GOL
1942-1995


MINISTRE
D’ETAT
ECHEVIN DE
CHAUDFONTAINE
AVOCAT,
ENSEIGNANT
A L’UNIVERSITE
DE LIEGE


Docteur en Droit de l’Université de Liège (1964), diplômé d’études supérieures en Sciences juridiques (Droit public et administratif) (1969), chercheur-stagiaire (1964-1965), puis aspirant FNRS (1965-1969) au Centre interuniversitaire de droit public, assistant du professeur François Perin (1969-1971), maître de conférences (1974), chargé du cours du droit des médias, Jean Gol (Hammersmith 1942 – Liège 1995) exerce comme avocat depuis 1964 au Barreau de Liège et dirige un bureau d’avocats spécialisés dans le droit commercial international, quand il se lance en politique. Actif au sein d’associations étudiantes de gauche et wallonnes, co-fondateur du Parti wallon des Travailleurs (1964) puis du Parti wallon (1965) et du Rassemblement wallon (1968), il est d’abord conseiller provincial RW de Liège (1968-1971), avant de faire son entrée à la Chambre des représentants en 1971.

Mémorial Jean Gol (Chaudfontaine)

Abandonnant son poste d’assistant à l’Université de Liège, il se consacre désormais quasi exclusivement à la politique. Acteur de la régionalisation provisoire (1974-1977), secrétaire d’État à l’Économie wallonne (11 juin-4 octobre), Secrétaire d’État adjoint au ministre des Affaires wallonnes (Alfred Califice) en charge de l’Économie wallonne (4 octobre 1974-18 avril 1977), il fait partie du tout premier Comité ministériel des Affaires wallonnes. Il participe ainsi à la construction et à la mise en place des premières institutions wallonnes, et au développement des premières initiatives wallonnes. Quittant le Rassemblement wallon pour former le Parti des Réformes et de la Liberté de Wallonie (1977-1979), et le PRL ensuite, Jean Gol préside ce parti (1979-1981). Acteur majeur de l’adoption des lois de régionalisation de l’été 1980, il siège au Conseil régional wallon de 1980 à 1994, ainsi qu’au Conseil communautaire. Jusqu’en juin 1994 et son élection au Parlement européen, il est régulièrement réélu à la Chambre dans l’arrondissement de Liège. Devenu vice-premier ministre dans les gouvernements Martens (1981-1988), il est notamment en charge de la Justice et des Réformes institutionnelles. Il porte notamment à son actif le statut de la Communauté germanophone (1983) et la mise en place de la Cour d’Arbitrage (1984). Rejeté dans l’opposition en 1988 avec son parti – dont il retrouve la présidence en 1992 – Jean Gol ne peut que constater et déplorer l’orientation des réformes institutionnelles de 1988 et 1993. La priorité est donnée aux régions et aucune majorité n’est disponible en Wallonie et à Bruxelles pour créer la structure de la « nation francophone » à laquelle il aspire. Attentif aux questions internationales, en particulier à l’Europe et à l’Afrique, surto

ut les relations Belgique-Zaïre, Rwanda et Burundi, il a été l’un des premiers à dénoncer les dérives du régime d’Habyarimana et a souvent mis l’accent sur l’importance de la francophonie. De 1977 à 1982, il siège aussi comme conseiller communal à Liège, avant de déménager à Chaudfontaine, dont il devient l’échevin des Finances (1992-1995).

 

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Joseph TORDOIR, Des libéraux de pierre et de bronze. 60 monuments érigés à Bruxelles et en Wallonie, Bruxelles, Centre Jean Gol, 2014, p. 199-202
http://www.halinka-jakubowska.be/index.html (s.v. avril 2015)
Paul DELFORGE, Encyclopédie du Mouvement wallon, t. IV, Namur, 2010
Joseph TORDOIR, Jean Gol : Vingt ans de combat libéral, Bruxelles, Centre Jean Gol, Labor, collection Histoire, 2005 
Jean-François FURNEMONT, Jean Gol. Le pirate devenu amiral, Bruxelles, 1997
Jean-François FURNEMONT, Jean Gol, dans Nouvelle Biographie Nationale, t. IX, p. 201-206

Parc communal d’Embourg (dit Parc Jean Gol)
4050 Chaudfontaine

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Paul Delforge

 © Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Plaque Hubert KRAINS

Plaque commémorative sur la maison natale d’Hubert Krains, réalisée à l’initiative de l’Association des Écrivains belges, 10 mai 1936.

En 1926, les autorités locales des Waleffes, ses habitants, ainsi que les amis de l’écrivain Hubert Krains s’étaient fortement mobilisés pour rendre hommage à l’auteur du Pain noir. Un bas-relief réalisé par Jules Brouns fut inauguré en présence du jubilaire qui reçut, à cette occasion, une véritable ovation. Dix ans plus tard, l’événement est encore dans toutes les mémoires, mais Hubert Krains n’est plus. Le 10 mai 1934, il a connu une fin tragique en étant happé sous les roues d’un train qui entrait en gare de Bruxelles. Afin de témoigner que son souvenir reste vivace, l’Association des Écrivains belges dont il était le président décide d’apposer sur le mur « aveugle » de sa maison natale une plaque commémorative en pierre bleue où sont gravés les mots suivants :

Plaque Hubert Krains (Les Waleffes)

DANS CETTE MAISON EST NÉ
HUBERT KRAINS
ROMANCIER DE LA HESBAYE
30 NOVEMBRE 1862 - 10 MAI 1934


 

 

 

 

 

Pour la circonstance, le mur de la maison a été chaulé et un portrait d’Hubert Krains y a été accroché. Comme en 1926, les autorités locales se chargent d’accueillir les délégations de l’Académie de Belgique et de l’Association des Écrivains belges. Un peu plus d’un mois plus tard, la même AEB inaugurera un buste de Krains au parc Josaphat, à Schaerbeek. Auguste Vierset et Alix Pasquier prennent la parole aux Waleffes, au nom de l’AEB, tandis qu’Hubert Stiernet s’exprime au nom de l’Académie et Poussart au nom du comité organisateur.
 

L’écrivain Hubert Krains (1862-1934) a déjà publié quelques contes et nouvelles quand il achève Pain noir, en 1904, l’œuvre qui fera sa réputation : écrit en Suisse où ce fonctionnaire à l’administration des postes occupe le secrétariat de l’Union postale universelle (1895-1911), ce roman qui évoque la question sociale et le machinisme est un hymne à sa terre natale hesbignonne. Devenu directeur général des Postes de Belgique (1925-1928), Hubert Krains devra attendre l’après Première Guerre mondiale pour obtenir une reconnaissance officielle comme écrivain et conteur. Son roman Mes Amis reçoit le prix quinquennal de littérature (1921). Depuis 1920, il est aussi l’un des tout premiers membres de l’Académie de Langue et de Littérature françaises (1920-1934), institution fondée à l’initiative du ministre Jules Destrée.

 

Sources

Le Thyrse, 1er mai 1936, n°5, p. 176 ; 1er juin  1936, n°6, p. 200-202 ; 1er juillet-1er août 1936, n°7-8, p. 225
Charles DELCHEVALERIE, dans L’Action wallonne, 15 mai 1936, p. 3
Paul ARON, dans Nouvelle Biographie nationale, t. VI, p. 257-259
Grands hommes de Hesbaye, Remicourt, éd. du Musée de la Hesbaye, 1997, p. 41-44
Olympe GILBART, Hubert Krains, écrivain classique dans La Vie wallonne, t. XIV. 1933-1934, p. 330-331
Charles BERNARD, Discours de réception à l’Académie ravale de langue et de littérature françaises, Bruxelles, 1935
Arsène SOREIL, Hubert Krains dans Histoire illustrée des lettres françaises de Belgique, p. 495-499
Jules DECHAMPS, Hubert Krains, Bruxelles, s.d., ‘Collection anthologique belge’
Paul DELFORGE, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. II, p. 898-899

Rue du Bec 3
4317 Les Waleffes

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Monument Joseph MARTEL

Avec Georges Truffaut et François Van Belle, Joseph Martel a été le premier parlementaire wallon à déposer une proposition de loi visant à instaurer le fédéralisme en Belgique (1er mars 1938). Reposant sur le principe de la création de trois régions (Wallonie, Flandre et, au moins, l’arrondissement de Bruxelles), le texte n’a pas été pris en considération par la Chambre, mais il n’en reste pas moins une première. 

Élu député socialiste en 1936 à l’âge de 33 ans, Joseph Martel paie-t-il son initiative au scrutin de 1939 ? En tout cas, il n’est pas réélu, mais conservera ses convictions wallonnes : il aura l’occasion de les exprimer à nouveau en janvier 1961, lors de la Grande Grève wallonne contre la loi unique. 

Fils du syndicaliste et député permanent Ernest Martel, ce jeune militant socialiste marqué par le rude travail des carriers d’Écaussinnes, où il est né, s’établit à Braine-le-Comte dans les années 1920 et en devient le premier représentant. Conseiller communal socialiste de Braine-le-Comte élu en octobre 1932, il en devient échevin en juillet 1934, jusqu’à sa mobilisation en novembre 1939. 

Lors de la Campagne des 18 Jours, le jeune soldat est fait prisonnier et, comme plus de 65.000 autres militaires wallons de sa génération, il passe ses cinq années de captivité en Allemagne. Retrouvant son mandat d’échevin au moment de la Libération (1945-1946), il devient bourgmestre de Braine-le-Comte en 1947 et le restera jusqu’à son décès en 1963 ; dans le même temps, il avait retrouvé un siège à la Chambre des députés en tant que représentant PSB de l’arrondissement Soignies (1949-1963).  
 

Afin d’honorer leur leader décédé le 12 avril 1963, les socialistes brainois décident de ne pas fêter le 1er mai de cette année-là et de consacrer plutôt une manifestation en l’honneur de Joseph Martel en inaugurant les étangs qui portent désormais son nom. 

Médaillon Joseph Martel (Braine-le-Comte)

Depuis une douzaine d’années, Martel avait porté ce dossier consistant à transformer près de 3.000 m² en espace de tourisme social, autour d’un vaste étang dédié à la pêche. L’inauguration des étangs se fit en présence des ministres Bohy et Custers, ainsi que de Léon Hurez, son successeur à la Chambre. En octobre 1964, les socialistes perdaient leur majorité absolue et étaient écartés du Collège par une majorité libérale, dans des circonstances rocambolesques. Néanmoins, les oppositions politiques n’empêchent pas l’érection d’un monument témoignant de la reconnaissance à l’ancien maïeur et député. Une plaque évoque le lieu et son initiateur.


Au moment de l’inauguration, un médaillon apparaissait au centre de la partie supérieure, incrusté sur une pierre bombée qui reposait sur le socle encore visible, mais, en 2014, le monument réalisé par Pascal Norga en était dépourvu.   

Originaire d’Etikhove où il est né en 1900, Pascal Norga est un sculpteur, spécialisé en art funéraire, qui dirigea la Fonderie de bronze et de cuivre « PN », établie à Renaix (Ronse) au milieu du XXe siècle ; il y utilisait la technique de moulages à découvert. Son père, Franz Norga (1861-1948) était originaire d’Espagne et s’était établi comme ébéniste dans le petit village d’Etikhove. Il avait eu quatre enfants dont Sylvain (1892-1968), son 2e fils, avait suivi une forte formation de sculpteur et s’était fait un nom dans l’art religieux : depuis le milieu de l’Entre-deux-Guerres, il exploitait un commerce lucratif d’objets décoratifs funéraires qu’il créait et produisait lui-même. 

Pascal Norga (1900-1974) héritera de son grand frère le droit de reproduction et la commercialisation de ses produits, activités qu’il mènera jusque dans les années ’60. Sculpteur lui aussi, Pascal Norga sera sollicité à diverses reprises pour réaliser des œuvres originales. À son actif, il compte deux reliefs sur les piliers d’entrée du cimetière d’Etikhove, la plaque commémorative pour les victimes civiles et militaires et les prisonniers politiques de la Seconde Guerre mondiale à Furnes et vraisemblablement le médaillon « Joseph Martel » ; il a aussi fondu la fontaine de Messines, à Mons (1959). En 1967, Herman (1940-) reprendra la direction de la fonderie paternelle.  
 

 

- Marcel M. CELIS, Norga, dans Pierre et Marbre, 2006, n°4, p. 24-28  
- A-M. HAVERMANS et Marcel M. CELIS, Norga : terug van weggeweest, dans Epitaaf, 20e année, n° 3, avril 2006, p. 3-9.  
- Pierre Dupont, Joseph Martel. Le semis et la récolte, s.l., imprimerie du Hainaut, 2003  
- Paul DELFORGE, Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. II, p. 1077-1078  
- Paul DELFORGE, Un siècle de projets fédéralistes pour la Wallonie. 1905-2005, Charleroi, Institut Jules-Destrée, 2005

Chemin de Feluy 62
7090 Braine-le-Comte

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Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Buste du peintre Pierre Paulus à Charleroi

Parc public créé à la fin du XIXe siècle et baptisé parc Astrid peu après le décès accidentel de la reine, en 1935, cet espace vert au cœur de Charleroi a été choisi pour disposer plusieurs bustes ou monuments honorant des personnalités de la métropole wallonne. 

Le peintre Paulus

C’est ainsi qu’en 1930 a été inauguré un buste en l’honneur du peintre Pierre Paulus de Châtelet (1881-1959). Bien connu pour avoir dessiné le coq hardi, rouge sur fond jaune qui a fini par devenir le drapeau officiel de la Wallonie en 1998, il l’est tout autant pour son impressionnante production picturale où Charleroi, la Sambre, ses habitants et son industrie constituent ses sujets principaux. 

Engagé dans des études qui devaient le conduire à devenir architecte, Pierre Paulus a croisé la route de Constant Montald à l’académie des Beaux-Arts de Bruxelles, et il s’est alors résolument tourné vers la peinture. Dès les premières années du XXe siècle, il s’affirme comme le peintre des charbonnages et des usines, des mineurs et des métallurgistes, des terrils, des hauts fourneaux, des lourdes péniches chargées de charbon, des paysages industriels, sous un ciel clair ou sous un ciel de pluie, couverts de neige ou illuminés par les lueurs rouges des forges. Rapidement étiqueté comme le continuateur de Constantin Meunier, Paulus devient le chantre du Pays noir. 

Exposées en Europe comme aux États-Unis, ses œuvres ne se limitent pas au caractère social ; il lui arrive de traiter des animaux, des fleurs délicates ou des natures mortes. Il accepte d’ailleurs d’être professeur d’art animalier à l’académie d’Anvers de 1929 à 1953, mais c’est l’aspect réaliste et anecdotique de même que les couleurs sombres qui caractérisent alors ses peintures.

Le sculpteur Alphonse Darville

Pierre Paulus n’a pas encore 50 ans lorsque son buste est inauguré à Charleroi. L’œuvre a été réalisée par Alphonse Darville (1910-1990). Né à Mont-sur-Marchienne en 1910, le jeune artiste étudie encore à l’académie des Beaux-Arts de Bruxelles. Et, à 20 ans, il est encore fort peu connu quand il se voit confier la responsabilité d’inscrire son illustre contemporain dans le bronze pour l’éternité. 

Ce n’est que l’année suivante que Darville recevra le Prix Godecharle puis, en 1935, le Premier Grand Prix de Rome. Co-fondateur de L’Art vivant au pays de Charleroi (1933), attaché à la promotion de la création artistique en Wallonie, co-fondateurs de la section de Charleroi de l’Association pour le Progrès intellectuel et artistique de la Wallonie (1945), Darville contribue aussi à la création de l’Académie des Beaux-Arts de Charleroi, qu’il dirige de 1946 à 1972.

Restauration et vol

Quelque peu abîmé par le temps, le buste de Pierre Paulus a fait l’objet d’une restauration profonde en 1998, au moment même où se discutaient, au Parlement wallon, les avant-projets de décret fixant définitivement les symboles wallons (drapeau, chant, fête). Les décrets avaient été votés en juillet. Et, le 18 septembre, dans le cadre des fêtes de Wallonie organisées à Charleroi par les autorités locales, on procédait à l’inauguration du buste en bronze de Pierre Paulus, l’auteur du drapeau wallon.

C’est ce buste du parc Astrid qui a été volé durant l’hiver 2007-2008. Interpellé par Jacques Van Gompel puis par Étienne Knoops, l’échevin de la Culture, Antoine Tanzilli n’a pu que déplorer le méfait à mettre en rapport, estimait-il, avec les cours élevés des matières premières, singulièrement du cuivre (…) » qui conduit des individus peu scrupuleux à faire main basse sur des objets comme le buste de Paulus. 

Pour prévenir tout acte similaire sur les autres bustes du parc Astrid, ceux-ci ont été mis à l’abri par les autorités locales (2008). Deux nouveaux exemplaires ont été refaits par la ville de Charleroi qui en installe un à Châtelet, devant l’ancien magasin de meubles La Fiancée. Celui du parc Astrid faisait défaut en février 2014, seul son socle évoquant la présence passée du buste.



Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Laurent LÉVÊQUE, Alain COLIGNON, Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. III, p. 1244-1245.
Chantal LEMAL-MENGEOT, Nouvelle Biographie nationale, t. IV, p. 288-290.
Pierre Paulus (1881-1959). Les couleurs de l’humanisme, Musée des Beaux-Arts, 1998.
Geneviève ROUSSEAUX, Alphonse Darville sculpteur, Charleroi, Institut Jules Destrée, 1982, coll. « Figures de Wallonie ».
Alphonse Darville : 60 [soixante] années de sculpture, catalogue d’exposition, 20 novembre 1982 - 16 janvier 1983, Jean-Pol DEMACQ [préface],  Charleroi, Musée des Beaux-Arts, 1982.
Alphonse Darville 1977, Charleroi, Impaco, 1977.
Paul DELFORGE, Essai d’inventaire des lieux de mémoire liés au Mouvement wallon (1940-1997), dans Entre toponymie et utopie. Les lieux de la mémoire wallonne, (actes du colloque), sous la direction de Luc COURTOIS et Jean PIROTTE, Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 1999, p. 285-300.
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 290.

 

Buste Pierre Paulus (reconstruction photographique à partir du socle de 2014 et du buste photographié en 2007)

Parc Astrid
6000 Charleroi

carte

Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Monument Paul REUTER

Monument Paul Reuter, 1948 
Réalisé par Victor Demanet.


Au pied de l’Église Saint-Donat, près de la rue du Bastion, un monument  dédié à Paul Reuter (Clausen 1865 – Arlon 1949) rappelle le souvenir du bourgmestre d’Arlon. Placé dans un espace arboré, le buste réalisé par Victor Demanet a été inauguré au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en présence

Monument Paul Reuter – © Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

du mandataire communal qui, quelques mois avant sa disparition, recevait ainsi le témoignage public de la reconnaissance de ses administrés.

Successeur de Numa Ensch-Tesch en 1921, Paul Reuter est avant tout un municipaliste qui perpétue une tradition libérale bien ancrée dans le chef-lieu de la province de Luxembourg. Depuis 1830 en effet, le parti libéral a toujours compté l’un de ses représentants à la tête du collège communal. Après Numa "le bâtisseur" (bourgmestre de 1901-1921), auquel il était apparenté, Paul Reuter abandonne l’échevinat de l’Instruction publique qu’il exerçait depuis 1895 pour ceindre l’écharpe maïorale. Il conforte la majorité libérale durant toute la durée de son mandat qui s’achève en 1949. Seules les occupations allemandes de 14-18 et de 40-45 ont été des périodes de contestation des choix politiques de Paul Reuter. Pour celui qui est né à Clausen, au grand-duché de Luxembourg en 1865, et qui défend la primauté de l’usage du français, la question de l’emploi des langues restera en permanence un enjeu important. Bourgmestre d’Arlon siégeant à l’Assemblée wallonne (1927-1940), Paul Reuter est écarté du maïorat d’Arlon par les autorités allemandes en 1941. Après trois années d’activités clandestines périlleuses, il reprend son maïorat le 10 septembre 1944, jour de la libération d’Arlon.

L’inauguration du monument Reuter, en 1948, est l’occasion d’honorer plus de cinquante ans d’activités communales. Le monument a été commandé à Victor Demanet (Givet 1895 – Namur 1964). Ayant grandi au confluent de la Sambre et de la Meuse où ses parents tiennent un commerce d’antiquités au cœur de la ville, le jeune Namurois était appelé à leur succéder si ses études à l’Académie des Beaux-Arts (1916-1919) où il est l’élève de Désiré Hubin, ne lui avaient pas donné le goût de la pratique de la sculpture. La révélation lui vient des œuvres de Constantin Meunier et surtout de la thématique sociale et ouvrière développée par le peintre/sculpteur bruxellois.

Lors d’un séjour à Paris, les œuvres de Rude, Carpeaux et Rodin finissent de convaincre Demanet que sa voie est dans la sculpture. Remarqué au Salon des Artistes français de Paris, en 1923, pour son buste de Bonaparte à Arcole, Victor Demanet s’impose rapidement comme un portraitiste de talent auquel sont confiées de nombreuses commandes publiques. Comme d’autres artistes de son temps, il réalise plusieurs monuments aux victimes des deux guerres. Tout en poursuivant une œuvre plus personnelle à l’inspiration comparable à celle de Constantin Meunier, avec de nombreux représentants du monde du travail, Victor Demanet est aussi l’auteur de plusieurs dizaines de médailles. C’est un artiste renommé et en pleine maturité qui signe le buste de Paul Reuter, placé à Arlon sur un piédestal en grès d’Esch-sur-Alzette, à la facture simple. En bronze, ce buste présente la particularité d’être plus élancé que les bustes habituels. 

La dédicace sur la face avant mentionne simplement :

A PAUL REUTER
LA POPULATION ARLONAISE RECONNAISSANTE 
1865 - 1948

 

http://www.routeyou.com/location/view/47438337/le-buste-au-bourgmestre-paul-reuter.fr (s.v. juillet 2013) 
Paul DELFORGE, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, 2001, t. III, p. 1416 
Bulletin trimestriel de l’Institut archéologique du Luxembourg, 1949, 25e année, p. 40-41 
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 397 
Jacques TOUSSAINT, Victor Demanet dans Arts plastiques dans la province de Namur 1800-1945, Bruxelles, Crédit communal, 1993, p. 147

Au pied de l’Église Saint-Donat
6700 Arlon

carte

Paul Delforge