Les 23 +2 « bonnes villes » de la principauté de Liège
Si l’évêque Gérard de Cambrai pouvait encore se permettre, en 1036, de considérer que la société se partageait entre trois catégories (genus humanum ab initio trifariam divisum est, in oratoribus, agricultoribus, pugnatoribus), deux siècles plus tard une nouvelle catégorie a émergé : à côté des oratores, bellatores et aratores, les gens des villes (burgenses) sont devenus une composante essentielle de la société occidentale (GENICOT), où ils ont acquis un statut. Dès le XIIe siècle, il existe des villes franches au sein de la principauté et le principe des trois états est déjà attesté ; par ailleurs, le droit de mainmorte est supprimé en 1123.
Avec leur propre administration locale, les « Communes » possèdent chacune leur droit urbain, leur jus civile, leur magistrat particulier, leur sceau, parfois leurs milices, tous les éléments caractéristiques de l’émancipation des villes au moyen âge. En raison de leur importance, certaines de ces villes obtiennent le droit d’être associées à la direction de la principauté et reçoivent le titre de « bonne ville ». Sur le modèle de Liège, chacune dispose de deux bourgmestres et d’un Conseil désignés annuellement, et reçoit le droit de ceindre le périmètre urbain de murailles. Dans l’organisation politique de la principauté, le titre de bonne ville procure surtout le droit de participer au pouvoir législatif et exécutif aux côtés du prince-évêque. La cité de Liège dispose d’un collège de 14 échevins non seulement tribunal de la cité, mais aussi Cour d’appel des échevinages des autres villes principautaires.
Très tôt, le pays de Liège a été considéré comme « un État parlementaire et représentatif » (KURTH), où les habitants étaient libres et protégés. Depuis la charte fameuse, octroyée par Albert de Cuyck en 1198, ceux-ci bénéficient d’une vraie garantie de leurs droits qui est confirmée et consacrée par la Paix de Fexhe (signée le 18 juin 1316). Et, en 1373, les « quatre paix des vingt-deux » élargissent encore les dispositions précédentes, quand est créé le Tribunal des XXII, Conseil d’État avant la lettre. Les premières bonnes villes y obtiennent au moins un membre (4 pour Liège, 2 pour Huy et Dinant, 1 pour Tongres, Saint-Trond, Fosses, Thuin, Looz et Hasselt), mais surtout la majorité, à côté des nobles (4) et du clergé (4). Avec ses membres élus, le Tribunal des XXII aura à veiller au maintien des droits de tous et à l’application stricte de la Paix de Fexhe.
En 1651, Verviers est la XXIIIe et dernière ville admise au rang de Bonne Ville. Un ordre de préséance est régulièrement mis en évidence pour « classer » ces 23 bonnes villes. Cet ordre ne correspond pas à la chronologie (difficile à établir) de l’octroi du titre. Deux villes – Maastricht et Bouillon – perdent leur titre de bonne ville lorsqu’elles sortent de la principauté de Liège. Le terme de « cité » est réservé à Liège, titre honorifique réservé aux villes antiques et épiscopales.
Références
Faid-131 ; Geni13-109 ; Han-35 ; RouNa-206
Institut Destrée (Paul Delforge et Marie Dewez) - Segefa (Pierre Christopanos, Gilles Condé et Martin Gilson)
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