Duvieusart Jean

Politique

Frasnes-lez-Gosselies 10/04/1900, Couillet 11/10/1977

Au cours du XXe siècle, seuls six Wallons ont exercé la fonction de premier ministre-chef du gouvernement belge, occupant la fonction moins de 13 % du temps. Parmi eux, Jean Duvieusart s’est vu confier la direction des affaires pour dénouer la Question royale. Désigné quelques semaines après la consultation populaire du 12 mars 1950, il a payé immédiatement la solution de pacification trouvée puisqu’il n’est premier ministre que deux mois.

Docteur en Droit et licencié en sciences politiques et sociales, ainsi qu’en notariat de l'Université catholique de Louvain, cet avocat du Barreau de Charleroi (1922) est issu d’une famille catholique, dont plusieurs membres sont actifs en politique. Ancien élève d’Élie Baussart au Collège des Jésuites de Charleroi, il en a gardé un intérêt pour la question wallonne. Membre de l'Assemblée wallonne déclinante (1937), il examine attentivement les enjeux culturels et socio-économiques de sa région à la veille de la Seconde Guerre mondiale et préconise dès ce moment la construction d’une autoroute de Wallonie. 

Conseiller communal catholique élu en 1926 à Frasnes-lez-Gosselies, il en devient d’emblée le bourgmestre (1927-1947). Mobilisé lors de la Drôle de guerre, il échappe à la captivité mais est pris comme otage en 1943. Conseiller provincial du Hainaut (1932-1936), plusieurs fois député suppléant de l’arrondissement de Charleroi avant la guerre, il remplace G. Michaux décédé, à la Libération et, en 1947, entre dans les gouvernements Spaak puis Eyskens, à chaque fois comme ministre des Affaires économiques et des Classes moyennes. Durant cette période (1947-1950), il contribue notamment au rétablissement de la liberté économique et de ce qui fut appelé la politique sociale de marché ; c’est aussi le moment où la Question royale trouve son dénouement.

Après la consultation de mars 1950 et le scrutin législatif qui donne une majorité absolue au PSC, Jean Duvieusart devient le chef d’un gouvernement catholique homogène dont l’objectif principal est de mettre un terme à l’impossibilité de régner de Léopold III. Rédacteur du projet de loi, le premier ministre est rapidement confronté à la grève générale et aux manifestations parfois violentes qui s'ensuivent principalement en Wallonie. Seule l’abdication du roi met un terme à l’insurrection. Quelques jours plus tard, le premier ministre remet sa démission (8 juin-12 août 1950). Malgré les attaques dont il fait alors l’objet, il s’en tient au devoir de réserve que chacun s’est imposé. Mais, vingt ans plus tard, suite aux propos de l’historien Willequet (Histoire de la Belgique contemporaine) et en raison d’accusations violentes contenues dans les Mémoires et notes politiques, de Jacques Pirenne (le secrétaire du roi), Jean Duvieusart rompt un long silence en publiant son point de vue dans La Question royale, Crise et dénouement (1975), ainsi que des procès-verbaux et des notes inédits des événements.
Écarté du gouvernement Pholien, Jean Duvieusart retrouve les Affaires économiques et les Classes moyennes dans l’équipe Van Houtte (1952-1954). Il ne sera plus ministre par la suite, poursuivant son mandat de sénateur de l’arrondissement de Charleroi-Thuin (1949-1965), tout en se consacrant aux questions internationales : membre de la délégation belge à l'ONU (1950), il est le ministre qui fait ratifier par le Parlement le traité de la CECA et est le premier président du Conseil des ministres de la CECA. Rapporteur de la loi ratifiant le traité de constitution de la Communauté économique européenne, il est désigné comme membre du premier Parlement européen (1958-1965), dont il est vice-président (1962-1964), puis président (1964-1965).  

Forcément acteur dans la Question scolaire (1950-1958), Jean Duvieusart est un défenseur acharné du volet linguistique du recensement de la population. Il fait en sorte qu’il soit organisé en 1947, mais il ne peut empêcher sa suppression en 1960. De plus en plus actif dans la défense du droit à l’autodétermination (Fourons, Mouscron, Bruxelles, etc.), Jean Duvieusart suggère la création de deux interprovinciales (flamande et wallonne) ayant compétence régionale en matière culturelle (1964). Prenant ses distances à l’égard du PSC-CVP, il renonce à se présenter devant l’électeur en 1965 ; les avocats de Charleroi en profitent pour le désigner comme bâtonnier (1965), mais son engagement politique redouble au lendemain du Walen Buiten de Louvain. Il rallie le Rassemblement wallon dont il est l’un des co-fondateurs (1968). Président de la coordination RW-FDF (1968-1972), il contribue à la transformation institutionnelle de la Belgique (1970), mais ne connaîtra pas les modalités de la mise en application de l’article 107 quater.

Sources 

DUJARDIN Vincent, Jean Duvieusart (1900-1977), Éditions Le Cri, Bruxelles, 2001
DUVIEUSART Étienne, Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, 2000, t. I 
LIBON Micheline, Nouvelle Biographie nationale, Bruxelles, t. IV, p. 145-150

Mandats politiques

Conseiller communal de Frasnes-lez-Gosselies (1927-
Bourgmestre (1927-1947)
Conseiller provincial du Hainaut (1932-1936)
Député (1944-1949)
Sénateur (1949-1965)
Ministre (1947-1950, 1952-1954)
Premier ministre (1950)